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1 Utilisateur(s) anonymes
Re : Ponctuation en poésie - niveau débutant |
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Expert Onirien
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24/01/2010 18:26 De Sur un petit croissant de lune qui chavire mes landes imaginaires...
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Une question que j'ai posé ailleurs, mais que je remets ici afin que l'on en discute (merci Léo):
Les retraits à la ligne, ou les espaces... Les utilisez-vous comme ponctuation, ou non? Les utilisez-vous plutôt pour le rythme? Pour ma part, j'ai tendance à l'utiliser comme une sorte de ponctuation, un peu comme l'auteur Benway. Estelle me disait que c'était tout à fait possible^^. Voilà ma énième question du jour^^.
Contribution du : 10/04/2010 13:57
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Un pour tous, et tous contraints... Sauf si contre un tout, il y a le "je" pour un chant! |
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Re : Ponctuation en poésie - niveau débutant |
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Organiris
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Il faut resituer les choses dans leur contexte historique, pour comprendre ce problème de la ponctuation poétique "moderne".
La ponctuation en poésie, même si son rôle a été longtemps limité à une fonction "respiratoire", a toujours été présente, exactement pour les mêmes raisons qu'elle l'est en écriture romanesque : elle est porteuse de sens, voire d'émotions, elle précise et nuance la pensée de l'auteur, elle découpe le discours en phrases (donc il ne faudrait tout de même pas oublier qu'elles constituent la base du discours écrit et l'unité de sens de ce discours). Fin 19e, une double révolution littéraire et plastique provoque un rejet des conventions, des habitudes. Ce rejet sera synthétisé un peu plus tard par Marinetti dans son "Manifeste du Futurisme" : on refuse toute référence au passé, le peintre réinvente l'image, le poète réinvente le mot. De cette révolution naîtront les surréalistes, Dada, les cubistes et bien d'autres choses. Dès 1890 et quelques, Mallarmé va être un précurseur, en essayant de réinventer le rapport mot-image ("un coup de dés n'abolira jamais le hasard", considéré comme le premier texte de recherche de cette nouvelle typographie). Vers 1910, Marinetti, excessif en tout comme le futurisme (je vous conseille la lecture de de fameux "manifeste", le personnage apparaît nettement moins poétique et recommandable ; mais depuis, il y a eu Céline, aussi...), Marinetti donc publie "Paroles en liberté", premier texte qui rejette en vrac la syntaxe, la grammaire... et la ponctuation. En réalité, ni Mallarmé, ni même Marinetti n'ont souhaité supprimer, toute ponctuation, toute grammaire. Souvenez-vous de l'époque où le bon peuple disait "mon gamin dessine mieux que Picasso"... Ben, en fait, en poésie, c'est la même chose : Picasso, Dali, Magritte et autres s'appuyaient sur une technique picturale irréprochable et, à partir de cette maîtrise de la toile et de la peinture, ils ont inventé une nouvelle expression. Dans laquelle on retrouve, in profundis, la même maîtrise technique que Michel-Ange ou le Titien. Enrobée autrement, mise au service de la peinture d'une manière différente. Mais de même que le fiston du monsieur n'aurait probablement jamais été un nouveau Titien, il ne sera jamais on plus un Picasso ou un Modigliani. Il y a beaucoup trop de technique à maîtriser. En poésie, la "révolution" est surtout typographique. Le rejet est celui du "livre de vers". Marinetti écrit ceci, comme fondement de la poésie futuriste : Citation : J’entreprends une révolution typographique dirigée surtout contre la conception idiote et nauséeuse du livre de vers passéiste. (...) ma révolution est dirigée en outre contre ce que l’on appelle harmonie typographique de la page, qui est contraire au flux et reflux du style qui se déploie dans la page. Nous emploierons aussi, dans une même page 3 ou 4 encres de couleurs différentes et 20 caractères différents s’il le faut. Par exemple : italiques pour une série de sensations semblables et rapides, gras pour les onomatopées violentes, etc. Nouvelle conception de la page typographiquement picturale. Vous voyez qu'on est assez