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Re : Défi de nouvelles n°7
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Chambre avec vue

« Vous avez un glaucome. » finit par dire doucement l’ophtalmologiste comme un haltérophile lâche un poids. « Glaucome » Un mot simple finalement mais laid à cause de « glauque » me dis-je. « C’est une dégénérescence progressive du nerf optique qui entraîne un rétrécissement du champ visuel. Elle peut aboutir à la cécité. » Il fait une pause… Après un instant, il ajoute : « Dans votre cas, malheureusement, le dépistage est trop tardif pour que nous puissions enrayer son évolution grâce à la médication. Je ne peux vous dire à l’heure actuelle à quelle vitesse progressera la maladie. »

Le diagnostic tombe comme un arrêt sur image ; l’image d’un homme mat de peau, au nez busqué qui vous regarde avec commisération en reprenant son souffle. Je ne pose aucune question, je comprends que ma vie va changer, je comprends tout ce que je vais perdre avec ce foutu « glauque home », ce mal insidieux arrivé en moi sans symptôme, ce piège de mes yeux qui se resserre sur moi comme l’étau d’une pieuvre sur sa victime. Je suis effondrée.

De retour chez moi, je n’ai de cesse de fixer chaque lieu dans ma mémoire, d’un regard insistant, comme pour conserver un trésor ; je ferme les yeux pour voir ce que je perçois dans le noir, pour voir si l’image s’imprime dans ma mémoire. Cette entreprise est vaine : les formes et couleurs s’estompent en quelques secondes. Mon cerisier-fleur se mue en tâche blanche. Mon parasol se couvre de rayures rougeâtres et grises. Si ma mémoire pouvait imprimer tout ce que j’aime sur le voile noir de mes yeux. Mais rien, pas le moindre petit espoir. Mon désarroi n’a d’égal que ma solitude. Il n’y a même pas de combat à mener, le truc est inéluctable… Attendre l’irrémédiable, se soumettre, accepter ? A quoi bon informer les amis ? la famille ? Je n’en ai pas la force. Pour l’heure, je me laisse sombrer dans le sommeil qui m’offre au moins l’oubli.

***

« Mr de Corre, professeur diplômé de piano »

Je franchis le seuil de l’appartement avec assurance bien que je ne sache rien de ce que je suis déterminée à apprendre. Le petit homme au visage serein me fait signe de m’asseoir. Je me poste sur le tabouret tournant et lâche rapidement : « Apprenez-moi le piano.» Je le sens amusé et intrigué par mon côté expéditif, et, sans autre formalités, il se place à mes côtés pour entamer la première leçon. Cela fait un mois que j’ai appris le solfège.

Les gammes d’abord. Je me sens happée par tout ce qu’il me dit. Je suis scrupuleusement chacune de ses indications. Une fois le cours terminé, il me raccompagne et me donne rendez-vous au lendemain, même heure, sans une remarque pour mon travail. Mais je n’ai pas besoin d’encouragements ; le courage je l’ai, il ne me quitte pas.

Je me présente dans l’appartement cossu le lendemain. Mr de Corre ponctue chacun de mes exercices par un « andante » ou un « moderato » selon ce qu’exige le morceau. Je déchiffre et maîtrise désormais une petite barcarolle. A la fin de l’heure, il stoppe le métronome et me dit simplement : « A demain »

Au bout de trois mois de leçons assidues, nous devenons une sorte de duo. Un duo d’aficionados accrochés aux sons, moi essayant de reproduire de mon mieux les partitions, lui attentif à chacun de mes gestes et à la naissance de l’émotion.

Je sens qu’il cache sa pudeur derrière le voile de la connaissance de la musique. Il n’ose pas me demander ce qui m’anime mais je sais que cela le trouble. Il me propose de travailler sur la sonate en La majeur de Schubert D 959, Andantino. Elle est mélancolique en diable. Je m’applique et me fonds dans chaque note. Les aigües percent mon cœur. La tristesse m’envahit. Je m’arrête de jouer. Une larme, fragile, s’échappe sur ma joue. Je sens la présence de cet homme m’envelopper comme un manteau de douceur. Je lui confie tout : le diagnostic de l’ophtalmologiste, la probable cécité, l’espoir de retenir chaque parcelle du monde, chaque paysage de beauté dans ma mémoire, le découragement (comment emmagasiner toute cette beauté dans un trou noir, comment rendre ma mémoire visuelle infaillible ?) et la décision de préparer ce futur sombre en développant d’autres sens que la vue.

« La réponse est en vous, vous l’avez trouvée. » me dit-il avec un soleil divin dans les yeux. Continuez à vous exercer, peut-être que votre avenir aura sa parcelle d’éclaircies. »

***

Je continue, farouchement à apprivoiser les touches, à faire du piano, que j’ai acquis il y a peu, un allié. La musique me submerge et m’emporte vers un ailleurs indéfinissable qui me fait oublier le temps, le monde, mon mal. Je m’essaie même à la création. J’apprends mes petites compositions par cœur. Car du cœur, il m’en reste.

***

La maladie continue, elle aussi, d’avancer ses pions, à pas de loup, de misère et de ruine. Je ne distingue plus les choses qu’à travers une sorte de tunnel ; la vision centrale est préservée.

***

Aujourd’hui, le monde des formes et des couleurs se dérobe définitivement à moi. On y est, c’est ma fin de jour. Mon champ de vision n’est plus qu’un champ de ruines. De vagues formes grises et rayées, une lumière blanchâtre sur fond noir. Je ne ressens rien. Comme si j’avais anesthésié toute souffrance. J’entends le silence du matin, quelques chants d’oiseaux, un bruit de moteur mais je ne les vois plus. Je vais devoir faire sans, sans le spectacle du monde, sans la vitalité des couleurs, sans le bleu du ciel, le rose des roses et l’orange du crépuscule.

Je me fraye un passage à travers les ombres jusqu’à mon piano. Je m’installe. « Fur Alina » Arvo Pärt. Je commence à jouer, lentement, je connais la pièce par cœur. Je joue inlassablement comme pour éponger le chagrin renversé à l’intérieur de mon corps depuis des mois. Les touches sonnent comme des gouttes d’eau. J’avance entre ces gouttes de rien du tout. Mon cœur est suspendu aux fils d’une invisible marionnette. Léger. J’avance entre les notes comme on frôle des rideaux éphémères. Tout est doux, pur et enfantin. Ce morceau a des allures de berceuse.

