Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Sentimental/Romanesque
farigoulette : La cabane
 Publié le 08/12/19  -  11 commentaires  -  7145 caractères  -  73 lectures    Autres textes du même auteur

Une cabane isolée sert de refuge à un couple.


La cabane


La cabane est là-bas à vingt mètres. Couchés dans les herbes ils observent les environs : un terrain marécageux bordé à l’horizon par des montagnes. Un endroit désert oublié du monde. Tel un mirage, à la lisière du marécage se dresse une maisonnette en bois montée sur pilotis. Toute leur attention se focalise sur l’habitation. La porte d’entrée entrouverte suscite leur crainte, Ulla et Buck s’attendent à voir sortir ou entrer quelqu’un. Cela anéantirait leur projet.

À force de fixer cette construction leur vision s’est affûtée. Les planches paraissent en bon état, une fenêtre cassée, des objets prouvent qu’elle est peut-être habitée pourtant il n’y a aucun signe de vie. Le couple a marché pendant des heures pour arriver là. Bannis de leur famille ils ont quitté la ville et se sont aventurés dans la campagne. C’est une belle nuit de printemps. Buck se rassure comme il peut. Une forêt s’étend derrière le marécage : ce serait un endroit sûr pour plus tard. Dans l’immédiat Ulla n’aura pas la force de l’atteindre. Buck s’inquiète pour sa compagne, mais il vaut mieux attendre encore. La précipitation pourrait leur être fatale.

La nuit s’avance lentement. Buck a du mal à garder ses sens en alerte, la fatigue et la faim le distraient, son estomac réclame bruyamment de quoi se sustenter. Il lui suffit de regarder Ulla pour écarter son appétit. Elle coince dans sa gorge les douleurs qui montent de son ventre, n’émet que quelques grognements sourds soucieuse de ne pas faire de bruit. Il faut y aller. Cette cabane a tout l’air d’être oubliée ce sera un excellent refuge où se dissimuler quelques jours. Buck soutient sa compagne pour reprendre la marche. Au lieu d’aborder la maisonnette de face ils font un petit détour pour se présenter sur le côté. Buck décide d’entrer seul et laisse Ulla à quelques mètres. Le cœur battant il pousse la porte, se fait cueillir par une odeur d’abandon, de poussière et de bois en décomposition. C’est un miracle que cette cahute soit encore debout. Le premier coup de vent la fera s’étaler parterre comme un ivrogne. De loin elle faisait illusion et avait meilleure allure. Vite, aller chercher Ulla, la mettre à l’abri, ici elle sera en sécurité tant... que le vent ne souffle pas. Aussitôt dans la pièce Ulla va se réfugier tout au fond et se laisse tomber directement sur le plancher. Enfin elle peut permettre à ses entrailles de s’ouvrir : souffrance et soulagement à la fois.

Devenu inutile Buck a envie de se dégourdir suite à la longue immobilité et la tension subies dans la journée et une partie de la nuit, de plus il ne se sent pas à l’aise entre ces quatre murs vermoulus. Ulla n’a besoin de personne, comme toutes les mères elle sait instinctivement ce qu’elle à faire. Ici pas de restaurant ni de magasin où se ravitailler, en ville les denrées sont faciles à trouver, Buck décide d’aller chasser l’heure est propice. À partir de maintenant sa mission est de nourrir sa famille.

Ulla met au monde deux magnifiques petits aussi rouquins que leur père. Malgré la journée éprouvante Ulla, de forte constitution, s’en tire magnifiquement, elle accomplit les gestes que ses ascendantes ont fait avant elle, à son tour de pratiquer le rituel de la vie. Les bébés sont nés à dix minutes d’intervalle. Pendant quelques jours téter sera leur principale activité. Deux heures plus tard Buck les retrouve tous les trois endormis, les petits serrés contre leur mère. 

