L'étage clair de Cyrill pourrait aussi s'appeler l'étage à Maxime...

Le suivant, c'est l'étage à tonton Georges.

On y trouve un gorille, une peau de vache, une petite fleur, un fossoyeur, un vieux Léon, un curé de chez nous petit saint besogneux, une fille nue et une claire fontaine, une Margoton, une Lison, un « bois de son cœur », un p’tit coin d’paradis sous un parapluie, un 22 septembre dont il se fout, un petit cheval, des dames du temps jadis, un pont qu’il suffit de passer, une hécatombe, une corne d’auroch, des bancs publics, un auvergnat, un pauvre Martin, un voyou, une cane, une Jeanne, une Hélène en sabots et en pleurs, une nonne, Colombine, Marinette, des nombrils de femmes de flics, des croquants, un testament, une prière, un arbre bien regretté, un oncle Archibald, des philistins, un amandier, des lilas, une marche nuptiale, la femme d’Hector, un Bonhomme, un phonographe, un pornographe, un mécréant, une Germaine Tourangelle, « Petit verglas », Pénélope, et beaucoup de beau monde encore…C’est un étage où tout le monde chante à tue-tête « La mauvaise réputation » et « Trompettes de la renommée » et où j’aimerais bien habiter.

L’étage 62 est un grand festival de musique techno-goa se déroulant principalement la nuit.
Les corps y dansent et se font flammes. Les corps y dansent et y deviennent des vagues.
Du plus lointain des ténèbres, du plus profond de ces corps en mouvement, ombre et lumière s’accordent avec le tam-tam d’un Temps qui tonne Toujours.
Il y a cependant cette personne qui ne danse pas, peut-être qu’elle n’aime pas la techno-goa.
Il y a aussi cette entité qui n’a pas de corps physique, peut-être qu’elle vient d’un étage autrement psychédélique.

L’étage 63 est un grand désert de sable… jonché… parsemé… de serpents.

Chaque morsure ou crachat de serpent
est irrémédiablement chemin vers la mort, chemin rapide et douloureux.


En sortant de l’ascenseur ou en arrivant par l’escalier, vous êtes accueilli(s) par un joueur de flûte.
Celui-ci vous accompagnera tout au long de votre trajet.

Il jouera de son instrument… il se fera charmeur de serpents…
et l’air enjoué comme un enfant… vous mènera sur les voies du vent…


Et ainsi vous survivrez… à la traversée du désert.



Et ainsi vous survivrez… à la traversée du désert.

Je suis l’étage. La notion même d’étage, sa quintessence faite chair.
J’occupe de ma sémantique l’univers entier et le phagocyte sans mansuétude, œuvrant comme un trou noir à absorber le tout dans une déglutition lente et bruyante.
Les abstractions comme les choses tangibles patientent au bord de mon gouffre.
Les chiens, les pyramides, les pensées coupables et les crachats de serpents se succèdent et mêlent leurs fluides dans un avalement tourbillonnant de grâce posthume.
Lorsque tout ou rien sera passé par mon bon vouloir inextinguible, je me mâcherai moi-même dans un délire néo-anthropophage avec la méconnaissance totale de la tâche accomplie.
Je laisserai à la postérité le soin de refaire corps en analysant puis synthétisant tous les reliefs à sa disposition dans le grand fourre-tout d’un existentialisme désagrégé.

Citation :

Tom, je me disais que cela pourrait être intéressant (et sympa) de poser ici quelques-uns des textes de tes écoliers en ateliers d'écriture (*) ; histoire d'apporter un peu de souffle neuf et frais qui pourrait être bénéfique pour tout le monde. Cela ne pourrait que nous stimuler réciproquement. Non ?
Avec leurs autorisations, bien évidemment.

Qu'en penses-tu ?
Qu'en pensez-vous, vous les autres intervenants sur ce fil ?

En ce qui me concerne, j'avoue que je suis très curieuse et intéressée de découvrir ce dont sont capables ces collégiens. Nos jeunes sont une telle source d'émerveillements au quotidien !


(*) Sous forme de ''citations'' signées avec le prénom et l'âge de l'élève, par exemple...

Elena, je trouve ta proposition intéressante. Il est vrai que les jeunes ont beaucoup d'imagination, je vois ça avec mes petits-enfants ados.
Pour ma part, je vais piquer le sujet à Tom pour en faire bénéficier les participants à l'atelier d'écriture que j'ai créé dans mon quartier.
Quand une idée est bonne il faut la faire vivre !

