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L'histoire de Brigitte et celle de Jean-Luc
NICOLE : L'histoire de Brigitte et celle de Jean-Luc  -  L'histoire de Brigitte - Chapitre 6
 Publié le 01/10/09  -  8 commentaires  -  7760 caractères  -  131 lectures    Autres publications du même auteur

Le jour « J », bien qu’il ne soit que dix-neuf heures, Jean-Luc me tourne autour avec impatience. Il tient beaucoup à ce que nous arrivions au restaurant avant tout le monde pour pouvoir accueillir nos invités.

Il me couvre d’un regard de pure fierté, heureux d’être accompagné de la plus jolie femme du groupe. J’ai quarante ans quand la majeure partie des autres en ont plus de cinquante, ça y contribue certainement, mais il affecte de ne pas s’en rendre compte.


- Non, ne mets pas ce collier-là, j’ai beaucoup mieux.


Il sort prestement l’écrin qui déforme la poche de sa veste depuis le début des préparatifs.


Il a exactement le sourire que petit il devait avoir en tendant à sa mère son collier de nouilles pour la fête des mères.

Il aura le même sourire fondant au cours de la soirée, chaque fois qu’il m’entendra dire à une femme « Tu as vu ce que Jean-Luc m’a offert pour mon anniversaire ? ». Et je le dirai souvent, juste pour voir encore son regard d’enfant épanoui de fierté.


J’en étais là de mes réflexions, quand Gérôme s’est annoncé de plusieurs coups de sonnette impatients.


- Vous pouvez faire enlever un couvert ce soir, Sophie ne viendra pas, elle m’a foutu dehors, et cette fois, elle peut toujours courir avant que je revienne. Je reprends ma chambre, de toute façon, d’ici je serai plus près des Beaux-Arts.


Comme cette année, il était encore aux dernières nouvelles inscrit en fac de droit, son père le suit pour réclamer des explications. Moi j’observe une neutralité helvétique.

Gérôme, à vingt-neuf ans révolus, cherche encore sa voie, et vraisemblablement encore pour longtemps si on veut mon avis.


- Mais qu’est-ce que c’est encore cette lubie, tu n’as jamais su dessiner.

- Pas grave, mon truc c’est la peinture contemporaine, le non figuratif, la démarche intellectuelle pure, tu vois.


Non, apparemment, il ne voit pas du tout, son père.


Je laisse échapper un soupir de découragement. À intervalles réguliers, Gérôme revient à la maison (chaque fois que Sophie le jette dehors), avec de nouveaux projets professionnels, tous plus farfelus les uns que les autres.

Il est à la fois l’aîné de la fratrie et le plus immature des trois ; en proie à de vrais enthousiasmes, mais totalement dépourvu de réalisme, et aussi vite découragé qu’il s’était enflammé.


- On pourrait parler de tout ça plus tard. Est-ce que tu peux t’habiller s’il te plaît ?

- Pourquoi ? Je suis pas bien comme ça ?


Un adolescent, je vous dis, un adolescent de vingt-neuf ans, les boutons d’acné en moins. Il y a des moments où je suis contente de pouvoir me retrancher derrière le devoir de réserve propre aux belles-mères.


Nous arrivons en même temps que Jean-Marc et son épouse, qui nous assènent sans plus attendre leur plaisanterie la plus éculée. Depuis la naissance de leurs enfants, ils affectent de nous appeler Papi et Mamie, toujours avec le même plaisir que la première fois. Je souris. J’aime bien le couple qu’ils forment tous les deux.


Le fils cadet de Jean-Luc est le seul de ses trois enfants qui lui ressemble vraiment. Très grand de stature, il fait un contraste saisissant avec sa femme Sarah, tellement petite et menue. Pour le caractère aussi, il ressemble à son père : comme lui il inspire confiance ; et puis c’est aussi le seul à avoir fait médecine, et il sera sûrement un merveilleux généraliste.


La seule touche de fantaisie de sa vie, c’est Sarah, son épouse. Elle est comédienne et membre permanent d’une troupe de théâtre expérimental à Paris. Il l’a rencontrée lors d’une représentation à laquelle sa sœur Marie, passionnée de théâtre l’avait entraîné. La représentation a été suivie d’une soirée débat avec les comédiens, dont Sarah.


