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Réalisme/Historique
hersen : Armée pour la vie [Sélection GL]
 Publié le 01/09/20  -  14 commentaires  -  7686 caractères  -  66 lectures    Autres textes du même auteur


Armée pour la vie [Sélection GL]


Sally s'est bien cachée.


Elle est sûre que Joffrey ne la trouvera pas de sitôt ! En plus, sa cachette est confortable. Ça sent un petit peu fort, parce que ce n'est pas loin de la porcherie, mais elle y est habituée, elle aide souvent ses parents à porter les seaux pour nourrir les animaux. Elle en a même un spécial pour elle, comme ça, elle peut le remplir et le porter toute seule.


Elle fait aussi plein d'autres tâches à la ferme, elle aime bien les animaux, qu'elle caresse. Elle leur fait des petits bisous. Sally aime bien aussi son frère, mais il ne veut pas trop de bisous, il dit qu'il a passé l'âge. Il a seize ans. Elle n’en a que huit. Alors quand il lui dit, hey, Sally, on joue ? elle ne dit jamais non.


Elle a bien chaud dans sa cachette, il n'y a pas beaucoup d'air, mais il y a du foin et c'est confortable. Elle entend les animaux, rien de plus car elle s'est un peu éloignée de la maison. Quelquefois, elle perçoit vaguement des bruits, et des voix étouffées, mais c'est normal, ce sont les sons journaliers, elle s'amuse à tendre l'oreille pour les reconnaître, mais c'est difficile.


Ce que la petite fille aime le mieux, quand ils jouent à cache-cache, c'est de trouver une bonne cachette et ensuite elle imagine Joffrey la cherchant. Elle se rappelle que même, une fois, il se promenait dans la cour en criant qu'il lui donnerait des bonbons quand il la trouverait. Mais bien sûr, elle savait bien que ce n'était pas vrai. Elle est restée bien cachée, sans rien dire. C'est quand sa mère a crié, les enfants, le goûter ! qu'elle est sortie de sa cachette. C'est le signal. Si son frère ne l'a pas trouvée avant, elle a gagné.


Mais Joffrey, c'est un malin. En plus, il connaît tous les coins de la ferme, alors évidemment, c'est de plus en plus dur de gagner. Elle pense qu'il va d'abord dans la grange, à chaque fois, car c'est un endroit où il y a moyen de se cacher, c'est grand et plein de foin. Après, elle n'est pas sûre. Une fois, elle l'avait entendu fouiller dans la remise, mais ce n'est pas un endroit pour une cachette. Il y a plein d'outils et ce n'est pas si facile de se dissimuler convenablement sans se faire mal.


Pour l'instant, elle pense qu'il en est à l'étable. Parce que le bétail est dans les champs, alors les mangeoires ça fait des jolies cachettes. Et puis après, elle ne sait plus bien parce qu'elle s'est un peu endormie. Oh, pas longtemps, juste un tout petit peu. C'est parce qu'il fait chaud dans le foin du soubassement derrière les parcs à cochons.


Et puis, elle ressent un malaise. Ça la réveille. Le silence n’est pas comme d’habitude. Un détail l'inquiète, mais elle ne sait pas ce que c'est. Elle pense à sa maman, à son papa. Elle se demande pourquoi Jo ne la trouve pas.


Pan !


Sally sursaute et elle se cogne à la poutre de l'appentis. Mais elle ne se frotte pas la tête. Parce qu'elle ne bouge pas, pas du tout du tout. Elle vient de reconnaître ce bruit sec, c'est celui qui l'a réveillée. Et ce n'est pas un bruit de la ferme. Elle en est sûre.


Son père a une carabine. Il va quelquefois avec son arme dans les champs. Il lui a expliqué une fois que c'est pour tuer des prédateurs, en lui expliquant bien le mot. C'est celui qui va te manger parce que lui, pour rester en vie et devenir grand, il a besoin de te manger. Puis son papa avait rigolé, non, pas toi, Sally, il ne va pas te manger toi ! C'est pour le troupeau, tu comprends, il faut protéger les petits.


Et Sally avait demandé, dis papa, tout le monde a un fusil pour tuer les prateurs ? Les prédateurs, ma grande, pas les prateurs. Elle aime bien quand papa sourit en grand, elle aime bien mettre sa petite main dans la sienne, la peau est un peu râpeuse.


