Parcourir ce sujet :
1 Utilisateur(s) anonymes
À propos de "Coupelle" |
||
---|---|---|
Maître des vers sereins
Inscrit:
11/02/2008 03:55 Groupe :
Évaluateurs Auteurs Membres Oniris Groupe de Lecture Post(s):
33316
|
Bonjour, et merci aux lecteurs de ce poème, il est là.
Dans ce poème c'est la musique, la forme, qui va tenter d'en illustrer le sens et les propos, le fond, qui va mettre en scène les moyens pour le faire émerger. Ça ne sera que des approches, ce n'est pas sensé aboutir à résultat, juste à contempler le mouvement. Le poème serait symbolique, d'autant qu'en plus c'en est l'objet : le sens propre de symbole serait une pièce de poterie brisé en deux, afin de faire se reconnaître, par la jonction des tessons, deux porteurs de ces objets qui ne se connaitraient pas par ailleurs. Par exemple, une coupelle. Le texte parle d'un course qui aboutit à une citadelle, puis des dortoirs, où se trouve un landau, qui contient cet objet brisé. Il n'y a pas tant un narrateur qu'un regard, ça serait comme de discuter avec un projecteur de diapositive qui ne donnerait la réplique qu'en piochant des images et en les projetant. Le sens figuré du symbole justement : parler par des images. Puis ce discours est interrompu par quelqu'un qui demande une coupelle, puis c'est fini. Je ne sais pas si ça se comprend bien que la main est à l'extérieur de la citadelle, que la coupelle permet d'y résider, mais qu'être à l'intérieur avec la moitié d'une a quelque chose de clandestin. Par rapport aux commentaires plus précisément : @Lunastrelle : Le 15ème vers est une trace de la lecture que je pouvais avoir de ce que j'écrivais. Du point de vue du rythme il y a un déséquilibre, mais il se passait quelque chose. la voix se fait entendre par l'intrusion de la main, qui tente d'attirer l'attention et débute sa demande, la syllabe perdue, c'est le moment où les deux regards se croisent, voire même c'est le moment où celui qui répond à la main laisse déjà entrevoir la nature de cette réponse, ça expliquerait le temps d'arrêt de ce demi vers de six syllabes : "une autre... (Euh ? euh !) cruelle". Mais là je mets des onomatopées sur un silence. J'ai pas résolu cette fausse note autrement. Pour les enjambements, il y en a dans trois strophes sur quatre, j'ai bien aimé couper ainsi le "s'il te plait" mais pour la "ponctuelle âme" c'était sans doute un moyen de camoufler cette inversion assez... lyrique. Ce que tu dis du texte, pour son "hypnose" qui "fait perdre le fil" ça définirait sa nature symbolique. Sa fonction de "tesson de coupelle" qui se montre en suspendant son action justement : pour regarder l'écriture comme symbole il ne faut pas être totalement en train de lire, mais aussi de regarder les lettres, leurs espacements, les sons qu'elles expriment chacune ou par association. @Kamel : Si les rimes à l' oreille sont bien alternés à l'écrit, de vers en vers, les assonances forment des couples de sons suivis, sauf pour le premier et le dernier. Comme une forme très basique de comptine avec un effet de boucle, c'est la mise en page qui va croiser les deux, pour une écriture alternée de sons qui se suivent en fait. @Pich24 : Pour ce vers 7 j'espère qu'il suffira de prendre la phrase en entier et de compléter le vers quelque peu : "À moitié l’ustensile Gît brisé et l’argile aurait d’être truelle, (plutôt) Qu’une demi-rondelle, une autre vie moins vile." L'objet brisé ressemble à un outil sans en être un véritablement. Parler de la "vie" d'un objet d'un point de vue moral, c'est juste une personnification, ce qui contredirait le jugement d'ailleurs : sa vie n'est pas "vile", le symbole est bien un outil, voilà des mots qui font comprendre une nature qui n'existe pas, qui peuvent la transformer. Pour le jeu de rimes, le poème lui-même, je devrais d'abord préciser que je l'ai écrit sans doute dans la première partie de l'année 2008, avant que je me questionne sur Le sexe des rimes, je ne connais pas non plus la césure. Le rêve lui-même date des années 90, au siècle dernier. C'est lui que je plagie sans doute dans nombre de poèmes. Je crains qu'il ne soit très convaincant comme "clef", il est néanmoins emblématique d'une écriture par juxtaposition de tableaux, liée entre eux par un fil conducteur