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Réflexions/Dissertations
Abu-ISsa : Marchand de sable
 Publié le 01/01/15  -  9 commentaires  -  4463 caractères  -  135 lectures    Autres textes du même auteur

Réflexion sur un instant de vie.


Marchand de sable


Il est bientôt dix-huit heures. Je décide de prendre une petite pause, avant de me replonger dans mes dossiers. En période de bilans, je passe mes soirées au bureau.

Je contemple la chute lente et rougeâtre du soleil sur la terrasse, en dégustant un bon chocolat chaud. Je m’exalte devant ce tableau coloré mouvant, pendant qu’une petite brise agréable me fait apprécier mon entracte.

Mis à part la beauté du ciel, mes yeux se baladent sur le chantier d’un immeuble et j’observe des hommes qui se changent après une journée de travail très physique. De pauvres âmes abusées qui travaillent à la semaine ou à la quinzaine. Des individus au corps svelte, aux traits chiffonnés et aux yeux creusés par manque de sommeil.

Des hommes illettrés qui ont lâché leur « bled » pour trouver du travail en ville, laissant derrière eux leurs familles pour plusieurs mois. Ils travailleront, de toute évidence, toute leur vie, pour un salaire de misère, sans aucune sécurité ni retraite. Dur labeur pour être pauvre !


L’un d’entre eux s’esquive et vient s’accroupir dans un coin, pour sortir furtivement de sa poche une boulette de résine de haschich, il l’effrite à l’aide de son briquet pour se rouler un joint. Le rituel débute. En quelques secondes, le dépresseur se pointe sur les lèvres, la fumée attire la meute et le joint tourne.


Au même moment, en haut du minaret, le muezzin engage l’appel à la prière d’une voix saccadée et mélodieuse. Une seconde mosquée, cent mètres plus loin, l’entame à son tour et ainsi de suite jusqu’à ce que toute la ville soit conquise par un sentiment d’apaisement.

Une impression de légèreté intemporelle en cette entrée timide de la nuit. Sur la route, deux petits vieux rieurs vêtus de leurs djellabas de couleur se tenant par la main se transportent joyeusement vers la mosquée.

Voilà le Maroc de tous les jours, celui des différences sociales très marquées, où tout est fragile et calme en même temps, où l’on sent un équilibre fébrile de paix.


En route vers la maison. La nuit semble de plus en plus sombre, tous les commerçants ont fait tomber leurs rideaux, seuls quelques épiciers persistent. Un brouillard absolu s’abat sur la ville accompagné d’une fraîcheur vicieuse qui pénètre directement dans mes os.

Je ne perçois plus rien, mon essuie-glace ne fonctionne plus et il est préférable que je m’arrête un instant pour essuyer mon pare-brise. Aucun chiffon en vue, je décide alors de prendre mon pull sur la plage arrière qui fera l’affaire.


Sur le bord de la route, près des poubelles collectives, des ombres s’agitent.

Je redémarre l’auto, m’approche et passe devant un âne traquant une charrette. Un homme taillé comme un clou, la cinquantaine, un chapeau de paille sur la tête, muni de son bâton, inspecte scrupuleusement les ordures à la recherche de bouteilles en plastique, et, avec un peu de chance, du fer et du cuivre.

Il les vendra par la suite au kilo, au lever du jour. Nombreux sont ces malheureux qui survivent aux périphéries des villes, sortant comme des rats de leur tanière dans ces nuits profondes.

Ces vaillants parcourent de longues distances pour gagner des clopinettes à risquer de choper de nombreuses maladies pulmonaires à force d’inhaler tous ces déchets toxiques.


Je me faufile tel un voleur dans la maison pour ne pas réveiller ma petite famille, que je ne fais plus que croiser. Nos horaires de travail sont radicalement décalés. Je rentre dans la salle de bain pour prendre un bon bain chaud, un pur moment de détente.

Minuit passé, sous les draps, tout le monde dort profondément et j’essaye de faire de même.

Mon sommeil depuis quelque temps se trouble, alors, pour cette nuit, aie pitié de moi, marchand de sable ! Envoie-moi une double dose de ta poussière.

Ma femme tâtonne le côté du lit pour contrôler si j’y suis bien puis, reprend son sommeil où il en était, la chance !

Toujours les yeux grands ouverts dans cette chambre où je me sens de plus en plus à l’étroit. Il est temps de quitter la pièce pour m’étaler sur le canapé du salon.

Marchand de sable, sache que je ne compte plus sur toi, j’opte pour un remplaçant, le speaker sur le canal d’infos en continu.

