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À propos de "Le tocsin" |
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Expert Onirien
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07/02/2011 18:53 Groupe :
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Bonjour,
Je tiens d’abord à tous vous remercier pour vos commentaires. Chacun d’eux est vraiment très constructif et intéressant. Cela compte beaucoup pour moi, d’autant plus qu’il s’agit de mon premier texte publié sur Oniris. J’ai beaucoup aimé lire vos réflexions, vos remarques, vos critiques,… Cela m’a permis un certain recul par rapport à mon poème, et c’est là exactement ce que j’attendais. @David : J’aime beaucoup votre interprétation et surtout cette image de la naissance. Ce n’est pas tout à fait de cela que j’entendais rendre compte, mais il me semble que votre lecture prend sensiblement la même direction que la mienne. Sans entrer dans le détail, je dirai que c’est de l’angoisse ressentie par tout être sensible face aux agressions quotidiennes de l’altérité qui cherche à le réduire au néant que j’ai voulu parler ; de cette angoisse que l’être cherche à étouffer par le repli sur soi et, finalement, le solipsisme. C’est là la signification que je donne au tocsin : alarme de l’être face à l’invasion de l’étrangeté. Mais il est vrai que la métaphore de la naissance permet peut-être de mieux le comprendre. Des nombreuses influences théoriques de ce poème, je pense ici pouvoir citer Jacques Lacan pour qui, d’après ce que j’en sais et surtout d’après ce que j’en ai compris, le fœtus serait à la fois sujet et monde ; serait un être fini et complet. Le fœtus réaliserait ainsi (imaginairement du moins) l’union d’une dualité puisque, s’identifiant à la mère qui l’englobe, il serait tout autant celui qui perçoit que l’univers qu’il perçoit. Or la naissance viendrait rompre cette union originelle en contraignant l’enfant à vivre avec les aléas de l’extériorité. Par conséquent, l’enfant ne serait plus que simple sujet, être incomplet et infini (dans les deux sens du terme puisqu’il subit l’infinie diversité du monde qui s’impose à lui). Par rapport à cela, je crois qu’on peut dire que ce poème cherche à traduire cette angoisse (qui peut être celle de l’enfant mais pas seulement), angoisse qu’entraîne l’éclosion de l’univers extérieur dans le champ de l’être, le dédoublement passif du sujet soumis à l’Autre. C’est en réaction à cela que peut se comprendre la fin du texte, l’être se mettant à la recherche du "redevenir fœtus" (cet être complet qui est à la fois sujet du monde et monde), à la recherche du solipsisme. Un final qu’on peut aussi comprendre, selon moi, comme l’allégorie de la création artistique par laquelle l’artiste s’enferme dans un univers dont il est lui-même le point d’origine. Allégorie de la folie également, mais d’une folie qui serait consciente et volontaire (cf. réponse à pich24). En tout cas, je vous remercie pour votre commentaire qui m’aura, je l’espère, permis d’éclaircir certains aspects de ce texte. P.S. : Qu’entendez-vous par "âme reptilienne (batracienne ?)" ? @Lunastrelle : Votre commentaire me fait vraiment plaisir. J’ai effectivement tenté cet exercice assez périlleux de rendre, à travers l’écriture et la syntaxe, ce foisonnement du sensible qui s’impose à notre sensibilité, ainsi que le malaise qui peut en découler. Ce pourquoi je peux considérer ce but comme atteint si vous avez trouvez votre lecture très sensorielle. @Lunastrelle et Pascal31 : Par rapport à cette lourdeur que vous pointez tous deux, je suis tout à fait d’accord pour dire que c’est là l’un de mes principaux défauts. J’ai tendance à vouloir trop en faire, quitte à me montrer parfois un peu pompeux. Cependant, cela reste à voir. Je suis bien conscient que mon texte manque parfois de souffle, mais parce que j’ai intentionnellement voulu le rendre étouffant, afin, précisément, de traduire le malaise de l’être qui se sent ainsi "violé" par l’altérité. Toutefois, je pense qu’il me faut encore travailler dessus pour parvenir à rendre compte de cet étouffement sans lourdeur. Merci d’avoir pris le temps de me lire et de donner votre avis. @Arielle : L’âme et le