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Quelques mots sur "Le nègre"
Expert Onirien
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Pour commencer, levons toute ambiguïté sur le titre qui en aura choqué plus d’un j’imagine. C’était en priorité son objectif, attirer les regards. Ensuite il faut l'évaluer par rapport au contexte, le récit se déroulant en 1904, époque où les préjugés raciaux étaient largement répandus. Je sais que la cancel culture voudrait effacer des pans de l’histoire, bannir des mots et des actes, mais le fait est que les coloniaux usaient de ce terme pour désigner les Africains. Ce n’est pas parce que « nègre » est devenu tabou aujourd’hui qu’il faut refuser de l’employer quand on aborde le passé. Je suis reconnaissant au CE d’avoir compris cette évidence.
Le texte en lui-même, comme souvent chez moi, oscille entre réel et fantastique en terre lointaine. Une façon pour moi de voyager et d’étudier d’autres sociétés. Merci à tous ceux qui ont permis sa parution.

J’avais bien conscience de l’aspect « petit nègre » du langage parlé Cox mais il m’était difficile de trouver la juste expression. Soucieux de ne pas dévaloriser les interlocuteurs Guinéens, j’ai essayé de faire attention. Concernant l’attente du contremaître avant de consulter un médecin, il faut admettre que c’est un dur à cuire. Un grand merci pour votre commentaire.

Il faut savoir Cornelius que les indigènes sous occupation coloniale française devaient s’acquitter d’un impôt en nature. Les villages fournissaient de la main d’œuvre non payée pour toutes sortes de travaux. Je suis heureux que ce texte vous ait plu.

Je suis fasciné par les masques africains Jeanphi, j’en ai d’ailleurs plusieurs accrochés à la maison. Ils traduisent un monde mystérieux, riche, que j’ai essayé de retranscrire dans cette nouvelle. Merci pour votre passage.

Ils ne sont pas encore nés les moralistes qui me dicteront mes choix Dowvid. Je refuserai toujours de me plier à la cancel culture et sa révision stupide de l’histoire. Merci de votre compréhension avisée et de votre lecture.

Je le redis Lari, j’aurais adoré être scénariste de film, d’où certainement cette façon très visuelle de raconter. Il y a aussi que je ne sais pas faire autrement ; l’introspection, le sentimental, l’exploration des tourments de l’âme, ce n’est pas pour moi. D’autres le font très bien à ma place et à vrai dire ça ne m’intéresse pas. J’ai toujours trouvé narcissiques les gens qui se mettent en scène dans leurs écrits mais il en faut pour tous les goûts. Grand merci pour ton commentaire.

Un commentaire relativement acerbe que j’accepte mais que je perçois surtout comme du ressentiment à mon égard Vilmon. Il me semble que d’emblée vous avez lu avec un regard négatif. J’en fais donc peu de cas mais vous remercie néanmoins de votre passage.

Je suis d’accord que la seconde partie du récit est plus lente que la première Cherbi. Le chantier et l’explosion apportaient du dynamisme, la mutation du contremaître davantage descriptive. J’aurais aimé apporter de l’ampleur mais j’étais bridé par une contrainte de caractères, 15 000 pas plus. Hé oui, encore un texte de concours ! Un merci sincère pour ton intérêt renouvelé.

Je vous reconnais bien là Marite, vous qui restez sensible au monde africain, à ses rites évocateurs d’un monde magique, inaccessible à nos représentations d’occidentaux. Votre commentaire a d’autant plus d’importance à mes yeux. Quand j’ai visité le musée du quai Branly à Paris, j’ai été très impressionné par l’art dit primitif des sociétés traditionnelles. J’en suis ressorti avec une foule d’idées pour mes nouvelles, dont l’ossature ce récit.

Contribution du : 26/02 10:25:45
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Bonjour Malitorne.

Décidément, tu es une bête à concours. Au moins, j’espère que tu ramène quelques récompenses. Sinon, comment dire, "y'apad'justice"!

Pour Le côté scénariste (oui, oui, je lis toujours un peu le retour des autres commentateurs), il n'est jamais trop tard pour passer la porte. Ne pas tenter, c'est le meilleur moyen d'échouer. Surtout qu'une foultitude de tes récits pourraient faire, au moins, d'excellents court-métrages!

Merci du retour.

Contribution du : 26/02 11:21:53
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Merci de votre retour!

