Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Policier/Noir/Thriller
calouet : Un soir à Rungis
 Publié le 03/05/09  -  16 commentaires  -  25676 caractères  -  113 lectures    Autres textes du même auteur

Une rencontre étrange, de celles qui arrivent parfois quand on ne doit rencontrer personne. Un soir, à Rungis.


Un soir à Rungis


Je m’étais fait du souci pour rien.


Moi qui me sens toujours un peu mal à l’aise dans l’entrelacs des artères franciliennes, n’ai eu finalement aucun souci pour arriver sur place. Passées quelques incivilités notoires mais heureusement bénignes offertes par certains autochtones aux bouseux dans mon genre, sorte de bienvenue locale à la va-te-faire-foutre, tout s’est passé tranquillement. À peine sorti de la bagnole, je suis agressé par une sorte d’odeur, un remugle de passé piétiné… Village microbe étouffé par une exubérante jungle urbaine, Rungis s’offre au regard du visiteur comme une vieille pute désœuvrée : on sent bien que ses belles années sont loin derrière, que désormais ses réverbères essoufflés ne font plus de l’œil que par habitude.


Après avoir tourné un quart d’heure sans résultat autre que celui de me conforter dans la fiabilité douteuse de certains des plans de villes que l’on peut trouver sur le net, j’arrive finalement au pied de l’hôtel Myriade, censé abriter une nuit studieuse et réparatrice à la veille de passer ce putain de concours.

Ça ressemble - du moins c’est fait pour - à une sorte de gros chalet à demi bétonné, flanqué d’une dépendance tout aussi peu artisanale servant de réfectoire en même temps que d’accueil. La réceptionniste est plutôt sympa, m’indique les endroits où aller bouffer ce soir tout en me prodiguant quelques conseils - le Bertuccio plutôt que le Courte Graille - avant de me refiler mon sésame pour la nuit.


Je suis agréablement surpris, mes rares souvenirs de ce type de chaînes hôtelières se résumant à des piaules minimalistes rappelant de par leur design plastifié et l’épaisseur ridicule des cloisons la vieille Caravelair de mes parents quand on allait camper pendant les vacances d’été… Là, c’est différent. Pas la grande classe, à ce prix je ne m’y attendais pas, mais l’insonorisation a l’air correcte, ça sent bon, le pieu est confortable. Face à la fenêtre, j’ai même de quoi me préparer un thé. Cosy, ou pas loin.


Le temps de déballer mon barda, c’est à dire très vite, j’allume la télé. C’est marrant ça : il y a des contextes qui incitent à faire certains gestes plutôt que d’autres. Chez moi, seul, j’aurais sans doute ouvert un bouquin, mais ici l’ambiance est à la télé. Les boiseries murales et le thé façon british n’y changeront rien, j’ai envie de glander devant un écran… Je me farcis un surprenant documentaire de pêche au congre sur le câble, qui malgré l’aspect repoussant de ces bestioles m’ouvre sacrément l’appétit. Me voilà dehors, une clope au bec, à chercher l’ombre d’une pizzeria au milieu des flocons tourbillonnants qui commencent à tomber.


Le ronron assourdissant de l’autoroute toute proche étouffe mes pas pressés par le blizzard parisien. Autour de moi, une multitude de panneaux lumineux éclaboussent la pénombre de leur aura vulgos. Pas moyen de trouver cette satanée pizzeria, à croire que la gonzesse de l’hôtel s’est bien foutue de ma gueule. « C’est à cinq cents mètres à peine, juste derrière l’hôtel machin »… L’emmerdant c’est que l’hôtel machin, j’ai oublié son nom, et que les hôtels ici, ben ils pullulent comme les pavés en enfer.

Finalement, après avoir traîné mes guêtres givrées aux quatre coins du pâté d’immeubles, sous l’œil de plus en plus intrigué d’une bande de jeunes freluquets me faisant revenir en arrière de quelques années, j’aperçois enfin des néons providentiels. Il ne peut en être autrement : ils sont verts et rouges. Le drapeau italien tronqué, l’étendard indispensable de toute pizzeria digne de ce nom, flanquée bien entendu d’un prénom aux consonances exotiques, que les plus candides imaginent être celui du patron… Le Bertuccio. Ce prénom-là, il est tellement tordu que je me pose sérieusement la question de sa provenance, tout en poussant la porte vitrée.


Ce restaurant a le même air, par certains côtés, que le chalet qui m’attend, perdu tout comme lui au milieu des alpages macadamiques de la banlieue parisienne. Comme les gérants de la chaîne d’hôtels, les patrons du Bertuccio ont joué la carte de l’authenticité, avec le même talent que le génial charlatan qui se fait payer pour créer les décors pitoyables de certains jeux fermiers et télévisés. Ici tout sonne faux, ou presque, malgré d’évidents - et du coup pitoyables - efforts de sortir un petit peu du lot ; on trouve même, coincés du côté cuisine, contre un mur, deux meubles vraiment anciens, en vrai bois, usés par de vraies années… Là il faut reconnaître qu’il a assuré le p’tit père Bertuccio. Les deux buffets en question ne servent certes à rien, mais l’intention est louable, et c’est avec un certain plaisir que j’attends, planté à l’entrée de la salle, que quelqu’un daigne s’intéresser à mon solitaire sort.


