Tu as mis la barre bien haut, Cyrill ! Toutefois, je fais un essai...

chose – impair – air – pose –
point – méprise – grise – joint –
voiles – midi – attiédi – étoiles –
encor – nuance – fiance – cor –
assassine – impur – Azur – cuisine –
cou – énergie – assagie – où –
Rime – fou – sou – lime –
toujours – envolée – allée – amours –
aventure – matin – thym – littérature –

Neuf quatrains à trouver, ce n’est pas peu de chose !
Essayons, toutefois, sans commettre d’impair ;
Pour ceci nul besoin de regarder en l’air,
C’est sur la page nue que le regard se pose.

Avant que de l’écrit vienne le dernier point,
Je veux de votre esprit chasser une méprise :
Veuillez croire au talent de ma matière grise
Qui fonctionne très bien sans le secours d’un joint.

De votre suspicion veuillez lever les voiles
Cessez donc de chercher quatorze heures à midi
Si votre affect pour moi se retrouve attiédi,
Levez les yeux aux cieux, il y a des étoiles !

Par passion de l’écrit, je m’évertue encor
De produire des phrases où plus d’une nuance
De chacun de leurs mots se marie ou se fiance,
Formant une musique digne du son du cor.

Si ma plume, jamais, n’est d’humeur assassine
C’est que je suis " fleur bleue " et repousse l’impur
Très loin, vers l’horizon, au fin fond de l’azur,
Interdit de séjour, jusque dans ma cuisine !

Quand ma muse, tenace, me tire par le cou,
Je retrouve, soudain, un soupçon d’énergie,
Comme une enfant grondée on me voit assagie,
Prête à imaginer, rédiger, mais jusqu’où ?

Il faut absolument que je trouve la rime,
Le désir m’envahit comme un amoureux fou,
Mais je suis démunie, poète sans le sou,
Accablée de torpeur, le désespoir me lime.

Je me croyais pourtant capable pour toujours
De capturer la rime, aujourd’hui envolée,
En refusant de croire qu’elle s’en est allée
Contenter un poète sachant parler d’amours.

Et voici advenue la fin de l’aventure.
Je relirai mes vers, c’est sûr demain matin,
Reposant mes neurones à l’infusion de thym.
Tout ceci, voyez-vous, n’est pas littérature !!!

Embellie, très plaisant à lire et rédigé en un temps record !

Merci Cyrill. J'aime beaucoup ce "jeu d'écriture".
Je trouve la contrainte des rimes imposées très stimulante.

Ouais, chapeau à ceux qui ont fait si vite! et si bien!
Voilà mon papyrus! :)

À voir au fond de l’âme éclore quelque-chose
Qui signe tout de blanc, qui pardonne l’impair,
Cet alcyon naissant, flottant, glissant dans l’air,
Semble un chant glorieux qui jamais ne se pose.

Car dans l’antre des fous, de calme il n’y a point:
Règnent là-bas l’erreur, l’écart ou la méprise,
La moire des chansons enfin n’était que grise,
Le mensonge en tout lieu de tout rocher le joint.

Alors si le réveil d’un vent pousse les voiles
Des cœurs encalminés au soleil de midi,
Si l’alizé s’en va loin du port attiédi,
Appareille à l’instant, direction les étoiles.

Ta route est libre enfin par le ciel ? Pas encor.
Il faudra naviguer les flots de la nuance,
Prendre la main des choix, aimer, comme on fiance
La parole des rois au grave son du cor.

Prends garde mon ami ! La colère assassine,
Brise le frêle esquif de son récif impur,
De violence elle fuit, débonde dans l’Azur
Et va distribuant sa sinistre cuisine.

Garde l’amour en plis comme une écharpe au cou,
Garde le trait, le cap, garde ton énergie!
Perdu dans l’écheveau d’une fièvre assagie
On est moins sur d’aller peut-être on ne sait où.

Dans la poche d’un frac toujours garde une Rime
Balsamique brûlant qui t’éloigne du fou,
Sait rendre un homme gai de n’avoir plus le sou,
Se faire des prisons, des noirs barreaux, la lime.

Tiens-toi loin des “jamais”, des “tous” et des “toujours”,
Il n’est pas de savoirs, de trop fière envolée
Qui devant les faubourgs ne voyait qu’une allée.
En seule vérité érige tes amours!

Ainsi va l’homme au vent, ainsi va l’aventure,
Marchant dans le typhon comme on cueille au matin
La sauge-passerage ,l’ellébore et le thym,
Épistolier vivant de sa littérature.

La classe, AxelDambre

Merci Cyril! Venant de toi 🙏
J'ai adoré le tien, qui m'a semblé extrêmement fluide à la lecture, ce qui, je m'en rends compte, n'est pas simple... En plus avec les eneasyllabes d'origine 👏
J'aime particulièrement ton avant dernier quatrain et ce vers : Voir ailleurs la tiédeur des amours.
Il ya cette symétrie des sons très agréable (OU-A-EU / EU-A-OU).
Bref super 😁

merci Axel pour tes éloges !

Citation :

Je n'ai pas réussi à faire abstraction du poème d'origine. Mais c'est pas évident du tout, ces ennéasyllabes, en effet.

Argl, un treizième pied s'était caché, c'est ça de vouloir faire trop vite 😅
... Erratum
* Passerage, ellébore, éclaire, sauge et thym*
Et l'autre n au vers de neuf pieds... Quel ânne 😅

Personne d'autre ? j'envoie l'original :


De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

Il faut aussi que tu n’ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l’Indécis au Précis se joint.

C’est des beaux yeux derrière des voiles,
C’est le grand jour tremblant de midi,
C’est, par un ciel d’automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !

Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la Couleur, rien que la nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !

Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L’Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l’Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !

Prends l’éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d’énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ?

Ô qui dira les torts de la Rime ?
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d’un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?

De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée
Vers d’autres cieux à d’autres amours.

Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym…
Et tout le reste est littérature.

Art poétique, Paul Verlaine

Merci Cyrill. Je connaissais pourtant ce poème, mais je ne l'avais pas reconnu.
Voici une autre proposition :

horizon – saison – hiver – mer – accueille – feuille – sentier – métier – miel – ciel – heureuse – creuse – chemins – demain – parfumée – aimée

Pourquoi chercher ailleurs ? Il est mon horizon,
Depuis longtemps mon cœur n’a que lui de saison.
Quand je suis dans ses bras je ne crains plus l’hiver
Mais je pense au soleil, à l’espace, à la mer,
A l’été rutilant qui gentiment accueille
Notre corps dénudé, plus léger qu’une feuille,
Et je nous vois déjà dévalant le sentier,
Oubliant tout, maison, obligations, métier,
Comme deux mariés dans leur lune de miel,
Occupés à atteindre leur septième ciel.
Moi je sais qu’il fait tout pour que je sois heureuse
Pour que sur mon visage une ride ne creuse
Un de ces vils sillons qui comme des chemins
Veulent montrer déjà ce que sera demain.
Alors je veux rester jolie et parfumée
Digne pour mon amour d’être toujours aimée.