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Neojamin
23/3/2024
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
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J’ai été séduit dès les premières lignes, l’ambiance est captivante et je me laisse happé par le récit.
C’est bien écrit, mais plus un texte et bien écrit, et plus l’esprit devient critique, s’arrêtant aux petits détails qui font tiquer. Je me permets donc de relever ce qui m’a sorti du récit à certains moments, l’usage douteux d’un adjectif, un mot de trop, un manque... «Bah», je n’ai pas compris, est-ce utile ? «Scrollant agressivement», je comprends l’idée, mais j’ai quand même du mal à imaginer un scrollement agressif... un autre mot serait peut-être plus adapté. «de bric et de broc», je me demande juste si on ne peut pas trouver quelque chose de moins français. Quand un texte parle de l’étranger, les expressions toutes faites et bien françaises ont tendance à me déranger. «a pris l’habitude d’oublier vite» un peu bancal comme phrase «avec leur force à remuer le sol» idem «la courbe de l’esclave arrondir son dos ; plus elle se sentait grandie» la contradiction est sans doute voulue, mais elle m’a fait tiquer... Peut-être que grandie pourrait être remplacé par un synonyme qui rentre moins en contradiction avec le dos voûté. «Elle jette un coup d’œil à l’heure.» Le passage est un peu long entre le moment où elle rédige son post et la reprise du présent. J’avais oublié qu’on était là. «Yun, c’est», pourquoi pas simplement Yun est... J’ai remarqué à plusieurs moments un changement de ton involontaire, une sorte de franc-parler qui s’incruste dans un texte généralement écrit avec un style formel. «C’était d’ailleurs au cours...» cette transition me paraît maladroite, un peu forcée. C’est un aller-retour passé/présent de trop pour moi. Le lecteur que je suis à envie de rester au présent. En fait, à partir de ce moment-là, je suis perdu. Est-ce un problème de cohérence de temps ? Je comprends que vous cherchez à nous faire plonger dans les souvenirs du personnage qui se réveille et scrolle, mais quelque chose ne fonctionne pas pour moi. Je me perds, les aller-retours ne font pas sens. Je pense que c’est un problème de temps... En tout cas, l’impression est tenace, j’ai eu beaucoup de mal à finir. Je pense qu’il y a quelque chose à revoir pour que la lecture soit fluide et que l’intrigue se déroule naturellement. Bonne continuation. |
Perle-Hingaud
2/4/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
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J'ai trouvé cette histoire prenante. Il y a du fond (terrible) et l'écriture est agréable. Les personnages sont dépeints clairement, j'ai visualisé les scènes. Je ne sais pas si cela reflète la réalité du traitement du cinéma en Chine, mais j'y ai cru. L'aspect véridique est renforcé par les notes de bas de page, intéressantes.
Seul bémol: le dialogue de fin est un peu confus. Qui dit quoi ? la mise en page avec des guillemets / des tirets n'est pas la bonne à mon sens. Il faudrait sans doute une autre présentation. Autre chose: je pense que ce texte serait plus percutant en le ramassant : il est un peu dilué avec des idées qui se répètent. Cependant, ce sont des pistes de travail si l'auteur le souhaite. Telle quelle, la nouvelle est déjà très réussie. Merci pour cette lecture ! |
hersen
3/4/2024
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
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Bonjour,
Je suis très mitigée sur ce texte. Si le fil est bon, le sujet plus que pertinent, j'émets plus de doute sur "l'ambiance". Je trouve le tout assez gentil. Ce qu'il manque, en fait, c'est le côté glaçant, obturant, d'être confronté à ces personnes qui, à des degrés divers, forment le diktat d'une marche à suivre pour aller droit, très droit. Ici, j'ai l'impression que je pourrais transposer sans beaucoup de difficulté dans un monde occidental, où les pressions ne sont pas non plus absentes pour obtenir un rôle, on y fait et défait des carrières pour pas grand-chose. Je veux dire que je ne ressens pas vraiment le poids énorme du"broyeur". Je ne suis pas assénée, je ne suis pas glacée à lire le texte. Je crois que je réagis ainsi parce qu'en fait, pour illustrer cette soumission, il aurait été plus percutant de prendre un fait bien moindre, avec, va savoir, une répercussion proportionnellement plus importante pour la vie d'un quidam. En fait, et c'est juste maintenant que ça me vient en écrivant ce commentaire, on est resté dans une mentalité très européenne. L'écriture, si je ne trouve rien à redire dans l'absolu, n'est pas assez incisive pour le sujet proposé. |