Enfin, une femme se pointe, tout sourire. Ce n’est pourtant pas ses gencives impudiques que je remarque en premier, mais bien la micro-jupe noire qui lui tient lieu de cache-sexe. Hélas, une rapide et experte observation m’apprend bien vite à déchanter, tant l’avenante jeune femme est bizarrement foutue. Pas de seins, un peu de ventre, le cul plat, les jambes squelettiques… Elle a bien du mérite de sourire ainsi. On dirait un chien trop maigre qui se serait mis à marcher sur les pattes arrière, et qui trimballerait sa carcasse frêle et un peu voûtée de tables en table… Enfin bref, je suis là pour bouffer, et à voir ce que préparent les trois balèzes qui s’escriment derrière leur comptoir, la fille de l’hôtel a l’air d’avoir été de bon conseil… L’acrobatique lévrier afghan - elle a les cheveux longs - me place, dans une merveille de pub dentifrice, tout près des cuistots. Elle frotte un peu son derrière contre la table en partant…


Le temps qu’on prenne ma commande, je prête un peu attention à la clientèle de l’endroit. Il y a vachement de monde pour un dimanche soir. Un examen un peu plus approfondi me laisse à penser qu’un paquet de gusses dans mon cas m’entourent. Beaucoup de types plutôt jeunes et seuls sont attablés. Ils passent sûrement le concours eux aussi, demain. Un d’entre eux vient se poser à la table à côté, puis un autre, encore un cran plus loin. Pendant ce temps, le lévrier grogne auprès de l’autre serveur - un branleur évident, qui devrait changer de déodorant au plus vite - parce que des clients se sont installés sans attendre qu’elle les place… On ne se parle pas avec les autres types, moi j’ai d’ailleurs autre chose à foutre puisqu’on vient de m’amener une Bertuccio Spéciale qui se distingue par une quantité aussi prodigieuse qu’inattendue de poivrons. La serveuse n’arrête pas de passer et repasser autour de moi, se frottant à chaque fois à la chaise, à la table. Je ne le prends pas pour moi… Les tables sont effectivement un peu trop serrées, d’où l’avantage évident d’avoir un cul maigre et plat. Elle s’est peut-être déformée, à la tâche… Le type arrivé en dernier passe à son tour commande, choisit un menu du jour, celui qui n’est évidemment servi qu’en semaine et le midi, passe donc un peu pour un con et choisit finalement des lasagnes, l’air un peu défait, tant par l’embarras que par l’odeur des aisselles de l’autre.


Dans l’expression « un repas en solitaire », le mot le plus important c’est solitaire. Je me fais copieusement chier, la serveuse continue de faire du tampon aux coins des tables (elle doit avoir les fesses couvertes d'hématomes, pourtant elles n’enflent pas, y a pas de justice) et commence vraiment à me gaver, le quart de vin soi-disant italien ne donne carrément pas envie d’aller visiter leurs caves, et j’en suis réduit à contempler les cuisiniers qui pétrissent la pâte sans réelle maestria. Le restau est blindé, mais l’atmosphère éteinte. Sans vraiment le vouloir, je m’aperçois que les deux gars à ma droite ont noué conversation. Ils parlent du concours. C’est marrant comme les gens peuvent être salauds dès lors qu’ils ont moyen de se rassurer aux dépens d’autrui. Celui qui est juste à côté de moi place de temps en temps une phrase ou deux, mais c’est son compère, celui qui ne sait pas lire un menu, qui fait l’essentiel de la discussion ; faut dire qu’il a de la matière. Il a bûché le concours depuis des mois, tandis que l’autre non, et se gargarise de l’utilité de sa préparation à distance, des quelques détails relatifs à l’épreuve qu’il apprend à l’autre, tout en guettant avec avidité ses réactions de surprise ou de trac subit de son interlocuteur, devant l’ampleur d’une tâche qu’il ne soupçonnait pas. C’est un schéma classique, je n’avais pas connu ça depuis la fac. Et ça ne me manquait pas. Le roquet surentraîné ne lâche pas sa proie, l’autre en oublie de bouffer… Mon voisin de pizza semble gagné par la trouille, malgré ou peut-être à cause des « mais je ne veux pas t’affoler » faussement bienveillants de l’autre. Quel enfoiré. À moi aussi il me fout la trouille ce con.


- Allez je peux bien me poser là… Si le Monsieur veut bien, me glisse alors une espèce d’épave dans un relent atroce.