Une chambre se matérialise… celle de mon enfance, au sol, un couffin et un poupon to à l’intérieur. Il tend les bras vers le ciel. Une chambre se matérialise ! La vision gagne en précision. Je vois, en ses murs, des chats, des bilboquets, des livres colorés, des châteaux pour de vrai, un patchwork bigarré sur un grand lit de bois.

Je continue de jouer, ne veux pas m’arrêter de peur que l’image ne disparaisse. Mais elle persiste tant que je joue. Je sens que j’ai gagné, la vision s’imprime sur ce qui était tout à l’heure un écran noir… « Les couleurs et les sons se répondent » Comme il avait raison, Baudelaire. C’est comme si ma mémoire visuelle avait fait son œuvre, avait été réactivée par la musique et l’émotion. Je sens que j’ai gagné, la petite chambre s’arrondit et se colore… Je sens que j’ai gagné : le poupon me sourit invariablement.

Contribution du : 24/07/2022 08:46
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Re : Défi de nouvelles n°7
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Champ stellaire


Je suis un peu mal en point ces jours-ci, on n’a plus beaucoup de cailloux à sucer, c’est la famine qui s’approche. Ça fait des années que je leur dis, faites attention à vos champs, les gars, si vous dilapidez nos ressources, qui sait ce qu’il adviendra de nous.
Mais je me débrouille. Si on a survécu jusque-là, c’est qu’on a appris à être spartiates. J’ai des petits passages à vide de temps en temps, des cailloux, on en a encore des tas et des tas, mais les milliers d’années, de siècles, d’ères, nécessaires pour les faire pousser me fait entrevoir une pénurie.
Je ne me plains pas, j’aide la communauté du mieux que je peux et pourtant, ce n’est pas moi le mieux loti, mon champ stellaire a trois cratères, alors pour remonter les cailloux avant de les sucer, je galère un max.
Bon, c’est vrai qu’on est un peu scotché sur notre planète, c’est pas demain-année qu’on aura de la visite. Même si au niveau touristique je suis sûr qu’il y a un potentiel. Sucer des cailloux, c’est pas tout le monde qui connaît !

Mon plus proche collaborateur, en d’autres termes mon pote Rocky, m’a dit que c’est parce qu’on est des losers spatiaux qu’on n’a que des cailloux pour survivre. Je ne suis pas trop fan de l’idée, évidemment, mais, comme disait ma bien lointaine arrière plusieurs fois grand-mère du temps où on avait deux yeux - un truc de ouf - « pour vivre heureux vivons cachés ». Elle avait de la sagesse, ma grand-mère, et en caillasse, elle s’y connaissait un brin avec un champ ingrat..Donc, ça doit être dans les gènes. Par contre, je ne sais pas trop comment on est arrivés là , sur ce caillou spatial, où on va et, surtout, comment on en repart. Ce dernier point m’intéresse, mais c’est juste une curiosité scientifique, évidemment, rien à voir avec une petite recherche personnelle de mon propre confort. Autrement dit, que j’en aurais ras la pierre de cet immobilisme.
Les autres, ça n’a pas l’air de les déranger, ils disent tout le temps que c’est sûr, sucer des cailloux n’assouplit pas la carrosserie, mais d’un autre côté, on a le laser à tous les étages. Des rayons lumineux qui nous rayent les slhouette par intermittence, on ne contrôle rien, on a appris à les subir, ces lasers. Alors le bonheur, c’est peut-être ça, se contenter de ce qui passe et en être content. Moi, ça m’esquinte l’entendement qu’on ne cherche pas à s’élever, à voir plus loin, pour les Cyclopes qu’on est, ça compte, de savoir comment font des hypothétiques autres pour s’en sortir sur leurs planètes. Parce que c’est ça qui me tue, il paraît que des planètes, il y en a à foison, de toute sorte. Des gazeuses, des terrestres, des venteuses, des pierreuses, des nébuleuses et je ne sais quoi encore. Ce serait bien d’échanger, on s’entraiderait.

Je dis toujours que si on n’est pas capable d’aller bien chez nous, faut aller voir ailleurs.
Il paraît qu’on a encore quelques vaisseaux qui pourraient servir, mais plus aucun jeune ne veut tenter l’Aventure. Il paraît même que ces vaisseaux servent de resserre pour les cailloux, il est bien connu que le problème de tout ce qui se mange, c’est le stockage. Ça se défend, mais du coup, les vaisseaux empierrés ne peuvent plus décoller. À trop entasser, on se ramollit la carcasse.

Mon rôle sur notre planète est de discuter et de raccorder les voix discordantes. Les soirs de lance-pierre, chacun peut imprimer ses revendications et la lancer à la volée, les messages se croisent, on rigole bien… et on ne décide rien. On se sent un peu seuls, avec Rocky.

Mais je sais maintenant, parce que j’ai vieilli et que mes meilleurs siècles sont passés, qu’on ne fait rien d’autre que de passer le temps le plus agréablement possible. Parce qu’au bout du compte, on n’a rien à faire. On fait des piques-niques, chacun apporte un tas de ses plus beaux spécimens, et on se raconte des conneries. On broie de la pierre pour des emplâtres quand on est malade, on fait, pour rire, des combats lapidaires.

Mais aucun d’entre nous n’a trouvé le moyen de renouveler le stock de cailloux qui s’épuisera à force de taper dedans inconsidérément.

Souvent, je m’assois le soir sur le plus gros rocher qui me reste et je contemple l’infinité de notre monde dont j’ai le sentiment qu’il est un peu fini malgré tout. C’est pathétique, j’en conviens, mais ça fait du bien de se faire un film, de se dire que quelque chose de chouette pourrait nous arriver, à nous la poignée de Cyclopspatiaux. Je sais, c’est dur à dire, mais on tient à cette appellation qui nous rattache à nos racines oubliées, ça nous laisse comme un drôle de goût dans la bouche, parfois, c’est mon coin à moi, à nous, notre secret, on se cligne de l’œil entre nous quand nous vient un vestige d’un passé que nous n’avons pas connu, mais…
Sans m’en rendre compte, je viens de faire un clin de mon œil à Rocky, là-bas en face. Je sais bien qu’il essaie toujours de se cacher derrière un cratère, il est pas cligneux, Rocky, mais je crois que ça lui a échappé, il a cligné aussi. En théorie, ce n’est pas raisonnable car nous sommes les deux les moins bêtes sur notre planète et que donc, en clignant ensemble, on met la population en danger. Parce qu’à cause de la gravité (pas de la situation, je parle de la gravité gravitationnelle), on reste la paupière close longtemps avant de pouvoir la relever. Assez longtemps.