Trois semaines ont passé, les bébés ont bien changé : ils ont pris du poids et n’arrêtent pas de gigoter. Ulla est fatiguée des soins qu’elle procure jour et nuit à sa progéniture et tout aussi fière de leur bon développement. Les petits gloutons la sollicitent sans cesse, Buck lui assure sa subsistance pourtant elle a maigri, est affaiblie, les mouflets lui prennent toutes ses forces. Aujourd’hui elle les considère assez costauds pour se passer d’elle quelques instants et va prendre l’air devant la maison. Trois semaines que la maman n’est pas sortie. Que c’est bon de respirer l’air frais ! Elle n’a pas le temps de se délasser qu’un cri se fait entendre et la fige sur place. Interrompant sa chasse Buck la prévient d’un danger. Deux jeunes garçons se dirigent vers la cabane. Ils tiennent chacun un bâton pour écarter les herbes et se déjouer des pièges du marécage.


— Tu es sûr qu’il n’y a personne ? demande le plus jeune.

— Tu vois bien qu’elle est abandonnée on va la nettoyer et installer notre QG, répond son aîné.

— C’est peut-être dangereux, tu as vu comme elle est vieille ? Et s’il y avait une sorcière dedans ?

— Ce que tu peux être trouillard. Fais-moi confiance, on sera comme des papes là-dedans.


Ulla et Buck n’ont qu’une chose à faire : fuir ! Ils se chargent l’un et l’autre d’un loupiot et détalent sans se retourner. Buck prend la tête car il a déjà préparé cette retraite qui devait se produire un jour ou l’autre, il conduit sa famille dans la forêt un abri les y attend. Les garçons médusés voient filer devant eux un couple de renards portant chacun un petit par la peau du cou. Le plus grand pointe son bâton comme s’il tenait un fusil et fait mine de tirer.


— En plein dans la tête ! s’exclame le faux tireur.

— Tu vois que c’est dangereux, il peut y en avoir d’autres à l’intérieur.

— Fais comme moi, trouillard, et c’est eux qui vont avoir peur.


Avec des cris de guerre les galopins font le tour de la cabane de l’extérieur en donnant de grands coups de bâton dans les murs. Un tour, deux tours, trois tours toujours en hurlant et en frappant à toute volée. Le fanfaron entre le premier. Son comparse hésite à franchir le seuil.


— Allez viens ! La voie est libre, mais ça pue.


Un craquement lui répond, puis toute une série, en quelques secondes la cabane s’écroule. Le gamin à l’extérieur est indemne. En état de choc il tâte son torse, ses bras, ses jambes, ne constate pas de blessure. Sous les décombres son copain ne répond pas à ses appels affolés. Le garçon prend ses jambes à son cou et court chercher du secours.

Buck s’est immobilisé, il a entendu le vacarme. Malgré le danger qui commande la prudence son instinct qui est le plus fort lui dicte de revenir sur ses pas. Son comportement est inattendu, la cohabitation en ville avec les humains l’a sans doute rendu moins méfiant. Il voit un des enfants qui s’éloigne rapidement, où est le deuxième ? Buck s’approche du tas de bois, flaire une présence humaine. Avec son museau et ses pattes le renard repousse les planches, des échardes se plantent dans son museau, mais il ignore la douleur jusqu’à ce qu’il trouve l’enfant. Les crocs plantés dans son blouson il l’extirpe, le traîne, l’écarte du désastre. Assommé le fanfaron ne réagit pas. Ce n’est que couché dans l’herbe, hors de tout risque, qu’il ouvre les yeux en même temps qu’il retrouve ses esprits. Des gémissements montent dans sa poitrine, aussitôt réprimés par le regard que l’animal darde sur lui avant de s’esquiver. Un regard jaune pailleté que celui-ci n’oubliera jamais.

Personne ne croira le gamin quand il racontera l’histoire du renard qui l’a sauvé. Ça ne l’empêchera pas de consacrer sa vie à défendre leur cause.


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   Tiramisu   
22/11/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

Jolie histoire, on ne peut être que touché lorsque l'on aime les animaux sauvages. L'écriture est vivante et prenante.

Au début, c'est l'histoire d'un couple que l'on pourrait penser humains, mais l'auteur joue avec nous. Au fond, quelle différence entre un couple d'humains qui attend un enfant et un couple de renards qui est dans la même situation. Les deux couples recherchent un lieu sécurisé pour que l'accouchement se passe au mieux, loin des prédateurs.

