Parcourir ce sujet :
1 Utilisateur(s) anonymes
Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Maître des vers sereins
![]() ![]() Inscrit:
11/02/2008 03:55 Groupe :
Évaluateurs Auteurs Membres Oniris Groupe de Lecture Post(s):
33387
![]() |
Bonjour à vous,
C'est un sujet où je voudrais questionner la limite entre l'application des règles de concordance des temps et le respect du sens dans la succession des conjugaisons de deux verbes dans une même phrase. Mon questionnement est venu d'une série de commentaires que j'évoquais tantôt : http://www.oniris.be/forum/so-use-dans-l-espace-lecture-t19079s0.html Citation : Le présent des quatrième et huitième vers ne concorde guère avec l'imparfait de la narration employé dans le reste des quatrains ; comme on passe au présent ensuite dans les tercets, peut-être l'ensemble pourrait-il être exprimé dans ce temps ? Citation : Le quatrième vers également m'a déplut. Citation : Dans le premier quatrain, vous faites une faute de temps. Vous devez écrire " qu'elle amortissait.... Citation : un deuxième quatrain dont la métaphore ferroviaire ne me parle pas du tout et où les temps se mélangent allègrement, etc. La question qui me venait était simple alors : mais qu'est-ce qu'ils ont mes temps ? Pour ce sujet-là, je vais reformuler ce qu'ils se passaient à travers quatre conjugaisons dans mes deux quatrains, pour ménager la tolérance à la vulgarité des uns et l'enthousiasme débridé mais peu propice à la concentration des autres, même si parfois ils sont les mêmes. Je vais le reformuler une première fois suivant le sens que je voulais présenter et une seconde suivant une interprétation des règles de concordance des temps, pour aboutir à une triple question : - La phrase bleue est-elle juste ? - La phrase rouge est-elle juste ? - La phrase bleue et la phrase rouge ont-elles le même sens ? Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertit tous les dimanches du danger. Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertissait tous les dimanches du danger. Thomas ne pensait pas à mal quand il a pris Mathieu à témoin. Thomas ne pensait pas à mal quand il avait pris Mathieu à témoin. En rouge, je voulais exprimer les règles de concordance des temps, soit : simultanéité=imparfait+imparfait et antériorité=imparfait+plus-que-parfait. En bleu, je voulais exprimer le point de vue du narrateur dans la subordonnée, d'où viendrait la confusion peut-être entre mon intention et une interprétation des règles de concordance comme seule moyen de faire se succéder correctement deux conjugaisons liées syntaxiquement. Bref, mon opinion est que toutes les phrases sont justes mais que les bleues n'ont pas le même sens que les rouges. J'ai tenté de m'appuyer sur quelques indices : Citation : Si le verbe de la principale est à un temps du passé, la subordonnée se met : http://www.synapse-fr.com/manuels/CONCOR.htm Ainsi : Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertit tous les dimanches du danger. Cela signifierait que Thomas continue de nos jours d'avertir Mathieu Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertissait tous les dimanches du danger. Ici, l'avertissement est ancien, il n'a plus lieu de nos jours. Citation : Tout comme le présent, le passé composé peut évoquer une vérité générale. Dans cet emploi, on évoque un fait qui s’est produit dans le passé et qui peut toujours se produire. Le verbe est alors généralement accompagné d’un adverbe de temps comme jamais, souvent ou toujours. http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp?id=4218 Ainsi : Thomas ne pensait pas à mal quand il a pris Mathieu à témoin. On pourrait lire : "il a (encore) pris Mathieu à témoin" Thomas ne pensait pas à mal quand il avait pris Mathieu à témoin. On pourrait lire : "il avait pris Mathieu à témoin (cette fois-là)" Merci de laisser un mot pour répondre aux trois question si ça vous dit, mais trop brièvement ça sera un peu comme de la tarte aux pommes sans pommes. Le sujet s'adresse à tous et ce qui m'intéresse serait d'avoir les critères sur lesquels se basent vos jugements, mais vous pouvez rebondir sur tout point du développement, ou sur le thème mentionné dans le titre. ![]()
Contribution du : 26/06/2014 17:24
|
|
_________________
Un Fleuve |
||
![]() |
Re : Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Visiteur
|
Bon, pardonne-moi David mais je n'ai fait que survoler tes explications. Tel le vautour inrepu, je me suis précipitée sur tes phrases bleues et violettes pour te dire mon avis du point de vue de la langue
Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertit tous les dimanches du danger. ou Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertissait tous les dimanches du danger. Les deux sont incorrectes pour la simple raison que "bien que" est suivi du subjonctif et non de l'indicatif. Il faudrait écrire Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertît tous les dimanches du danger. (imparfait du subjonctif) J'estime (avis personnel) que l'imparfait du subjonctif est tellement tombé en désuétude que, même à l'écrit, il n'est plus franchement obligatoire. On peut le remplacer avantageusement par le présent : Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertisse tous les dimanches du danger. Maintenant, on peut penser au plus-que-parfait du subjonctif qui, lui, apporte une nuance : Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'eût averti tous les dimanches du danger. La nuance est que Thomas, autrefois, voyait Mathieu tous les dimanches et, à l'époque, l'avertissait du danger de passer par le vieux pont. Désormais (dans le temps du récit), Thomas et Mathieu se sont perdus de vue (ou alors il ne le voit plus le dimanche, ou alors quand il le voit il ne lui parle plus du vieux pont et de ses dangers), mais Thomas constate que ce couillon de Mathieu, malgré les admonestations qu'il a amplement reçues il y a des lustres, et ne reçoit plus, continue à passer par le vieux pont. Il va bien finir par se noyer. Thomas voyait encore Mathieu passer par le vieux pont, bien qu'il l'avertît tous les dimanches du danger. Les deux parties de la phrase se situent dans le temps du récit : Thomas, tous les dimanches, avertit Mathieu des dangers du vieux pont, et Mathieu, toujours aussi têtu, continue à passer par là. On rejoint donc, si j'ai bien compris, la nuance que tu disais pour ces deux phrases, sauf que "bien que", en principe, n'admet pas l'indicatif. Thomas ne pensait pas à mal quand il a pris Mathieu à témoin. Thomas ne pensait pas à mal quand il avait pris Mathieu à témoin. Les deux phrases sont a priori correctes, mais la deuxième me gêne, j'essaierai de comprendre pourquoi plus tard. Dans la première, tout se passe dans le temps du récit : Thomas a pris Mathieu à témoin et, à ce moment-là, il ne pensait pas à mal. Aucun problème. Thomas ne pensait pas à mal quand il avait pris Mathieu à témoin. Là, je ne vois pas comment ça s'articule... Le plus-que-parfait de la temporelle semblerait indiquer un temps antérieur au temps du récit, mais le "quand" indique, lui, une concomitance entre le fait que Thomas ne pensait pas à mal et sa prise à témoin de Mathieu : deux signaux contradictoires qui brouillent le sens de la phrase. Je ne vois pas trop dans quelle situation elle serait appropriée... Bon, mais en y réfléchissant davantage, je crois que ça se tient dans un contexte où la principale elle-même ("ne pensait pas à mal") est antérieure au temps du récit. En élargissant le contexte : Francis repensait à l'avanie que lui avait bien involontairement fait subir Thomas. Un si bon camarade ! Francis savait que Thomas ne pensait pas à mal quand il avait pris Mathieu à témoin. Mais quand même, Francis avait été profondément blessé.
Contribution du : 26/06/2014 17:51
|
|
![]() |
Re : Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Maître des vers sereins
![]() ![]() Inscrit:
11/02/2008 03:55 Groupe :
Évaluateurs Auteurs Membres Oniris Groupe de Lecture Post(s):
33387
![]() |
Merci de ton passage, socque. Tu as bien fait de survoler le sujet jusqu'aux phrases colorées, c'est ce dont je voulais parler, mais je me rends compte dès les premières lignes de chacun de tes commentaires que je me suis trompé en reformulant les cas qui m'intéressaient : j'ai changé les articulations. Je n'utilisais pas de "bien que" et de "quand" dans les vers qui me posaient question. Il faut que je reste dans le "que+indicatif", ça m'apprendra à lire des pages de conjugaison...
Ça sera plus clair si je recommence avec d'autres exemples : Ses bras maniaient la pelle, brulés par le soleil qu'il voit tous les jours Ses bras maniaient la pelle, brulés par le soleil qu'il voyait tous les jours Elle avait de l'espoir pour ceux qu'elle a mis au monde Elle avait de l'espoir pour ceux qu'elle avait mis au monde Pour moi, les quatre phrases seraient justes et n'auraient pas le même sens. En rose, l'application des règles de concordance des temps, mais pour respecter un "temps du récit". En bleu, un "temps de narration" dans les subordonnées, une façon pour le narrateur de se mêler à l'histoire.
