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Aux bons commentaires intensifs...
Expert Onirien
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28/07/2011 11:53
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(à propos du texte Aux bons soins intensifs)

Je sais que je suis terriblement en retard sur les Sardines, Antigone ou même les Serpents... Mais je tenais à remercier les commentateurs de la nouvelle Aux Bons Soins Intensifs et donner quelques clefs.

Ce texte n'est pas biographique en tant que tel. Il agrège plusieurs personnes en une seule: la médecin, la victime, le bourreau...

Cette nouvelle est articulée autour de deux thèmes: le milieu hospitalier que je connais "par frottement" ainsi que la psychologie d'une victime d'inceste, là aussi par expérience indirecte.

Sur le milieu hospitalier, j'ai voulu donner une part de mon admiration envers le personnel soignant dont les principales caractéristiques sont souvent le détachement ET l'empathie. J'ai côtoyé à plusieurs occasion de ma vie ainsi que dans ma famille des humains qui passent leur temps dans la souffrance et la mort, plongé dans ce que l'humain a de plus fragile, de plus merveilleux comme de plus abject. La charge nerveuse de prendre soin de personnes dont on signe ensuite les actes de décès est extrême, surtout dans un service de Soins Intensifs qui voit ce défilé continuellement. Les roulements sont également très soutenus avec des astreintes de week-end juste après de grosses semaines et avant deux ou trois jours de reprise. C'est épuisant physiquement et nerveusement pour les personnels qui développent des capacités de distanciation énormes, associées à de réelles empathies pour des personnes qui souffrent, paniquent et sont terriblement vulnérables. Que tous ces personnels trouvent ici l'expression de mon admiratif attachement...

Toutefois, les rapports du milieu médical avec la mort et la souffrance peuvent parfois être ambigus. On l'a vu dans la Shoah, mais également dans les hôpitaux psychiatriques de Staline, ainsi que dans l'utilisation des médecins dans les conflits des Balkans, du Caucase et maintenant du Proche-Orient. Plus proches de nous, plusieurs cas dramatiques d'euthanasies à l'hôpital viennent nous interpeller sur la frontière entre l'assassinat d'une personne vulnérable et le dévouement poussé à son extrême.

L'autre pilier est une femme qui a connu l'inceste. La construction de la personnalité des enfants abusés est complexe, quelles que soient la nature des faits, brutaux ou non. D'une manière assez habituelle (mais tous les contre-exemple existent), les processus de maturité vont se baser sur une dissociation totale du coeur et du corps, réduisant ce dernier à un simple objet réceptacle de sensations et inaccessible aux émotions. On observe le même phénomène après des viols extra-familiaux ou des violences répétées, mais dans le cas de l'inceste, les compensations sont très extrêmes, car la notion de "l'amour familial protecteur", si important pour structurer les êtres, est viciée. ça peut conduire à des sexualités complètement hors-normes.

Alors qu'on a des personnes visiblement intégrées dans la société, leurs rapports au corps est désastreux: anorexies sévères, mutilations, conduites à risques, drogue, prostitution, pratiques extrêmes, recours à la douleur ou à l'humiliation sont courantes (attention à ne pas extrapoler dans un sens ou un autre: toutes les personnes abusées ne vont pas finir junkies-SM et toutes les personnes ayant des pratiques sexuelles inhabituelles n'ont pas subies de violences dans leur enfance). Toutefois, la coupure cœur/corps, peut entretenir deux personnes qui cohabitent dans le même corps, parfois de façon très orageuse.

C'est pour cela que j'ai parlé de l'épisode du carabin, qui semble un cheveu sur la soupe dans un contexte normal, mais donne un indice à une personne ayant été en contact avec ces crimes. L'idée était d'introduire l'idée que le Docteur Joyeux peut être très différente dans son travail et en dehors. Et pas simplement "différente", mais complètement opposée: quasi-sainte dans la journée, damnée pornographique le soir.

Peut-être aurais-je du en mettre un peu plus? beaucoup moins? Je revendique toutefois l'utilité de ce paragraphe, même si son sens est inaccessible au plus grand nombre. Il ne m'a pas semblé que rajouter des détails dégoûtants aurait servis mon propos. On sait juste que "y'a un truc - elle n'est pas si lisse". Alors? Plus ou moins ? Vos avis en forum m'intéressent!

Le médecin qui voit son passé lui sauter à la gorge et se venge de façon implacable est par contre relativement plausible. Certains faits ressurgissent du subconscient de façon très brutale, par exemple à l'occasion d'un choc émotionnel. La quadragénaire qui a réussi à tirer un trait sur son passé de petite fille peut voir des souvenirs oubliés remontrer à l'occasion de cette admission. La coupure cœur/corps peut alors inhiber les réactions "normales" et submerger quelqu'un d'une irrépressible pulsion de vengeance. Le cloisonnement des personnalités multiples peut laisser la haine s'exprimer alors qu'elle continuera à être "la super-médecin" en dehors de la chambre du vieillard.