corps ? Non, pas exactement. Ce n’est pas de ce dualisme que j’ai voulu parler mais plutôt de l’opposition entre la subjectivité et le monde, le corps sensible ne servant jamais que d’intermédiaire entre ces deux pôles. Un combat ? Je ne pense pas non plus. Une fuite plutôt, le renfermement de la subjectivité qui cherche à devenir son seul principe, qui cherche à se défaire de l’influence du monde extérieur. Je pense qu’on peut voir cette quête comme une forme d’ascétisme, mais alors un ascétisme dénué de toute prétention mystique. Je reconnais qu’il était sans doute maladroit de parler d’âme. En fait, par ce terme, c’est la subjectivité pure que je cherchais à désigner. De même, par corps, je voulais parler de la subjectivité relationnelle et passive, de notre être sensitif toujours au contact de l’Autre. Je vous remercie d’avoir relevé cette ambigüité qui peut effectivement prêter à confusion. @ristretto : Vous n’êtes pas du tout passé à côté de mon but qui était de vous parlez. Apparemment c’est réussi même si votre interprétation n’est pas exactement la mienne. En écrivant ce poème, je n’avais pas du tout en tête la mondialisation, l’indifférenciation,… mais pourquoi pas. C’est vrai qu’il y a de cela : le despotisme de l’Autre (sous n’importe qu’elle forme, la mondialisation n’en étant qu’un cas particulier), l’Autre qui cherche à anéantir, à avaler notre subjectivité. Merci de votre commentaire, je suis content que ce texte vous parle. @pich24 : Je pense que vous avez tout à fait raison de distinguer âme et esprit. C’est d’une réaction instinctive qu’il s’agit, indépendante de la pensée "factice", de la rationalité parfois tout aussi autoritaire que la sensibilité. J’aime beaucoup votre expression de désaffection du réel qui rend parfaitement compte de mon intention : exprimer la tentation de remplacer ce réel qui s’impose par un réel que nous imposerions subjectivement. Par rapport à votre référence à la schizophrénie, ce n’est effectivement pas de cela qu’il s’agit. Bien qu’il puisse peut-être se trouver certains éléments qui iraient dans ce sens (désinvestissement du réel, isolation,…), la recherche ici décrite est une recherche consciente et volontaire. Personnellement, j’y vois plutôt un repli de type autistique. Il ne s’agit certainement pas d’en faire l’apologie - ce qui serait de très mauvais goût et foncièrement irrespectueux envers les personnes qui souffrent (directement ou indirectement) de cette maladie - néanmoins, je crois qu’il peut existe une certaine tentation de l’autisme : s’isoler du monde et d’autrui, se replier sur sa propre subjectivité, son propre imaginaire,… En cela, je n’ai pas vraiment voulu critiquer l’individualisme (mais votre lecture est tout aussi légitime que la mienne), je n’ai pas non plus voulu en faire l’apologie, mais j’ai essayé de l’exprimer et, surtout, d’exprimer les causes qui peuvent pousser un individu à un tel isolement. Merci pour votre commentaire, je suis heureux d’avoir suscité votre intérêt et de vous avoir fait cogiter !
Contribution du : 10/03/2011 10:27
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Sans puissance d'expansion, sans une certaine domination sur les choses, la vie est indéfendable. Une seule chose est exaltante : le contact avec les puissances de l'esprit. A. ARTAUD |
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Re : À propos de "Le tocsin" |
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Maître des vers sereins
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11/02/2008 03:55 Groupe :
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Citation :
P.S. : Qu’entendez-vous par "âme reptilienne (batracienne ?)" ? C'était en rapport confus avec ce passage du poème : "au creux de mes ouïes entrouvertes et frémissantes" Ça évoquerait plutôt les poissons en fait, j'étais pas content de "reptilien" et j'ai tenté de transiger avec "Batracien", je cherchais le mot... j'emploie "âme" et "être" indifféremment mais je pensais bien au développement de l'embryon dont les futures poumons ressemblent à des branchies, c'était une autre approximation des "ouïes" citées ci-dessus, j'y voyais une idée d'évolution, douloureuse, de métamorphose.