Oui, tout le monde peut avoir un fusil, parce qu'il faut se défendre, tu comprends, il y a des gens qui pourraient vouloir ce qu'on a, même si c’est pas des animaux. Il faut se protéger. Quand tu seras plus grande, tu apprendras à tirer, comme ton frère qui se débrouille déjà bien. Sally le sait bien, d'ailleurs, elle est un peu jalouse de ça. Vivement qu'elle soit grande. Sa maman aussi, elle sait tirer à la carabine.


C'est pour ça qu'elle est bien sûre d’avoir reconnu le pan !, surtout qu'un troisième vient d'éclater. Mais son papa ne tire jamais dans la ferme. Il dit que les armes, c'est dangereux, et c'est pour ça que Sally sort de sa cachette, qu'elle n'attend pas l'heure du goûter. Mais c'est surtout parce que le pan !, ce n'est pas le même. Ce n'est pas celui de la carabine de son papa. C'est plus sec, elle ne sait pas trop comment dire. Peut-être qu'il en a acheté une autre et qu'elle ne le sait pas ? Parce qu’il a toujours dit que quand Joffrey sera plus raisonnable, il lui offrira une carabine pour lui tout seul.


Elle a peur maintenant. Quand ça fait trop de bribes dans la tête qu'on ne peut pas expliquer, ça fait peur. Elle accroche sa jupe à une écharde, le tissu est déchiré. Elle pense soudain à sa mère. Normalement, une jupe déchirée, et hop, elle se fait gronder tout de suite. Mais elle n'a pas peur pour ça. Au fond d'elle, elle aimerait bien que sa mère la gronde. Là, tout de suite, maintenant.


Elle avance entre la porcherie et l'étable, elle avance tout doucement, Jo il dit tout le temps que c'est une trouillarde de fille, sa sœur. Alors, c'est peut-être pour ça qu'elle n'ose pas avancer plus, parce qu'elle est juste une trouillarde de fille ?


Elle voit maintenant une partie de la cour de ferme. Elle voit quelqu'un couché par terre. C'est quelqu'un qui a la même veste que son papa, ça l'étonne, parce que son papa, il ne prête pas tellement ses affaires, sauf à Jo des fois. Quand il l'appelle Mon fils à moi.


Sally est immobile, l'esprit embrouillé, quand elle entend des voix. Des drôles de voix qu'elle ne connaît pas. Elle entend aussi une voiture qui arrive, vite vite vite, elle se plaque contre le mur. Elle tremble et elle est glacée. Parce que c'est la voix du shérif, monsieur Jamerson, qui sort du haut-parleur, et la petite fille se bouche les oreilles tellement c'est fort, et un autre pan ! lui transperce les tympans.


Et puis il y a plein de bruits, des portières qui claquent, des voix fortes, elles appellent Joffrey, elles lui disent de se tenir tranquille, de pas faire le con. Et puis des gens qui courent. Et soudain tout s’arrête. Seule une voix lui parle, maintenant, et elle dit doucement, oui, pose ton arme par terre et recule. Lààà, doucement Jo. Et puis des grésillements de radio, des tas de sons qui ne lui sont pas tellement familiers.


Elle entend monsieur Jamerson qui l'appelle, mais il ne l'appelle pas comme quand il veut rigoler, il crie, il crie fort, et Sally voudrait bien répondre, mais ses cris restent coincés.


Elle voit une silhouette qui s'approche, elle veut se cacher encore, son frère lui dit souvent que ses cachettes sont nulles et là, elle n'est pas tellement bien cachée, il a toujours raison, Joffrey, elle voudrait rentrer dans le mur et rester là tout le temps, à regarder son papa couché par terre. Elle sait que sa maman est aussi couchée. Parce que sinon, elle l’aurait entendue crier à Joffrey de s’arrêter de s’énerver, ça arrive souvent. Alors Sally sait que sa maman est aussi couchée par terre.


Et pendant qu’elle se dit tout ça, à toute vitesse dans sa tête, monsieur Jamerson avance tout doucement, une main tendue, il dit, ça va aller, Sally, ça va aller…


Non, monsieur Jamerson, ça va pas aller. C’est ce qu’elle croit qu’elle lui dit, mais rien ne sort de sa bouche, tout se passe dans l’horreur de sa tête. Elle regarde le shérif, les yeux démesurément ouverts, muette.


Non, ça va pas aller, monsieur Jamerson.


 
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   Anonyme   
16/8/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une histoire somme toute simple, plutôt bien menée à mon avis. Avec mes préjugés sur les Américains (on parle de shérif), je ne m'étonne pas qu'un brave fils de paysan pète les boulons à la ferme et massacre sa famille, c'est la moindre des choses. Tous tarés aux USA.

