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De la prédation
Expert Onirien
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07/08/2014 15:38
De À même l'écorce des peupliers
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Bonjour et meilleurs vœux à tous pour 2017 !

Merci à toutes les petites mains qui ont oeuvré dans la coulisse pour que ce poème (écrit en juillet 2014) soit retenu. Merci à tous ceux qui l'ont lu et à tous ceux qui, l'ayant lu, ont contribué à le faire vivre en le commentant.

Le choix de proposer "Chasseur et proie" était-il prémonitoire de ma disparition du forum ? Je le reconnais : l'exercice du commentaire est pour moi une drogue. Il convient, de temps en temps, d'envisager un sevrage total. Il est parfois préférable d'oublier les mots pour une durée indéterminée.

M'était-il possible de venir sur Oniris sans commenter ? Non. Pouvais-je y venir en envisageant une forme plus allusive de commentaire ? Non.

Il était sans doute alors préférable de n'y plus venir pendant quelques temps.

Voici le commentaire que j'ai fait de mon poème une quinzaine de jours après l'avoir écrit.

Le champ lexical du tramage ("filet", "réseau", "mailles", "serpentine", "fil", "agglomérer", "Toile d'araignée"), qui jalonne le texte, en épouse le propos : celui du ruban de l'écriture et de son interprétation. Je parle donc ici, spécifiquement, de l'exercice de commentateur. Le titre signale assez le caractère ambivalent, contradictoire, de l'entreprise. Celui qui commente un texte traverse en effet le double statut de la prédation. Courant derrière un texte pour se  l'approprier, s'en faire une représentation toute personnelle (hyperboles : "immole", "à perte de vue", "infiniment"), il se trouve lui-même sans cesse poursuivi, sommé de répondre a minima à ses défis, à ses exigences, à ses lignes de force, à ses lignes de fractures, de fuite, à ses détours. En bref, il devient la proie du discours de l'autre, d'une nécessité de dire qui le déborde. Le fruit de cette dépossession est lisible ici au travers des formes impersonnelles ("Il se désigne", "il suffira", "il vous sera possible", "il faudra"), de la personnification ("un réseau / soudain / qui rabat du poing") et par la présence, très minoritaire, du pronom personnel sous sa forme sujet. Quelque chose parle sous la plume du commentateur. Une chose qui a pour vocation, entre autre, de gommer, d'éclairer voire de magnifier quelques aspérités du texte (gradation méliorative : "endimanche les éclats, tamise les jonctions, adoube le souffle"). J'avoue qu'après coup, en relisant "Retable", j'ai souri et pensé à Louis. J'ai lu ce mot à sa manière, non plus sous son sens premier (qui ne manquait pas de faire sens) mais en m'amusant, en le décomposant. Re-table. Commenter, c'est remettre sur la table, remettre le couvert. Alors, happé par la matérialité des mots, la matérialité du langage, d'un langage qui se ferait nourriture, attablé au festin des mots des autres, vous voici violemment arraché au temps ("fait glisser l'horloge hors de vous"). L'image qui affleure insensiblement est celle de l'appel irrésistible des sirènes ("Enchanté", "symphonie"). Le commentateur, à la fois gibier ("arrimé") et gibecière ("giboyeux"), se trouve enchaîné à la respiration, au souffle du texte, marin sur le pont d'un navire. La figuration en trois parties de ce dernier marque les trois stades de l'appréhension d'un texte. Une première lecture vous présente l'ensemble, ce qui s'offre immédiatement, cristallisant la lecture ("Au premier filet / transpercé", "Vaste mâture") et laissant le reste du propos fuyant ("mots... lestés"). Une seconde lecture, plus au cœur de la ligne de flottaison, met progressivement en évidence les enjeux plus complexes dont le texte est porteur (métaphore : "la travée de l'errance", expression : "flancs... de soufre"). Une troisième lecture, ayant pris en compte un certain nombre de paramètres (syntaxiques, stylistiques, grammaticaux), ayant ainsi ouvert un certain nombre de brèches, de pistes d'analyse (métaphores : "la cale aux quatre vents"), permet au commentateur de développer une forme d'interprétation basée sur une cohésion acceptable d'éléments prégnants sur lesquels s'appuie l'armature du texte ("Toile d'araignée étoilée"). Ce dernier mouvement s'alimente d'une série de correspondances qui s' élaborent dans la conscience du commentateur, à l'intérieur de son vécu, de ses lectures. À  l'image de l'escalier vertigineux (antithèse : "s'ébauchent en promontoire" / "descendent à perte de vue"), le commentateur creuse interminablement en lui-même afin de débroussailler le texte support au regard de la sédimentation qui s'exerce au fond de lui-même (superlatif : "du plus bas qu'il vous sera possible de l'envisager"). Le caractère déroutant de l'exercice entamé (paradoxe : "Patiemment. / Fiévreusement") en signale l'aspect déconcertant, déjanté, halluciné. Plus symptomatique encore de ce rapport au texte : la présence de l'adjectif "balsamique". Se pencher avec une telle concentration sur les écrits des autres, se lancer, au long cours, dans cette tourmente intérieure qui vous happe, mobilise votre attention, c'est, aussi, il faut bien se l'avouer, combler un manque, un manque à se trouver, à s'éprouver, à se transmettre en écriture.