symbolique. Ça se voudrait "écrire à la façon des rêves" avec leur syntaxe et leur orthographe, au besoin. Ce n'est donc pas un exercice de style par rapport à la prosodie classique, mais ce poème fait aussi partie du chemin qui m'a amené à écrire des poèmes classiques. Je vois plus largement la poésie classique comme une étape de la tradition orale, qui reste l'objet de la poésie pour moi : rendre du monde au moment où l'on vit quelque chose de l'indicible. Seul la poésie permet d'aller au-delà des mots. Donc le choix de cette double assonance ressemblant au pronom est juste-là pour mettre en valeur une autre façon d'entendre "coupelle", pour préciser que le mot ne sera jamais qu'une représentation, si le passage à l'écrit peut lever quelques ambiguïtés, par l'orthographe notamment, ça ne sera jamais entier. Pour preuve le fait que cette coupelle illustre le symbole par excellence, ou par origine, tout autant qu'il désigne un ustensile assez simple. Pour la fluidité des rimes, comme pour leur pertinence, je ne part pas dans l'écriture d'un poème avec une "histoire prosaïque" à mettre en vers et en rimes. Je part des mots, je veux mettre certains sons dans un poème, plutôt que quelque chose à raconter, certains mots aussi, le plus souvent pour les sortir de leur message commun, pour mettre en lumière d'autres facettes, comme par exemple ici avec "truelle". Je pense donc qu'il y a "perte de sens" parce qu'il y a une échéance d'attendue qui ne vient pas, mais ce n'est pas ce que je veux ou peux faire, je ne possède pas "l'histoire" de ce poème au-delà de ce que je peux en écrire que j'ai tenté de résumer au début. Pour "l'autre crue du Nil", c'était l'unité de mesure de l'année terrestre dans la lointaine antiquité, il pouvait y en avoir jusqu'à quatre par ans, et ça pourrait expliquer l'âge de certains personnages de la Bible (ils peuvent avoir plusieurs centaines d'années) enfin, j'avais lu cela et ça m'avait marqué, le fait que des repères différents change la perception de mots écrits pourtant. Il n'y a pas plus de non dit dans mon poème que d'en tout autre écrit, ça fait partie de sa nature d'être lié à son temps, à des repères communs, allant bien au-delà de la langue. Ici donc, ça illustrerait le pouvoir de cette coupelle, la faveur que représenterait de résider à l'intérieur de la citadelle, puisque cela n'est pas raconté autrement dans le poème. Comme s'il ne restait que les émotions sans les objets ou les raisons qui les provoquent. @ soque : J'espère que j'ai éclaircis précédemment ce fameux propos de quelques vers, votre citation est incomplète pour le comprendre, il faut s'en tenir à la ponctuation : "(... ). À moitié l’ustensile Gît brisé et l’argile aurait d’être truelle, Qu’une demi-rondelle, une autre vie moins vile. Un enjambement peut-être constitué par un rejet ou un contre-rejet, ici il y a les deux : Il n'y a pas de meilleur moyen pour rendre plus difficile la compréhension d'une phrase que de la disposer ainsi. Cela met la musique des vers en avant par rapport aux sens des mots, avec une mise en lumière de ceux à la rime : "truelle" suit "résiduelle/ponctuelle/éventuel" et préparera, en quatrième élément de la rime, à "cruelle" qui suit "virtuelle/consensuel... et doigts nus hèle justement. Désolé pour le fou-rire au moment de la main, c'était justement le moment poignant du rêve, c'est pas une image, la main précède le visage, qui sera peut-être présent plus tard, et tout autant que la voix ce sont ces doigts qui hèle, au sens propre. C'est un certain mouvement de la main et des doigts, comme la main d'un homme qui se noie surgissant des flots, paume très ouverte et doigts en extension et en rotation légère, comme pour mieux accueillir une autre main secourable : c'est appeler une autre main juste avec sa propre main comme moyen d'expression, avec une expression ultime, un secours impérieux. Pour le choix des mots en u-el, je ne connaissais les diérèses au moment de l'écriture, mais je commençais à vouloir m'en servir, sans me soucier de leur origine latine mais à partir de lettre qui n'avait pas subi de modification, des diérèses communes à la prosodie classique et au langage courant. Je n'utilise pas "sensuel" par exemple, mais je prends "truelle", je ne