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2 Utilisateur(s) anonymes
Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Oh dommage, Poldutor... Mais vous vous serez amusé à écrire...
Autant prendre les choses du bon côté !
Contribution du : 30/03/2022 19:06
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Perso, ça m'aurait arrangée dimanche pour l'échéance. Samedi soir, ça va être compliqué...
Contribution du : 31/03/2022 16:02
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Ça me paraît compliqué cependant de changer en cours de semaine alors certains se sont arrangés avec cette échéance. Chacun, en effet, pourra ouvrir le bal dès 20 h.
La prochaine fois, on pensera à inclure un dimanche 😊
Contribution du : 31/03/2022 18:30
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Maître Onirien
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Bonsoir Lulu
Finalement, bonne nouvelle (pour moi) je vais pouvoir mettre mon historiette! A samedi 20 heures. poldutor
Contribution du : 31/03/2022 20:17
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Super, Poldutor !!!
Contribution du : 31/03/2022 20:25
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Si vous avez un peu de temps pour écrire aujourd'hui... N'hésitez pas...
Chez moi, il neige depuis hier 😊 On pourra publier sur ce fil à partir de 20 h ce soir et jusqu'à 23h59 au plus tard 😊 Au plaisir de vous lire !
Contribution du : 02/04/2022 09:27
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Nouvelle de Vero que je poste en son nom.
Et changer de vie. Il faut que je lui dise, il en va de ma conscience et de mon bien-être moral. La nuit fut épouvantable, entrecoupée de cauchemars, réveils en sursaut, transpiration excessive et palpitations. Je n’ai rien avalé ce matin, pas même un café; pas le temps, l'appétit coupé, le moral dans les chaussettes. Je dois rejoindre mon père à l’aéroport d’Orly pour l’inauguration d’une troisième grande bijouterie joaillerie à Madrid dont je serai, selon ses désirs, la gérante. Mon avenir professionnel est, hélas, minutieusement programmé, et ce, depuis le berceau: Suivre les traces du patriarche sans broncher, intégrer l’école des arts joailliers, suivre une formation commerce et management pour, dit-il, prendre sa relève. J’ai suivi mes études avec succès, mais sans réelle passion et surtout sans motivation. Obéir, il me faut obéir, même si mes objectifs professionnels sont à l’opposé des siens. Je me souviens d’un réveillon de Noël particulièrement agité : J’avais quatorze ans et je rêvais d’intégrer un lycée hôtelier après l’obtention du fameux Brevet des collèges. Ma mère, femme au foyer, a toujours aimé cuisiner pour le plus grand plaisir de nos papilles. Un vrai cordon bleu ! Enfant, j’étais constament accrochée à ses jupons et je l’aidais, comme je pouvais, mais toujours avec plaisir et curiosité, à préparer les repas.La cuisine est un art gustatif et visuel que je voulais découvrir à tout prix. Entre la dinde et la bûche pâtissière, la discussion dévia autour de la poursuite de mes études. Le moment était bien choisi pour leur faire part de mes vœux . Après tout, c'était Noël et papa n'oserait pas refuser ma demande devant une dizaine d'invités, fussent-ils de la famille! Je crois n’avoir jamais vu mon père entrer dans une telle colère sous les yeux impuissants et embués de maman.Il était pâle comme un linge, et son coup de poing sur la table fit trembler les murs, la vaisselle et les convives, aussi. Un long silence et surtout un grand malaise s'en suivirent . Ma mère n’avait guère son mot à dire, comme toujours... Le patron, c’était lui, et pour le Lycée hôtelier, c’était NON ! L'affaire était définitivement classée sans suite et la fête terminée. Nous n'en avons plus jamais parlé. La semaine dernière, alors que je surfais tranquillement sur le web, j'eus l'idée soudaine de rechercher une formation pour adulte, loin, très loin de la France, dans mon domaine secrètement rêvé . Et bingo ! Un établissement de renom et semble- t-il bien noté en Australie, à Sidney pour être précise, proposait une formation diplômante en