plumette
13/4/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
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j'ai lu cette nouvelle avec intérêt et je pense que son contexte géographique y a participé ,ainsi que la qualité de l'écriture bien sûr, même si, à la fin de ma lecture, je me dis que ces pressions visant à contraindre une personne à l'auto censure pour pouvoir travailler aurait pu être transposées dans d'autres lieux. Pour moi, la chine c'est très exotique! car je n'en ai pas la moindre expérience ni connaissance et de ce fait, je peux vous faire total crédit de ce que vous racontez( ce qui serait différent avec certains pays arabes ou la Russie de Poutine)
J'ai apprécié l'écho entre le sujet du court métrage ( la femme enchaînée) et les chaînes de Liweï qui cède aux menaces du chef de la propagande. Je la trouve un peu naïve de ne pas s'être préparée à l'interrogatoire du policier alors même qu'elle sait ce pour quoi on l'a convoquée. Vous lui prêtez beaucoup de colère et cependant, elle ne fait rien de cette colère ? j'ai aussi trouvé que la nouvelle pourrait avoir plus de force si elle était plus ramassée. Il y a des digressions qui m'ont paru un peu longues , je ne suis pas certaine que le passage par la case "avocat" soit indispensable, de même pour le moment où lors de la cérémonie de remise des prix les trois femmes, éméchées, se mettent à déconner. Mais c'est un travail précis et soigné, et de cela , je vous remercie! |
Louis
15/4/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
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Un texte prenant et fort intéressant, offrant l’image d’un pouvoir qui craint le pouvoir de l’image, une puissance politique et idéologique qui craint la puissance de l’image cinématographique, et s’efforce de la contrôler.
L’action se déroule dans la Chine actuelle. La ville, Shanghai, s’éveille : « Il est 6 heures, et Shanghai s’agite déjà » Cette phrase, comme un refrain, ouvre et clôt le premier paragraphe. Ce refrain fait écho à un autre, chanté autrefois par J. Dutronc : « Il est cinq heures, Paris s’éveille » Dans ce clin d’œil, un cliché est bousculé : Shangai, la grande ville industrieuse d’Asie, hyperactive, entre en action à six heures, quand Paris, la ville occidentale, le Paris chanté, s’éveille (ou s’éveillait), plus tôt, à cinq heures. Une autre différence implicite entre les deux villes ouvre la contextualisation du récit. Une différence qui tient plus au fond de son sujet. Si le premier plan de la grande cité chinoise est celle de l’agitation, et si une image animée en est dressée, c’est sur le fond d’une image plutôt photographique, dont la particularité réside dans un flou et la coloration étrange de l’ensemble, due à une lumière filtrée par des nuages « tout chargés de la poussière venue des déserts de l’Ouest ». Ainsi tout semble baigner dans une « teinte sépia ». Or le ton sépia caractérise, entre autres, les photos anciennes ; le sépia est la teinte du temps, d’un temps passé, vieilli. Ainsi la ville ultramoderne, aux aspects futuristes, se présente à l’aube, dans un paradoxe intéressant, sous une teinte vieillotte. À quoi s’associe un autre paradoxe : la vie de l’hyperréalisme économique prend une allure étrange, « surréaliste ». La chanson de Dutronc s’ouvre au contraire sur du Blanc : « Je suis le dauphin de la place Dauphine Et la place Blanche a mauvaise mine ». Paris à l’aube, offre du blanc. Et donc plus de netteté et de clarté, malgré sa « mauvaise mine » de ville mal éveillée. Or le blanc ne désigne pas seulement une teinte, mais un nom propre : « place Blanche ». Cette place porte le nom d’une femme héroïque : Blanche Lefebvre. Elle a défendu, avec 120 communardes, cette place contre les Versaillais en 1871. Elle était membre de l’'Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés’, un des premiers mouvements se réclamant ouvertement du féminisme. Elle sera tuée le 23 mai 1871, à l’âge de 24 ans, sur la barricade des Batignolles. D’un côté, donc, un Paris implicite, un Paris qui a connu nettement dans son histoire