prend pas "rituel" mais je prends "virtuel", je ne prend pas "manuel" ni "annuel", ni "duel", je ne me sert pas d'un registre plus romantique, où ses mots de rimes sont plus courant. J'ai pris un vocabulaire plus moderne, pratique si j'ose écrire avec cette "truelle". Le rêve avait également ce décalage entre la façon de raconter et les objets pour y parvenir : ce château était un dortoir, ce landau vide contenait ce qui aurait aussi bien pu m'apparaitre comme un cendrier, le secours était demandé de l'extérieur, sans bruit de bataille ou quoi que ce soit d'ennemi, de dangereux. Pour ce passage avec la faute de pied et les doigts : "Une main se faufile et de ses doigts nus hèle, Vainement son appel a dit : « N’aurais-tu s’il Te plaît à tomber pile une autre... cruelle, Je n’ai pas de coupelle, une autre crue du Nil. »" Je ne connaissais pas la prosodie quand je l'ai écrit, mais j'en appliquais une d'après ouïe dire en quelque sorte, ça tombait juste à mon oreille alors que même à l'oreille, ça ne colle pas justement. J'ai une explication, la main arrive dans la citadelle, avant que les protagonistes de ce dialogue ne puisse se voir, la "main" a déjà commencé à parler. C'est la première fois qu'il se voit, le temps du regard échangé qui contiendrait cette syllabe manquante. En finissant son "s'il te plait" la main sait qu'elle n'aura pas ce qu'elle cherche, aussi elle ne demande plus de "coupelle" mais un symbole équivalent, à ses yeux. J'écris sous la dictée d'un fait onirique, qui raconte de cette façon, enfin, j'aurai tenté de la rendre ainsi ; je crois bien qu'un rêve peut sembler "destructeur de sens" et ça se défend même, c'est juste une autre approche que d'imaginer un discours symbolique dans ce qui semble "sans queue ni tête". Mais je ne venais pas militer pour l'interprétation des rêves dans ce poème, je voulais rendre ce que j'avais pu saisir de l'un d'eux, et tirer de la poésie de cette façon de s'exprimer. Je l'ai fait dans plusieurs poèmes, voire tous ceux que j'ai écrit, mais il n'y a que dans celui-là où je parle d'une de leurs origines, parmi toutes les amarres orphelines qui peuvent claquer aux vents contre un poème. Donc, gratuit, pas dans le sens où j'aurais pu ne pas l'écrire sans que ça ne change rien à ce que j'ai pu écrire après. Mais c'est peut-être l'approche formelle plutôt qu'émotionnelle qui vous fait écrire cela : j'ai fait poème en plaçant des assonances à certains endroits et pas depuis une envie d'écrire irrépressible à cause d'un sentiment difficile à mettre en mot. J'écris cela pour reformuler, et je me trompe peut-être, mais c'est justement par un travail formel que j'ai voulu rendre l'indicible, et non par un travail narratif. J'ai placé des mots en résonance avec d'autres plutôt que de les utiliser pour leur usage commun de "dire". C'est une vision de la poésie pour moi, ça ne tient pas juste au "bruit" des mots mais à leur articulation entre eux, leur symbolique, leur phonétique, pour une expression singulière qui ne renvoie pas forcement à une interprétation, mais qui est une poésie en soi. C'est dans ce sens que je prend "gratuit" : le poème ne rend pas une histoire à son lecteur, c'est bien ce que j'ai voulu faire passer pour de la poésie... @Pascal31 : Il y avait bien une forêt dans ce rêve, les gens se dirigeaient tranquillement vers la citadelle en descendant une colline qui ressemblait à la trace d'une piste de ski en montagne, c'est à dire une trouée dans la forêt justement. C'était paisible, sauf quand vient le moment de rentrer, où chacun dégaine sa coupelle, et je ne sais toujours pas comment on peut rentrer avec la moitié d'une... mais bon, pour la compréhension plus globale, je veux bien aider, c'est vrai que c'est touffu, mais les mots n'étaient pas tant là pour dire quelque chose. L'image du dortoir elle peut s'associer à celle de lits superposés, la présence du landau pourrait faire résonner cette image comme une alternative a des lits jumeaux, juxtaposés. D'un point de vue pratique, un couffin a peu de chance de se voir garnir dans un dortoir, c'est pas un lieu de naissance, malgré l'apparence du landau vu la disposition des lits. Ce landau contient un objet néanmoins, un symbole qui permet de reconnaitre le propriétaire