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Re : Contraintes contrastes
Expert Onirien
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Ma femme trouve que je parle trop. Ce n’est pas complètement faux : lorsque je rentre le soir, je ne peux pas m’empêcher de lui détailler par le menu les péripéties de ma journée de travail. Les derniers potins sur les collègues de bureau, les engueulades, les vacheries, bref, le monde du travail quoi !
Elle, elle est institutrice. Très à cheval sur la discipline, l’ordre, la rigueur. Je me suis toujours demandé si elle ne martyrisait pas un peu ses petits élèves.
A part ce reproche récurrent, nous formons un couple très uni. Ma femme me dit souvent : « Si tu pouvais la boucler, ce serait la vie rêvée ! » Elle est taquine, ma femme.
L’autre jour, alors que nous promenions rue St Denis (je ne sais plus quelle course nous avions à y faire). Je me souviens, j’étais en train de lui parler d’un nouveau venu au bureau, tout jeune, tout boutonneux. Les collègues avaient déjà remarqué qu’il reluquait avec insistance le cul des secrétaires, sûrement un chaud lapin. On les remarque tout de suite… Ma femme m’interrompt au milieu de ma phrase. Elle me prend par le coude, m’introduit sans ménagement dans le sex-shop « la Sucette à la vanille » (97, rue St Denis).
« Qu’est-ce qui te prends, Irène ?
- Je ne sais pas – une idée, comme ça… »
Ignorant ouvertement le vendeur (la vendeuse ?) qui se proposait de nous guider dans nos choix, elle se dirige droit vers une vitrine qui contenait tout un assortiment de fouets, de clous, de menottes, de pinces, de tout un tas de fouillis dont je me demandais comment on pouvait bien s’en servir. Elle prend d’autorité un truc constitué d’une boule de caoutchouc grosse comme une mandarine, munie d’une sangle de caoutchouc.
« Mais enfin, chérie, vas-tu me dire où tu veux en venir à la fin ?
- Tu verras bien, mon amour. »
Je ne suis pas bégueule. Je dois dire que ces petits mystères m’émoustillaient un peu. Je n’avais jamais vu Irène faire preuve d’une telle audace, d’autant moins que je lui reprochais souvent son manque d’entrain pour la chose.
Depuis, chaque fois que mes discours la fatiguent – ça arrive assez souvent – elle se saisit de l’engin, me fourre la boule dans la bouche, la sangle autour du crâne, puis me déculotte à la manière d’un mauvais élève qu’on va punir pour son insolence. Le plus beau, c’est quand elle appelle le chien :
« Ornicar, mords-le ! »
Il le fait, ce con ! Heureusement, c’est un bouledogue : il ne parvient qu’à me mordiller les fesses en bavant de bonheur.
Je trouve qu’elle a de bonnes idées finalement, ma femme.

Contribution du : 18/08/2013 14:30
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Les honneurs déshonorent ; Le titre dégrade ; La fonction abrutit - Gustave Flaubert
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Re : Contraintes contrastes
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Est-ce que c'est ca la contrainte.

un retour de vacances apocalyptique,

stony.

Contribution du : 18/08/2013 15:01
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Re : Contraintes contrastes
Visiteur 
Bonjour, Martin,

Cette semaine, on peut choisir entre deux thèmes, ou même mélanger les deux.
Ceux-ci sont présentés au post#1020 (en gras), dans lequel il est dit aussi qu'on ne peut utiliser aucune conjonction de coordination (mais, ou, et, donc, or, ni, car).

Contribution du : 18/08/2013 15:09
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Re : Contraintes contrastes
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Le vieil homme, accoudé à son balcon, ressemblait à une cariatide qu'on aurait délivrée de son fardeau. A le voir si droit, la nuque si souple, le regard si vif, ceux qui le connaissaient auraient parié que quelque magicien lui avait rendu vingt années de vie pendant l'été. Contemplant la rue sous lui, un verre de bière à la main, un cigare rougeoyant entre les lèvres, il semblait pourtant attendre quelque chose avec une certaine appréhension. Il venait de s'éveiller d'une sieste bienfaisante. Avant de prendre son dernier repas en solitaire, il était venu sur son balcon pour jouir encore une fois du silence, de l'atmosphère de paix qui émanait du paysage urbain assoupi. Encore une fois, il se donnait raison : rester seul chez soi pour les vacances était définitivement le seul choix raisonnable !
Soudain, alors qu'il regardait les nuages jouer dans le ciel, un brouhaha terrible attira son attention : un homme vêtu de blanc s'avançait vers son immeuble. Ses yeux étaient comme une flamme, il avait dans sa main droite sept étoiles. Il criait, sa voix était comme le bruit de grandes eaux. Il avait dans sa main droite sept étoiles. De sa bouche sortait une épée. Puis dans le ciel apparut une femme enceinte enveloppée de soleil, puis un grand dragon rouge ayant sept têtes surmontées de dix cornes...
Le vieil homme ne croyait pas aux anges, moins encore aux démons. Il se frotta les yeux, vida son verre, écrasa son mégot après une dernière bouffée, versa une larme. Sous leurs apparences trompeuses, il avait su reconnaître en l'homme blanc son fils félon, en la femme enceinte sa belle-fille insupportable, en le dragon l'épouse qui tenaillait son âme depuis quarante ans. Les vacances étaient bien finies, l'enfer recommençait.