Je me rends compte tout de même que vous devez donner dans la facilité avec cette histoire... La raconter du point de vue de la gamine est une bonne idée, mais à mon avis manque un contexte au-delà de "tous tarés aux USA" permettant à la lectrice que je suis de saisir la dynamique familiale et/ou les pressions extérieures qui ont fait craquer Joffrey. Tel quel, je trouve le récit superficiel.

   ANIMAL   
16/8/2020
 a aimé ce texte 
Bien
Une histoire horrible de règlement de compte familial. Le fils d'agriculteurs est pris d'un coup de folie et tue ses parents, sans doute à cause d'un conflit larvé qui dure depuis longtemps puisque d'après la petite Sally ça arrive souvent qu'ils se disputent.

L'enfant qui s'était cachée n'a pas assisté au massacre. On se demande si son frère n'a pas tout prémédité et proposé la partie de cache-cache pour l'épargner. La police arrive trop tard pour éviter le drame et ne peut que recueillir l'enfant déboussolée.

Le thème de cette nouvelle pourrait être : comment continuer à vivre lorsqu'on se retrouve orpheline. Il est traité de façon habile avec ce jeu, les souvenirs de la petite fille et puis juste quelques coups de feu pour souligner le drame.

Le choix de raconter par les yeux de la fillette est séduisant mais enlève malheureusement la possibilité de mieux comprendre le contexte de ce drame. On se retrouve avec une tranche de vie coupée de l'amont et de l'aval puisqu'on n'en saura pas plus sur le geste du frère et le futur de Sally.

Cela me manque pour donner du corps à cette histoire.

en EL

   Corto   
22/8/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une tranche de vie dramatique vue à hauteur d'enfant de huit ans.
Le récit est très bien structuré, tour à tour concret, réaliste puis intérieur dans des perceptions brouillonnes qui ne s'éclaircissent que pour une issue terrible.

Le déroulement des événements est limpide même à travers la confusion qui ne quitte pas l'esprit de l'enfant peu préparée à cette situation.

Des formulations remarquablement choisies sont parfois à relever ainsi: "Quand ça fait trop de bribes dans la tête qu'on ne peut pas expliquer, ça fait peur."

Dans le dénouement l'immense écart entre le comportement des adultes et la compréhension de l'enfant est parfaitement rendu pour atterrir sur la phrase finale: "Non, ça va pas aller, monsieur Jamerson".

Cette nouvelle assise sur un jeu d'enfants pour aboutir à l'extrême drame familial est fort bien construite.

Bravo à l'auteur.

En EL: Corto.

   Donaldo75   
24/8/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Au début de ma lecture, je n’étais pas fan de ce que je lisais. Pourtant, j’appréciais le choix narratif du point de vue de Sally. A ma seconde lecture, mon impression s’est améliorée mais ce n’est toujours pas le Nirvana. Je trouve que le choix narratif est bon mais que le style dénote parfois, comme si le lecteur voyait l’auteur derrière Sally. Et puis le vide spatial – je veux dire par là les retours à la ligne – délite la narration et lui donne encore plus un aspect de remplissage. Au vu du thème, il y avait plus de place pour de la densité, du corps, au lieu de rester en surface comme j’en ai l’impression au moment même où j’écris ce commentaire. Le bon point, c’est qu’il y a une tonalité.

   maria   
1/9/2020
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour hersen,

Ce fut agréable de découvrir, en compagnie de Sally, la ferme et les petites habitudes de ses occupants.
Mais lorsque nous avons entendu le premier "pan" j'aurais aimé la laisser un moment.
Et peut-être aurais-je su pourquoi, quand, comment Jo s'est procuré une arme, s'il avait prémédité son acte ou si il a agi sur un coup de folie, s'il a tiré sur sa mère alors qu'elle prévenait le shérif ?
Ou bien si Jo n'a rien fait du tout et que ce fut un de ces "prédateurs" l'auteur des coups ?

Mais, j'ai dû rester auprès de Sally et je n'ai pas vu grand-chose.
Tant pis pour moi.

Un grand merci quand même, hersen, de ce que tu as voulu partager.

   plumette   
1/9/2020
 a aimé ce texte 
Bien
je n'ai pas venu venir le drame.

j'ai bien aimé le cheminement dans la tête de l'enfant, ses pensées qui nous en apprennent sur le contexte, son admiration pour Jo, son implication sérieuse dans le jeu.

La qualité d'un silence qui révèle quelque chose cela me parait très juste, ce silence qui précède le premier pan !

