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Les silences de Colombe
Maëlle : Les silences de Colombe  -  VII - Embut
 Publié le 11/08/10  -  8 commentaires  -  3576 caractères  -  127 lectures    Autres publications du même auteur

Le bac de français approche trop vite. Jusqu'à avril, tous mes cours gardent l’empreinte de Colombe. Les mots surlignés, les expressions soulignées. Et puis, un jour, ça s’arrête. Le poème ne porte plus sa marque. Sois sage, ô ma douleur… Tu parles ! Petit coup de crayon mine sur la marge, elle me guidait dans ces mots trop hermétiques. Sage et attentive dans la salle à manger, elle n’avait pas besoin de parler pour que je la suive. J’ouvrais le livre de français, je cherchais, je lorgnais sur son épaule pour lire ce qu’elle avait écrit, et elle faisait semblant d’être dupe si je feignais de juste vouloir lui voler un baiser. Aujourd’hui je trie, je reprends, texte après texte, Colombe à chaque page : Diderot et des tartines de Nutella, Jules Verne et la moue méprisante quand j’avais essayé de lui faire croire que je l’avais fini, je l’avais pas supporté, j’avais lu toute la nuit pour me faire pardonner, et la trigonométrie m’avait permis de me racheter.

Et Baudelaire. Baudelaire qui me donne les mots que je n’ai pas pour crier que Colombe est partie.

Sa place reste vide.


Elle n’est pas revenue.


Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille…


+++


Un jour elle a dit :


- S’il te plaît, fais-le.


Dans ma chambre, avec le casier de legos au pied du lit, qu’il faudra que je descende à la cave, un jour.

Colombe dans mon lit. Colombe toute nue offerte, Colombe qui se laissait explorer depuis plusieurs semaines en souriant, en plaquant très fort mes mains sur son corps pour qu’elles y restent. Colombe, si sérieuse. Colombe qui me demande…


Je la regarde. Bien sûr j’y pense, j’y ai pensé. Bien sûr je le souhaite, de toutes mes forces. J’ai peur. De lui faire mal, d’être maladroit. D’être trop jeune.


- Je veux pas te faire de mal…


Elle me regarde avec insistance, sans rien dire. Elle bouge juste un petit peu, tout son corps qui ondule doucement contre le mien. Bien sûr que j’en crève d’envie, putain !

Mais Colombe ? Colombe…


- C’est ta première fois aussi ?


Question idiote. Bien entendu. C’est sa première fois. Moi aussi. Je ne sais pas comment faire. Je ne sais pas quoi faire. Pourquoi ça on nous l’a jamais expliqué !

Et elle, elle sourit.


- Tu es sûre ?


Oui, de la tête.


D’accord. On y va, alors. Ce cadeau-là… Colombe, ma colombe… Ma douce, ma belle, mon adorable. Laisse-moi t’embrasser. Non, embrasse-moi, c’est mieux. Là, et là aussi. Encore. À moi. Sais-tu que je crève de trouille ? Oui, bien sûr. De désir aussi, Colombe. Tu souris. Tu veux toujours ? Tu poses ta main sur mon dos, là où ça fait un creux, et comme ça tu me guides. Je vais pas y arriver, tu sais… Tu soupires.


- Je t’ai fait mal ?


Non de la tête. Je sais bien que si. Colombe, pardonne-moi.


- Tu veux que j’arrête ?


Le sursaut de ton corps qui proteste, ta main qui appuie plus encore sur mon dos. Non. Bon.

Alors d’accord. Je continue, le plus doucement possible, mais je me rends compte assez vite que c’est pas la bonne solution. J’oublie de penser, je ne suis plus que sens, mes yeux sur toi, ton odeur, ta chaleur.

Je ne sais pas combien de temps ça dure. Un instant, une éternité.

Colombe !

Machinalement j’avais jeté un œil au réveil. Il s’était passé 10 minutes. Est-ce qu’on peut ressentir autant de choses en si peu de temps ?


+++


J’ai reçu ma convoc’. Ma mère travaille le jour de l’oral. Je m’arrange avec Pedro pour que son père nous emmène tous les deux. Je questionne tout le monde : personne ne sait quand passe Colombe.


 
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   brabant   
17/8/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Maëlle,

Petit retour en arrière: "Les cernes lui mangent le visage". Un horrible doute m'est venu. Colombe serait-elle enceinte d'un autre et aurait-elle trompé Simon en se donnant à lui, pour lui faire croire que...
Abracadantesque !...