Contribution du : 18/08/2013 15:28
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"Nous oublions ordinairement qu'en somme c'est toujours la première personne qui parle."
H.D. Thoreau
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Re : Contraintes contrastes
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Pour visiter un commerce d'articles,

je vais devoir faire des photographies et comme ca je vais pouvoir écrire un texte.

Contribution du : 18/08/2013 16:01
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Re : Contraintes contrastes
Visiteur 
@ Rosebud: Je constate qu'il suffit de vous titiller du côté de la rue Saint-Denis pour que, presque instantanément, surgisse un texte. Cochon !
J'étais pris par l'histoire au point que j'en oubliasse de vérifier la conformité à la contrainte. C'est bon de ce côté là aussi. C'est le double effet Kiss-Cool. Il y a bien un "mais" ("Mais enfin, chérie [...]"), mais celui-ci me semble relever davantage de l'interjection que de la conjonction de coordination. Si un grammairien passait par là...

@ Acratopège: L'éloge de la solitude servi par un style d'où rien, comme d'habitude, ne dépasse... sauf peut-être une petite répétition ("Il avait dans sa main droite sept étoiles."). En réalité, je me demande si vous l'avez fait exprès ou non. Je trouve que cela provoque un certain effet, qui se révèle intéressant après avoir cru à l'étourderie. Auriez-vous lu "La grande peur dans la montagne" de votre compatriote Charles-Ferdinand Ramuz ? La répétition y devient une véritable figure de style, parfois intéressante, parfois écœurante, dans tous les cas intrigante.

@ Martin: Des photos pour peindre ensuite la scène en atelier, pourquoi pas, mais essaye de rester discret, tout de même.

Contribution du : 18/08/2013 17:31
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Re : Contraintes contrastes
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@stony
Étourderie, mais je suis d'accord, ça donne un certain effet ramuzien!

Contribution du : 18/08/2013 17:35
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Re : Contraintes contrastes
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Je vais essayer stony.

Contribution du : 18/08/2013 17:37
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Re : Contraintes contrastes
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@ Rosebud :

J'oubliais de vous dire un truc !
Comme pour le cas d'Acratopege, il n'y a qu'une infime chance pour que vous l'ayez fait exprès, mais je vous explique néanmoins en quoi je relie votre texte à un fragment de ma mémoire. C'est vraiment très étonnant, vous allez voir...
Comme bien souvent, ma culture n'est que très superficielle. Ainsi, si je sais ce que représente Rosebud pour Orson Welles, je crois que je n'ai jamais vu "Citizen Kane", au mieux quelques extraits.
C'est donc dans une culture plus populaire que je puise l'étonnement dont je vous fais part, car je n'ai en revanche jamais loupé un épisode de Columbo.
Dans l'un de ceux-ci, le meurtrier dresse deux dobermans afin qu'il deviennent agressifs et passent à l'attaque lorsque ceux-ci entendent un mot précis. Ceci lui permet de tuer à distance, car c'est lors d'un coup de téléphone passé à la victime qu'il demande à cette dernière de prononcer le mot fatidique, provoquant de la sorte l'attaque mortelle des chiens. Columbo, ayant démonté le stratagème, fait dresser à nouveau les chiens pour que ceux-ci, à l'écoute du même mot, deviennent cette-fois affectueux.

Savez-vous quel est ce mot ?

Je vous laisse le découvrir dans cet extrait (désolé, je ne l'ai pas trouvé en français).

Contribution du : 18/08/2013 17:55
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Re : Contraintes contrastes
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Etonnant, non?
Mais moi, mon bouledogue est inoffensif, en plus d'être con comme un bouledogue; je ne crois pas qu'il soit capable d'apprendre un mot de passe.
Cela dit, comme je l'avais déjà expliqué quelque part, je n'ai jamais vu Citizen Kane en entier non plus. Il n'y a que "Rosebud" qui m'évoque quelque chose. La raison de mon pseudo est fort simple: je l'utilise comme mot de passe pour tout et depuis je ne sais combien d'années. Comme c'est un assez joli mot, impossible à oublier et impossible à relier à ma vie privée, je le mets à toutes les sauces. Celui qui trouve mon portable ou n'importe lequel des bidules modernes que je possède a le sésame maintenant; c'est malin!

Contribution du : 18/08/2013 18:14
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