J’ai été pour ma part étonné de voir tant de gens se scandaliser du mot nègre. Il est tout á fait légitime dans son contexte et je n’avais même pas imaginé qu’on puisse s’en formaliser. Il ne vient evidemment jamais de la bouche de l'auteur; il est simplement un élément de langage des personnages colonisateurs. Il est nécessaire pour écrire cette nouvelle correctement.
La seule critique peut-être ce serait de l’avoir utilisé pour titre, ce qu’on pourrait voir comme du sensationnalisme facile… Mais bon honnêtement, ça fait partie du jeu, il faut savoir « se vendre » et attirer l’attention !
Je me dis que les gens qui trouvent cela excessif ont dû se faire dessus en voyant Django Unchained.

Avoir peur des mots plutôt que du contexte, du verbe plutôt que des idées qu’il représente, je trouve que ça confine à une pudibonderie que j’imaginais plutôt Etats-Unienne (pudibonderie qui brille de tous ses feux dans leur brillante périphrase du n-word, qui veut dire exactement la même chose, force l’auditeur a épeler le mot dans sa tête, mais bon au moins on l’a pas dit à haute voix ! C’est comme Voldemort…).
Ceci dit, l'amalgame cancel culture/révisionisme ne me parait pas juste non plus: ce n'est pas le sens du terme.

Bref, pour l'exercice, je propose que vous réécriviez le texte en remplaçant tous les passages qui contiennent « nègre » par « homme de couleur ». Il faudra juste faire attention a bien le proposer dans la catégorie humour…

Contribution du : 26/02 12:12:50
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Merci Malicorne pour ce retour sur mon commentaire. En effet, après avoir vécu et travaillé (pas en contrat expatrié) quarante ans en Afrique Centrale, j'ai choisi assez rapidement de modifier mes codes et repères de vie pour mieux appréhender le monde qui m'entourait. Revenue aujourd'hui sur ma terre de naissance je me rend compte que cela m'a considérablement enrichie humainement. J'avoue aussi que certains codes et repères d'ici auxquels je dois me réadapter m'apparaissent parfois assez étranges et réducteurs. Bonne semaine à vous.

Contribution du : 26/02 15:58:02
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J'aimerais être esprit pour traverser l'espace et modeler le temps, à jamais, à l'infini.
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Salut,
Non, ce n'est par vengeance. J'ai eu le même regard sévère que l'on a à propos de mes récits. C'est par équité, comme j'ai indiqué.
Et je me questionne à propos d'un père qui accueille avec affection celui qui est responsable de la mort de son fils simplement parce qu'il a maintenant la peau noire.
De même, je m'interroge de la philosophie du shaman de damner une personne à avoir la peau noire, alors qu'il a lui aussi la peau noire, comme si son propre état est considéré être une damnation.
Mais je dois fabuler, aucune autre personne n'a remarqué ces points.
Vilmon

Contribution du : 26/02 18:53:59
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Salut Vilmon !

Je ne veux pas parler au nom de l’auteur, mais puisque vous vous étonnez que les autres commentateurs n’aient pas relevé les difficultés que vous mentionnez, laissez-moi vous faire part de la lecture différente que j’ai faite de cette chute.

Je ne partage pas votre compréhension du sortilège comme visant á “damner [le narrateur] à avoir la peau noire". Je ne pense pas que le marabout considère son action comme une damnation du tout, ni comme une simple punition, comme en témoigne l’amour sincère dont il fait preuve à la fin (et qui vous a gêné également, nous y arrivons). Pour moi, la métamorphose est bien loin d’un simple changement de couleur de peau, elle est plus profonde, plus riche et plus insidieuse. Le sortilège du marabout transforme l’âme du contremaitre.
On s’en rend compte lorsque celui-ci acquiert une mystérieuse maîtrise de la langue locale (« Auguste se surprit à comprendre leurs conversations, lui qui n’avait jamais fait l’effort d’apprendre le mandingue »). Son regard sur le pays change, lui aussi : « (…) à l’écoute des lieux qu’il traversait. Un être charmé par mille odeurs subtiles, la végétation exubérante et le relief altier du Djalon qui pointait vers le ciel ». On nous dit qu’Auguste, loin de simplement changer de couleur, se détruit pour renaitre comme une tout autre personne : « Sensation de morcellement où tout ce qu’il avait été s’enfuyait, remplacé par quelqu’un de différent ». Il se débarrasse des signes extérieurs d’appartenance à une culture étrangère, et se fond avec la nature Guinéenne : « Il fit tomber sa veste qui le gênait, retira ses chaussures pour mieux sentir la douceur de la terre ».