Mais c’est vrai qu’on n’a pas beaucoup de visites ni d’attaquants, vu qu’on est dans le trou du cul de l’Espace. C’est pour ça qu’on est cools, surtout Rocky.

Ma paupière commence lentement à se relever, (après plusieurs unités de ‘assez longtemps’) et j’entrevois que ça bouge sur mon rocher. Ç’est pas Roccky, il m’aurait envoyé une pierre avant de venir.

Alors qui c’est ? Parce que les autres Cyclopspatiaux, ils ne viennent pas pour parler, ce ne sont pas des penseurs.

Petit à petit, se dévoile devant moi une image.J’ai devant moi deux types dans des combinaisons brillantes, ils ont deux yeux comme autrefois et je crois qu’ils me parlent, mais je n’entends rien. Je leur fait signe d’enlever leur casque, histoire de se mettre à l’aise. Je leur offre un caillou à chacun, en guise de bienvenue, mais au lieu de les sucer, voilà qu’ils les examinent et les perforent avec une machine à vrille, et ils mettent dessus un produit, et ça fait pschiiittttt et le caillou change de couleur. Et voilà qu’ils se mettent à danser, on aurait dit des fous. Moi, je reste stoïque sur mon rocher, quand ils me prennent soudainement chacun d’un côté et me soulèvent de mon siège. Comme je suis très lourd, la pierre c’est du solide, ils ont un peu de mal. Puis ils montent tous les deux sur le rocher, sortent des trucs et des machins et semblent lancer des appels avec un appareil. Ils ont l’air très excités ! Mon minéral ne fait qu’un tour, viennent-ils pour nous sauver, nous les Hommes-Pierre des contrées invivables ?

Rocky a disparu, je ne peux partager avec personne mes espoirs. Parce que sur leur vaisseau, il y a un logo. Je le reconnais car il fait partie de notre Héritage, nous les habitants d’ici. C’est un globe. Terrestre. J’entame une conversation, je leur dis nos difficultés, notre faim, je leur parle de mon arrière plusieurs fois grand-mère, mais ils me repoussent sauvagement et me lancent des lasers. Qui me terrassent. Là, je suis paralysé, pétrifié pour de bon. J’ai gardé encore un peu ma conscience, hélas assez longtemps pour voir qu’ils rassemblent tous les habitants et qu’ils les laserisent.

J’ai le cœur fendu devant cette sauvagerie.

Maintenant que nous sommes tous rassemblés, paralysés, pétrifiés, nous voyons passer le temps lentement, nous sommes « les Cyclopes » et comme si ça ne suffisait pas d’être prisonniers conscients pour des millénaires, nous les voyons ravager la planète. Ils ont poussé tous les cailloux, pleins d’hommes sont venus, ils ont tout cassé, nos cailloux à sucer et nos corps de pierre en petits bouts ou en poudre, qu’ils envoient par cargos entiers sur la Terre, je pleure nos origines bafouées, je pleure de n’avoir pas été vu comme un frère.

Ils ont émietté Rocky en gravier pour leur base. Ils le piétinent à longueur de cycles.
Ils m’ont mis en tas avec les autres et de temps en temps ils en prennent un, on ne sait jamais sur qui ça va tomber, qu’ils décortiquent et envoient sur Terre, je crois que nous recelons une rareté, du métal, ou allez savoir quoi.

Je me rends compte maintenant qu’on n’a pas été assez offensifs, on ne savait pas. Rocky non plus.

Comment vivre en paix si celui d’en face n’en veut pas, de notre paix ? S’il ne s’intéresse qu’à ce qui représente à leurs yeux de la richesse ?

J’ai faim. On me retire petit à petit ce qui me sustente. Je suis maintenant un esclave, ou plutôt une marchandise, qui attend d’être émietté, envoyé ailleurs, en mille morceaux. Et de ces éclats, ma mémoire traverse des contrées immémoriales et remonte à la surface péniblement. Je revois mon arrière mille fois archi-arrière grand-mère, souriante dans sa plaine, disant à ses enfants, l’argent ne se mange pas, petits, l’argent ne se mange pas.

Les cailloux non plus. Elle le savait mieux que personne.

Contribution du : 24/07/2022 09:21
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Re : Défi de nouvelles n°7
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Les feux dans la lande



La nuit semblait verser des filets de sang noir entre les aulnes du ruisseau. Quand la lune ronde traversait un rare nuage, la bruyère de la lande s’effaçait ; seuls subsistaient les feux électriques : trois rouges alignés et un blanc formant un « L ». Des lambeaux de brumes rosées et argentées serpentaient entre ces lumières étranges.

Henri Monsergue était posté à l’orée d’un bois de hêtres. Il faisait partie d’un groupe de six maquisards, chargé, avec trois autres équipes, de récupérer les conteneurs et les paquets qui allaient être largués au milieu du terrain par un Halifax britannique. En ce début d’été 1944, la fraîcheur d’après minuit recouvrait les épaules des hommes. Face à la lande et au ciel, ils attendaient depuis plus de deux heures et commençaient à trouver le temps long.



– Tu crois que c’est normal, Henri, que l’avion n’arrive pas ? demanda Philippe Artigeas.

– Mais, enfin, le chef Barjat vient de nous dire qu’il fallait patienter ! Londres, c’est pas la porte à côté !

– Et t’as entendu quoi, avant-hier, à la BBC ? s’inquiéta encore Philippe.

– « Mon grand frère est petit ». Manille m’a confirmé que c’était pour nous, cette nuit. J’ai écouté le message dans son logement de l’école, j’étais à La Bussière pour une « livraison ».