Contribution du : 10/03/2011 11:20
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Un Fleuve |
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Re : À propos de "Le tocsin" |
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Expert Onirien
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07/02/2011 18:53 Groupe :
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Citation :
Ah oui... Je ne voyais pas du tout les choses comme cela, mais pourquoi pas. Pour moi, les ouïes étaient simplement un symbole du sens auditif... Citation :
C'est plutôt comme ça que j'avais compris votre "âme reptilienne", le "reptilien" me faisant penser à la mue, à la transformation de l'être par le détachement de la peau sensible.
Contribution du : 10/03/2011 11:40
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Re : À propos de "Le tocsin" |
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Expert Onirien
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07/05/2008 23:29 Groupe :
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le mot reptilien ramène aussi à notre cerveau primitif
celui qui alerte en cas de danger, celui qui est en charge de notre instinct de survie ... merci Luna K pour tes explications mais aussi pour ton ouverture d'esprit quant à nos interprétations personnelles.
Contribution du : 10/03/2011 19:01
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Re : À propos de "Le tocsin" |
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Expert Onirien
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07/02/2011 18:53 Groupe :
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@Lhirondelle :
Bonjour, Merci pour votre commentaire qui, de tous, est peut-être celui qui se rapproche le plus de ce que j’ai voulu dire. Quoique… "je ressens comme un décalage, une "non connexion" entre le "soi" et les autres, entre le "soi" et ce qui l'entoure". C’est exactement cela que j’ai voulu exprimer, mais à la fin du texte seulement... Au contraire, l’essentiel de ce poème cherche à exprimer le parfait opposé : une trop forte connexion entre le soi et l’Autre, de sorte que, au final, le soi est engloutit par cet Autre. La déconnexion n’intervient alors qu’en réaction à cela, comme l’unique moyen (sans doute extrême) d’enfin se retrouver véritablement maître de soi. Par rapport à : "de ne jamais voir poindre à l’aube les fanaux d’une âme solidaire ; contraint de repousser tout et chacun, même les fanaux des âmes solidaires". La contradiction est effectivement volontaire. Il m’est assez difficile de l’expliquer précisément ici car ce n’est pas un thème que j’ai beaucoup développé dans ce texte. En gros, j’ai voulu exprimer le cercle vicieux ("Je m’encercle, vicieusement") dans lequel nous enferme ce mal être puisqu’il exclut, par principe, toute aide étrangère, l’étrangeté étant précisément l’agresseur. Ainsi, même si cette aide arrivait, dans la mesure où elle fait partie du problème, elle devrait être rejetée avec le reste du monde extérieur (lequel est un, et donc ne peut être nié ou affirmé que comme un tout… : sujet d’un éventuel prochain texte qui me permettrait d’approfondir cela). Dans "prodiguer l’âme d’un abri", j’y vois le premier sens également : "à l’âme, prodiguer un abri", l’isolement, contre l’altérité qui cherche à l’anéantir.
Contribution du : 11/03/2011 11:41
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Sans puissance d'expansion, sans une certaine domination sur les choses, la vie est indéfendable. Une seule chose est exaltante : le contact avec les puissances de l'esprit. A. ARTAUD |
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Re : À propos de "Le tocsin" |
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Chevalier d'Oniris
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09/09/2009 18:44 Groupe :
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Merci Lunar-k pour les précisions sur ce texte.
Au plaisir de lire le prochain. Bonne journée Lhirondelle
Contribution du : 11/03/2011 12:57
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