Ça y est, sa voix chaude me berce et mes paupières lourdes s’abattent. Ce sentiment agréable de perte de conscience s’enclenche et ma respiration se convertit en ronflements.

Je te félicite, présentateur : tu as accompli ta mission, je suis enfin dans les bras de Morphée.





 
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   Asrya   
14/12/2014
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
"d’une fraicheur vicieuse qui pénètre directement dans mes os."
--> "dans mes os" --> pas très jojo

"Je te félicite, présentateur : tu as accompli ta mission, je suis enfin dans les bras de Morphée."
-->Hum, mouais, pas friand de la forme de le phrase. Surtout pour une fin de nouvelle. Un peu étiré, un peu saccadé ; pour pas grand chose.

Un récit court, plutôt bien écrit malgré quelques lourdeurs (une histoire de goût probablement).
Quant à l'histoire en elle-même, c'est plutôt bien raconté. Peut-être que cela ne fait pas assez naturel et que vous recherchez "trop" à forcer l'émotion. Pour le coup, je n'ai pas été touché.
Je ne critique pas les faits énoncés, seulement la manière dont ceux-ci sont traduits ; à la limite du "pathos".
J'ai trouvé la fin assez décevante.
Le marchand de sable vs le présentateur télé : mission Morphée.
Je n'ai pas accroché. D'autant plus que cela se détache du reste du récit, plus axé sur la "détresse" du quotidien. En finir avec ce présentateur télé, pour moi ne rime à rien.
Avis personnel évidemment.

J'ai passé un bon moment à vous lire,
Merci pour le partage.

   Anonyme   
15/12/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Une tranche de vie aigre-douce d'un narrateur spectateur des choses, désabusé. Il jouit du confort matériel mais paraît bien solitaire, et touché par la détresse des pauvres autour de lui sans toutefois sortir de son enfermement pour aller au-devant d'eux...

Pour moi, se dégage du texte une conclusion : la modernité a les mêmes effets au Maroc qu'en Europe... peut-être, par analogie, partout. Je trouve cela plutôt bien vu et amené sans guère de subtilité mais de manière efficace. L'histoire en soi n'a rien de passionnant mais s'en dégage une ambiance, à mon avis.

Je ne vois pas l'utilité de la toute dernière phrase, à mes yeux le texte se clôt bien sur "ronflements". Bien sûr, vous êtes l'auteur, c'est vous qui voyez ; simple impression de lectrice.

   alvinabec   
15/12/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,
Ce texte me semble plus comme une minuscule tranche de vie avec ses hauts, ses bas et une pointe d'analyse sociologique qu'une réflexion, laquelle? sur le devenir des travailleurs dans une grande ville, sur l'état d'âme du narrateur insomniaque ou l'effet d'un soleil couchant sur les affaires courantes.
C'est tout à fait recevable cela dit même si manque une histoire ou une morale au choix du scripteur...

   in-flight   
2/1/2015
Les premiers paragraphes font office d'éditorial: on a le sentiment qu'on lit un journaliste qui nous décrit un sinistre décor du haut de sa tour d'ivoire.
Et non! Le narrateur est un autochtone qui rumine l'évolution de son propre pays.

"deux petits vieux rieurs vêtus de leurs djellabas de couleur se tenant par la main se transportent"--> j'ai saisi l'image mais le verbe "transporter" n'est pas très beau dans ce contexte

"où tout est fragile et calme en même temps" --> Si vous souhaitez marquer une opposition, "calme" et "fragile" n'ont rien d'antinomiques. Et puis qu'y a-t-il de fragile? Quant au calme, les appels du muezzin viennent de résonner dans la ville (vision d'européen :-)

"qui pénètre directement dans mes os"--> j'aurais enlevé "dans".

"Je ne perçois plus rien, mon essuie-glace ne fonctionne plus et il est préférable que je m’arrête un instant pour essuyer mon pare-brise. Aucun chiffon en vue, je décide alors de prendre mon pull sur la plage arrière qui fera l’affaire." --> Toute cette partie me semble superflue.

Une dénonciation sur la fracture des classes sociales, accrue par la mondialisation au Maroc comme ailleurs. La fin met en relief l'abrutissement télévisuel, seule façon pour le narrateur de trouver le sommeil et d'échapper à son quotidien.

Le marchand de sable est mort emportant avec lui l'espoir de jours meilleurs.

   Neojamin   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour,

Merci pour cette petite incursion dans ce beau pays. Pour y avoir passé quelques temps, j'ai pu aisément retrouver de vieilles images qui patientaient dans ma memoire.