L’instituteur Roger Mercier, alias Manille, ne participait pas à la réception de ce parachutage. Il avait fondé un maquis, au printemps 1943, en aménageant des caches en compagnie des premiers réfractaires au STO, à proximité d’une bergerie abandonnée dans la forêt du Puy Peyroux. Huit de ses anciens élèves l’avaient accompagné dans cette aventure, dont Henri Monsergue. Par la suite, Roger Mercier était rapidement devenu le responsable FTP d’un secteur géographique s’étendant à une vingtaine de communes.



– Bon, j’espère que le frérot ne va pas trop tarder, poursuivit Philippe. Transbahuter tout le matériel, ça prend du temps, je sais pas si les English sont au jus…

– T’inquiète pas, fais confiance à Barjat. « Mon grand frère est petit », ça doit vouloir dire qu’on n’aura pas une grosse livraison, une douzaine de conteneurs à tout casser.

– Taisez-vous maintenant, il vaut mieux être discret, les coupa gentiment, mais fermement un résistant plus âgé.



Moins d’un quart d’heure plus tard, ils entendirent le ronronnement de l’avion au-delà des sapins, puis, presque aussitôt, les cris rauques de Barjat et les claquements des parachutes qui s’affalaient en plein milieu de la lande. Les quatre équipes récupèrent au plus vite neuf conteneurs et six paquets, sans oublier les toiles des parachutes et les feux électriques. Chaque groupe partit en camion vers une planque provisoire que leur avaient indiquée Manille et Barjat, dans l’attente d’une distribution aux maquis du secteur. Leur mission accomplie, les hommes rejoignirent leurs caches respectives une demi-heure avant l’aube. Ils dormaient déjà lorsque la lune parût se briser contre les premiers rougeoiements de l’aurore, faisant ruisseler la rosée sur la lande redevenue parfaitement silencieuse.



Vint un soir de novembre avec sa neige éparpillée, légère, voletant toute pâle au-devant des lumières d’un bal clandestin (*). La joie de vivre égayait les murs de la grange isolée, il y avait du vin et un peu à manger. Quelques maquisards avaient pris le risque de quitter leur camp pour rejoindre les habitants du village et ses environs. L’accordéon chantait les landes de bruyère, l’amour et le vent. Henri regardait sourire le beau visage de Marie, ils dansaient dans l’insouciance et la force de leurs vingt ans.

Soudain, peu après minuit, les miliciens pénétrèrent dans la grange avec leurs cris, leurs fusils. Ils jetèrent les hommes dans des camions bâchés. Quelques-uns purent se sauver depuis l’étage donnant sur un champ labouré en bordure de la forêt du Peyroux. Henri n’eut pas la présence d’esprit de s’enfuir ni de se débarrasser du morceau de toile de parachute qu’il gardait en souvenir dans une poche de son veston fripé. Il fut interrogé, torturé, ainsi que cinq autres jeunes suspects, par la milice, puis par la Gestapo de Limoges. Dans son délire de fatigue et de douleur extrême, en état de semi-conscience, il laissa échapper ces trois mots : « Manille…, viens, Manille. » Il resta prisonnier quelques jours, puis fut envoyé en déportation au cœur de la Pologne. Il mourut le mois suivant dans le camp d’Auswitch, tué par les soldats SS entre deux rangées de barbelés. Il avait tenté de fuir, ou plutôt de se suicider tant son désespoir était immense face à ces grands champs de neige et d’horreur, face aux larmes de sa mère, désormais seule au monde, face à la mémoire de Roger Mercier, son instituteur, qu’il avait inconsciemment dénoncé, face à Marie dont il revit le visage sourire à l’instant de sa mort.



La Gestapo, aidée par la milice, découvrit rapidement quel homme se cachait derrière le nom de guerre « Manille ». Il fut arrêté quelques jours plus tard dans sa classe devant ses élèves affolés. La nuit venue, l’instituteur avala une capsule de cyanure dans sa cellule.



Barjat remplaça Roger Mercier au même poste, dans ce secteur qu’il connaissait parfaitement : vallons et collines, routes et chemins, le moindre ruisseau, le moindre pacage…, et les hommes. L’espoir continua à éclairer les landes certaines nuits de pleine lune.





(*) Les bals étaient théoriquement interdits à cette époque en signe de solidarité avec les prisonniers français en Allemagne.

Contribution du : 24/07/2022 09:26
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Re : Défi de nouvelles n°7
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"Le Pré-aux-marguerites"


"Tiens, Paulo... pour t'acheter des pâtisseries... Crénom ! Tu es si maigre !" me dit Henri en me tendant un billet de vingt francs.

- "Oh, merci m'sieur Henri ! Paulo va pouvoir acheter des chocolatines !

- Si on te demande où tu as eu cet argent, ne dis pas que c'est moi qui te l'ai donné !

- Paulo sera muet comme... muet comme...comme...

- Ça ira !" lance le facteur en enfourchant son vélo, avant de redescendre vers le village.

Je l'aime bien, Henri. C'est un bon ami du Papé, il vient régulièrement lui rendre visite, interrompant sa tournée, pour boire un coup, et discuter des nouvelles du village. Le Papé, il y descend rarement, de peur de tomber sur madame Yvonne, qui veut lui acheter le Pré-aux-marguerites...

"Paulo ! Je te paye pas pour bailler aux corneilles, peuchère ! Retourne travailler !" me lance le Papé, depuis la ferme. "Papa, tu sais bien qu'il est simple d'esprit..." lui reproche la Jeannette. "Il est peut-être idiot, Jeannette, n'empêche que je ne le loge pas, ni le nourrit, ni le blanchit gratuitement. Qu'il fasse au moins sa part de travail, au lieu de révasser, en attendant qu'une bonne âme consente à lui donner son dimanche..."

J'aime bien la Jeannette ! Je l'ai connue toute petite... mais elle a bien grandi, maintenant, c'est une belle femme. J'aimerai bien lui conter fleurette, mais je crois que le Papé ne serait pas d'accord : je suis "innocent", comme ils disent au village, ce ne serait pas convenable, je suis sûr que monsieur le curé y trouverait à redire. Comme dans la chanson :

"Non Roger tu n'auras pas ma rose,
Non Roger tu n'auras rien,
Monsieur le curé a défendu la chose,
Non Roger tu n'auras ma rose...
Non Roger tu n'auras rien !"