Nous rappelons que sur Oniris les interventions ne peuvent être faites qu'en nom propre de l'auteur.
Des élèves désirant participer doivent s'inscrire comme chacun des membres.
Le cas échéant, ils seraient tout à fait bienvenus.

hersen pour les Organiris

Réponse à vous trois (hello!) :

J'aime aussi ta proposition, Elena. J'y ai déjà songé en fait. Cependant, je rejoins aussi Hersen pour différentes raisons : l'organisation parfois compliquée et plus ou moins faisable pour avoir l'autorisation des enfants et celle des parents d'élèves, le fait de lier l'écrit d'un mineur à un site d'écriture principalement pour adultes, ou les différences entre mes différents statuts : il y a des écoles où je suis intervenant, celle où je suis animateur périscolaire, avec selon le rôle à tenir, l'opportunité ou pas de rencontrer les parents dont j'ai fait écrire les enfants, ou celle de leur proposer la participation de leurs enfants à un forum d'écriture sur le net.
J'ai eu l'occasion de parler d'Oniris à certains parents d'élèves dont je me suis dis que ça pouvait leur parler, ça s'arrête là. Je préfère faire preuve de retenue, déjà parce que je ne veux pas ne pas respecter les règles du site, et parce qu'il me semble que c'est le plus honnête vis-à-vis de tout le monde, même si ça implique au final le non-partage.

Je trouve très belle votre curiosité de leurs écrits. Sans les citer directement, je peux vous dire que oui, enfants et ados peuvent se révéler brillants, dans l'imaginaire qui déborde mais aussi dans la capacité de synthèse, à pouvoir créer une phrase qui sonne et qui a du sens, si on leur donne du temps et de l'espace, et un cadre minimal pour le faire. Ils ont des étages "de leur âge", du plus littéral (en détaillant des murs en brique ou en caramel...) au plus abstrait (en parlant d'infini, de monde qui n'existe pas...). Ils s'amusent aussi avec la numérotation, en inventant des étages 9 virgule truc ou 10 tiret machin, rajoutent parfois certains signes mathématiques savants, bref, ils savent aussi s'amuser avec le cadre et les consignes dès lors qu'on leur a fait découvert un certain champ des possibles. Ils vont dans le merveilleux, dans le cartoonesque, dans l'horrifique, dans l'engagé, dans le méditatif, ... Il y a l'enfant de primaire qui a imaginé sa maison infinie. Il y a cette collégienne qui a créé son étage pris dans une boucle temporelle. Mes applaudissements un peu éblouis.

Embellie, si ce jeu d'écriture te plaît pour un atelier, plaisir à toi, c'est fait pour !


Merci à vous trois,

à bientôt entre les lignes.



P-s : j'ai passé la serpillière dans l'escalier 8789 donc attention ça glisse...

Merci à Tom pour la glissade et pour le partage dont nous espérons tout de même encore quelques miettes et quelques somptueux étages ...

Étage intercalaire numéro 8,879,00 de quelques trop longues années

Cet étage est composé de deux spacieuses Agoras, d'un entre sol, d'un réfectoire et de deux couloirs presque infinis bordés de chambres et se terminant par une vitre gigantesque abouchée à une végétation luxuriante et bavarde. La réplique exacte de cette configuration située juste au dessus (l'étage prime, juste prime) n'est accessible que depuis l'étage 8,879,00 en question.
Ici des gens assis et des gens debouts se boutonnent et se déboulonnent invariablement à horaires fixes. Il(s) y passe(ent) de quelques trop longues et trop jeunes années. En voici la description :
Le premier serait mort quatre fois si les services de secours universels ne l'avaient pas débarqué sur le portique sécurisé d'entrée, inutile de préciser qu'encore aujourd'hui il applaudi des deux mains dès qu'il en a l'opportunité. Le deuxième mange des alexandrins dont il a fait son magnifique roman à l'âge de dix-huit ans seulement, et qu'il crache courtoisement à la figure d'une assistante sociale dans le seul but de le lui faire présenter à la maison d'édition la plus proche. Le troisième est réduit à la condition de sous homme genre plancton tributaire des vents médusés en plein océan arctique par une sœur fratricide pour n'avoir pas réussi à faire de lui son petit Nietzsche. Le quatrième est vampirisé par son ex amoureuse qui a profité, semblerait-il, de son départ pour l'univers 8,879,00 afin de mener une carrière d'alcoolique cocaïnomane nyphomanesque après être passée dans les tentacules de son ex meilleur ami nommé amicalement la 'pieuvre chauve'. Le cinquième subit depuis toujours les colibets qu'il ne doit qu'aux troubles générés depuis la petite enfance par l'inadaptibilité de son génie patriarcal. Je m'arrête là, parmis quarante-cinq autres pensionnaires qui ne sont en réalité qu'une seule et unique personne. Attention à ne pas monter à l'étage 'prime, juste prime' situé au-dessus selon la même configuration et accessible uniquement depuis l'étage 8,879,00. Personne n'en descend jamais. Ceux qui choisissent d'y monter se plaisent à y demeurer secrètement jusqu'à leur dernier souffle, tels de gros oiseaux en lequels personne jamais n'a perçu l'apparence d'un signe humain avant la fin de la première page.
Cet univers affiche le plus souvent une bouille souriante et laisse quelques fois s'ouvrir une large mâchoire vorace dont la langue bifide ligote les nouveaux arrivants afin d'en établir le régime futur.