- Oh… Bien sûr oui. C’est cool…


C’est cool… N’importe quoi. La surprise me fait dire des conneries vraiment lamentables parfois. Le gars s’installe, dans un silence religieux, à ma gauche. À un mètre tout au plus : l’odeur est insoutenable. Il embaume le restaurant à lui tout seul, de cette odeur âcre qu’ont les purs pochetrons, comme si leur sueur changeait de composition à cause de la tétine. Décapant. Presque tout le monde le regarde, d’autant plus qu’il a le front ensanglanté. La blessure doit dater de quelques heures, ça a eu le temps de coaguler. Ce mec est repoussant, mais fascinant d’un certain côté : sa trogne parcheminée et éraflée, ses effluves, rien ne semble le mettre mal à l’aise, il est comme un poisson dans l’eau, ou plutôt une cerise dans du kirsch… Il attend tranquillou que la serveuse, qui visiblement prend tout son temps, vienne le servir tout en observant sans aucune gêne son cul maigrelet bousculer les tables. De temps en temps il me jette un coup d’œil, avec un air de connivence perturbant… Dans cinq minutes, il tâte sur les fesses du lévrier.


- Bon alors ça vient oui ?!!


La méthode est un peu bourrue, mais il n’a pas tort, mon nouveau copain. Ça fait bien un quart d’heure qu’il attend que quelqu’un s’intéresse à lui autrement que pour se foutre de sa gueule sous cape, et d’ailleurs presque autant que j’attends le café et l’addition. Les deux autres à ma droite se sont tirés, la pizzeria commence tout juste à se vider.


Enfin, tandis que le clébard en culottes courtes se planque derrière la caisse, le serveur qui pue la sueur se pointe. Normal que ce soit lui.


- Monsieur… dit le branleur d’une voix trop pincée pour être honnête.

- J’aurais préféré la gamine…

- Vous désirez ?

- Ben, je désire manger mon petit bonhomme, répond l’ivrogne avec de faux airs de Gabin dans la voix.

- …

- Tu me mets une pizza, n’importe laquelle. Je m’en tape… Une bonne.

- Mais…

- Vas y choisis, je te dirai après si t’as bien senti le coup…


Deux minutes plus tard, il se retrouve avec une montagne de poivrons face à lui.


Finalement mon café n’arrivera jamais, je vais régler directement au bar et me tire de chez l’ami Bertuccio avec un certain soulagement. La neige ne tombe plus. Au loin se dessine le toit colossal du marché de gros le plus important de France, et encore plus loin les masses sombres de ce pompeux centre d’affaires où j’essaierai d’être le meilleur, demain… Je rabats ma capuche pour me protéger du vent, le vrombissement continu des moteurs m’accompagne jusqu’à ma chambre. Je me sens seul, comme rarement, paumé loin de chez moi face à l’épreuve qui m’attend, le cerveau sans doute imperceptiblement embrumé par le quart de piquette d’Italie… À peine entré, je rallume la lucarne hypnotique. Un match de boxe. Souvent plaisant de voir des gars se taper sur la gueule avec talent, tout en sachant que rien de grave ne devrait se passer. Autant la violence me fout les boules en vrai, autant elle est excitante en tant que jeu. Je suis une petite frappe. Je mets un thé en route, retire mes pompes et m’allonge sur le pieu, quand soudain on cogne à la porte. Il est un peu tard pour que ce soit un employé. Je me plante derrière la porte, abaisse la poignée, et demande connement « qui c’est ? » alors que je le devine déjà très bien au fond de mon ventre.


- Hé salut vieux. Je peux entrer ? me demande le front amoché, luisant au lampadaire du parking.


Il se tape visiblement de ma possible réponse, puisque pénétrant aussitôt dans le micro-hall de mon antre d’un soir… Je ne réagis même pas, complètement abasourdi par le culot du type du restau, et surtout troublé de savoir qu’il m’a suivi depuis là-bas. Le gars extirpe deux canettes des manches de son blouson aviateur, un truc immonde et râpé avec des fermetures éclair partout. Largement de quoi planquer tout un pack. Il se pose sur le pieu tout en me regardant avec cette assurance presque charmante du gars qui a pleinement conscience de son culot, mais qui sent qu’il peut se le permettre. Rapidement, l’odeur dans l’appartement prend cette saveur vinaigrée qui m’avait assailli tout à l’heure. J’attrape une chaise, plus pour me donner contenance que par réelle envie de m’asseoir, et la pose près du lit.


- Je m’appelle Bob.

- C’est bien…

- Et toi ? C’est comment ?

- David.