Je ne m'appelle pas Roger, mais Paulo, et je ne suis pas un beau parti pour la Jeannette, pas comme les gars du village, qui la courtisent parfois, à l'insu du Papé...

Alors que je donne leur grain aux poules, j'entends un bruit de moteur : une voiture. Serait-ce madame Yvonne ? Hélas oui ; cette berline bleue, qui peine à grimper à l'assaut de la colline, c'est la sienne. Elle vient relancer le Papé, une fois encore. J'appréhende la dispute à venir... tant que celui-ci ne s'empare pas de sa carabine, madame Yvonne n'en sera quitte que pour quelques injures, comme les autres fois.

Le Papé, pendant cette visite, ne pouvant pas me surveiller, je peux espionner la conversation, à travers les volets clôts de la salle à manger :

- "Inutile d'insister ! Je le répète, je ne vendrai pas !" fulmine le Papé.

Madame Yvonne a la voix haut perchée, elle s'est toujours montrée sèche et dédaigneuse à mon égard ; pourtant, c'est d'une voix posée, aux accents enjôleurs, qu'elle lui répond :

"Voyons, Nicoleau, pourquoi diable vous accrocher à ce pré où ne poussent que mauvaises herbes et chiendent ? Ce Pré-aux-marguerites, si mal nommé, n'a pour seul avantage qu'être terrain constructible, ce dont mon offre tient compte... comment puis-je être plus généreuse ? Dans votre situation, vous devriez consentir de me vendre ce terrain, cher ami...
- Je ne serai jamais votre ami, sale peste ! Sortez de chez moi, et emmenez vos airs suffisants avec vous !"

C'est le moment pour moi de m'éclipser, et prendre un air affairé, pour que le Papé ne m'accuse pas de tirer au flanc. Madame Yvonne quitte la ferme, si elle pouvait ne jamais revenir ! Le Papé est, à chacunes de ses visites, d'une humeur massacrante...

Je nourris les cochons, dîne, me couche, et c'est déjà demain. Le matin, j'aperçois monsieur Henri arriver sur le chemin menant à la ferme, pied à terre, en poussant son vélo.

"Vouaille, Paulo, voici trente francs, achète toi de quoi manger, tu es encore plus maigre qu'hier !" déclare t'il en me tendant des sous.

L'air de rien, ça fait trente ans que les villageois me donnent mon dimanche - pas seulement le dimanche, mais tous les jours - et durant tout ce temps j'ai amassé un joli magot. C'est simple, plus les gens croient que vous l'êtes, simple, plus ils sont généreux ! D'un autre côté, si l'idiot, c'est moi, que sont ils, eux ?

Je prétexte avoir fait un faux mouvement, pour pouvoir me reposer cinq minutes et assister à la conversation de monsieur Henri et du Papé.

- "Nicoleau" dit le facteur en dégustant sa fine, " En venant, je suis passé au pré... j'y ai fait une découverte étrange : une portion du terrain semble boueuse !

- Et alors ?" répond le Papé, "c'est à cause de la pluie !

- Justement, il n'a pas plu de la semaine. Nicoleau. Nous sommes de vieux amis, vouaille, tu dois avoir une bonne raison de ne pas vendre le Pré-aux-marguerites, alors que tu es perclus de dettes... ça n'aurait pas un rapport avec La Bilote ?

- Henri, La Bilote, c'est une légende ! Tout le monde connaît cette histoire, dans le patelin, mais personne n'a jamais réussi à la localiser, cette foutue source...

- Justement, je pensais... toi, tu pourrais peut-être savoir quelque chose là-dessus...

- Peuchère, Henri, ne vas pas croire tous les ragots du coin, La Bilote, elle a jamais existée, sauf dans les rêves des simplets ! Quant à mes dettes, je trouverai une solution, sois en assuré" répond le Papé. Ajoutant : "Paulo, tu m'escagasse, à rester les bras ballants, retoune travailler !"

Je vaque donc à mes occupations : nourrir les bêtes de la ferme, ranger le foin, cueillir les fruits, mais cette histoire de source me trotte dans la tête... il faut que j'en ai le coeur net : je vais donc voir ce fameux pré, armé d'une pelle.

C'est un grand terrain vallonné, où ne pousse, comme le dit si bien madame Yvonne, "que mauvaises herbes et chiendent". Comme monsieur Henri l'a remarqué, à l'extrémité ouest le sol est bourbeux. C'est là que je plante mon outil, creusant, creusant, encore et encore...

De retour à la ferme, je vois la berline bleue garée dans la cour, et sa propriétaire, que le Papé menace de sa carabine, et que la Jeannette tente de retenir. Madame Yvonne quitte la ferme, avec précipitation, jurant qu'elle reviendra avec la gendarmerie...

Moi, je le comprends, le Papé. Le Pré-aux-marguerites recèle un secret ; ce n'est pas un simple terrain contsur... conturc... comme dit madame Yvonnne. Ce pré abrite un trésor ! Mais je pense que si je disais ce que c'est, le Papé serait furieux, alors je me tais. De toute façon, je suis idiot, les gens ne m'écouteraient pas, parce que je ne suis pas un-telligent.

C'est le repas, le lendemain soir. Le Papé et la Jeannette sont silencieux : ce matin, les hirondelles* sont passées. Si le Papé menace encore madame Yvonne de sa carabine, les gendarmes l'arrêteront. Comme si cela ne suffisait pas que le Papé ait pour cinq cent mille francs** de dettes ! C'est mon tour de dire la prière, je le fais tant bien que mal.

Monsieur Henri, qui a quelques sous de côtés, a accepté d'en avancer une partie à son ami le Papé, mais ce ne sera pas suffisant. Je ne supporte pas de voir mon employeur déprimé... je crois que moi aussi, je vais devoir prendre une décision...

Je quitte la table précipitamment, direction ma chambre, dans l'étable. Derrière mon matelas, rempli de foin, il y a un trou, de la largeur de deux mains, dans la paroi des combles du bâtiment ; j'en sors une boîte à chaussures... renfermant trente ans d'aumônes de la part de ces gens qui me trouvent trop maigre, ou trop idiot pour penser à l'avenir. Je l'ai déjà dit, c'est un fait : plus les gens vous croient simplet, plus ils sont généreux !

Les pauvres, s'ils savaient... !

