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USS-AMÉRION II : Continuation
Sebastien : USS-AMÉRION II : Continuation  -  Oh, vous savez, moi, c’que j’en dis...
 Publié le 08/07/10  -  3 commentaires  -  7823 caractères  -  35 lectures    Autres publications du même auteur

L’atterrissage se déroula sans anicroche, à l’étonnement général. Les coordonnées du pont d’amarrage furent transmises et décryptées avec succès, et, malgré quelques erreurs dans l’approche du quai (conduisant tout de même à l’arrachage de trois antennes externes, d’une demi-parabole et d’un rail de projecteurs), l’équipage put mettre le pied sur Fafl le cœur léger. Un fonctionnaire les attendait au bout de la rampe d’accès au spatioport, perché à plusieurs dizaines de kilomètres au-dessus de la forêt qui recouvrait quasiment l’ensemble de la planète. Le spatioport, pas le fonctionnaire.


- Messieurs-dames, salua-t-il sobrement en galactique standard.


Le groupe d’explorateurs fourmilla de regards étonnés. Qui pouvait bien passer pour une femme, dans cette fine équipe ? pensa Kroustibat.


- Aloooors, paperassa le zélé. Vous arrivez de Tutuvie septentrionale, sur la planète Keubon.

- Absolument, répondit Guignoletti.

- Bien. Alors il me faudra, sous quinze jours, vos trente dernières feuilles de paye, à chacun bien sûr, une attestation de votre employeur, un résumé de l’actualité galactique, vos empreintes de pouces ou assimilés, le détail de votre séjour, et un certificat.

- Un certificat ? Un certificat de quoi ? s’étrangla Guignoletti qui avait bien du mal à dissimuler ses sentiments envers la bureaucratie.

- Un certificat, qui atteste, quoi ! s’énerva le fonctionnaire. Et vous signez là, là, là, et là, ajouta-t-il en tendant son bloc digital.

- Mais... bon. Là ?

- Oui. Non ! Là.

- Ah. Là.

- Non, bon sang. Ici, là, sous le... voiiiilà.


Derrière le capitaine, l’équipage se tenait coi, dans l’attente d’éventuels problèmes de papiers ou autres, problèmes qui étaient monnaie courante dans ce genre de formalités. Et puis, avec ce genre d’individu, avait affirmé Dugommier quelques minutes auparavant, il valait mieux surveiller ses paroles. Personne ne souhaitait avoir un agent de l’immigration aux baskets. Le fonctionnaire rangea son bloc, remit soigneusement le capuchon sur son kréonbik, puis déclara :


- Vous êtes en règle pour dix jours fafliens, et n’oubliez pas ce que je vous ai demandé. Et la prochaine fois que vous venez nous rendre visite, c’est-à-dire la prochaine fois, préparez tout ça avant, ça vous épargnera une amende.

- Quoi ? On a une amende, directement, à sec ? fulmina Guignoletti.

- Oui.

- Mais... mais pourquoi ?

- C’est la procédure. Oh et puis ne vous énervez pas, hein, je n’y suis pour rien. Allez, hein, bon séjour, conclut-il en tournant ses trois talons.


Une petite brise insolente soufflait sur l’équipage abasourdi et néanmoins toujours groupé au milieu de la rampe d’accès. Loin en dessous d’eux, la canopée verdoyante s’étendait à perte de vue. Kroustibat, qui ne mâchait pas ses mots (et c’était bien la seule chose qu’il ne mâchait pas), déclara d’une voix sans appel :


- C’est débile, on est en règle pour dix jours, et on doit fournir des trucs sous quinze jours, mon capitaine. Faudrait déposer une réclamation, mon capitaine.

- Pourquoi pas une fiche d’amélioration continue, pendant que vous y êtes ? bouillonna Guignoletti. Vous avez encore envie de faire de la paperasse, de lâcher vos commz et de prendre une prune ? Descendons plutôt de ce perchoir et tâchons de trouver une mairie ou un truc du genre. À défaut de tribu, y a peut-être moyen de sceller de juteux accords commerciaux, se frotta-t-il-les-mains.


La fine équipe se mit en branle, et pénétra dans le hall du spatioport. La vaste salle était pleine de pas perdus et vide de voyageurs. Guignoletti avisa le seul être vivant, en l’occurrence un employé municipal qui était occupé à balayer d’inexistantes saletés.


- Pardon mon brave, le centre-ville je vous prie ? demanda le capitaine d’un galactique hésitant.

- C’est toi le centre-ville, répondit celui-ci aimablement.

- Que... Non, je veux dire pourriez-vous m’indiquer la direction du centre-ville ?

- Oui.

- ... et donc ?

- C’est par là, dit-il en désignant une direction avec son balai.


L’équipage se retourna comme un seul homme dans la direction indiquée. L’ingénieur de surface (tout augmente) indiquait la baie vitrée.


- Mon capitaine, interrogea Dugommier en keubonien, puis-je essayer de communiquer avec l’indigène ?

- Allez-y, sous-lieutenant, tentez, tentez, acquiesça Guignoletti avec un mouvement désabusé de la main.