hôtellerie-restauration. Les prix étaient exorbitants, mais qu'importe, je gagne bien ma vie et j'ai pu épargner suffisamment d'argent pour m'offrir ce qui, pour moi, est l'opportunité à ne pas rater ! Comble du hasard, un avion décollerait de Roissy le même jour que celui d'Orly, en fin d'après-midi. Étrange coincidence... Mais mon enthousiasme a bien vite cédé sa place à cette réalité beaucoup moins réjouissante : Mon père, ses projets, pour lui-même bien sûr, et pour moi, évidemment. Il serait déçu, rouge de colère- comme ce fameux soir de Noël- si je déclinais son offre soi-disant alléchante. Ben voyons ! Un cadeau empoisonné ! Je ne peux pas le trahir même si, à vingt-huit ans, j'ai la certitude d'avoir gâché ma vie avec cette existence insipide où seule ma lâcheté ne m'a pas permis de vivre de ma passion. Partir...je veux partir, m'épanouir, être heureuse, enfin ! Non. Hors de question d'en parler, ce sujet est tabou, oublié, enterré. Pense à autre chose, sors toi cette lubie de la tête une bonne fois pour toutes ! Ton destin est scellé, Basta! Le taxi vient d'arriver pour me conduire à l'aéroport. À peine le temps de rassembler mes affaires et je sors, l'estomac noué, le cœur serré et l'angoisse à son plus haut niveau. Dans quel pétrin me suis-je encore fourrée? Pourquoi l'ai-je laissé choisir mon futur logement, organiser le déménagement? Mon Dieu quel gâchis! Je me sens comme prise dans un engrenage vicieux, pervers et sans fin, comme une mouche emprisonnée dans les filets d'une immense toile d'araignée et qui se débat tant qu'elle peut pour échapper à son prédateur. Sur la route, je ne cesse de penser à cet établissement prestigieux, j'imagine ce que serait ma vie là-bas si...Ah! Si seulement... -"Et puis merde à la fin ! Oubliez l'aéroport d'Orly, faites demi-tour dès que possible et conduisez-moi, s'il vous plaît, à Roissy-Charles de Gaulle"...
Contribution du : 02/04/2022 20:08
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Les enfants d’hier
Adèle a depuis longtemps exploré la nuit. Son expertise n’est plus à prouver. Les mamans le savent. Ce soir, une jeune femme qu’elle a préparée à patienter face aux premières contractions, lui a jeté une forte colère à la figure lorsqu’elle l’a renvoyée à la salle d’attente, voire chez elle. « Le col n’est pas ouvert… » avait-elle insisté. Adèle s’est alors mise à faire des calculs. « Quel âge peut donc avoir le premier enfant que j’ai aidé à venir au monde ?... Mon Dieu… » En regardant par la fenêtre de son bureau, elle voit, comme à son habitude les réverbères allumés depuis le centre-ville. La maternité surplombe la vallée à mi-hauteur, juste au niveau d’un replat où chaque matin, les nouvelles mamans peuvent oublier l’environnement citadin. Les yeux sur le nouveau jour ; l’enfance à peine née, déjà ancrée dans l’avenir d’une vie heureuse ou tourmentée. Si Adèle songe parfois à quitter sa fonction de sage-femme, c’est souvent dans le flux de cette cadence folle qui la fait vivre le jour et la nuit. Son mari, en définitive impatient, l’a quittée il y a quatre mois pour clore leur lourde procrastination face à leurs perspectives de vacances. « Ce n’est pas ce que nous avions choisi en nous mariant » lui avait-il assené fréquemment au cours des années. Adèle part au bout du monde et partout sur la Terre pour participer à cette éclosion de la vie qu’est la naissance. Engagée dans « Médecins sans frontières », elle vit au moins deux fois par an à l’étranger, et à un rythme aussi effréné quand elle reste dans les Monts d’Arrée. Gaël, son mari en a eu assez, ne voyant plus l’intérêt de rester auprès d’une trop absente. Il l’avait aimée dans son engagement qui l’avait tant séduit au début, mais plus assez pour endurer cette jalousie qui le gagnait parfois lorsqu’il se comparait à ses amis qui menaient un quotidien plus classique avec des enfants. Cette nuit, donc, Adèle a renvoyé une jeune femme chez elle… « Ne vous inquiétez pas. Faites exactement comme je vous l’ai expliqué ces dernières semaines. » Au cœur de ses réflexions, face à la fenêtre éclairée du dehors, elle ressent tout à coup