La nature, la cabane sont joliment décrites.

L'arrivée intempestive des enfants vient rompre l'équilibre de la petite famille, toujours ces humains qui se croient les rois du monde même quand ils sont enfants. Ils arrivent bruyamment dans ce lieu préservé Mais la prudence de l'animal, sa méfiance nécessaire vis à vis des humains, les font s'enfuir sans encombre.

Le sauvetage par le renard est peu crédible, un renard ce n'est pas si costaud que ça, et surtout sauver un humain plus ou moins agressif, quelle générosité !

Mais j'aime la conclusion qui fait que lorsque l'on a rencontré le monde sauvage de près, on ne peut que l'aimer, l'honorer, et le protéger.

Merci pour cette lecture.

   ANIMAL   
23/11/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Une très jolie histoire bien écrite, bien menée, pleine d'aventure et de beaux sentiments.

La recherche d'un refuge, l'inquiétude, la faim, l'imminence d'une naissance... cela aurait pu être le quotidien de bien des malheureux jetés à la rue ou d'esclaves évadés. A ma grande joie c'est ici celui d'un couple de renards et l'histoire finit bien.

Je regrette un peu que l'auteur dévoile trop tôt qu'il s'agit d'animaux, trahi par le mot "grognements" au début du troisième paragraphe. J'aurais vu quelque chose comme "douloureux soupirs".

Néanmoins, la nouvelle est bien écrite, la lecture facile, le style agréable.

Au niveau du scénario, la partie "sauvetage" sonne moins bien. La motivation de l'animal ne me gêne pas, on a vu maintes fois des animaux aider des humains (et l'inverse). Mais un enfant pèse tout de même son poids et je vois mal un renard avoir la force de le tirer.

Cela ne m'a pas empêchée d'apprécier cette nouvelle, optimiste comme je les aime.

en EL

   maria   
25/11/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

L'auteur(e) a réussi l'effet de surprise en brouillant les pistes avec le choix de la catégorie.
Très judicieux. Mais cela ne suffit pas à m'enlever mon humeur chagrine. Pourquoi être allé si vite ? Pourquoi ne pas avoir écrit davantage sur l'accouchement et sur la vie de la petite famille dans la cabane ? Tenir plus longtemps cette duplicité eut rendu le revirement encore plus savoureux.

Exercice peut-être périlleux en gardant une écriture appliquée et un vocabulaire juste. Et je comprends aussi l'impatience de l'auteur(e) à nous montrer sa jolie pirouette.
Beaucoup de tendresse, de bienveillance et d'espoir dans cette nouvelle.

Merci pour le partage et à bientôt.

   Corto   
8/12/2019
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Belle démarche pour cette nouvelle simple mais astucieuse.
On se laisse emmener dans l'aventure de ce couple de renards qui manifestement n'a pas la vie facile.

Les humains toujours aussi arrogants s'imposent comme des malotrus et la morale de l'histoire montre un animal plus généreux qu'un humain.

C'est simple, facile à lire, sûrement utile pour endormir un enfant agité avant d'aller au lit.

Je me souviendrai volontiers de "Ulla et Buck".

Merci à l'auteur.

   Anonyme   
8/12/2019
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour farigoulette,
(bien joli pseudo, et bienvenue sur Oniris)

Une histoire simple et émouvante sur l'attitude et les réactions des animaux.
J'ai aimé le soin de l'auteur pour éviter les répétitions des mots "cabane", "garçons".
Les phrases claires, précises.
Le suspense concernant l'identité du couple n'est pas long à être dépassé, mais le narrateur sait habilement pratiquer l'anthropomorphisme.
Un ou deux détails pourraient être un peu revus :
"il conduit sa famille dans la forêt un abri les y attend.", il me semble manquer une virgule après forêt.
"Ils se chargent l’un et l’autre d’un loupiot" pourquoi pas plutôt ...chacun d'un loupiot.
"s’exclame le faux tireur", le mot "faux" me semble superflu.
La formulation des deux dernières phrases, conclusion-morale de l'histoire avec les mots "ça ne l'empêchera pas " devrait pouvoir être plus "sobre" tout en gardant son impact.