Nous sommes le lendemain matin. Henri vient de finir de compter mes économies, y ajoutant la somme qu'il prête au Papé. Il me regardent tous d'un air furieux, lui, le Papé, et Jeannette. Il y a de quoi : je les fais passer pour de parfaits idiots, moi, l'idiot du village ! Le Papé va pouvoir régler ses dettes. Et madame Yvonne ne pourra plus profiter de la situation de celui-ci, pour lui acheter le Pré-aux-marguerites...

"Fêtons cela dignement !" s'exclame Henri. "Jeannette, apporte nous la fine" demande le Papé.

- "J'ai une meilleure idée, Papé" dis-je, exhibant une bouteille remplie d'un liquide clair.

- Mais c'est de l'eau !"

"Oui, de l'eau... l'eau la plus pure, la plus fraîche de la région !...

L'eau de La Bilote, la source du Pré-aux-marguerites..."

* Surnom des gendarmes à bicyclette, nommés ainsi à cause de leur grande cape, qui rappelle l'oiseau.

** Francs Anciens, soit cinq mille nouveaux Francs.

Contribution du : 24/07/2022 14:07
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Re : Défi de nouvelles n°7
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En 1988 je suis tombé sur la trilogie “Terre champ de bataille” de Ron Hubbard. Le “pitch”, comme on dit de nos jours était alléchant: de vilains extra-terrestres, les Psychlos ont presque anéanti les hommes et asservi les rares survivants. En trois volumes, le héros, un jeune homme, va passer du statut de désolante victime à celui d’exterminateur de ces grands méchants. J’avais adoré.
Un film en a été tiré en 2000 avec John Travolta. Totalement pathétique. Je ne connaissais rien de Ron Hubbard et surtout je ne savais pas qu’il avait fondé la Scientologie. L’apprendre n’avait pas gâché mon plaisir, d’autant qu’Hubbard avait ce qu’on appelle le “sens of wonder”. A posteriori je ne vois pas grand chose de l’idéologie de cette secte dans le roman, sauf la détestation de Ron Hubbard pour la psychologie et la psychiatrie, d’où le nom des vilains, les Psychlos.

Marqué par cette lecture, je n’ai pourtant pas poursuivi par la décalogie “ Mission Terre”, descendu par toutes les critiques. Et encore moins par la “Dianétique” qui est le manuel de la Scientologie...

Et puis arrive ce défi sur Oniris: “champ”. “Champ”?

Pourquoi pas “Terre champ de bataille” qui s’est imprimé dans mes souvenirs. D’accord, mais qu’en faire?

Et si...


Terre champ de bataille (comme par hasard...)

L. Ron Hubbard n’est pas mort le 24 janvier 1986 à l’âge de 74 ans. Le fondateur de la Scientologie pensait avoir tout prévu: une injection pour simuler la rigidité cadavérique, la tombe (modeste, vue de l’extérieur) et le cercueil entièrement aménagés, les bouteilles d’oxygène, le compartiment secret rempli de faux papiers et d’autant de liasses de billets que nécessaire pour commencer une nouvelle vie dans un luxe insolent, et surtout la mort accidentelle de ceux qui s’étaient occupé de toute cette installation.

Puis la mort accidentelle de ceux qui s’étaient occupé des morts accidentelles. Ainsi de suite. Cinq fois. Ces derniers étant choisis parmi des junkies en bout de course, payés par une ONG éphémère.

Lorsqu’au quatorzième jour Lafayette Ron Hubbard sortit du cénotaphe (L. pour Lafayette, et il en était très fier), naquit Elon Musk.

Enfin, pas tout de suite, mais il faut lire la suite pour comprendre. En attendant cette imposture majeure, son nouveau nom fut Napoléon Smith.

Ron Hubbard s’était déjà détaché depuis plusieurs années de son Église/secte/pompe à fric dont les malversations devenaient trop visibles. Revenu à ses primes amours, l’écriture de romans de science-fiction, il préparait surtout son grand retour, dans son ranch californien.

A soixante-dix ans il n’en paraissait que cinquante et cela commençait à se voir. Voler les résultats et éliminer le chercheur sud-coréen qui avait mis au point la nano-technologie réparatrice n’avait pas posé de problème insurmontable grâce aux ramifications de son organisation. Mais il devenait de plus en plus évident que son corps rajeunissait au lieu de porter les stigmates de l’âge. Depuis plus de dix ans déjà il changeait de serviteurs chaque année.

Mais surtout ses projets pharaoniques ne s’inscrivaient pas du tout, ou trop peu, dans la lignée de son best-seller, la “Dianétique”, le délirant bébé qui l’avait porté à la tête de l’Église de Scientologie. Celle-là même qui prônait le dépassement de la condition humaine et qui révélait au cercle le plus restreint que la race humaine était d’ascendance extra-terrestre.

Vous n’avez rien compris? Normal. Reprenons: Ron Hubbard ne vieillissait plus grâce à de microscopiques robots qui réparaient son corps en temps réel.

L’immortalité donc. Mais pas par la maîtrise de soi comme le prônait son Eglise. Par la science. Merde, tout faux la Scientologie.

Il avait assez d’argent maintenant pour quitter les Travolta et autres Tom Cruise et surtout toutes les suspicions d’argent sale qui commençaient à déferler sur son organisation. Un visage trop jeune, le FBI à ses portes, il était temps de changer d’identité pour réaliser ses rêves de grandeur. Et à une toute autre échelle.

Napoléon Smith s’installa à New-York, sur la 5ème avenue évidemment, avec l’apparence d’un jeune homme de vingt ans, et tissa sa toile grâce à tous les dossiers qu’il avait conservés sur les grands de ce monde. Il le fallait. Le monde ne savait pas encore que son sauveur était à nouveau en action. Dix ans à asservir les dirigeants, ce ne fut pas de trop. Par exemple il fut obligé de renflouer plusieurs fois Donald Trump qui, par son incurie, perdait plus d’argent qu’il n’en gagnait. En 89 il en eut assez de la guerre froide et s’en débarrassa.

Enfin, en 1995, il fit disparaître un jeune homme qui devait se lancer dans un doctorat de physique énergétique. Plutôt prometteur le gamin...