une forme de légèreté qui la détache de tout, ou presque… « Et si je partais voir mon cher père ? ». Il vit à des centaines de kilomètres de là, et sans se dire qu’elle est négligente, elle ne le voit à peu près qu’une fois tous les deux ans. Lui sait bien qu’elle dispose de peu de temps et qu’elle voue sa vie aux autres. Fier d’elle, il se contente de ses rares visites à Lyon. Elle décide de réserver un billet de train pour le lendemain. Une collègue s’occuperait de la jeune femme en colère. Après tout, il n’y a aucun risque. « Pas de césarienne en vue. » A l’aurore, lorsque le train démarre, Adèle revoit son enfance. Son père, âgé maintenant de près de quatre-vingt-huit ans, lui a dit un jour qu’elle réaliserait sûrement ses rêves. Peut-être l’aime-t-elle autant pour cela en particulier. Il l’a toujours portée et son soutien lors de ses études avaient été manifeste. Rien à voir avec sa mère toujours autocentrée et si peu ouverte à la vie de son entourage. Lui en veut-elle un peu, beaucoup, pas tant que ça ? Elle a heureusement son père. « Ce qu’il a dû changer… » se dit-elle, toujours soucieuse de le retrouver en paix et loin des querelles d’emplois du temps qui animent de façon dérisoire son quotidien. A Dijon, le train s’arrête quelques minutes. Une famille, dont une fillette d’environ cinq ans, monte et s’installe à son niveau. Très vite, Adèle remarque qu’on a préparé des repas pour le déjeuner. La petite fille dit vouloir déjà manger le gâteau au chocolat. « C’est pour le dessert, tout à l’heure », lui répond sa mère. En franchissant un tunnel, la lumière du train s’allume et fait sourdre un bruit durant quelques minutes, longues et opportunes. - « Comment t’appelles-tu ? » demande Adèle à la petite fille assise face à elle. - « Adèle. » - « Adèle ? Mais moi aussi, je m’appelle Adèle. C’est incroyable ! » La petite fille lui sourit et lui répond que c’est la première fois qu’elle rencontre quelqu’un qui se prénomme comme elle. Elle avait toujours cru que son prénom était original. - « Moi aussi, c’est la première fois que je rencontre quelqu’un qui porte le même prénom que moi… Tu aimes les voyages apparemment. C’est bien… Dis-moi, que veux-tu faire plus tard, quand tu seras grande ? » Les parents, tranquilles, observent en souriant, surtout la mère qui semble inciter sa fille à répondre à leur voisine de voyage. - « Je veux être hôtesse de l’air ou pilote d’avion. » - « Tu as déjà pris l’avion ? » - « Non, mais avec mon grand frère, on compte les avions quand on les voit passer dans le ciel. Il paraît que lorsqu’on voit leur trainée blanche, ça veut dire que quelqu’un pense à nous. » - « Quel âge as-tu ? » - « J’ai bientôt six ans » répond la petite Adèle. Contente de discuter avec la petite fille, Adèle en oublie presque les contraintes du voyage. Elle ira au wagon-restaurant se chercher un sandwich ou une salade. Dans les pays qu’elle traverse, souvent, elle voit des gens aux personnalités si différentes et si communes, qu’elle se sent ni plus ni moins ordinaire. Pourquoi Gaël, son mari l’a donc quittée, elle se le demande encore. Après tout, il savait bien qu’elle travaillerait comme sage-femme et qu’elle s’engagerait auprès de « Médecins sans frontières » dès leur rencontre. A-t-elle raté quelque chose ? A-t-elle manqué leur projet de vie ? Est-elle si absente ? En ressassant, elle réalise qu’elle ne connaît rien de la vie des enfants qu’elle a vu naître. Bien souvent, et depuis le début de sa pratique de sage-femme, les mamans lui laissent une photo de leur nouveau-né. Rares sont celles qui se souviennent d’elle lorsque les enfants ont déjà quelques années. Au dehors, les paysages défilent à toute vitesse, mais à l’horizon se trouve son propre reflet. Le temps de passer à autre chose lui semble presque évident maintenant qu’elle est vraiment seule. « Quelle absurdité, quand même, se dit-elle, si au moins je pouvais comprendre notre chemin… » « Je veux être hôtesse de l’air ou pilote d’avion » avait dit la petite fille. Quelle belle perspective dans cette alternative. Ce sera l’un ou l’autre, pour le moment, en tout cas… Adèle se