Cette dernière lecture restera à jamais, pour moi, la plus étrange.
Je te sais peine à croire qu'un tel monde existe. Un monde où des humains, comme nous, mais qui n'ont qu'un seul cœur pour faire battre leur sang et porter leur amour, lisent des livres qui ne sont qu'une suite de pages noircies d'un filet d'encre, au point qu'on se demande quel sens ils attribuent, dans leur étrangeté, au simple mot lecture. Mais je l'ai éprouvé et j'en connais la réalité, même si je peux comprendre qu'elle semble invraisemblable à quelqu'un de bon sens.
Dans l'espoir de tempérer ta stupeur, je te dois un aveu. J'ai demandé à cette feuille infirme, qui montrait tant de grâce à montrer tant de laid, s'il était possible de comprendre autrement ce qui me paraissait, vu des yeux de ce Jan, une caricature. Elle n'a pas répondu, mais j'ai vu - je le jure ! - une feuille sourire. Par la vertu de ce sourire de feuille, j'ai été un moment le témoin fasciné de deux âmes : celles de deux Politocs. Je n'ai connu que ces deux-là, je me garderai donc d'en faire tant une généralité qu'un cas d'espèce.
À l'un d'eux pouvait raisonnablement s'appliquer une bonne part des griefs exposés. Ce Zélite, pourtant, passait à ses propres yeux pour un homme de bien, bon citoyen malgré des règles légales parfois faites pour être interprétées, bon père malgré ses enfants, bon mari grâce à ses maîtresses et gestionnaire avisé du bien-être d'autrui par droit et par culture. Crois-moi : sa réalité recouvrait tout autant de légitimité que celle du Jan.
L'autre Politoc était moins sûr d'avoir toujours raison, et moins préoccupé de soigner sa chapelle que d'y entendre une messe qui lui convienne. Réellement épris du souci de servir, se sentant redevable aux obscurs de l'agrément d'habiter une autre destinée que la leur, cet être ferme et doux, sincère et désolé de ne pouvoir à chaque instant le rester, recherchait la justice, exigeait l'équité, se contentant de mieux quand plus est hors d'atteinte. Ce Politoc était une femme. Mais il s'agit probablement d'un hasard.
Graine n'a jamais employé ni phrases ni mots : elle a toujours eu trop à me découvrir pour se contenter de si peu. Elle est à ce point dans le vrai que je n'ai plus, de ce à quoi elle m'a permis d'assister ensuite, que ces quelques mots à t'écrire, de sa part : Celui-là est heureux qui sait aimer d'Amour, car rien n'est une FIN.
Additif
La pratique du rappel, en matière de concerts populaires ou de représentations scéniques, est un rituel quasi obligatoire auquel nul n'a pu, à ce jour, trouver de contre-indication convaincante.
Immodeste et confus de l'être, j'ai donc décidé de donner aujourd'hui naissance au rappel littéraire qui n'est pas moins spontané que ses précédents, et donc pas plus moralement discutable. De surcroît, il n'a pas davantage d'influence sur le coût de ce roman que lesdits précédents sur le prix du ticket d'entrée.
Parce que je suis bien content que tu me lises, et pour répondre à la ferveur des témoignages d'intense satisfaction que - j'en suis persuadé ! - tu es en train de manifester au grand étonnement de ton entourage, je vais te partager une histoire de plus. Puisse-t-elle pousser à la réflexion les tripatouilleurs de gènes et assimilés, sachant qu'il est inutile d'espérer éveiller le sens moral de ceux qui les financent.
Rien à voir avec les enfants de prostituées qui savent, eux, qu'il n'y a pas de honte à être aimé d'une mère prête à tout pour vous élever le moins mal possible, malgré la vie ou à cause d'elle.
Mais ça s'appelle quand même "Fils de pute !".
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