Exit Napoléon. Le nouvel Elon Musk rompit avec son père qui commençait à avoir des doutes et se lança sur le marché de l’Internet. Les extra-terrestres, l’esprit de Xenu lui-même, empereur galactique, ne le lui avait-il pas affirmé : au XXIème siècle, le fric serait sur la Toile!

Bon, tout le monde connaît (ou croit connaître) la suite: Paypal, Tesla, SpaceX.

Et surtout la guerre.

Grâce aux nano-technologies et à la gratuité d’Internet, dès 2035 toute la population du monde était augmentée : une nano-puce injectée au niveau de la tempe, et hop tout un chacun est connecté. Les capacités mémorielles et de calcul sont multipliées par mille.

Une race de génies.

Mais ce que personne ne savait c’est que par la même occasion les influences néfastes de nos ancêtres d’outre-espace furent éliminées. Plus de traces délétères de nos lointains parasites. Plus de pulsions négatives. Fin des meurtres, des viols, des braquages.

L’espèce humaine devint... l’exact inverse : de braves moutons décérébrés. Prêts à tendre la joue gauche. Toujours, en toute occasion. Enfin théoriquement puisque personne ne voulait dorénavant gifler son prochain. Personne. Sauf Elon qui s’était bien gardé de s’injecter une puce augmentée.

“La petite maison dans la prairie” fut interdite pour violence inacceptable. Ainsi que tous les chefs-d’œuvre de Walt Disney emplis de méchants. Les Japonais jetèrent à la mer tous les mangas et l’autodafé fut général. Quelques albums illustrés pour les moins de trois ans survécurent, mais pas tous, oh non, pas tous!

Alors les Psychlos arrivèrent sur Terre, tuèrent 99% de l’humanité et asservirent le reste. Avec une immense facilité.

Pourtant un jeune homme, éternellement jeune dit-on, se dressa contre eux: Jonnie « Goodboy » Tyler.

Ainsi commença “Terre champ de bataille”.

Contribution du : 24/07/2022 14:09
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Re : Défi de nouvelles n°7
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Champs de neige


L'auteur qui as mis des lien pour les histoires celui-ci fut kidnapper par la belle Kylie qui était une très jolie femme et emmener dans une
grotte en Australie ou celui-ci demandais ceci à la blonde de ce pays.

Qu'est-ce que je fais ici.

Tu m'as abandonner parce ce qu'on m'a kidnapper
dans l'avion que j'ai pris pour retourner chez moi
par des pirates de l'espace et ils m'ont jeter dans un donjon de glace avec des rats, et
des souris et je ne pouvais pas m'évader de ce donjon de glace mais les souris et les rat ont creuser un tunnel ou j'ai pu m'évader et en marchant dans les rochers, montagnes de neige et dans les pistes cyclables
j'ai croisée une femme en veste de cuir qui m'a parler de son bébé d'amour et Quelle étais mariée à lui.
Je n'étais pas marier à cette femme mais ou est-elle.
Chez elle mais dis-moi qu'est-ce que tu te rappelles du mont Everest.
Oui je me rappelle du mont Everest parce ce que tu m'avais envoyez des carte postale que les filles et moi on n'est allez là-bas pour te retrouver et qu'ont n'est redescendu en toboggan et qu'on est aller sur la glace et après tu as pris l'avion pour retourner en Australie...
Et après j'ai fais des tas de textes à poursuivre avec différents auteurs et que j'ai épouser une étudiante qui as fais une pilule pour soigner les gens qui sont dépressifs, envoyez l'esprit de quelqu'un dans un autre corps et je me suis retrouver dans un autre corps.
Qui as fais sauter les fontaines de jouvence.
On ne le sais pas.
Dis-moi Kylie tu as lu cette histoire.

Oui et cette pilule avec quelle plante a-t-elle pris pour fabriquer cette drogue est-ce que c'est la plante de ce virus ou dans un champ de fleur que cette fille a fais cette pilule.
on ne le sais pas ma chérie.

Et cette fille est-elle marier et pour ton ex est-elle marier elle aussi.
Non mais elle a une fille et elle voudrais que j'épouse cette fille et je lui ai dis non et je me suis retrouver dans un musée avec une fille avec un ordinateur portable et nous avons regarder des images de phrases à poursuivre, cour de récré Martin et ses amis, mes feuilles de Noël.

Et ou sont tes feuilles de ce que tu as dis.
chez moi dans mon armoire.

Allons chez toi et tu va me les montrer
c'est feuilles.
Très bien allons-y.
On gèles ici il n'y a pas de chauffage.
Si il y a du chauffage ma chérie.
Si il y a du chauffage pour quelle raison
que tu garde ton coat d'hiver mon bébé
d'amour.
Parce ce que j'ai froid.
Mais il ne neige pas dehors.
Oui je sais mais c'est le déluge de pluie et...

Ma biche d'amour es-tu là.
Oui mon bébé d'amour je suis là.
Qui est-ce ce monsieur.
C'est mon mari et il me donne des tas de bijoux quand on pille
les autres planète de l'espace.
Que faisons-nous de lui ma biche.
Nous pourrions le faire passer par la
planche dans l'espace ou le garder
en captivité dans une grotte ou il
ne pourra plus s'évader mon amour.

Non pas dans les grottes de glaces mais sur une autre planète ou il ne pourras plus retourner chez lui.
Très bien emmenons-le sur la planète ou il y a des champs de neige et de glaces et des fleurs et des animaux de la préhistoire.

C'est une planète ou il neige tous le temps avec des tas de champs enneigées

La planète des neige.

Oui la planète des neige avec la femme en veste de cuir.

Contribution du : 24/07/2022 16:21
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Re : Défi de nouvelles n°7
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Dans mon champ d'osselets


Les derniers rayons de soleil s’éteignent dans le ciel surchauffé ; l’astre de la nuit commence lentement à montrer sa surface momifiée. J’entends déjà la musique des serpents à sonnettes et le bruit du vent dans les cactus. Le désert ne m’a jamais semblé aussi serein. Je sors de la miteuse voiture de location sortie d’un vieux film des années soixante-dix. Elle va bien dans le décor, au milieu de nulle part au Nevada, une abime à GPS où même les cartes routières perdent tous les ans des touristes. Je sens l’endroit parfait pour construire mon champ d’osselets.