C’est déjà mort et je le sais, je tente pitoyablement de retenir ces réponses qui sortent quand même, me demandant encore comment j’ai pu laisser entrer ce gars… Lui ne change pas vraiment d’attitude, laisse couler un maximum de temps entre chacune de ses phrases, comme un chirurgien opérant un cas qu’il estime difficile, comme un sculpteur s’attaquant à une roche trop friable. Il me parle de la pluie, du mauvais temps, de sa pizza et des poivrons qu’il digère mal - c’est vrai que ça manquait, une odeur de poivrons presque digérés - sans vraiment faire gaffe à mes rares répliques. Il débite sans hâte un petit discours de convenance, d’une façon trop suffisante pour que reste éternellement stoïque. Mon cœur se remet à battre la chamade, je sens enfin monter en moi de l’adrénaline, et même une rage peu commune… L’envie subite de lui rentrer dedans, de lui finir le front, de le faire passer au travers de la porte. Mon poing droit se crispe un peu sur le montant simili-acajou de ma chaise… Il commence à décapsuler une bière.


- Bon ok, on arrête là… J’ai été sympa, mais franchement j’ai pas que ça à foutre, tu vois ! J’ai du boulot moi demain, et ce soir aussi. Je me lève tôt putain, on se connaît même pas, j’ai pas envie de boire. Et toi à mon avis, t’as pas vraiment soif non plus.

- C’est ça ton boulot, dit-il en pointant son menton râpeux vers la télé, où le petit mexicain vient d’aller au tapis dans l’indifférence générale.

- C’est pas le souci merde ! J’ai envie d’être peinard ! Tu te crois où ?!!

- Tiens David…

- Pfff merci… dis-je en m’emparant de ma bière comme un petit mexicain groggy.


Finalement, passée la cuisante humiliation de mon putsch foireux, les choses finissent un peu par s’arranger. Ayant ouvert la fenêtre sous le fallacieux prétexte d’en griller une, l’air ambiant est devenu certes polaire mais respirable. Et surtout, Bob s’avère être un gars vachement sympa. On dirait qu’il m’aime bien sans raison, juste comme ça. Ce type a un véritable génie propre, une faculté rare pour les relations humaines… Je n’arrive pas encore à croire qu’il ait pu m’embobiner à ce point, alors que j’étais pourtant pleinement conscient de ce qui se passait, et que j’étais contre. L’impression finalement de m’être fait enculer de force, et de découvrir qu’au fond ça n’est pas si désagréable… On cause tranquillement, autour de notre deuxième bière respective (j’étais sûr qu’il en avait d’autres) ; il est très intéressé par mon concours, ou du moins fait bien semblant, me pose plein de questions carrément étonnantes vu son état avancé, et je commence à me dire que même si la nuit doit être courte, ça n’est pas si grave. Je n’aurais pas travaillé ce soir de toute façon. On verra bien demain… Je laisse filer un peu de temps avec ce mec qui m’impressionne tout autant qu’il me dégoutte, et même bien plus. La télé ronronne en sourdine, comme l’orchestre minable qu’on entendrait à peine derrière la vedette, le vent qui souffle dans les branches quand t’es juste occupé à écouter la complainte altérée d’un vieux corbeau.


À mesure que je prends confiance pourtant, Bob semble laisser évoluer tout doucement son attitude et son discours. Je ne suis pas blindé, loin de là, et je vois très clairement qu’il commence à se livrer de plus en plus, comme si lui aussi laissait retomber un bouclier de trouille.


- T’en veux une ?

- Ah non mon vieux ! c’est fini, j’ai arrêté, me répond-il en se tapant sur les cuisses, navré, juste avant d’extirper un paquet de fraises tagada de son inépuisable blouson.


Tout en continuant à presser la détente de la tchatche, il engloutit les bonbons rouges comme des perles, donnant les arômes d’une surprise-partie d’un autre âge à notre discussion. Rien ne semble l’arrêter, pourtant j’aimerais bien qu’il la boucle un peu, qu’il arrête de soupirer, de gueuler, de postillonner comme ça, le mélange olfactif dégagé commençant à m’attaquer sérieusement l’estomac.


- Tiens au fait, Bob. J’ai vu qu’ils avaient foutu une corbeille de saloperies là, sur la table… Ouais dans les corbeilles. Des trucs à la menthe, et à la réglisse aussi. Te gênes pas…

- Non vieux c’est bon. J’ai ce qui faut.


Et il extrait une nouvelle fois, tel le capitaine caverne de mon enfance, des fraises écœurantes de ses poches. Dépité, je me laisse retomber sur le dossier de cette putain de chaise, qui commence à me ronger le dos.


- Et tu fais quoi toi, dans la vie ? À part arrêter de fumer…

- Je fais pas mal de trucs. Rien que tu n’aies jamais touché à mon avis… Attention c’est pas pour te doser que j’dis ça hein !… Tiens tu vois hier, j’étais en Italie. Florence, Naples… J’ai pas fait qu’amuser le terrain…

- Seul ?

- Ouais toujours. Quand je veux de la compagnie, j’arrive à me débrouiller, dit-il dans un éclat de rire mi-forcé, mi-retenu…

- Et tu fais quoi ?