Contribution du : 26/06/2014 22:24
|
|
_________________
Un Fleuve |
||
![]() |
Re : Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Visiteur
|
Je serais assez d'accord ; cela dit, il faut voir comment c'est amené dans le contexte : les phrases bleues, prises isolément, surprennent à mon avis. Dans un texte, ça fonctionnerait peut-être, je ne saurais me prononcer hors contexte.
Contribution du : 26/06/2014 23:27
|
|
![]() |
Re : Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Maître des vers sereins
![]() ![]() Inscrit:
11/02/2008 03:55 Groupe :
Évaluateurs Auteurs Membres Oniris Groupe de Lecture Post(s):
33387
![]() |
Pour développer un peu, et pour ne pas que je l'oublie moi-même aussi :
Ses bras maniaient la pelle, brulés par le soleil qu'il voit tous les jours Le personnage continuerait de "voir le soleil" au moment de la narration. Ses bras maniaient la pelle, brulés par le soleil qu'il voyait tous les jours Le personnage pourrait avoir disparu, ou bien le "temps du récit" est respecté, indépendamment du sens. Elle avait de l'espoir pour ceux qu'elle a mis au monde Les personnages "survivent" à la narration : les nouveaux-nés sont vivants et leur mère également. La nuance entre ce passé simple et un éventuel présent, ça serait de ne pas insister sur la date des naissances, au contraire d'un "elle avait de l'espoir pour celui qu'elle mit au monde le 5 janvier 1982" par exemple. Elle avait de l'espoir pour ceux qu'elle avait mis au monde Le récit est révolu. Les personnages pourraient être d'une autre époque. C'est quelque chose qui me semble courant quand on évoque le passé avec ses contemporains. Pour l'emploi du présent en subordonnée d'une principale à l'imparfait au moins, il me semble que le procédé est relativement courant : "Au temps des pastels de Latour, Quand l'enfant-dieu régnait au monde Par la grâce de Pompadour, Au temps des beautés sans seconde ; Au temps féerique où, sans mouchoir, Sur les lys que Lancret dessine Le collier de taffetas noir Lutte avec la mouche assassine ; Au temps où la Nymphe du vin Sourit sous la peau de panthère, Au temps où Wateau le divin Frète sa barque pour Cythère ; En ce temps fait pour les jupons, Les plumes, les rubans, les ganses, Les falbalas et les pompons ; En ce beau temps des élégances, Enfant blanche comme le lait, Beauté mignarde, fleur exquise, Vous aviez tout ce qu'il fallait Pour être danseuse ou marquise. C'est un extrait d'un poème de Banville, la voyageuse : http://www.poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/theodore_de_banville/la_voyageuse.html La règle de concordance des temps proposerait l'imparfait pour les strophes deux et trois, mais elles portent sur un tableau admiré et une scène mythologique, deux "évènements" que l'auteur considérait sans doute comme intemporel, peut-être par opposition à la beauté de la muse, sur le modèle de la rose de Ronsard. Le poème est bien plus long, on peut lire ensuite des strophes comme : "Vous eussiez aimé ces bichons Noirs et feu, de race irlandaise, Que l'on porte dans les manchons Et que l'on peigne et que l'on baise." Là, le présent pourrait être remplacé par un plus que parfait suivant la règle de concordance, un peu comme : "Vous eussiez aimé ces bichons que nous avions porté dans les manchons" Banville fait un choix de narration pour la conjugaison, pour évoquer sans doute quelque chose dont il est contemporain, comme pour les phrases en bleu.
Contribution du : 30/06/2014 20:01
|
|
_________________
Un Fleuve |
||
![]() |
Re : Subordonnée suivant le sens ou la concordance ? |
||
---|---|---|
Visiteur
|
Je me demande s'il n'est pas question, dans le poème que tu cites, du présent dit "de vérité générale" : on met au présent parce que ce qui est exprimé était vrai à l'époque et l'est toujours, c'est une vérité intemporelle.
C'est particulièrement clair dans cette strophe : "Vous eussiez aimé ces bichons Noirs et feu, de race irlandaise, Que l'on porte dans les manchons Et que l'on peigne et que l'on baise." Les bichons, à l'époque où Banville écrit son poème, sont toujours des chiens-chiens à leur mémère, ou "chiens de manchon", comme on disait pour les petits modèles qu'une dame pouvait glisser dans son manchon. Pour les autres (strophes, pas chiens), c'est moins clair, je suis d'accord.
Contribution du : 30/06/2014 20:13
|
|
![]() |