de son autre partie. Mais quand vient la main avec ces envies de crue du Nil, la main "enfermé à l'extérieur" et bien qu'elle demande une coupelle, elle ne voit pas ce qui se trouve dans le landau. D'où la fin multi-dramatique : une demi coupelle au lieu d'une entière qui met dans une situation de clandestinité, un fugitif qui veut lui aussi une coupelle mais qui ne voit qu'un landau dans un dortoir. Les personnages dramatiques sont donc le narrateur clandestin et l'interlocuteur fugitif, le drame lui-même tourne autour de la possession d'un objet de reconnaissance, pour trouver protection d'une menace non dite. La confrontation peut sembler absurde, pourquoi une coupelle et pourquoi un landau, ça restera muet, comme si je donnais mon âge en le comptant en nombre de crue du Nil il y a des milliers d'années, mais en prononçant juste "J'ai 180 ans !". @Lunar-K : Merci d'attirer l'attention sur cette troisième strophe. "Elle est un rien gracile à naître virtuelle : Un symbole éternel, un passe, un droit d’asile ; Une porte d’avril mais joint consensuel ; Ces vents pour hirondelle auront fui dans l’exil." J'ai fait une révision en reprenant ce poème, le premier vers d'origine était celui-là : "Elle n’a rien de gracile à n'être virtuelle" Bien que d'une part, j'inverse le sens, comme si ce n'était pas si important qu'elle soit gracile ou pas (ça parle de la moitié de coupelle brisée dans le landau) en plus j'inverse le mot avec son assonance, j'appelle ça comme cela "naître" et "n'être" et il y en d'autres par la suite : "Une porte d'avril, mai, juin consensuel" et "Ces vents pourriront d'elle" C'est ce que je peux en dire, cette strophe décrit l'objet et son rôle dans l'histoire. La porte d'Avril pourrait être en rapport avec le printemps, un truc du genre "crue du Nil" pour symboliser un moment précieux, adapté à une sorte de lieu. Ce qui se dit par assonance relèverait plutôt de la personnification de l'objet, la coupelle "souffre" d'être brisée, ne se sent pas à la hauteur "plutôt trois mois que l'éternité" par exemple, le pourrissement en écho au vol de l'hirondelle également. Le drame est tellement abscons qu'on pourrait se demander s'il ne vaut pas mieux être dehors, en tout cas la coupelle se le demande. @Alex2 : Comme je le disais, je me suis servi d'un rêve pour faire un poème symboliste. Ça pourrait parler d'écriture, arriver à faire une histoire passionnante serait comme de joindre les deux tessons d'une coupelle, on peut parfois lire de la part de lecteur "Je me suis reconnu dans cette histoire/elle m'a happée" ou d'autres remarques pour dire que "ça colle". Je me demande même si cette expression de "ça colle" ne renvoie pas également à l'objet du symbole, la coupelle dont chaque partie doit coller véritablement avec l'autre. J'ai dit aussi que c'était un ancien poème, donc l'exercice de style était encore assez directement lié à une charge émotionnelle, c'était relativement angoissant de découvrir ce que j'avais envie d'écrire : j'allais parler aux gens comme un rêve et ses images, ou plutôt aller me faire lire par des lecteurs avec des poèmes, argh ou lol, sans queue ni tête. @Jaimme : Ce que je retiens de ce poème c'est de pouvoir être enfermé dehors, du moment où la liberté passe de l'extérieur à l'intérieur, comme "avec l'âge" par exemple. le rêve date de peu après mes vingt ans et c'est un peu ce que j'y lis. Pour le genre féminin/masculin, il venait d'une lecture phonétique du mot du titre, et cela jouait avec, je le rapprocherais de l'histoire des lits superposés plutôt que juxtaposés, le couffin dans le dortoir. D'autant que ces assonances apparemment alternées dans les vers sont en fait des assonances suivis linéairement. Pour ce troisième et quatrième vers, c'est encore un vers modifié de la version d'origine, voilà les versions avant/après : "Même un landau futile attend sa ponctuelle Ame à son étincelle, à son temps puéril." "Même un landau futile attend sa ponctuelle Âme à son étincelle, et son temps puéril." Ça ne change peut-être rien pour l'enjambement qui précède la modif, ça pourrait l'alourdir avec son "virgule et". Encore merci à ceux qui ont laissé un commentaire
Contribution du : 26/03/2011 04:28
|
|
_________________
Un Fleuve |
||
Transférer |