Le sous-lieutenant tenta. Il passa un bras amical autour des épaules de l’employé, et l’entraîna à l’écart de la petite troupe en discutant vivement avec lui en faflien. À l’arrière, Kroustibat, Danet et les trois mécaniciens pesaient le pour et le contre des différentes façons d’accommoder le falfuzia à toupet fauve (à savoir en sauce, en ragoût, en beignets, en cocktail, bouilli, en soupe, grillé, frit, et même sur des tartines). Quelques minutes plus tard, le sous-lieutenant était de retour tandis que l’employé municipal disparaissait en claquant une petite porte.


- Alors ? interrogea le capitaine.

- Alors il s’en fout, répondit Dugommier, complètement blasé. Mon capitaine.

- J’ai du mal à croire que cette planète soit dotée d’un commerce florissant et accorde si peu d’attention aux touristes, dit Guignoletti, vexé. Bon, allez, on descend, on verra bien. C’est un ascenseur, ça, là-bas ? En avant.


Arrivés au pied de l’immense tour du spatioport, les explorateurs sortirent de l’ascenseur dont les portes se refermèrent, et ils se retrouvèrent... en pleine cambrousse. La façade grise du bâtiment se perdait dans la végétation, et seule une piste mal entretenue témoignait de la présence d’une espèce intelligente. En plus du bâtiment, bien sûr. La chaleur était étouffante, et l’humidité n’arrangeait rien. Guignoletti, à court d’idées, ne pipait mot. Soudain, des fourrés se mirent à froutchfroutcher, non loin. Kroustibat profita de l’occasion pour dégainer son lance-grenades d’un air soupçonneux, et chacun suivit son exemple. Guignoletti mit la main sur la crosse de son Mamère-PPK, Dugommier empoigna son canon à choupinos, et ainsi de suite. Les trois mécanos, quant à eux, se mirent en formation de combat, en bon spécialistes des arts marteaux (les arts marteaux regroupent toutes les techniques connues permettant d’assommer un adversaire, parfois par la simple force mentale). Le buisson froutchfroutcha encore un peu, puis un faflien en émergea, l’air jovial.


- Ah bah tiens. Des pigeo... des étrangers.

- Bonjour, mon brave, recommença Guignoletti en intimant l’ordre à son équipage de baisser les pétoires. Nous souhaiterions, euh... Conduisez-nous à votre chef ? essaya-t-il finalement.

- Ah. Il veut aller à la ville. C’est loin, hein, il est au courant ? Il va avoir besoin d’un moyen de transport. Je peux lui en louer un. Pas cher. Beau voyage.

- Eh bin... bégaya le capitaine. D’accord.


C’est ainsi que, sans savoir s’ils auraient assez d’eau, de nourriture et de munitions, sans trop savoir où ils allaient, les membres de l’équipage de l’USS-Amérion prirent la piste qui, d’après l’indigène, ralliait la ville de Padbra, près du fleuve Padchokola. Le véhicule à bord duquel les huit explorateurs avaient pris place était une version tout-terrain du poids lourd Grügrü de chez Grölschwagen. Le poste de conduite, abrité et renforcé par des arceaux en fibre de banane sauvage, disposait de tout un tas de réglages totalement inutiles et par conséquent rigoureusement indispensables. La plateuforme arrière, munie de plusieurs rangées de sièges et de coffres, était décapotable. En tant que mécaniciens, le trio Bwa-Wou-Bss prit ce qui tenait lieu de volant et, une fois les lourds sakados chargés et les places à l’arrière attribuées, le signal de départ fut donné. Bwa tourna la clef du Grügrü qui émit un gnignignignibroumbraoum de contestation dans un premier temps, mais démarra tout de même.


 
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   David   
16/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Un début à la kafka, avec comme une pointe de critique sociale : "Personne ne souhaitait avoir un agent de l’immigration aux baskets." des preuves d'un humour non dénué de nuances multiples (s'il en fallait... ) : "À l’arrière, Kroustibat, Danet et les trois mécaniciens pesaient le pour et le contre des différentes façons d’accommoder le falfuzia à toupet fauve (à savoir en sauce, en ragoût, en beignets, en cocktail, bouilli, en soupe, grillé, frit, et même sur des tartines)."

En p'tit tapas quotidiens, l'Amérion, ça me va.

   Anonyme   
22/2/2015
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bon, nos fringuants héros arrivent enfin sur la planète Flafl où ils sont reçus par un bureaucrate. Une fois les formalités paperassiennes accomplies, ils s'enfoncent dans la fôret en direction de la ville de Padbra, voili-voilou !

Pourquoi ? On en sait toujours rien.

Un peu plat, donc, car à ce moment de l'intrigue, il eût fallut que nous sachions, car je me pose maintenant la question de savoir si je dois poursuivre ou non, faute d'intérêt.

Bon, encore un chapitre et on verra bien...

   Donaldo75   
13/12/2021
En réfléchissant bien à ma lecture, je trouve à ce texte une allure de bande-dessinée du genre celles qui émaillaient les fanzines de science-fiction déconnante des années quatre-vingts. Ici, le découpage est trop fin pour que l'histoire dépasse la grosse poilade aux clins d'oeil appuyés mais l'ambiance reste égale, une forme de délire travaillé mais trop fourni de bidules en tous genres pour permettre au lecteur de comprendre où il va. Je sais, tout chemin n'a pas besoin d'être tracé si le lecteur donne de lui, met en branle son propre imaginaire pour interpréter ce qu'il lit. C'est ce que je me dis quand je mange des choux à la crème mais cela ne les rend pas succulent pour autant.


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