De manière générale, c'est écrit simplement, les images ne sont pas très originales, le vocabulaire est simple, le style dépouillé. Pas de quoi s'exalter...Par contre, le ton est juste est convient à la description. En faire plus aurait sûrement été déplacé.

Pour ce qui est du fond, pas de surprise, les inégalités sont bien présentes dans ce monde, là-bas ou ailleurs... Quelques lourdeurs par contre, des précisions qui ne sont pas nécessaires...les images suffisent souvent pour expliquer une situation. Ainsi, j'ôterais ce genre de phrase :
"Ils travailleront, de toute évidence, toute leur vie, pour un salaire de misère, sans aucune sécurité ni retraite. Dur labeur pour être pauvre !"
ou "Ces vaillants parcourent de longues distances pour gagner des clopinettes à risquer de choper de nombreuses maladies pulmonaires à force d’inhaler tous ces déchets toxiques."

L'idée de Marchand de sable m'a semblé avoir été "ajoutée" pour aggrémenter cette instant de vie. A mon gout, ça manque de finesse...il faudrait peut-être en parler dès le début pour que ça ne tombe pas comme une pierre à la fin... ou l'omettre complètement. En a-t-on vraiment besoin ? Le calme et la douceur de cet instant de vie suffisent...

Merci pour le voyage!

   aldenor   
6/1/2015
 a aimé ce texte 
Un peu
Un bref aperçu de la vie au Maroc. Des scènes de misère. L’instantané pourrait être intéressant. Mais je le trouve desservi par une écriture pas assez compacte, pas assez précise.
Trop de « Je » se succèdent au début.
« ...une petite brise agréable me fait apprécier mon entracte. » : ça m’a l’air lourd comme formulation, « agréable » suffit à communiquer l’impression que la brise est appréciée.
« Mis à part la beauté du ciel... » est superflu : enchainer tout de suite sur le chantier.
« travail très physique » me surprend, je songerais plutôt à « travail harassant »
« aux yeux creusés par manque de sommeil. » : Il me semble que c’est une image perçue d’une terrasse lointaine ; on ne peut donc arriver à ce niveau de détail.
« Des hommes illettrés ». Ici, « hommes » me parait de trop.
« ...toute la ville soit conquise par un sentiment d’apaisement... ». Pas sûr que « conquise » soit approprié.
« ...un équilibre fébrile de paix. » : pas compris.
« ...seuls quelques épiciers persistent » : il me semble que « persiste » n’est pas utilisé à bon escient.
Le passage sur l’essuie-glace est un peu hors de propos.
La conclusion, oui, dormir, oublier, qui explique le titre. Mais bon, faut-il voir un parallèle entre la vie de famille du narrateur et ses observations ? L’idée n’est pas assez développée.

   Lulu   
10/1/2015
 a aimé ce texte 
Un peu
Une réflexion dans le cadre d'un récit ; celui d'une fin de journée de travail.
Je m'attendais à un développement plus conséquent. Là, on reste à la surface des choses. On voit bien les ouvriers qui travaillent durement, et le travail harassant du bureau qui conduit le narrateur à rentrer tard le soir. Mais ça s'arrête là. J'aurais aimé savoir ce que faisait le narrateur au-delà de sa contemplation par la fenêtre..., avoir une réflexion plus profonde.
Enfin, j'ai été frappée par le mot "illettrés". Les ouvriers seraient-ils tous illettrés ? Je n'en suis pas certaine. La plupart des enfants des bleds vont à l'école, il me semble. Cela dit, je veux bien admettre que nombre d'ouvriers sont effectivement illettrés.

Le récit oscille entre la réflexion et la narration proprement dite, mais l'ensemble se lit assez bien.

   ameliamo   
18/10/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un monde gris où le travail dur et la pauvreté dominent. Les hommes sont résignés avec leur vie soit misère soit ennuyeuse. Un lieu triste où on ne se passe rien. Ni dans ce texte, il n’y a pas aucune action, seulement la description d’un jour quelconque, semblable aux tous les autres.

   AuteurFanatique   
11/11/2018
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
C'est beau, soit, mais il n'y a rien de splendide...
L'écriture convient à l'histoire et aux descriptions.
Par conter, il n'y a pas de morale, ni d'histoire. A mon goût il y a trop d'informations pour la longueur du texte et c'est un peu une perte de temps...
C'est juste un beau voyage dans ce magnifique pays qu'est le Maroc.
Il faudrait donner un vrai sens, une vraie âme au texte. Et je trouve la fin bancale et mal dite.
A retravailler un petit peu.


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