L'idée du blocage des voies urinaires m'a été soufflée par une amie médecin. J'ai adoré cette proposition qui me semble un excellent symbole du "contrapasso", le retournement présenté par Virgile à Dante, lors de sa visite de l'Enfer, dans la Divine Comédie. Le Dr Joyeux devient le diable qui, comme dit la Bible, "fait mourir les hommes par là où ils ont péché".

Concernant le sac laissé là, c'est une facilité d'auteur. J'ai essayé d'autres choses, mais ça m'a paru moins bon. On peut effectivement y voir une ultime "conduite à risque", comme ces Serial Killer qui laissent de plus en plus d'indices pour se faire coffrer, parce qu'ils savent qu'ils n'arrêteront pas d'eux-même. Le Dr Joyeux a laissé à sa victime une chance d'échapper à la peine de mort: que quelqu'un ouvre le sac de son vivant! Moins de 0,1% de chance de sans sortir... "Machiavélique", disait Brabant ? oui...

Pour finir, je peux partager un avis récurrent sur les deux dernières lignes, et surtout la toute dernière qui pourrait sauter sans problème et finalement altère l'émotion finale. A réfléchir... (la proposition de Pepito est intéressante: l'amoureux éconduit pourrait voler le sac de Joséphine).

Le style froid est voulu. Le Docteur Joyeux est une victime et un bourreau. Aurait-elle pardonné ou aurait-elle demandé une simple reconnaissance de son état de victime, qu'on aurait eu de la compassion pour elle. Mais dans le cas présent, elle va se faire justice et montrer n'avoir que faire de notre empathie. Sa vie est un vide affectif et elle entretient ce néant. Elle se fout de l'amour qu'on pourrait lui porter: l'amour est pour elle un mot vicié dans son sens, perverti dans ceux-là même qui devait lui donner sa force initiale.

Finalement, j'aime beaucoup le commentaire de Ludi -malgré sa notation- "(...) tout brûle dans la tête de Joséphine". Oui, c'est exactement ça: TOUT BRULE! ... Bien plus qu'on ne peut l'imaginer !

Merci encore aux correcteurs et correctrices, lectueurs et lectueuses... Le débat est tout vert !

Contribution du : 02/08/2012 16:27
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Re : Aux bons commentaires intensifs...
Visiteur 
Bonjour Palimpseste,

Pour répondre à ta question, oui, tu aurais dû développer et en mettre plus. Tel que c’est écrit, j'avais interprété cette indication comme une vantardise déplacée de la part d'un médecin que tu qualifies de « carabin » (c'est péjoratif je crois). Je n’ai jamais pensé que le Dr. Joyeux avait plusieurs personnalités cloisonnées. Ce n’est pas écrit dans ton texte, ce n'est que dans ta tête et si le lecteur peut le supposer, ce n'est pas aussi intéressant que si tu avais semé plusieurs autres indices.

D’une manière générale, je note un contraste entre ton explication en béton, dont je te remercie, et ton texte à peine évocateur. Le texte se situe en dessous de son intention et de ce qui le sous-tend.

En espérant avoir donné un point de vue intéressant,
N.

Contribution du : 11/09/2012 00:16
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Re : Aux bons commentaires intensifs...
Expert Onirien
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28/07/2011 11:53
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avec un peu de retard

MERCI RENAUD !

Voilà la crême d'un commentaire, la quintessence d'Oniris, le Nirvana d'un auteur.

Evidemment, tous les commentaires très précis sont intéressants (répétitions, mauvaises concordance de temps, phrases bancales, articulations faiblardes, etc.), mais ce commentaire plus général est particulièrement précieux parce qu'il donne une indication de récriture, plus que d'amélioration.

C'est très exactement aussi ce à quoi servent les forums post-publication. J'ai parfois fait part de mon amertume de les voir si peu utilisés mais là, je suis comblés et ne regrette aucune de mes autres interventions mortes-nées: la vitalité de celle-ci me paye de toutes les autres...

Je ne sais pas encore comment je reprendrai ce texte ni avec quels détails en exhausser le goût, mais toujours est-il que j'ai là un vrai angle d'attaque: réduire l'ellipse entre les indices laissés d'un personnage mal construit et la posture hyper-lisse qu'il donne de sa vie. En quelques phrases, Renaud m'a fait là une indication précieuses qui, je l'espère, fera passer ce texte important pour moi de "bon" texte non pas à "meilleur" mais carrément peut-être à "grand" (toutes proportions gardées sur les qualités littéraires de votre serviteur).

Merci donc à Renaud pour son commentaire, à la communauté et à tous les soutiers d'Oniris (webmestre, modo, correcteurs...).


Contribution du : 18/09/2012 11:43
_________________
La meilleure nouvelle publiée sur ONIRIS : Palimpseste est raide dingue amoureux de Lobia, inoubliable auteure de "Numéro 20"... Nous sommes ensemble depuis deux ans grâce à Oniris, la meilleure agence matrimonialo-littéraire du Monde !
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Re : Aux bons commentaires intensifs...
Visiteur 
Avec plaisir, Palimpseste !

Contribution du : 19/09/2012 16:13
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