Dès qu'elle le vit, la poule fut prise d’un désir incoercible. Se dandinant, elle passe et repasse devant lui, l’aguiche, lui lance des regards fallacieux, allant même jusqu’à glousser de manière sirupeuse.
C’est qu’il a tout pour plaire : une peau que l’on devine velouteuse sous ses plumes aux couleurs orangées, rouges et azurées, un regard magnétique et, grain de maïs sur le gâteau, un chant moelleux.
Elle les imagine dans le champ voisin, faisant des cabrioles sous l’œil envieux des étamines ou s’offrant à lui sur la rocaille.
Ne tenant plus, elle s’arrête enfin et, en position de bascule, lui présente son croupion.
Jusque là impassible, le goupil, qui se félicite de prôner la ruse comme doctrine, tombe alors le déguisement et croque la poularde.

joli, Faolan

Mesdames, méfiez-vous des bellâtres... on en vous le dira jamais assez.

Son tempérament fallacieux, sa peau d’écailles au toucher velouteux et ses iris de chat aux reflets azurés en ont fait l’un des prédateurs les plus redoutés. D’entre les rocailles, seul le Goupil éclairé peut le mettre en déroute d’une de ses agaçantes cabrioles. Néanmoins, lorsque sa tête fuselée effleure les étamines d’une fleur sauvage ou qu’il se tapit dans le moelleux des hautes herbes, et qu’une proie tend sa gorge palpitante à ses sens, le besoin incoercible de mordre le pousse à frapper. Une fois suffit, la victime se débattra en vain, mais son venin la paralysera. Alors, elle entreverra le regard magnétique de son agresseur au corps longiligne et ocellé avant d’expirer. Les sucs sirupeux de son organisme auront vite fait de dissoudre les ultimes traces d'une existence trop insouciante. La doctrine du serpent est de ne laisser que quelques plumes ou poils sur les lieux de la mise à mort. Repu, l’ophidien se retira de la scène de chasse, il se terra sous la bascule du terrain de jeux de vos enfants.

Le pauvre bouvreuil sifflait son triste refrain journalier. Statique sur son perchoir, il regardait l'aéroplane au vol hasardeux en songeant à la façon rocambolesque dont il pourrait s'évader. Peut-être une saignée dans le sol en bois de la cage ? Non, c'était utopique. Son bec ne résisterait pas à l'impact.

Je ne suis pas spécialement joueuse, mais les défis de ce type me stimulent les neurones... une vraie gourmandise pour mon petit cerveau

Un peu long mais bon...

Professeur,

Par la présente, permettez-moi de vous signaler qu’il devient utopique, voire hasardeux, de pratiquer des expérimentations sur des animaux vivants.

Lors des travaux pratiques de ce jeudi 11 février 2010, un ultra léger motorisé frôla les vitres de la classe 4.12.
Le bouvreuil, que j’y maintenais allongé sur une table, m’échappa et s’envola en pépiant en direction de l’aéroplane.
Dans sa précipitation, il ne vit pas que les fenêtres, extrêmement bien lavées au demeurant, étaient toutes closes : le douloureux impact ne put être évité. Pris de pitié pour le malheureux volatile gisant groggy sur le carrelage, je n’eus de cœur à pratiquer la saignée demandée, bien que celle-ci intervienne dans les points du travail journalier du premier semestre. Je l’ai donc repris chez moi, le temps de sa convalescence.

Croyez-bien que je ferai tout pour remonter ma cote lors de l’exercice sur l’électricité statique.

Pierre Lambot

Le professeur sourit en repliant la lettre. Bien qu’il ne croyait pas un mot de cette histoire rocambolesque, il décida de passer l’éponge : pour une fois qu’un étudiant ne sortait pas l'habituel refrain et faisait preuve d’originalité…