La poussière a commencé son invasion, dans mes poches, au tréfonds de mes jambes de pantalon, sur ma chemise, partout, comme si elle savait. Je me souviens alors de ce vieux Mexicain à la station-service, en train de quémander un pauvre billet de cinq dollars à un couple d’étudiants venus découvrir l’Amérique des canyons et des grandes étendues désertiques, celle chantée jadis par des troubadours aux cheveux longs et aux chemises fleuries. Je revois leurs sourires gênés devant les oripeaux d’un petit homme basané en train de raconter comment il avait traversé le Rio Grande au temps où le miracle américain représentait encore beaucoup dans l’esprit de millions d’âmes perdues en quête d’un avenir meilleur. Ce passé me parait lointain et je suppose qu’ils ne l’ont jamais connu. Pour eux, pour moi, le pays est devenu un endroit brutal où des excités envahissent le Capitole au nom d’un mythe indécent dont les héros ont décimé tout un peuple emplumé pour en brûler les totems et en saccager les terres sacrées. Je les imagine essayer de revenir aux sources, quand un crotale se disputait quelques insectes avec un lézard anémique, quand la nature américaine se résumait aux fondamentaux, manger, se reproduire et terminer dans l’estomac d’un plus gros que soi. Je ne peux pas leur jeter la pierre ; moi aussi j’ai voulu croire à toutes ces conneries débitées en tranches sur une chaine du câble entre deux publicités pour des sodas bourrés de sucres et des voitures aux allures de char d’assaut.

Je ne sais plus depuis combien de temps je marche. Le soleil est parti sous d’autres horizons, peut-être même en Europe où des riches donnent de la mitraille à des moins bien lotis pour qu’ils se défendent contre le grand méchant loup de service, notre nouvel ancien ennemi à nous les beaux et preux Américains aux dents blanches et à la carte de crédit pleine de zéros. La lune occupe désormais tout le ciel, avec sa face scarifiée et ses allures de mort-vivant. Je souris en pensant à mon coturne Ken qui prétendait que des zombies habitaient sur la face cachée et attendaient la prochaine mission chinoise pour s’offrir un festin mémorable. Avec son physique de surfeur et les chèques à quatre chiffres de ses parents, il avait fini par planter ses études pour aller chevaucher la licorne bleue dans un hôpital psychiatrique cinq étoiles. Je regrette mon pote Ken. On se marrait bien tous les deux.

J’ai soif. Je sors une gourde de mon sac à dos. L’eau a un goût métallique. L’idée d’en relever la saveur avec une petite gélule me tente un instant mais je dois rester fort, garder le dessert pour la fin et surtout trouver le lieu idéal pour mon ultime expérience. Je regarde le paysage. Malgré la nuit, les cailloux et les cactus scintillent furtivement. Je me demande si ce n’est pas un effet de bord à retardement de ma pharmacopée mais finalement je m’en balance car j’aime beaucoup ce que je vois. Au moins, ici je sais que Dieu a mangé Dieu depuis longtemps, que le chien ne deviendra jamais un loup parce que c’est trop déprimant d’être adulte. Même les vieux Mexicains paraissent riches dans ce théâtre de poussière.

Enfin, je suis arrivé. En tout cas, c’est ce que mon instinct me dicte. Je pose mon sac entre deux rochers informes que je décide d’adouber compagnons de cérémonie. Je les prénomme Joe et Nancy, je trouve que ça fait antique à la mode bannière étoilée. Je sors mon matériel : des osselets, de l’eau, de la pharmacie récréative et une couverture à carreaux. Je répartis mes petits morceaux d’os selon une figure géométrique bien précise comme indiqué dans le Livre des Anciens. Elle doit permettre de faciliter le champ spirituel dont j’ai besoin pour atteindre le seuil. C’est ce que Ken n’avait pas compris quand il a essayé ; pour cette raison, tout est parti en sucette, son esprit, sa raison et le pourquoi du comment d’un tel cérémonial. Je ne commettrai pas la même erreur.

Tout est prêt. Je bois une gorgée d’eau. Elle a toujours le même goût de métal froid. Il est temps d’en relever l’essence. Je démarre avec un Mandrax rouge. Ken les avalait comme des M&M’s et je n’ai jamais compris comment il faisait pour ne pas disjoncter en cours de route. Je suis maintenant assis en tailleur sur le sol poussiéreux. J’essaie d’imaginer les troubadours à cheveux longs, avec leurs chemises à fleurs et leurs chansons d’amour où tout le monde se tient la main dans un grand ciel bleu. L’image tarde à venir. Je force le destin avec un Quaalude bleu. J’attends. Je reprends un peu d’eau. Ma gorge commence à chauffer. Je dois me laisser aller, c’est normal au début. Au moins, je n’ai plus cette sensation métallique sur la langue.

Je commence à percevoir des formes humaines ; je vois comme des chevelures bouclées mais je ne discerne pas les traits sur les visages. Les chemises n’ont ni fleurs, ni cols, elles sont juste grises comme celles des condamnés dans les goulags russes ou les camps de concentration allemands. J’entends désormais un semblant de musique, un mélange entre chanson gothique et requiem classique. Je reprends un Mandrax. Soudain, une voix me parle. On dirait celle de Ken. Il me balance des phrases incompréhensibles au sujet de la lune, de momies scarifiées, de licorne et d’autres trucs que je ne saisis pas bien. Pourtant, j’aime ce qu’il me raconte. Je trouve du sens à ces hiéroglyphes verbaux. Je me lève. Ken me demande de danser avec les formes aux longs cheveux bouclés. Je me lance et prend la main de la plus proche. Je la sens décharnée et enfin je comprends ce qu’est le champ d’osselets. La mélodie m’enjoint d’enchainer, de fusionner avec les autres danseurs, de devenir eux. Je n’ai plus besoin de Mandrax ou de Quaalude. Je comprends enfin ce que me dit Ken et pourquoi maintenant. Je vais rejoindre la lune, le crotale, l’insecte et le lézard dans le tempo final.

Contribution du : 24/07/2022 20:53
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Re : Défi de nouvelles n°7
Maître Onirien
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De A côté de la forêt de Saint Germain
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Je remonte le sujet sinon il va disparaitre de la liste.

Contribution du : 26/07/2022 09:20
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Dans le théâtre extrémiste
(Dirk Polak)
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