Le lendemain au petit déjeuner, il nous a annoncé le plus sérieusement du monde qu’il avait rencontré la mère de ses enfants, ce qui a beaucoup amusé Marie et Gérôme. Il était sérieux, il voulait épouser Sarah et il y est arrivé.

Un mariage dans la plus pure tradition judaïque qui a bien failli achever ses deux grands-mères, catholiques pratiquantes toutes les deux, ainsi que sa mère pour des raisons différentes (franchement Brigitte, comédienne, c’est un métier ça, pour une épouse de médecin ?).


Ils m’ont placée en bout de table, bien en vue. Surtout, ne pas céder à la panique. Je souris de plus belle pour me donner une contenance.

Au gâteau, je suis presque détendue, après tout le plus gros est fait... jusqu'à ce qu’ils se mettent à prendre la parole à tour de rôle pour m’adresser une sorte de compliment improvisé.


Jean-Marc commence. Il raconte comment, pour le baptême de ses deux enfants, j’ai fait graver la gourmette que je devais offrir à celui dont je suis la marraine du prénom de son frère, baptisé le même jour, mais doté d’une autre marraine. Ils rient tous affectueusement, comme s’ils entendaient cette histoire pour la première fois.

Suivent quelques autres anecdotes de la même veine, jusqu'à ce que ce soit le tour d’Éliane.


- Je voudrais lever mon verre à Brigitte, qui bien que privée du bonheur de fonder une famille, a su être la bonne fée de sa famille d’adoption, sans jamais se plaindre.


Plus vraiment sobre, Éliane, mais quand même.


Le lendemain, elle passe à la maison pour me demander de lui pardonner sa maladresse, et elle en profite pour aggraver consciencieusement son cas. Je l’ai mise dehors dès que possible, et j’ai tourné en rond pendant le reste de l’après-midi en attendant le retour de Jean-Luc qui avait dû repasser à la clinique.


- Éliane vient de m’apprendre que tu leur avais dit que j’étais stérile. Tu peux m’expliquer ça.


Il est ennuyé Jean-Luc, je le vois à sa façon de se débarrasser de sa veste le plus lentement possible, pour se donner le temps de réfléchir.


- C’était il y a des années, on venait de se marier et elle n’arrêtait pas de nous demander quand on allait enfin mettre un bébé en route. Nous avions déjà trois enfants et pas spécialement envie d’en avoir un quatrième. Tu m’avais tout récemment parlé de la stérilité d’Isa. C’est sorti comme ça, sans que j’aie eu le temps d’y penser. Tu connais Éliane, la discrétion n’est pas sa qualité la plus évidente, le temps que je me retourne et elle en avait déjà parlé aux autres. Et puis ça n’était pas si grave, d’ailleurs je n’y avais plus pensé jusqu'à hier soir. Écoute, excuse-moi, je vois bien que tu es contrariée.

- Je ne suis pas si contrariée, c’est seulement que je suis surprise que tu puisses affirmer sans hésitation que « nous » ne voulions pas d’autres enfants, alors que je ne pense pas que nous ayons eu de conversation à ce sujet avant aujourd’hui.

- Pourquoi ? Tu veux un enfant ? À nos âges, et alors que nous sommes deux fois grands-parents ?

- Non, bien sûr que non, c’est juste que je n’y avais pas vraiment pensé avant.

- Bon, eh bien sois gentille, n’y pense pas davantage maintenant, crois-en mon expérience, la crise de la quarantaine n’est pas un passage obligé. Marie est là ?


Le vendredi soir, Marie, qui a pris son premier poste d’institutrice à quatre-vingts kilomètres de chez nous, déserte son petit logement de fonction pour retrouver sa chambre et sa meute de copains. En général, elle sort quasiment tout le week-end, et il nous arrive parfois de la croiser à l’occasion d’un repas. Là elle sort tout juste de la salle de bains, qu’elle a occupée une bonne partie de l’après-midi.


- Il n’y a vraiment personne qui va dire à Gérôme que quand il termine mon bain moussant, il pourrait quand même en racheter un ? Quel parasite celui-là. Et d’abord qu’est-ce qu’il fait encore là à vingt-neuf ans ?


Je m’abstiens de lui faire remarquer qu’elle a un boulot, un appartement, et qu’à vingt-quatre ans elle est toujours là elle aussi.