Par contre 3 coups de feu avant l'intervention du shérif, Je n'ai pas compris? et surtout, le troisième différent des deux autres donc tiré par une autre carabine?

bon, ça m'a un peu perturbée sur la fin, de ne pas pouvoir attribuer les pan!

Et comment le shérif et sa clique ont-ils été alertés?

je pense que toi Hersen, tu sais exactement ce qui s'est passé, mais moi lectrice, j'en suis réduite à des conjectures parce qu'on n'a rien de très consistant à se mettre sous la dent pour comprendre l'origine et le déroulement du drame. ce qui est logique , tu me diras, parce que la fillette, elle non plus n'a rien vu venir !

   Anonyme   
1/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Hersen, bonsoir

« Armée pour la vie » constitue un scénario à l’atmosphère pesante à partir du premier « pan ». Je trouve ce récit agréablement mené mais qui garde des parcelles de mystère pour le personnage du père que la fillette semble admirer, de la mère pour laquelle on ne sait pas grand-chose, sauf qu’elle possède une carabine dont elle sait bien se servir, et de Joffrey visiblement équilibré et gentil avec sa petite sœur, mais armé lui aussi.
Mais quand même, le suspense est bien mené. L’auteur choisit –finement- d’insister à plusieurs reprises sur le fusil du père, exprès pour nous induire en erreur et nous laisser supposer que c’est lui l’auteur des coups de feu fatals.
Dans les toutes dernières lignes, le jeune garçon pour lequel on éprouvait de l’empathie, qui donnait la sensation d’un jeune homme apparemment sans histoires ôte la vie à ses parents. Acte que l’on peut supposément attribuer à des brimades ou humiliations subies et répétées de la part du père et de la mère, mais aussi dû à cette facilité de « dégainer » à tout instant dans ce perpétuel Far-West.
Mais que sait-on avant ce terrible passage à l’acte ? Que nous dit ce récit de cette fine barrière qui justifie que certains comme moi ne l’ait pas vu venir ? Comment ne pas se sentir gêné par les propos du père qui considère comme normal le fait que tout le monde, petits ou grands peut -sous-entendant « doit impérativement »-posséder une arme pour défendre sa vie et ses biens contre toute intrusion...Oui, comment ne pas avoir vu les signes avant-coureurs de ce qui allait se passer in fine, dans ce délire excessif, abusif de devoir s’armer à tout prix ? Et ce n’est que lorsque cette fin tragique arrive que nous comprenons que nous n’étions que les spectateurs d’un déclin d’une société malade.

   hersen   
2/9/2020

   papipoete   
4/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour hersen
Un récit qui nous renvoie à l'enfance, ce temps que rien ne peut troubler de soucis, le temps où on ne pense pas comme un grand... et on joue au ballon, à la cachette...
Puis un événement tragique nous transforme soudain en " grand ", avec des bruits qu'on ne devrait pas entendre, des images que l'on ne devrait pas voir... On devient " grand " en plein milieu d'un jeu d'enfant.
NB on se cache avec la fillette ; on cherche quand c'est nous qu'on colle... on rigole ! Puis le drame nous prend par le coeur, et on suit les mots de l'auteure, des mots comme entrecoupés de sanglots, on a peur...
Fort bien mis en scène, le récit déroule une trame qui nous plonge au fond d'un puits d'angoisse !

   Anonyme   
6/9/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Hersen,

Un drame familial comme il en existe tant, trop , habilement mis en scène dans cette nouvelle dramatique.
Un simple jeu de "cache-cache" qui tourne au cauchemard pour la protagoniste, une jeune enfant qui ne sortira pas indemne de cette tragédie.
Une petite fille de huit ans qui se retrouve propulsée dans l'horreur d'un règlement de compte en famille , et dont l'insouciance, l'innocence, disparaissent tragiquement
Un récit réaliste bien mené et dont le premier "pan" m'a fait comprendre ce qui se profilait.

   Yannblev   
11/9/2020
Bonjour Hersen,

C’est une idée intéressante que de confronter l’enfance à la réalité absurde et parfois sauvage de certains milieux en perdition. Le jeu de cache-cache qui n’arrive pas à masquer et empêcher cette réalité est aussi à mon sens une très bonne idée.
Le récit un peu « mâché » cherche a priori à traduire par le choix des expressions et leur tournure d’écriture le vécu intime d’un enfant inscrit dans l’innocence de son âge jusqu’à ce qu’un « pan » sonore le ramène dans un monde où on ne joue plus vraiment. Je me demande si l’auteur, au lieu de décrire une situation et relater les in petto de l’enfant avait pris carrément la place de Sally dans sa cachette, en utilisant par exemple la 1ere personne du singulier pour cette évocation, n’aurait pas donné une dimension encore plus prégnante à ce texte.