prend à rêver de tous ces enfants qu’elle a vu naître et qui mènent des vies qu’elle ne connaîtra jamais. Sans se sentir démiurge ou maîtresse de cette humanité partie vivre de ses propres ailes, elle se dit qu’elle n’aura pas été grand-chose, tout juste une passeuse de la vie intra-utérine à l’air libre. « Je veux être hôtesse de l’air ou pilote d’avion » se répète-t-elle, se disant qu’elle pourrait elle aussi être un peu plus actrice du voyage des longues distances, comme s’il était possible de servir une partie du monde dans les hauteurs. « Ce n’est pas rien, tout de même » réalise-t-elle en même temps. « Quelle joie de voir les nouveaux parents accueillir leur enfant, quand ce n’est pas des jumeaux ou des triplés… » Ses collègues la confortent souvent dans sa mission de sage-femme. Elle n’aurait pas aimé être gynécologue ou infirmière. Pourtant, dans cette routine, qu’elle suppose pour la majorité des activités professionnelles, le constat de quelque chose qui se serait installé de façon quasiment mécanique lui parait insolent. Elle est tout de même dans une posture de concourir à la mise au monde, parfois aux forceps, des nouveau-nés. « Dire que je voulais être maîtresse quand j’étais petite fille… » En suivant le fil de ses pensées, Adèle se souvient qu’Elisa, sa meilleure amie, est restée fidèle à son premier vœu. Elle était professeure des écoles et semblait heureuse de préparer des leçons sur les volcans ou de montrer aux enfants comment pouvait naître un papillon. Au-delà de se sentir utile, Adèle se dit que chaque jour est un ensemble d’heures où il ne faut rien perdre. Or, combien de temps passe-t-elle à donner des rendez-vous aux futurs parents, et aux futures mamans ? Combien de temps passe-t-elle à négocier avec les collègues parfois récalcitrants le planning de la semaine ? S’il n’est pas si dérangeant de travailler la nuit, cela lui coûte quand même maintenant un clair divorce. Elle se souvient de certains pays traversés où elle amenait les futures mamans au calme et à la sérénité pour les préparer à leur accouchement. Les salles sans vie, sans peintures douces aux murs, ni décorations pastelles. Elle se revoit, oubliant combien de mamans et d’enfants en même temps, couper le cordon ombilical partout identique. Arrivée à la gare de Lyon Perrache, Adèle sait que son intuition relève d’une évidence. « Je m’occuperai des enfants, des garçons comme des filles, lorsqu’ils seront devenus des hommes et des femmes grabataires. » Son père, loin d’être une personne dépendante, comprendra sûrement son souhait de reconversion. Il a toujours été là. « Pourquoi ne pas changer ? Après tout, ce sont les enfants d’hier… » 8892 caractères espaces compris
Contribution du : 02/04/2022 20:10
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Maître Onirien
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Chic! le défi, c'est parti!!
Bifurcation C’est venu petit à petit, avec la fatigue. Sûr que la pandémie a précipité tout cela, la désorganisation, je devrais dire désorientation plutôt, on a perdu le nord, on a perdu le sens, toujours parer au plus pressé, plus le temps de penser, des vagues qui montent, l’indignation devant ceux qui se défilent, l’impuissance devant la détresse des familles privées d’accompagner leurs proches, ces règlements à la con qu’il faut faire appliquer, l’agressivité de ceux qui nous croient responsables de ces inepties, la peur de l’erreur sous la pression. Sûr que les applaudissements aux fenêtres n’ont pas suffi à effacer les nuits sans sommeil, les oreilles vrillées par les bips, la vision des brancards alignés dans les couloirs, on a tenu parce qu’il le fallait, on était en pleine tempête, on s’accrochait les unes aux autres pour ne pas couler, le cœur en guise de bouée, à repenser à tel ou tel qu’on avait pu aider, rassurer. C’est après, quand ça s’est calmé, que je me suis mise à douter. J’ai essayé des trucs, la sophrologie, les balades en forêt, un groupe de paroles, j’ai cru que sa pourrait me suffire pour retrouver une unité intérieure, un apaisement. Dans le groupe, lorsqu’ il fallait se fédérer autour de