 
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   jaimme   
1/10/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Des plaisirs de la vie quotidienne, aggravés par une situation compliquée à gérer. Mais on sent une forte pression chez Brigitte, une fissure prête à se transformer en fracture.
L'humour est de retour. Grinçant. Mais aussi tendres (le collier de pâtes par exemple).
J'ai trouvé une ou deux phrases qui auraient demandé un peu d'huile (d'olive je pense).
Mais d'une façon générale on sent que chaque phrase a été ciselée, ce qui est quand même un exploit sur une telle ampleur de texte.

   nico84   
2/10/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Pas si facile cette vie. Sa vie de femme est bien remplie mais sa vie de mère est un vrai gouffre. Qui se transformera peut être en crise, qui sait.

Ses beaux-enfants ne sont pas des réussites dans la manière de les décrire, tout n'est pas rose et la vie est bien avancée.

Une éré mouvementée s'annonce, bravo encore !

   LeopoldPartisan   
2/10/2009
 a aimé ce texte 
Un peu
Amour gloire et beauté !
Plus j'avance moins j'ai d'empathie pour tous ces personnages qui comme l'écriture, est-ce voulu se fait de plus en plus superficielle. C'est les feux de l'amour et les gosses des autres. Quelque part tout cela me fait froid dans le dos :Personnellement Brigitte, moi je choisirai de me mettre la tête dans le four, avec un coctail (c'est vrai celà, ils sont toujours au resto ou/et en représentation.) de baribituriques volés dans le sacoche de Jean-Luc. Attention Brigitte, surtout ne pas couper l'électricité ni d'oublier de bien fermer la porte à clefs en les laissant dans la serrure, comme celà qu'en J.L. rentre ou Eliane, on s'éclate tous ensemble. Comme j'ai commencé, je dois finir, mais j'ai un peu de mal. Toutefois je respecte vraiment l'effort d'une histoire qui mériterait, de te servir de synopsis à un vrai roman. Ma critique c'est que ce côté, très survolé nuit vraiment à l'ensemble qui j'en suis sûr mériterait une vrai réécriture. Tu en as le canevas.

   Filipo   
30/10/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Toujours bien écrit. On ressent effectivement les non dit et l'absence de communication sur certains points dans le couple Brigitte-Jean-Luc (l'annonce de la "stérilité" de Brigitte). L'histoire du "collier de pâtes" donne l'impression - choquante, c'est voulu - que l'épouse du chirurgien est plus un faire valoir lors de représentations publiques qu'une compagne adulée.

On se prend au jeu de la vie de cette femme, minutieusement retracée de félures en petites crises... lecture toujours agréable pour moi, émaillée de beaucoup d'humour.

   Anonyme   
9/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Pour l'instant l'épisode le plus aboutit pour moi.

On s'en enfin qui est brigitte.

L'humour est enfin absente te on rentre dans la profondeur des personnages. C'est un long je trouve depuis le début, mais c'est une bonne chose.

   monlokiana   
15/9/2011
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Pas plus intéressant que le passage précédent. Beaucoup de noms. J’avoue que je commence déjà à m’y perdre. L’humour a disparu depuis le chapitre 4 pour laisser place à la vie et au quotidien de Brigitte. J’avoue que je commence un peu à m’ennuyer d’elle. C’est la femme genre « je fais tout » « j’encaisse tout » « je subis tout ». Je trouve qu’elle ne se bouge pas trop et ce caractère commence à rendre l’histoire inintéressante et pas trop emballante.
Tout de même, je cours encore lire la suite.

   pierre   
30/6/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup
l'humour et la légèreté de vie des premiers chapitres glisse doucement vers une atmosphère plus grave mais toujours avec quelques petites pointes d'ironie et le même ton ds le style. si ds les premiers chapitres on papillonne, avec les deux derniers ( le 5 et le 6) on s'installe . pour ma part je trouve cela assez réussi.

   carbona   
7/8/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Toujours très bien.

La boulette d'Eliane, franchement, on a connu mieux dans l'histoire de la délicatesse.

La réaction un peu cassante et expéditive de Jean-Luc au sujet des enfants me surprend. C'est une facette de son caractère à laquelle je ne m'attendais pas.

"Comme cette année, il était encore aux dernières nouvelles inscrit en fac de droit, son père le suit pour réclamer des explications." < J'ai dû relire deux fois, mauvaise utilisation des vrigules.

"Gérôme, à vingt-neuf ans révolus, cherche encore sa voie, et vraisemblablement encore pour longtemps si on veut mon avis". < répétition de "encore"

J'ai compris qui sont Jean-Marc et Sarah.


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