- Des affaires mon petit pote ! Des affaires…


Il se vautre encore un peu plus sur le pieu, évitant l’espace de quelques secondes mon regard, les lèvres pincées. L’air agacé. Je comprends aussitôt que les affaires en question sont sans doute en accord avec sa dégaine : dégueulasses et puantes. Mais lui, en savant stratège qu’il est - ça ne fait plus aucun doute à mes yeux - reprend aussitôt la main, comme pour éteindre le feu que sa réponse tronquée vient d’allumer en moi.


- Je t’aime bien tu sais, David. Y a pas mal de gusses qui m’auraient envoyé chier. Y en a qui auraient osé, c’est clair.

- Tu m’étonnes…

- Tu sais pas qui je suis, hein ?

- …

- T’inquiètes, c’est cool… ah, je t’aime vraiment bien toi !


Il me prend un moment par le cou. J’ai vraiment peur, à nouveau.


Après m’avoir lâché le col, ressentant sans doute ma gêne, il se re vautre sur mon pieu, puis commence à me reparler, beaucoup plus doucement, comme si sa subite marque d’affection avait lessivé une partie de ses forces ; où plutôt comme s’il ressassait une erreur à peine commise, comme un alpiniste qui reste un instant au bord d’un gouffre après avoir failli y tomber… Moi, j’ai trop d’inquiétude pour le questionner à ce sujet, pas assez de lucidité pour me fier à de furtives impressions. Alors je l’écoute, en relançant de temps en temps ses monologues lorsque je le sens prêt à s’essouffler. Je joue la montre à défaut de mieux. La fatigue commence à me tarauder, le radio-réveil et les cadavres au sol m’indiquent que c’est tout à fait normal… Me vient alors à l’esprit qu’il pourrait s’endormir là, ce salaud… S’il me demande, qu’est-ce que je fais ?…


Tandis qu’il me parle de l’Italie, et de la facilité avec laquelle même un type comme lui peut se faire arnaquer chez le premier commerçant venu, je regarde ses yeux en capote de fiacre. Une faible lueur parvient à s’échapper des deux fines meurtrières, un air en totale discordance avec le discours narcissique qu’il me tient. S’il ne m’impressionnait pas autant, je croirais volontiers qu’il doute, qu’il a peur, comme moi… Soudain, au détour d’une de ces phrases que l’on oublie à mesure qu’on les entend, Bob se lève, et se dirige d’un pas trop indolent pour être parfaitement naturel en direction des chiottes. Quelques secondes plus tard, je l’entends gueuler après la cuvette, qui se barre sur le côté dès que l’on tente de s’y asseoir… Moi, je rigole en silence à l’imaginer essayant de trouver une position qui permette de faire ce qu’il a à faire là-bas tout en maintenant en place l’anneau fuyard… Je me revois quelques heures plus tôt. Je me marre oui, d’une façon qui m’apparaît bientôt ridicule. Je me marre de ces rires nerveux que l’on a parfois lorsque l’on sent une situation nous échapper totalement, je ris de me voir ainsi piégé, consentant par défaut de réaction. Je suis une huître collée à son rocher Myriade, qui poireaute en attendant que la marée remonte enfin, et que se barre la grosse mouette alcoolique qui est en train de chier sur ma coquille… Je suis ridicule, et je me marre de l’être. Quelques larmes arrivent déjà, et mes ricanements muets redoublent rien qu’en entendant la chasse d’eau.


- Hé ! Ça va David ?…

- Ouais… Ouais t’inquiète, lui réponds-je en m’appliquant au maximum pour retenir mes contractions abdominales.

- Ça pue c’est ça ? C’est parce que ça pue que tu te marres ? me dit-il plein d’espoir, commençant lui aussi à sourire.

- Oh… oui ! C’est ça Bob, tu m’as bien enfumé la piaule espèce d’enculé…


Ses billes se figent. Et mon rire s’éteint. Le simple fait d’avoir traité ce mec d’enculé, sans vraiment y faire gaffe, pourrait me coûter très cher. Parce qu’il ne faut pas se leurrer : Bob n’est pas un monsieur tout le monde, c’est même monsieur personne si je me fie aux individus qui ont croisé mon chemin jusqu’à ce soir. Ce type est à part, c’est peut-être le genre de gars à qui dire « espèce d’enculé » est très grave. J’ose à peine le regarder dans les yeux maintenant, tentant de conserver le plus longtemps possible ce genre de sourire crispé que l’on adopte au sortir d’une blague ratée…


- T’as peur de moi.

- …

- C’est con d’avoir la trouille, je ne te ferai rien. Tu sais, tout à l’heure, quand t’as ouvert la fenêtre. Tu te souviens ? Je t’ai dit que c’était pas la peine, mais t’as ouvert quand même et finalement j’ai laissé faire. Tu te souviens ?

- Oui, bien sûr.

- Et t’as remarqué quelque chose depuis, dehors ?

- Non… C’est… c’est calme dehors, non ?