Merci du moment.

   Tiramisu   
14/9/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour Hersen,

C’est toujours un plaisir de te lire, car tu as une écriture fluide avec peu de mots pour dire l’essentiel, et j’aime ça.

Concernant cette nouvelle, je suis plus réservée sur le fond. C’est bien écrit à hauteur d’enfant, et ce n’est pas simple à faire, je reconnais que c’est assez réussi. En revanche, je trouve que c’est assez en surface, on passe beaucoup de temps dans la cachette d’enfant. On ne sait pas grand-chose de sa personnalité, c’est une petite fille lambda, tu as su parler à hauteur d’enfant mais sans nous livrer sa personnalité, toutes les petites filles de huit ans ne se ressemblent pas. Là, on a à faire à une petite fille de huit ans assez stéréotypée. Elle joue à cache-cache comme toutes les petites filles de son âge aime jouer. Comme les enfants de cet âge, elle est centrée sur les sensations, les odeurs, le confort. Cette partie est assez longue en proportion du reste du texte.

D’autant que Sally présente à peine ses parents, son frère. De son point de vue, tout le monde est gentil. On ne sait rien du contexte, cela manque aussi. Bien sûr c’est raconté à hauteur d’enfant qui aime sa famille et n'est pas critique vis à vis de sa famille mais il y aurait pu avoir une scène décrite entre le fils et les parents afin que l’on sente monter une tension même si Sally n’en saisit pas le sens, le lecteur pourrait comprendre certaines choses. Est-ce le choix du frère de la faire se cacher pour effectuer son massacre ? Cela aurait pu être suggéré, par exemple : cela fait un moment qu’il ne lui avait pas proposé de jouer, il l’envoyait promener et puis soudain il lui propose de jouer etc… Sally trop heureuse saute sur l'occasion.

En résumé, je dirais que le texte est trop centré à la fois sur une petite fille lambda et sur les « pan » et pas assez sur le contexte qui aurait pu être décrit en semant des indices pour le lecteur ça m’a vraiment manqué.

La partie finale avec Sally est bien présentée, c’est à dire son état de sidération, ces morts sont comme une effraction violente dans son monde d’enfant. Et elle en prend pour la vie, d’où le titre … En tout cas, pas dans le sens qu’elle a gagné en solidité, mais qu’elle est marquée à vie. Le jeu de mot est pas mal trouvé.

Merci pour cette lecture

   Alcirion   
19/9/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Hersen,

Une nouvelle racontée avec le point de vue d'un enfant assez efficace. L 'émotion est bien présente dans la dernière partie : les éléments sont donnés au compte-gouttes par l'enfant, ce qui crée un crescendo dans la progression dramatique et une chute efficace.

Le texte est court, on n'en apprend pas beaucoup sur les personnages, point de vue interne enfantin oblige. J'ai le sentiment que c'est le thème qui domine le récit, les acteurs ayant seulement pour rôle de le fixer dans le temps et l'espace. Une lecture agréable.

   Anonyme   
16/10/2020
Bonjour Hersen,

Il n’y a pas réellement d’histoire, juste une scène : un jeune homme perturbé a tué ses parents, père et mère, à la carabine. Point-barre.

Mais cette scène est l’occasion d’un exercice réussi et d’un très bel exemple de scène vécue par le lecteur sans la moindre description directe. A montrer souvent pour illustration du principe.

La scène est vécue par les oreilles et ensuite les yeux de la petite fille. Jamais il n’est dit que Jo a tué, ni que son père et sa mère sont morts, ni qu’il est perturbé. Tout cela peut être inféré facilement par le lecteur et, ce qui n’est pas la moindre des réussites, sans la moindre ambiguïté possible. Seule une très bonne maîtrise de la narration permet de faire une telle confiance au lecteur, même si la scène n’est en l'occurrence pas très difficile à décoder, la facilité de décodage ne signifiant pas nécessairement facilité d'écriture.

L’angoisse de la petite fille est très perceptible, avec une belle économie de moyens, de même que le climat anxiogène avec l’arrivée de la police. Je n’ai certes pas sursauté, mais j’ai néanmoins ressenti plus d’angoisse et d’horreur que dans biens des récits d’horreur qui en font des tonnes pour un résultat médiocre.

L’exercice se focalise sur un objectif limité, mais cet objectif est parfaitement atteint.
Oui, un très bel exemple à montrer souvent, sans le moindre doute.
Bravo.


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