loin de la simple suppression de la ponctuation. Ce n'est d'ailleurs pas elle qui est en cause, c'est l'écriture poétique en général. Et on doit la notion de "vers libres" à cette révolution. Des premiers essais de Mallarmé à la fin des années 1890 aux "poèmes visuels" d'Apollinaire, puis au-delà, par Breton, Tzara, Aragon... toute la poésie dite "libérée" va s'essayer non pas à supprimer la ponctuation, la syntaxe et la grammaire, mais à les RÉINVENTER, exactement comme les cubistes ont réinventé la peinture. Jamais Marinetti, même dans ses écrits les plus extrêmes, n'a supprimé la ponctuation. Jamais Apollinaire ou Mallarmé n'ont supprimé toute respiration d'un texte. Ils ont réinventé une manière de la traduire, par une utilisation de l'espace, par la fonte, la police, la graisse, la casse, la couleur, bref par tous les artifices que la typographie mettait à leur disposition. Le passage que je cite de Marinetti ci-dessus est très significatif de ce que cherchait les Futuristes : leur recherche était avant tout, dans ce domaine, typographique. Ce petit rappel historique servait juste à poser le problème correctement : la ponctuation est aussi indispensable à la poésie qu'à n'importe quel autre texte Un texte n'est jamais a-ponctué. Il peut être mal ponctué, oui, mais il a toujours une ponctuation, nécessairement. Sous quelle forme ? C'est à l'auteur d'en décider. La réponse est donc oui, l'espace, le retour à la ligne, le saut de plusieurs lignes, un espacement plus important au sein de la même ligne, tout cela peut être ponctuation, et tout cela peut être aussi accompagné par une part de ponctuation symbolique (Mallarmé a supprimé toute ponctuation de ses poèmes, sauf les points finaux des phrases ; le sens et la portée de la décision qu'il prend ainsi devraient nous faire réfléchir). Tous les mélanges sont possibles, la seule contrainte est que l'ensemble doit être signifiant, et cohérent. Parce que de la même manière que n'importe quel gribouillage n'est pas un tableau cubique, une simple liste de mots sans ponctuation n'est pas un poème : la technique nécessaire pour construire quelque chose de signifiant reste la même. et indispensable. Et dé-ponctuer un poème n'est pas l'a-ponctuer, c'est le ponctuer différemment. Mais pour le faire, il faut savoir déjà ponctuer correctement. Ben oui, ça s'apprend et ça se travaille, ces choses-là, ça ne vient pas tout seul, que voulez-vous ! Donc, ponctuer différemment, certes, mais ponctuer intelligemment... toujours. Et c'est certainement là le plus difficile pour certains, parce que l'écriture – et la ponctuation qui n'en est qu'un accessoire – ne s'"apprennent" plus réellement. Un exemple, à présent. Certains peuvent penser que j'agis au comité éditorial en ayatollah de la ponctuation en général et de la virgule en particulier. C'est faux. Et la preuve est ici, dans ce poème où vous ne trouverez que deux symboles de ponctuation traditionnelle, et plein de silence, d'accélérations et de ruptures dans le rythme et le souffle. En fait, ce poème est construit dans l'esprit des Futuristes, en jouant sur la typographie de l'écriture et de la page (relisez l'extrait de Marinetti ci-dessus...).
Contribution du : 11/04/2010 00:55
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Re : Ponctuation en poésie - niveau débutant |
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Organiris
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Temps dépassé, je rajoute ici un lien que je cherchais et que je n'avais pas retrouvé en tapant mon message.
Je vous invite à consulter ce document, assez extraordinaire, que j'avais repéré sur le site de l'Université de Séville (bien que ce soit un document de la BNF) au cours de recherches. Il montre bien les préoccupations des futuristes, ce qu'ils louaient et ce qu'ils rejetaient. J'ai retrouvé aussi, pour ceux que cela intéresse, un lien vers le Manifeste de Marinetti, tel que publié dans Le Figaro en 1909.
Contribution du : 11/04/2010 01:11
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Re : Ponctuation en poésie - niveau débutant |
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Merci pour toutes ces explications et liens, je vais potasser tout ça pour me faire une idée plus claire.
Contribution du : 12/04/2010 00:17
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