des femmes qui ont lutté jusqu’à la mort pour des idéaux de justice et de liberté, et puis Shangai, la ville d’un futur qui ressemble à un passé, en laquelle il sera question, dans l’histoire qui va suivre cette ouverture, du devenir chez une femme chinoise d’aujourd’hui des idéaux de justice et liberté. Elle se nomme Liwei. Elle est actrice de cinéma. Elle est femme d’image. On ne suit pas au présent l’aventure douloureuse qu'elle a vécue. On entre dans ses souvenirs. Le texte se confronte à la diversité des images. On passe de l’image extérieure de la ville aux images mentales de Liwei, à ces images-souvenirs teintées cette fois par sa sensibilité, par toute sa subjectivité. Ainsi se refait-elle le film de son histoire : « Elle se revoit rédiger ce post avec empressement… » Elle nous invite, spectateurs-lecteurs à voir ce film avec elle. Par nos yeux, et nos yeux dans son regard : un film à visionner. L’image a pour elle une fonction de mémoire. On ne produit pas mentalement des images parce que l’on se souvient, mais on se souvient parce que l’on peut reproduire mentalement les images d’un passé. Son histoire a justement été celle de la production d’un film cinématographique à fonction de mémoire, mais objective et collective. Un réalisateur, Wang, lui a proposé un rôle dans un court-métrage en lequel il s’agit de « retracer la vie romancée de Xiao Huamei, la femme enchaînée » Il s’agit de transformer des images photographiques, qui ont ému tout un pays, celles d’une femme « exploitée », humiliée, asservie, en images cinématographiques. Le film ne serait pas une œuvre de pure fiction, mais la reproduction d’un fait réel. Sa fonction serait effectivement de mémoire : « plus personne ne semblait se souvenir du sentiment de révolte qui avait saisi le pays (…) C'est peut-être pour ça que Wang a décidé de rappeler à tous cette histoire qui avait tant fait couler d’encre. » Un film donc contre l’oubli, qui perpétue une indignation salutaire. Et plus encore, l’image animée, cinématographique, construite sur un scénario pourrait produire plus de puissance émotive auprès du public, en redonnant la force de la vie réelle à l’image-souvenir, en éclairant par une dimension de fiction la part d’ombre que laisse la photo figée en un lieu et en un moment donné. Un film peut être vu et revu, il recèle une puissance contre les forces qui voudraient l’enfouir dans les limbes de l’oubli. Le film mental de Liwei porte précisément sur un film cinématographique. Le film de son histoire s’écrit comme film sur un film. Comme cinéma au second degré. Il y a pourtant une voix off dans ce film, qui est celle du narrateur. Par elle, nous apprenons que Liwei est une actrice « passionnée » ; apprenons encore que, par ce film, ses intentions ne visaient pas à « se mettre dans la peau du personnage », mais à sortir de sa peau pour se glisser dans celle d’une autre et l’accueillir en elle : « elle invitait la femme enchaînée à venir habiter en elle ». Un type d’identification par lequel, le temps d’un film et de ses préparatifs, elle redonnerait vie, une seconde vie à la femme enchaînée, non pour simplement reproduire son sort malheureux, mais pour devenir image vue, à la fois belle et insupportable au regard ; image parlante, non pour reproduire les mots de la malheureuse femme, dont on ne sait ce qu’ils ont été, mais pour se faire la porte-parole des sans-voix, la parole haute des femmes traitées comme du bétail : « Ces voix, toutes ces voix, elle voulait les faire résonner avec leur faiblesse torturée, avec leur force à remuer le sol ». Liwei se sent donc « habitée » par des voix de souffrance et de révolte. Mais aussi, par l’image si bien rendue du personnage réel, elle accomplirait une sorte de dépassement de l’image : elle se ferait l’image à voir de ce que l’on ne doit plus voir dans la réalité ; elle jouerait dans un film la scène de l’’obscène’. Elle se sentait donc « grandie » par ses idéaux élevés de dignité et de liberté. Plus que son jeu d’actrice de talent, ce sont ses idéaux qui lui donnaient une valeur humaine, quand elle avait l’impression de se plier au rang des plus maltraitées, non dans leur soumission, mais dans leur révolte. L’histoire de Liwei est pourtant celle d’un rôle qu’elle ne jouera pas dans un film qui ne se fera pas. Elle va devoir se confronter au pouvoir politique. Le projet de film a été connu des