visions positives, j’étais muette. Je restais avec ma colère, ne sachant à qui l’adresser. Petit à petit, j’ai dû reconnaître, admettre que je n’y croyais plus. A quoi est-ce que j’avais cru d’ailleurs ? Même ça, j’avais du mal à le formuler. J’ai commencé à me demander si j’avais vraiment choisi d’être infirmière. Je me suis souvenue de ma préparation au concours, des notes griffonnées sur une feuilles pour tenter de mettre au clair mes motivations. A dix-huit ans, J’avais hâte d’être dans la vie active et le mot active me semblait avoir tout son sens avec un tel métier. Je voulais mon indépendance, ne pas galérer pour trouver du travail, et l’essentiel, du moins ce que je croyais à l’époque, c’est que j’aimais les gens et que j’avais une âme de Saint Bernard , ce bon gros toutou montagnard à l’instinct de sauvetage bien développé. Quitter cet univers , cette confrontation quotidienne à la fragilité de la vie , ce n’est pas une trahison quand même ! Trop de stress, trop de décalage avec mes potes du lycée que je ne vois plus. On ne se fréquente qu’entre infirmières, à parler trop souvent boulot, planning et humiliations. Les choses ne sont plus comme avant, l’altruisme, le dévouement, le soin aux autres, ce sont des mots devenus creux qui ne vibrent plus pour moi. Je crois que je voudrais pouvoir accueillir un enfant. Mais quelle place pour lui dans ce chaos ? Retrouver ma confiance d’abord... *** J’ai osé. Stop ! J’en suis sûre maintenant, j’arrête ! Depuis que j’ai décidé, ça va mieux. Là je suis dans le sas de décompression. Un temps pour ouvrir mon horizon. J’ai quelques mois, grâce à pôle emploi. La question de la « reconversion » je la laisse flotter pour l’instant, je vis au ralenti, je devrais plutôt admettre que je vis enfin normalement. *** Dimanche, je suis allée chez Mamilou à La Pesse . Son accueil tout simple et sans question m’a fait chaud au cœur. On a mangé au coin du poêle, lentilles et saucisse de Morteau, et son fameux flan fait avec les œufs de ses poules. Après le repas, elle s’est assoupie dans son fauteuil, je me suis levée doucement et suis allée fureter dans l’atelier de Papilou? On n’a rien touché depuis sa mort, l’ été dernier. Papilou avait au moins trois métiers : éleveur, moniteur de ski et sculpteur sur bois Entre l’étable, les prés, les vallons enneigés et l’atelier j’ai passé ici , en toutes saisons, avec mes frères, des vacances d’une richesse qui n’a rien à voir avec l’argent. Papilou m’a initiée à la traite, à la conduite du tracteur, au ski de fond et aux outils à bois sans faire de différence avec mes frères et j’en était fière. A l’atelier, il me trouvait habile. Toi, t’as le sens du bois, disait-il. Un été j’avais appris à manier les gouges et l’année d’après j’avais sculpté de petites branches de laurier sur un beurrier pour la fête des mères. Il fabriquait des statues de Saint sur commande, des vierges naïves, on le demandait pour des restaurations dans des églises et on lui avait même confié la réalisation d’un chemin de croix, 14 panneaux pour les quatorze stations, ça l’avait occupé pendant plus de deux ans. L’atelier, c'était un un vrai capharnaüm empoussiéré ! Papilou gardait tout parce que ça peut toujours servir. Petite , je devais toucher seulement avec les yeux, jusqu’à ce que, promue arpette, j’ai eu le droit de passer la balayette et de ranger les bouts de bois par taille, épaisseur, couleur. Puis j’ai eu accès aux gouges , aux maillets, à la colle. Papilou était aussi un genre de menuisier, il faisait des bancs, des manteaux de cheminées, des portes de placard. Je le regardais, un peu effrayée, passer les pièces dans la scie à ruban, et quelle promotion le jour où j’ai eu le droit de me servir de la ponceuse ! L’odeur de l’atelier me replonge dans cette sensation inouïe du temps arrêté lorsque je « bricolais » à ses côtés. Je suis là, rêveuse, à contempler ce décor où il y a tant à regarder , lorsque je sens la présence silencieuse de Mamilou derrière moi. Elle s’avance doucement - Ah ma petite Margot, je savais bien que je te trouverais ici ! *** La conseillère de pôle emploi est plutôt