- C’est super calme oui. C’est le genre de calme que je fuis. Le genre d’absence qui me flanque les jetons, parce qu’elle n’est pas naturelle. Écoute bien : on n’entend rien, à part l’autoroute, les deux trois connards au loin qui rentrent chez eux à pas d’heure. Personne ne traîne dans les parages, depuis un bail. Et tu sais pourquoi ?

- …

- Parce que personne n’a le droit de passer ici, sur ce putain de parking, sous cette putain de chambre d’hôtel… Parce que dehors, l’absence que l’on entend c’est une présence qui se dissimule. Ils ont fait leur périmètre, ils sont postés, et ils attendent.

- Je ne comprends pas…

- C’est pas plus mal. Tu vois, ce soir j’ai pris un peu de bon temps avec toi. J’ai profité du peu de liberté que m’offrait à contrecœur un parfait inconnu. Faut pas déconner, je sais bien que je t’ai forcé la main… Et si j’ai voulu à tout prix rester un peu ici, à l’abri, c’est parce que je sais bien qu’ils sont là dehors, à attendre que le loup sorte du bois. Ils m’ont raté de peu à Orly, ça se voit même sur mon front.

- T’es recherché ? dis-je d’une voix de gamin, les yeux rivés à sa blessure, que j’avais oubliée pendant tout ce temps.

- Évidemment. Robert Grappelli, que je m’appelle. Et si tu mates un peu la télé, t’as déjà dû entendre causer de mon cas… répond-il avec un calme effrayant, tout en enfilant ses pompes. Au début tu sais, je voulais surtout me cacher, et peut-être te prendre en otage pour me faire la malle. Mais ça fait déjà deux ans que je cavale. Deux années de galère à écouter le silence autour de moi. Deux années à avoir la chiasse quand je m’aperçois que les roussins m’ont repéré… Alors ce soir c’est fini. Parce que j’en ai marre, et aussi parce que j’ai pas envie de te faire déguster, t’es un gars bien… C’est peut-être parce que t’avais peur de moi, mais t’as pas cherché à me foutre dehors à tout prix, t’as pas cherché à savoir ce que je foutais là avec mes canettes et mon front dégommé. T’as pas fais chier ton monde, et je vais suivre ton exemple. Je vais me rendre, payer ma dette comme ils disent et après on verra…


Il se pointe alors juste derrière le carreau, l’entrebâille un peu plus, et gueule à qui veut l’entendre qu’il est bien là, qu’il arrive, sans armes. Un instant, malgré toute la persuasion dont il a su faire preuve, je le crois complètement timbré. De la chambre d’à côté montent quelques jurons, peut-être un de ces gars avec qui demain j’aurais dû passer un concours... Et puis dehors. Dehors, où le silence se rompt brutalement. Un type avec un porte-voix interpelle Grappelli, lui demande de sortir mains en l’air, immédiatement. Lui demande aussi de ne pas se servir de moi, qu’ils l’auront quand même, quoi qu’il tente… Ils lui disent que c’est fini. Je le prends pareil pour moi. La porte se referme sur Bob, tout doucement. Puis des bruits, des pas saccadés, des frottements sur le mur, quelques paroles en douce sur le balcon, et c’est tout. L’autre à côté s’est rendormi, sûrement. C’est fini.




Mars 2005


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   horizons   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Ambiance originale, personnages peu communs et très belle écriture J'ai bien aimé le ton sarcastique (pour la description de la pizzéria ou de la serveuse qui, pour une fois, n'est pas un fantasme sur pattes à 2 balles!)
La fin est en plus complètement inattendue...(même si dans la réalité elle est peu probable.) Mais bon, on n'est pas dans la réalité.
Je changerai le titre qui me paraît pas à la hauteur du récit.

   David   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Calouet,

Du tout bon, bien sympa, merci pour la lecture. J'ai tiqué sur cette expression : "ils pullulent comme les pavés en enfer." puis je me suis dit que ça pouvait être une reformulation de - l'enfer est pavé de bonnes intentions - un truc à la Audiard qui ne tombe pas très, très juste à mon goût.

   Menvussa   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
C'est un très bon texte. Le paysage et l'ambiance y sont très bien décrits. Une maîtrise certaine de l'écriture, même si je regrette parfois certaines expressions qui, si elle font couleur locale, jurent avec le reste du texte.

J'ai particulièrement aimé :

"Parce que dehors, l’absence que l’on entend c’est une présence qui se dissimule"

Personnellement, j'aurais préféré que cela se passe à la montagne avec le champ des petits oiseaux mais, c'est une autre histoire.

   Ariumette   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Récit vraiment bien mené. On reste accroché jusqu’au bout sans finalement vraiment savoir pourquoi ! Etrange d’être ainsi dans le même état d’esprit que le narrateur !
Le seul petit point négatif pour moi c’est que l’histoire de la serveuse traîne un peu en longueur. Je trouve qu’elle revient un peu trop.
Autrement, la chute est sympa et surtout l’atmosphère de ton récit est réussie et jamais relâchée.
Le style est fluide, le vocabulaire adéquat. Vraiment chouette !