services de police par l’intermédiaire des réseaux sociaux. Nous sommes dans une "société de contrôle", dans laquelle tous les sujets sensibles sont surveillés sur le Net. Le "Grand frère" du Parti veille, et un "panoptikon" a été mis en place, tel que l’avait déjà décrit et pensé Michel Foucault dans Surveiller et punir. Liwei se trouve singulièrement désarmée face à ce pouvoir qui, s’il cherche à s’exercer sur les écrits et les images, joue lui-même de l’image comme apparence. Ainsi ne se montre-t-il pas dans sa réalité brutale et violente. Dans le bureau de police, il prend le visage affable d’un jeune fonctionnaire, simple rouage dans une vaste machine de contrôle. À cette apparence courtoise s’ajoutent et se superposent les images nées de son imagination : « C’était son imagination, qui lui dépeignait les yeux de sa mère au travers de barreaux » ; images d’une réalité plus cruelle et plus redoutable. Cette stratification d’images troublantes l’ont comme vidé d’elle-même, ont chassé d’autres images-fantasmatiques d’ « héroïsme et de résistance ». Liwei n’est pas Blanche Lefebvre. C’est l’image comme représentation d’elle-même qui se trouve mise en question. A-t-elle simplement manqué de courage ? Mais c'est une femme d’image, et son rapport aux images est complexe. Sa faiblesse ne trouve pas de quoi être surmontée dans l’attitude de Wang, le réalisateur. Attitude de résignation et soumission : « il a su manœuvrer la situation diplomatiquement pour éviter toute forme de sanction » L’appui de son mari, « insurgé », ne suffit pas. Dans le dialogue avec son mari, pointent quelques contradictions chez Liwei : elle prétend que le film devait être « l’histoire d’une femme », une histoire singulière, raison pour laquelle il ne conviendrait de changer ni le nom de la femme esclave, ni les « faits réels » pour échapper à la censure. Or, elle se rêvait porte-parole de toutes les voix des femmes humiliées : « ces voix, toutes ces voix, elle voulait les faire résonner… ». Peut-être cherche-t-elle déjà à justifier, sans se l’avouer, sa compromission. Des aspirations conflictuelles se disputent en elle : des « fantasmes » d’héroïsme, mais aussi des images rêvées de réussite professionnelle dans le cinéma : « son plus grand rêve d’adolescente ». Or ce rêve s’est réalisé, ou est en passe de l’être. Elle a joué un rôle dans un film qui a obtenu un prix, un film au titre significatif : « L’âge du vent ». Film au titre poétique, mais qui ne dérange personne, tout à fait inoffensif, et qu’elle-même a trouvé en le jouant « un peu ennuyeux ». Le pouvoir va finir par s’incarner, et prendre chair dans le directeur du "zhong xuan bu". Sa posture, son maintien, son visage s’identifient à la fonction qu’il représente : « raide », « figé dans une posture guindée », « les mains osseuses et froides » ; et regard « intense » et « perçant » de l’homme du panoptikon. Il porte jusqu’à ses poignets les signes de la domination : « un bracelet tibétain » et même une "chaîne", « une chaine d’argent ». D’apparence courtoise, la violence du pouvoir en lui se dissimule et tout à la fois transparaît. Dans un aparté, il dévoile à Liwei, en un tutoiement peu respectueux, la réalité du pouvoir qu’il exerce sur sa carrière cinématographique, et révèle de façon transparente la menace qui pèse sur elle, si elle voulait persister dans son projet de film de « mauvais goût » pour le Parti. Liwei était la proie de puissances internes, le désir de réussite cinématographique, de reconnaissance de son talent d’actrice, et cet autre désir d’incarner des idéaux élevés qui lui tiennent à cœur. Elles s’avèrent inconciliables, il lui faut trancher. « ça ne mènerait à rien de se sacrifier pour la cause » lui avait dit Wang. Elle se résigne donc, son désir de cinéma et de réussite l’emporte sur le reste. Non, Liwei, bien que sensible, talentueuse, pleine d’humanité n’est pourtant pas Blanche Lefebvre. Il lui est interdit, dans sa vie comme à l’écran, de jouer le rôle d’une héroïne, qui place ses valeurs au-dessus de tout, de sa carrière, ou même de sa vie. Ne subsiste que ce "balancement" des sentiments, une légèreté à retrouver : le temps n’étant plus à l’héroïsme, mais à L’âge du vent. Merci Cox pour ce texte tout à fait intéressant, capable de mettre le lecteur en empahie avec la jeune Liwei. |
Cox
21/4/2024
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