Ferrandeix,

Revenant sur le dernier vers du Dormeur du val :
« Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit »
j’ai même oublié de pointer la cacophonie rouges/zo, que je trouve beaucoup plus pénible à l’oreille que celle de Damy « propices à l’envie ». D’ailleurs, Rimbaud a tellement déstructuré la versification qu’aucun récitant de ce poème n’a jamais fait cette liaison (voir Youtube) et n’a donc jamais lu ce vers comme un alexandrin ni même comme un dodécasyllabe. Ce vers a toujours eu 11 syllabes à la lecture et pourtant, les coupes, le rythme et les silences en font un vers inoubliable.
Aviez-vous pensé à résoudre le problème de certaines cacophonies en ne respectant pas la prosodie de l’auteur et en jouant à la place sur des jeux d’harmonie et de pauses dans le vers ?
Comparant donc Damy et Rimbaud, pourrions-nous conclure ensemble au résultat du match : Damy 3 – Rimbaud 0 ?

Bellini

Je vous remercie beaucoup Bellini mais mettre 3 à 0 à Rimbaud dans une discipline sportive dont j'ignore complètement les règles relève du pur zazard

J'ai essayé de reprendre ce fil depuis le début mais j'ai été vite largué. L'écriture euphonique est une réelle discipline scientifique qui nécessite un certain niveau.
Je ne désespère cependant pas, tout ce qui peut améliorer la qualité de l'écriture m'intéresse et je me replongerai à mon rythme dans ces cours. Il m'a fallu du temps pour ingurgiter le traité de Sorgel dont je suis encore loin de maîtriser toutes les finesses.

Merci, en tout cas, d’œuvrer pour éviter les cacophonies désagréables à l'oreille.
Dans l'ensemble de ma production, Rimbaud doit bien me mettre 5/0.

Bonjour,

Moi, Rambo me met toujours KO, au moins 1000/0 !!!

Heu..., j'aurai une question. J'ai écrit un vers qui ressemble à un alexandrin, mais qui a peut-être (entre autres) un problème euphonique :

"Cette éclatante rose éclose au mur du champ."

"éclose" pose éventuellement un problème.
Est-ce que quelqu'un(e) peut me conseiller ?

Merci !

par avance.

Bonjour Luz,

Je ne vois ni n'entends un quelconque problème. Votre alexandrin est fluide, il joue sur des assonances agréables "ose-ose- placées sur la charnière de l'hémistiche, les élisions "cette_éclatnate" et "éclose_au mur du champ" contribuent à l'harmonie du vers.

Mais en tant que novice, je laisse la priorité des observations au maître en matière d'euphonie, Ferrandeix, ainsi qu'à d'autres participants que cela intéresse.

Bien cordialement,
Cristale

Merci beaucoup Cristale !

Je suis rassuré sur ce vers, important pour moi dans un poème que j'écris en ce moment.

Très bonne journée !



Luz

Bonjour Luz,

"Cette éclatante rose éclose au mur du champ."

Je ne vois dans cet exemple aucune cacophonie, qu’on aurait par exemple avec :
« Cette éclatante rose ose narguer le champ »
La reprise de la rime ose, assimilée ici à une assonance identique, est séparée par le groupe écl qui empêche précisément la cacophonie. Par contre, la position des accents toniques reste importante pour la qualité harmonique du vers. En fait, il y a deux façons de lire ce vers :

« Cette éclatante rose//éclose au mur du champ »

Ou

« Cette éclatan/te rose éclose/au mur du champ »

à la manière d’un trimètre hugolien. On obtiendrait le même résultat rythmique en changeant le mètre :

« Cette éclatante
rose éclose
au mur du champ »

Dans la première version on a un accent tonique marqué sur « rose » et un autre sur « éclose », donnant un équilibre parfait au vers. Dans la version trimètre, l’accentuation marquée sur « rose » disparait, c’est comme si on lisait :

« Cette éclatan/te roséclose/au mur du champ »

qui modifie littéralement l’harmonie du vers. Personnellement, dans le cadre d'une suite d'alexandrins, je préfère largement la première version avec césure. Et si je voulais vraiment que les lecteurs ne le lisent pas autrement, je le marquerais par une virgule à la césure :

« Cette éclatante rose, éclose au mur du champ »

Simple avis.
Bellini

Merci beaucoup Bellini !

Oui, je préfère également la première solution. Je ne pensais pas qu'on pouvait lire le vers autrement.
Je me demande si la virgule n'est pas trop forte. Mais c'est très intéressant : il faut en tout cas marquer une pause (une sorte de mini-virgule ?) en milieu de vers...


Très bonne journée !

Luz

Personnellement je ne mettrais pas de virgule, l'hémistiche est sensé marquer une légère pause, le temps d'une respiration.

Bonne journée à vous Luz et Bellini.

Cristale

Cristale, Luz,

Je suis bien d’accord avec vous pour se passer de la virgule, mais Cristale, lorsque vous parlez d’hémistiche, c’est que vous considérez à priori que le lecteur lira un 6/6 et non un 4/4/4. Mais bon, peu de lecteurs, il est vrai, découpent un vers en trimètres lorsqu’une césure est visible… Ils ont plutôt tendance à voir une claudication quand ils ne repèrent pas la bonne cadence.
Je voulais juste préciser l’importance de l’accentuation des syllabes, qui est à la base de la prosodie classique (et même de quelques règles concernant l'élision, par exemple), donc de l’harmonie et du rythme des vers. Je sais que vous savez que le classique ce n’est pas juste une question de rimes, d’élisions ou d’hiatus. Lorsque l’auteur a compris cette notion de coupes à l’intérieur de l'alexandrin, alors il a gagné un degré dans la maîtrise de son art. Ecrivez un poème entier en coupes 3/3/3/3 et faites-moi signe si vous ne vous êtes pas endormis au milieu.

Luz, j’espère qu’on ne vous pas dégoûté du classique…. Votre poème sera une réussite, je n'en doute pas.

Cordialement
Bellini

Merci Cristale et Bellini !

Pas de problème ; j'essaie, petit à petit, d'enregistrer les codes du classique. Mon poème sera présenté plutôt en néo-classique ou contemporain (mes rimes sont bien pauvres...)

Encore merci !

A+