   Anonyme   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
La première qualité de ce texte, c'est l'écriture. Surtout dans la première partie. L'auteur excelle à créer une ambiance.
Le problème c'est qu'il s'y complait, ce qui entraîne ipso facto quelques longueurs. Peut-être est-ce voulu dans un effet de style.
Je pense néanmoins que quelques coupes bien dosées allégeraient et muscleraient le récit.
La chute me semble manquer de crédibilité, mais que sait-on de ce qui se passe dans la caboche des gros durs en cavale ?

   Anonyme   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Au début, j'ai failli zapper. Comment souvent. Puis je me suis laissé entraîner. Pas eu tort : belle écriture, ambiance et protagonistes très bien rendus, point de vue original.
En négatif, 1 ou 2 fautes de syntaxe, juste de quoi tirer légèrement les oreilles des correcteurs.
Et ce titre, vraiment pas à la hauteur, effectivement.

Au plaisir de te (re)lire.

   Anonyme   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
L'écriture, les phrases, le choix des mots, les images, les personnages, la description de la serveuse (superbe !) tout est vraiment choisi, bien installé.
L'histoire en elle-même.
De toi j'ai lu des choses fantastiques, tellement même que je suis restée devant en me demandant comment il se fait qu'un éditeur ne t'ai pas attrapé dans ses filets. Tes textes, y compris celui-ci sont vraiment bien écrits avec une verve très personnelle et une écriture qui a vraiment du poids, à chaque fois des phrases qui font mouche. Mais cette histoire là je ne sais pas.
D'abord il me manque ce concours. Il a l'air d'être important, or il n'est pas développé. Il a un rapport avec Rungis, mais je ne vois pas bien lequel.
Ensuite il y a quelques longueurs, en particulier quand Bob s'incruste dans la chambre de David. Va savoir pourquoi, peut-être à cause du résumé, je m'attendais à une rencontre fantastique - dans le domaine du fantastique - et bien que j'aie été surprise, ça m'a laissée un peu sur ma faim.
Pas trop crédible le dur, sa démarche psychologique j'entends, d'autant que ce n'est que la peur qui a vraiment empêché David de l'envoyer bouler et de le virer de chez lui. Ce que je veux dire c'est qu'il y a quelque chose dans le physique du gars qui met mal à l'aise David, qui fait naître cette peur et je ne sais pas trop ce que c'est.
Ensuite, c'est un peu inattendu ce revirement de la part de Bob d'autant que l'assise est bancale. Je le ressens plus comme un prétexte d'en finir avec sa vie en cavale : il lui en fallait un pour se rendre il a trouvé celui-là.
Ceci n'est bien sûr que mon ressenti,
Au plaisir de te lire.

   aldenor   
3/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J’aime l’écriture sans accrocs, le ton sobre et juste; l’analyse psychologique est intéressante, on suit bien le héros dans ses hésitations et ses incertitudes face à l’inconnu qui débarque chez lui.
Mais finalement, le cœur de l’histoire est la relation entre ces deux hommes et je trouve la préparation proportionnellement trop longue, sans nécessité. Le concours, le resto, Rungis, tout ça, sans être inintéressant (le premier paragraphe avec la présentation de Rungis est particulièrement bien tourné), fait plus de la moitié de la nouvelle qui du coup me parait mal équilibrée.

   Flupke   
4/5/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
J'ai bien aimé l'ambiance glauque, sombre, très bien rendue. Et l'air blasé, ironique du narrateur.
En particulier:
L’acrobatique lévrier afghan - elle a les cheveux longs
passée la cuisante humiliation de mon putsch foireux
Superbe ton désabusé.

   Anonyme   
5/5/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour

J'ai cru lire du nestor Burma. j'ai particulièrement retenu la description de la serveuse.
Ici les descriptions longues servent l'ambiance , et moi qui ai tendance à les zapper, j'ai été accrochée.

Les méandres psychologiques du perso sont bien décrites. juste un petit détail: comment l'autre parvient à le retrouver dans son hôtel ? Il l'a suivi?

Sinon la chute ... Oui inattendue et elle sonne juste

Merci

Xrys

   victhis0   
5/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Je suis fan de ce style, de cette langue précise, verte et désabusée, parfaitement maîtrisée.
Fan aussi de l'ambiance, des desciptions sommaires mais justes des protagonistes, de ce coté "perdu d'avance" suffisamment fin pour que l'on doute quand même de l'issue.
Auteur rare à tous les sens du terme, dont j'aprécie la langue et les intrigues.
Un petit bémol tout de même sur celle-ci que j'ai trouvé certes curieuse, mais j'ai quand même trouvé la posture du truand peu crédible, voire carrément improbable. Sûr qu'une prise d'otage pure et simple aurait fait "déjà vu", mais il est peu vraissemblable que le truand est suivi, seul, notre héros sans se faire pincer à ce moment là par les condés...

   widjet   
12/5/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Calouet poste trop peu pour qu’on puisse ne pas lire ce qu’il fait (et puis j’ai tellement de bons souvenirs avec ses textes). Son dernier bébé (« La falaise noire » qui m’avait plutôt plu remonte à presque un an !).