dubitative. - Le stage est un pré requis pour l’accès à cette formation et ça va pas être facile de trouver quelque chose, je préfère vous le dire ! il va falloir chercher de votre côté, nous on a absolument aucune offre dans ce secteur. Et puis, vu votre parcours et votre âge, il vaut mieux vous confronter à la réalité du métier. Margot n’est pas vraiment étonnée du manque d’emballement de sa conseillère. Elle s’en fiche, ce qui compte pour elle, c’est d’être financée pour sa formation, un CAP d’ébénisterie en un an, une formation plutôt généraliste pour commencer , c’est cette garantie d’un revenu, même modeste qu’elle est venue chercher aujourd’hui. Margot se sent tous les culots. Elle a répertorié dans l’annuaire en ligne tous les ébénistes et/ou sculpteurs dans un rayon de 30 kilomètres, elle va commencer sa tournée dès demain. Elle a décidé de se déplacer, d’aller sonner aux portes plutôt que de tenter d’obtenir des rendez-vous par téléphone. Elle s’attend à beaucoup de refus, mais elle se dit qu’il suffira d’un seul oui ! Elle a passé du temps à chercher sur le net des « profils » de travailleur du bois, du sculpteur plutôt artiste qui cherche à vendre ses œuvres à l’unité et organise des stages, à l’artisan genre Papilou, elle a aussi découvert des débouchés auxquels elle n’avait pas forcément pensé comme créateur de décors pour le théâtre, restaurateur de meubles anciens, elle a éliminé tout ce qui utilise trop la série , menuisier, agenceur, conservant tout de même l’option « jouets en bois », peut-être un peu marginale ,on verra bien, son petit carnet est rempli de notes , mais pour ce stage, elle prendra ce qui se présente, elle est prête à accueillir les surprises, les bonnes bien sûr parce qu’elles ne pensent plus aux mauvaises. Dans le coffre de sa voiture, en guise de fétiche porte bonheur, elle conserve les douze gouges anciennes que Mamilou lui a donné, soigneusement roulées dans un bel étui en cuir patiné.
Contribution du : 02/04/2022 20:10
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Re : Défi de nouvelles n°6 : Un changement de métier |
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Organiris
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Conte des zoizeaux pour les oiseaux
Je suis chanteur de zoizeaux dans un palais. J’avais des prédispositions, étant rêveur et zézayeur. Un prince très riche avait dans son palais des milliers de cages dorées, joliment tarabiscotées et avec une chaîne en tungstène par lesquelles elles étaient accrochées au plafond. Le prince m’a engagé car il ne retirait pas de ses oiseaux le plaisir escompté. Il les avait achetés aux quatre coins de la Terre, du temps où ça l’amusait encore de mener lui-même sa barque dans tous les ports, un énorme rafiot noir qui se traînait chargé sur les mers. Avec un nom en grand peint à la poupe. Ces zoizeaux multicolores étaient supposés chanter du matin au soir, mais le prince remarqua que de jour en jour les notes s’effilochaient. Il m’a donc embauché après avoir épluché mon CV, que je lui chantai sur plusieurs tons. Il fut séduit et je devins chanteur de zoizeaux. Je venais le matin et je passais de cage en cage, nous faisions nos gammes, puis j’inventais des jeux, des canons, des trilles et je me suis tant démené pour mon travail qu’en peu de temps, le palais de nouveau fut lieu de concert permanent. Le prince, vraiment très content, me payait bien. J’en étais déjà à remplir mon deuxième coffre de billets tout neufs. Un matin, tout guilleret comme à l’accoutumée, j’entrai dans la salle aux zoizeaux. Comment décrire l’émotion, quand on est simplet comme je le suis, simple zézayeur de zoizeaux ? Les larmes me sont tout de suite monté aux yeux. J’avais devant moi un spectacle atterrant. Tous ces zoizeaux s’étaient arraché des plumes. Le spectacle était saisissant en ceci que non seulement ces plumes étaient plumes, mais elles étaient en plus si multicolores, si joyeuses par elles-mêmes, en tout cas pour mes yeux, que je n’ai pas d’emblée compris le message des zoizeaux. Un message terrible tandis que {neigeaient} des plumes et des plumes et des