Ainsi, pour moi, il est très clair que le sortilège n’est pas une bête punition, mais a un aspect beaucoup plus intéressant : le marabout ne se contente pas de détruire, il rebâtit. Il remodèle jusqu’à l’esprit d’Auguste pour l’ouvrir á une culture qu’il a toujours méprisée, á un pays qu’il n’a jamais su voir. Il lui insuffle la culture de ses ancêtres, et l’amour de sa terre. Bien loin d’accueillir comme un père celui qui a tué son fils, il accueille un fils nouveau qui a vaincu, remplacé le tueur. Le marabout se rattache ainsi à une philosophie animiste, à rapprocher de croyances tribales traditionnelles, qui va bien au-delà du simpliste « œil pour œil, dent pour dent ». Il dépasse cette bête idée de vengeance, et transcende la haine en amour, insufflant une richesse nouvelle dans l’âme du tueur, pour pouvoir l’accueillir comme un homme régénéré et débarrassé de sa violence frustre.

Bref, comme je le disais dans mon commentaire, je trouve cette morale « entre le beau et le flippant », et bien plus intéressante et nuancée qu’un lourd « lol t’étais raciste, maintenant t’es noir, des grosses barres ! »

En espérant que ça puisse apporter des réponses a vos questions et des pistes de lecture alternatives !

Contribution du : 27/02 06:26:16
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
Maître Onirien
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De par le fait
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Entièrement d'accord avec l'analyse de Cox.

Contribution du : 27/02 06:54:55
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...  "En dehors du chien, le livre est le meilleur ami de l'homme. En dedans, il fait trop noir pour y lire"

Groucho Marx.
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Chacun trouve quelque part son émulation pour écrire Cherbi, moi ce sont les concours et les appels à textes. J’ai besoin de ce type de défi pour m’appliquer et mobiliser mes ressources. Je n’ai jamais obtenu le moindre centime, tenir le recueil final entre les mains est la plus grande de mes récompenses. Scénariste c’est trop tard, puis je ne connais personne du milieu.

Je pense que vous n’avez pas fait l’effort de rentrer dans le récit Vilmon, vos remarques montrent que vous l’avez survolé sans chercher à le comprendre. Je vous renvoie à l’analyse de Cox qui explique avec justesse les fondements du récit.
Par ailleurs, ne confondez pas sévérité et sincérité. Je ne me suis jamais préoccupé dans mes commentaires d’adoucir mes propos afin de ne pas froisser l’auteur. Je dis ce que je ressens, sans détours, considérant qu’il y a trop d’avis lénifiants sur le site pour que les miens en fassent partie. Il faut savoir encaisser la critique, aussi dure soit-elle, sinon on n’expose pas ses textes au public.

Vous m’épatez Cox, je ne saurais expliquer mon récit mieux que vous l’avez fait. Je n’ai rien à redire, vous avez parfaitement compris le sens profond de la métamorphose. Un colonial brutal et raciste devient homme de la terre de Guinée, ainsi le père endeuillé retrouve un fils. C’est toujours une grande satisfaction pour un auteur de voir que son histoire a été pleinement intégrée, qu’il ne s’est pas planté dans les étapes. Pour ça je vous remercie de tout cœur.
Concernant la cancel culture, possible que je me sois trompé. Je ne sais pas exactement comment on nomme ce mouvement qui déboulonne les statues et rejette sans véritables connaissances les repères historiques.

Contribution du : 27/02 08:45:37
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
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Je pense que Cox a tout dit. Heu, non : tout dit et expliquer, rien à ajouter.

Je ne parle pas forcément de récompense pécuniaire, Maltorne. On peut remettre des trophées, on peut permettre la parution d'un premier roman, on peut mettre en avant, par tout les moyens, durant un certain temps, les œuvres du ou des vainqueurs ou gagner la bourriche avec son lot de haricots verts en boîte. Et pour les scénarios, c'est bien dommage, mon ami. Ton imaginaire amènerait un peu d'originalité dans une production française qui n'ose que trop rarement le fantastique (qui se POLARise? ah, ah, ah, je me trouve trop fort en jeux de mots...).

Contribution du : 27/02 09:36:48
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Re : Quelques mots sur "Le nègre"
Maître Onirien
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Immense merci à Cox pour son analyse qui traduit, enfin je pense, une perception élargie à propos d'une culture si différente de celle dans laquelle nous avons, pour la plupart d'entre nous, été façonnés et éduqués. Je retiens particulièrement les propos qui suivent :
" Le marabout se rattache ainsi à une philosophie animiste, à rapprocher de croyances tribales traditionnelles, qui va bien au-delà du simpliste « œil pour œil, dent pour dent ». Il dépasse cette bête idée de vengeance, et transcende la haine en amour, insufflant une richesse nouvelle dans l’âme du tueur, pour pouvoir l’accueillir comme un homme régénéré et débarrassé de sa violence frustre. "

Contribution du : 27/02 10:55:28
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