Ou bien alors serait-elle malade, et donnée à Simon alors qu'elle est encore belle, puis l'aurait abandonné pour le bien de celui-ci, afin qu'il ne s'encombre pas d'une infirme, ou pour qu'il n'ait pas à regretter un amour par avance défunt, lui causer du chagrin maintenant pour lui éviter du chagrin plus tard. Grandeur d'âme.
On serait dans une sorte de remake de "Love Story". Ô le couple Ali McGraw-Ryan O'Neal ! Comme ces deux-là sont beaux ! Je peux désormais visualiser Colombe et Simon. Mais je n'aime pas ça; j'avais trop pleuré en regardant le film.
"La place de Colombe, à côté de moi, était froide."
Ne faites pas ça hein !


Retour au bac (un chapitre par année scolaire ?) J'aime le premier paragraphe.
Style: je n'aurais pas mis: "trop hermétique", un mot est hermétique ou ne l'est pas: "des mots hermétiques"

Deuxième paragraphe: il me plaît assez. L'attitude de la fille me paraît mieux observée que celle du garçon par moments trop mûr, par moments trop maladroit/inexpérimenté peut-être. Il y a de la contradiction dans l'air. Je n'aime pas non plus ces "10 minutes" trop précises.

   David   
26/1/2011
 a aimé ce texte 
Bien
Si je ne me trompe, ça doit faire au moins trois ans, peut-être deux, que la scène remémorée a eu lieu, et que Colombe ne s'adresse plus à Simon... et ça fait plusieurs chapitre que la raison du silence de Colombe reste en suspend, que Simon patauge dans ses obsessions. C'est sa narration unique à lui qui la pose en tortionnaire, un "témoin" par exemple aurait pu atténuer le désespoir de l'un et le côté évanescent de l'autre, ce n'est sans doute pas le but, à suivre donc...

   Anonyme   
6/3/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'ai juste hate de lire la suite ! J'adore le suspens ! Je veux savoir !

   monlokiana   
18/8/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Hum…J’ai bien aimé ce paragraphe même si je le répète encore, le roman est trop centré sur les deux personnages principaux.
On sent enfin assez bien l’alchimie entre les deux, le désir, l’amouuuuur et tout ca. On est proche d’eux, on se les imagine facilement parce que dans cette scène, il y a de l’attention, de la délicatesse, même si je trouve que ça fait très cliché : deux jeunes qui se donnent, le garçon qui panique parce que c’est sa première fois, la fille qui veut le faire et qui n’a pas froid aux yeux.
Oui, c’est un chapitre délicat, simple, tendre…
J’ai bien aimé et je cours lire la suite (encore lol)

   Anonyme   
11/9/2011
 a aimé ce texte 
Bien
J'en étais sûre ! Donc bon, j'ai compris ce qu'il se passait, c'est étrange que lui toujours pas ! Enfin, c'est un garçon ;)
J'espère en tout cas que tu nous ajouteras une autre intrigue que la seule "Colombe stp reviens", car sinon j'ai bien peur que cela ne devienne bien long. Enfin, c'est vrai que cela dépend du style d'écriture et de la manière dont c'est mené.
A voir donc.
(par contre, excuse moi de dire ça de but en blanc, mais le comportement de Colombe AVANT qu'elle ne quitte Simon n'est pour moi absolument pas crédible ! après, je n'ai pas la science infuse, mais bon... pour moi certaines choses ne cadrent pas)

   carbona   
15/12/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai aimé ce chapitre. La description de cette première fois entre les deux adolescents est délicate et réaliste. Colombe est partie se cacher forcée par ses parents le temps d'accoucher et de faire adopter le bébé ?

   MissNeko   
7/10/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très touchant paragraphe. Votre description de leur première fois est belle et pure.
Mais quel suspens !!!

   Donaldo75   
25/11/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un chapitre intéressant car il décrit en peu de mots la première fois vu de la fenêtre d'un garçon qui ne veut pas expédier la chose vite fait sur le gaz, comme on disait de mon temps. Et le début, une sorte d'hommage à Colombe et à la littérature, colle bien avec la suite tellement la tonalité n'est pas brutale, loin de là, juste adolescente avec ses incidentes et ses hésitations.

Le style reste cohérent.


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