plumes brillantes, bigarrées, floconnant le sol : Libère-nous, toi seul peut le faire. Libère-nous si tu nous aimes ! Faut-il tant de temps pour trouver une action juste ? Faut-il réfléchir ? Sans doute. Je me suis assis sur un des mes coffres à billets – j’avais été augmenté il y a peu pour compétence exceptionnelle en chant de zoizeaux – et je baissais les yeux sur un sol richement carrelé aux dessins élaborés par les plus grands artistes. Les zoizeaux se taisaient, respectant ma pensée, continuant néanmoins de s’arracher les plumes. Quand j’eus fixé le savant carrelage suffisamment longtemps, que j’eus considéré le beau de ce monde, je découvris qu’il n’était en fait que question. Que devais-je faire ? Le travail pour lequel je m’enorgueillissais d’être si hautement payé valait-il le bonheur des zoizeaux du prince ? Les fesses plus lourde que du plomb, dont un kilo ne vaudra jamais la valeur de ces plumes dans mon cœur, je me suis levé. Puis j’ai ouvert les cages, une à une, et laissé les zoizeaux s’envoler. De ma vie je n’ai jamais été si ému, le spectacle de ces zoizeaux déplumés m’a renversé l’âme. Ils avaient tout sacrifié, sauf les plumes de leurs ailes. Ils ont cru en moi. Je n’ai pas de mots aujourd’hui encore pour m’être senti autant en osmose avec eux à ce moment, au-delà des mes chants {zézayants}. Il fallait maintenant que je me libère moi-même, le prince sera si furieux qu’il me coupera peut-être la tête. J’ai tenté d’ouvrir les coffres, mais pas moyen : ils étaient verrouillés. Impensable de les emporter, il étaient de toute façon scellés au sol magnifique. Je n’avais plus rien, sauf ma tête. Je me mis donc à courir pour la garder, j’ai couru aussi loin que j’ai pu lorsque je me suis écroulé sur une plage. J’ai dormi longtemps, je crois, et des clameurs mécontentes m’ont réveillé. Abasourdi, j’étais au milieu des gens affairés traînant des grands sacs derrière eux et ramassant quelque chose que je ne pouvais identifier. Le sable gluant collait, et des poissons, des coquillages, des… zoizeaux ? etaient prisonniers d’un magma noir. Je voyais des silhouettes en contrejour sur les rochers, penchées dans ce qui semblait être une tâche méticuleuse. Debout enfin, on me bouscula. Excuse, entendis-je. Je tournais comme une toupie au ralenti, et j’ai fini par comprendre qu’il me fallait à moi aussi un sac. Ma vie venait de prendre un tournant, je mis les mains dans le cambouis. Et juste avant de me pencher pour ramasser ma première galette de brut persillée de grains de sable, j’ai vu au loin, sur la mer, un gros bateau noir, le Rakham le Noir du prince. Cassé en son milieu et se vidant de sa cargaison. Le prince finalement ne m’avait pas coupé la tête. Il avait fait pire, il me l’avait laissée pour que je sois témoin de sa vengeance. Je me suis dirigé vers les rochers. Je n’avais plus le temps de pleurer ou quoi que ce soit d’autre. Un volontaire était en train de nettoyer un oiseau qui n’était plus qu’une masse. Il avait des gestes très doux pour débarrasser l’oiseau de cette infection d’or noir. L’oiseau avait de temps en temps un soubresaut. Le nettoyeur m’expliqua qu’il fallait en premier s’occuper du bec, pour que l’oiseau puisse respirer. Puisse chanter, ai-je immédiatement pensé, puisse chanter. Le nettoyeur de zoizeaux m’a tendu cet être si fr^le sous cet habit noir. Sois très doux, dit-il, je ne pense pas qu’il survivra. Je l’ai pris dans mes mains, son œil rond me regardait. Il avait reconnu le chanteur de zoizeaux, il avait reconnu son libérateur. Alors, bien que maintenant dans le cambouis, je n’ai pas oublié mon premier métier. J’ai chanté, mezzo voce, pour lui et ses frères, un air nouveau. Un air qui ne venait pas du palais, un air qui venait du fond de moi. Je décidai de rester dans le cambouis, il y avait un énorme travail. Et je chanterai, de temps en temps, pour pour les zoizeaux. J’entendis rire au loin sur la mer. Le prince, sur un de ses autres Rakham des mers, repartait pour une autre cargaison. Mon travail ne finira jamais.
Contribution du : 02/04/2022 20:15
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