Merci pour ce partage,
Éclaircie

   ours   
8/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Farigoulette

J'ai fait l'erreur de survoler les commentaires avant de vous lire ce qui m'a enlevé une partie du suspens, mais ce n'est pas grave au final car j'ai pu m'amuser de la façon dont vous avez traité le sujet. J'ai même été surpris du retournement de situation final, alors qu'on aurait dû penser qu'une famille d'êtres humains avait trouvé un équilibre précaire, c'est un autre duo d'humains qui vient renverser tout cela. Pour se faire prendre au piège finalement. Le sauvetage final ouvre la réflexion, l'homme est-il un 'renard' pour l'homme ? Ou comprendra-t'il que son écosystème est en train de partir à vau l'eau. Interprétation toute personnelle bien sûr.

   hersen   
8/12/2019
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
On voit qu'il y a une recherche pour ne pas dévoiler de suite ce qui fait le sel de la nouvelle; perso, j'ai deviné à partir de "rouquins", parce que j'avais justement tiqué sur certains détails auparavant.

C'est le point fort de cette nouvelle.

Pour l'écriture, je trouve le rythme difficile, car des phrase sans virgule m'empêchent de trouver un ton. Il est important de relire une nouvelle à voix haute, cela aide beaucoup pour corriger la ponctuation, on sent ainsi soi-même le souffle qui est ou n'est pas dans le texte.

L'histoire est une jolie histoire, mais d'un point de vue vie sauvage, assez peu réaliste. Mais rien n'empêche de rêver, et s'il faut qu'une bête de la nature nous sauve la vie pour qu'on décide de faire quelque chose pour les animaux, pourquoi pas ?
Il manque justement ce petit plus qui pourrait venir de l'écriture, l'histoire en elle-même étant bien bâtie et cohérente.

Je profite de ce premier texte sur Oniris pour te souhaiter la bienvenue.

   plumette   
9/12/2019
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
j'ai eu du mal à entrer dans l'histoire.

Cette lente arrivée à la cabane, qui mélange narration extérieure et ressentis m'a laissée une drôle d'impression , je voyais venir quelque chose qui s'est précisé avec "Ulla va se réfugier tout au fond et se laisse tomber directement sur le plancher. Enfin elle peut permettre à ses entrailles de s'ouvrir"

Et puis les petits rouquins sont arrivés confirmant mon intuition de lectrice.

J'ai bien aimé l'incursion des deux gamins à la cabane, la fuite de la petite famille . J'ai un moins adhéré à la fin avec cet improbable sauvetage.

Pour autant, l'histoire est sympathique, l'écriture claire même si je pense que le début pourrait être amélioré.

   Pomme_d_Adam   
11/12/2019
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Je vais faire court, j'adore
La chute qui nous fait comprendre que ce n'est pas un couple rejeté de la société, mais bel et bien une famille de renards chassés pour leurs vols citadins est magnifique.
Bonus pour la cause animale, et le petit enfant sauvé des décombres.
Enfin, j'adore cette idée qu'est de faire penser ces renards comme des humains.
Bravo

   placebo   
15/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Joli texte. La fin me plaît bien, car elle ouvre une porte sur le réel : et si cette histoire s'était réellement passée, que l'auteur était le gamin, et qu'il avait imaginé le reste ?
Effectivement quelques virgules pourraient être rajoutées mais ce n'est pas dérangeant.
Bonne continuation,
placebo

   Donaldo75   
18/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Farigoulette,

J'ai beaucoup aimé cette histoire. Je ne crois pas que le suspense tienne longtemps quant à la nature profonde de Buck et Ulla - au début, j'avais opté pour le scénario selon lequel c'était un couple de chiens - mais l'essentiel n'est pas là. La narration donne envie de poursuivre avec eux; l'empathie gagne le lecteur et se renforce quand les gamins arrivent à proximité de la cabane. J'aime bien le retournement de situation, où grâce à Buck l'un des deux gamins va changer du tout au tout. Cela peut paraître naïf mais c'est juste beau.

Bravo !

Donaldo


Oniris Copyright © 2007-2023