Contribution du : 21/01/2017 10:36
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Re : De la prédation
Maître Onirien
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De Monts du Jura -
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Bonjour Jfmoods

Tout simplement vous dire que je suis heureux de vous retrouver sur le site. Meilleurs vœux à vous également.

Je vais relire attentivement votre auto-analyse.

En attendant de vous lire à nouveau en commentaire et sur vos textes.
Sincèrement.

Contribution du : 21/01/2017 10:46
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Vivre au paradis, quel enfer !
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Re : De la prédation
Expert Onirien
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Bonjour jfmoods et meilleurs voeux pour 2017.
L'analyse de votre poème est très intéressant et certains passages sont surprenants.

Citation :

jfmoods a écrit :
Je le reconnais : l'exercice du commentaire est pour moi une drogue..


j'ai connu ça moi aussi, quand commenter devient addictif...bien que c'était sur un site de poésie où je n'avais pas besoin d'écrire de longs commentaires, j'avais bizarrement du mal à me contenter d'une simple lecture et ensuite passer mon chemin. Fallait que je commente chaque lecture c'était plus fort que moi.

Citation :

Alors, happé par la matérialité des mots, la matérialité du langage, d'un langage qui se ferait nourriture, attablé au festin des mots des autres, vous voici violemment arraché au temps


Je n'ai pas eu une telle interprétation en lisant votre poème mais votre analyse me parle. Je ne sais pas si je suis capable de reconnaître cet état mais c'était parfois éprouvant. Un côté masochiste peut-être?

Contribution du : 21/01/2017 11:27
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Re : De la prédation
Maître Onirien
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De du côté de Brocéliande
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Bonjour jfmoods et tous mes voeux pour l'année qui commence.
J'ai lu attentivement le commentaire de ton texte qui m'éclaire enfin sur la portée de celui-ci que Hersen avait déjà très justement appréhendée, ce que je n'avais pas su faire, je l'avoue.
J'aime beaucoup cette lecture en trois temps que tu proposes et à laquelle il serait bon de s'adonner chaque fois qu'on désire laisser un commentaire.
Une première vue d'ensemble du navire avant de se pencher sous la ligne de flottaison puis d'accéder aux cales et aux soutes, au précieux chargement de l'interprétation.
J'ai particulièrement apprécié cette image :
"Commenter, c'est remettre sur la table, remettre le couvert. Alors, happé par la matérialité des mots, la matérialité du langage, d'un langage qui se ferait nourriture, attablé au festin des mots des autres, vous voici violemment arraché au temps ("fait glisser l'horloge hors de vous")."

Merci encore pour ce travail dont tu nous fais partager ici un peu de la méthode et du prestigieux tissage

Contribution du : 21/01/2017 12:26
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"La poésie est aux apparences ce que l'alcool est au jus de fruit"
Guillevic
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Re : De la prédation
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Ben mon vieux, tu nous a foutu la pétoche : on imaginait déjà le pire...
Bonne année : santé, prospérité, amour et bien sûr bonheurs littéraires !!!!

Contribution du : 21/01/2017 13:07
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Re : De la prédation
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Ah heureuse de vous retrouver pour cette nouvelle année. TOus mes vœux également. On s'est fait du soucis pour vous

Contribution du : 21/01/2017 14:36
_________________
"[...] laissez-moi vous dire quatre mots magiques, véritable « Sésame ouvre-toi de l’enfance » :

Il était une fois…..

Jean Cocteau
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Re : De la prédation
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De Rhône
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Bonjour jf moods
Ravie que la période de sevrage soit terminée!
Je suis friande de vos commentaires qui m'apprennent beaucoup, surtout en poésie !

Plumette

Contribution du : 21/01/2017 17:07
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