Bon, je ne vais pas tourner autour du pot. Je n’ai pas été emporté de plaisir.

Certes, on retrouve donc (mais pas dans la continuité) le plaisir dans le langage sec et vert de l’auteur, son affection palpable pour les marginaux, les éclopés de la vie. Mais, j’ai trouvé :

- trop de digressions (le personnage a systématiquement un commentaire à faire comme une sorte de prétexte obligatoire à la recherche du « bon mot » à chaque fois. Ca tue un peu le naturel et le réalisme),

- de la longueur – inutile - aussi (la scène de restaurant s’étire trop sans pour autant être très passionnante malgré un souci réel pour donner une atmosphère),

-des redites (les fesses de la « serveuse »),


Bref tout ceci ralentit inutilement le rythme et m’a sorti un peu du récit et de l’intrigue qui finalement n’est pas celle qu’on croit (j’ai du louper un truc car finalement que sait on de ce concours ?)

Cela donne aussi l’impression que l’auteur a le cul entre deux chaises (quelle histoire veut il réellement raconter, celle du héros ou celle du captif ?).

Enfin, la longue tirade du mec en cavale à la fin, ça le fait pas trop. Ca « ramollit » le personnage dont la caractère me semblait plus « taillé ».

Je suis très déçu car même si certains passages sont pas mal notamment les quelques réflexions cyniques du personnage, l’histoire, déjà empesée d’un héros un tantinet trop bavard et pas toujours aussi percutant qu’on le voudrait, n’a pas autant de mordant et certaines zones d’ombres – qui me semblent involontaires – demeurent.

J’espère que tu nous feras pas attendre trop longtemps avant ton prochain opus

Merci Calouet

W

   Raoul   
17/5/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Je me suis fait alpaguer.
J'aime bien l'ambiance instillée par le vocabulaire et les descriptions jamais lourdes de ces endroits qui ne ressemblent pas à grand chose, où tout est du provisoire qui s'étend jusqu'à durer.
Les personnages sont biens campés sans pour autant être trop descriptif (intéressante l'idée des odeurs).
L'histoire se déroule avec beaucoup de naturel, je n'ai pas vu les ficelles, je me suis laissé mené par le bout du nez jusqu'à la pirouette finale qui a le grand mérite de laisser en suspend (pas de sur-lignage) et les personnage et puis nous lecteurs.
L'histoire à déjà commencé quand on commence la lecture, elle se poursuit aussi sans nous après, alors, nous sommes des silhouettes quelque part dans le décor…
Chouette lecture.

   florilange   
2/6/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Me suis sentie dans 1 polar. Faut avoir vécu Rungis 1 soir, 1 nuit d'hiver pour en saisir l'atmosphère. Les digressions dans la pizzeria sont bien vues, il est seul, s'ennuie, 1 soirée à tuer avant 1 concours qu'il aimerait oublier : 1 homme ordinaire, ne vivant que de l'ordinaire. Quoi faire, sinon regarder autour de soi?

Maintenant, qu'il ouvre la porte à n'importe qui, ça, c'est 1 autre histoire, 1 truc de gars peut-être? 1 femme n'aurait pas ouvert.

J'apprécie le style, l'humour forcé, désabusé, plutôt vachard du personnage. C'est d'abord de lui qu'il se moque. Il a peur sans y croire pour de bon, la chute le surprend donc autant que nous. Alors, il n'était pas seulement empêtré, gêné de ce type "odorant", il est vraiment passé à côté d'1 drame?

N'ayant pas encore lu les autres textes de calouet, ne peux pas comparer. Mais créer une ambiance, c'est 1 art difficile. J'aime.
Florilange.

   Selenim   
4/6/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Superbe texte d'ambiance, écriture précise et organique.
L'auteur place ses personnages comme sur un échiquier et met le lecteur mat bien avant la chute.
Du bon boulot.

Selenim

   boisluzy   
27/8/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Du bon boulot. Un brin de sexisme mais tout le reste passe très bien. Vous avez un sens aigu de la narration. J'ai pu largement en juger par ailleurs. Il faudrait peut-être désormais travailler au long cours. Un roman, par exemple. Vous avez ce qu'il faut dans la narration, la construction, le souci du détail, la férocité sociale pour tenir la distance. Tenez-nous au courant lorsque vous serez publié!
Ceci dit quel concours peut-on bien passer à Rungis? Autrefois c'était à Arcueil. Les choses ont-elles changé dans la ville-lumière?


Oniris Copyright © 2007-2023