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Aventure/Epopée
jeanphi : Le « décor acteur » du décorateur [concours]
 Publié le 08/05/23  -  14 commentaires  -  7383 caractères  -  115 lectures    Autres textes du même auteur

Artiste décorateur à la cour du prince Untel II (tu l’auras), il passa quinze jours à l’ombre par précaution de sûreté d’État…


Le « décor acteur » du décorateur [concours]


Ce texte est une participation au concours n°33 : L'ombre et la lumière

(informations sur ce concours).



Les méandres de l’esprit prennent leurs sources dans l’obscurité impénétrée de nos synapses. La noirceur et le plein jour sont indissociables. L’esprit se mêle alors à la rugosité du monde comme par syncrétisme, par compromission de l’absolu pour le solide.


Je ne suis pas ce que l’on peut appeler un homme de l’ombre. Mes zones de connexions sont essentiellement établies dans le domaine pratique : je collabore, je participe plus que je ne médite à l’existence. Un élément ordinaire, un animal pensant…


J’ai la chance de pouvoir me livrer à la plus passionnante des missions à titre professionnel, je suis arrangeur d’intérieur et organisateur de réception au service de la haute société bavaroise, sous la direction du ministre Schultz attaché à la cour du prince Untel II. Les bruits de couloirs et les chuchotements, les jeux de pouvoir, les secrets de succession, me sont entièrement étrangers. Artiste reconnu, situé dans l’angle mort des préparatifs et des installations de présentations, seuls m’affèrent l’image et l’étiquette, le plastique* brillant, voilà mon créneau. Mon œuvre est ce qu’une lune bien pleine est au soleil, le réfracteur qui permet au monde de regarder sa lumière en face, un prisme, dont le ressort est invisible, grimé aux couleurs fades de la monotonie quotidienne.


En bien des occasions, il me semble ne plus avoir à réfléchir comme un simple valet, mais bien comme un augure, un intouchable qui dessine les contours célestes, un satellite.


Je m’assois sur le trône princier avant cérémonie pour m’écrier subitement : « C’est morne ! Il faut que notre prince voie autant d’éclats derrière son public que le public n’en voit autour du prince ! Sinon, comment s’illuminerait-il, quelle aura pourrait-il manifester à la vue de sujets fixés dans la noirceur inerte durant la communion ? » Il peut m’arriver de transformer tout un pan de salle de banquet entre une cérémonie et sa réception, comme ça en une heure, uniquement parce que les vents de l’esprit ont tourné, qu’une princesse est malade, ou qu’un baron est endeuillé. C’est par ces fulgurances que j’ai convaincu. Et ma maîtrise très vaste de l’artisanat s’exprime à son plein potentiel.


Aujourd’hui comme hier, mon statut me donne accès aux appartements privés auxquels aucune garde ni intendance ne parvient de jour. Seuls des magistrats et des hauts représentants y sont introduits occasionnellement aux côtés des dignitaires de l’État.


C’est ainsi que j’entendis par-devers moi la nouvelle d’une invasion en préparation en vue de conquêtes expansionnistes. Ainsi une guerre s’annonçait-elle…


Le haut ministre des armées s’entretenait assez vivement avec un membre du clergé aux côtés du prince lorsqu’il m’aperçut, penaud, observer l’alignement des cadres de la galerie des glaces avec fascination.


– Sire, puis-je vous demander ce que cet homme fait ici ? s’enquit-il auprès de notre bon prince.

– Ça n’est que mon décorateur, il doit accéder aux appartements privés de jour car son travail desthétique nécessite un peu de… clarté… et de profondeur de champ visuel.

– Sire…


S’ensuivit une brève discussion à voix basse entre les trois hommes dont je n’osais tenir que les ombres en visu avant de me voir escorté vers une geôle obscure et humide où je passai deux semaines. Il s’agissait m’indiqua-t-on d’un protocole appliqué visant à maintenir la sûreté d’un secret d’État.


Captif, allongé la plupart du temps, advint pour seule issue à cette nuit de me réfugier hors de mes craintes dans ma pensée.


La décoration d’un lieu clos et dépouillé sans recours extérieur relève des arts indiens et birmans. Au bout de quelques jours, je m’intimais à maintenir une activité d’aménagement, fût-elle dérisoire.

Les deux seuls éléments amovibles à ma portée se trouvant résider en la substance d’une planche posée sur le conduit béant d’une latrine ainsi que d’une minuscule table basse, je choisis de laisser la planche bien en place et de décider avec le plus grand soin de l’emplacement idéal de la table. Il me fallut calculer la surface exacte de ma cellule nonagonale irrégulière dont je déterminai trois centres pour finalement positionner l’objet de la seule manière qu’il puisse séquencer ses trois points centraux. Cela ne me satisfaisait guère, durant plusieurs jours, la poussière de ciment qui s’écoulait d’une jointure me servit de grains dans la réalisation d’une fresque qui me représentait accroupi dans cette geôle sur le sol. Une fois admis le constat de cette pénombre trop forte pour travailler le détail de mon œuvre, je la balayai et laissai filer d’entre mes paupières de grosses larmes qui perlaient comme de grands soleils, étincelants de l’unique rai de lumière qui me parvenait du plafond comme d’un fanal en veilleuse.


Mon esprit, qui m’avait si souvent paru une entité insondable, une étoile noire, se mit à percevoir de la lumière. Il ne s’agissait plus d’une forge perdue dans la pénombre, d’un puits nourricier qui recouvre le monde d’apparats étincelants et de spiritualité. La lumière ne jaillissant plus hors de ma pensée vers l’extérieur, il s’agissait plutôt de la laisser pénétrer, infuser, s’abîmer éternellement dans mon esprit. Mes muscles se défendaient, ma respiration m’animait entièrement, j’avais progressivement la sensation que rien de grave ne pouvait m’arriver. Une sérénité intense me gagna petit à petit, cette nouvelle tranquillité me permit d’observer le monde pour la première fois au regard de mon âme. Calme, pleinement consciente, cette âme percevait la clarté, la sienne propre. Je perçus l’esprit comme le phare d’un monde inanimé, uniformément froid et rigide. Plus question de compromettre l’absolu il s’agissait de le cerner, jusque dans ses moindres espaces de noirceur aux confins de l’intelligence.



Il fallut bien que mes yeux endoloris s’ouvrent de nouveau à la surface terrestre lorsque l’on me sortit des catacombes, après une demi-lune, au deuxième jour de la guerre.


Aux suites de cet épisode, je fus encore bien mieux traité à la cour du prince Untel II. Ma dimension décorative s’épanouit à des champs plus complets et une remise en cause plus aboutie des notions de l’esthétique. Statues de glace, napperons de soie peinte, vasques, vases, services, je mis en adéquation du plus petit grain de sésame tiré à la surface des croûtes fumantes jusqu’au timbre des grelots cousus aux tenues des serviteurs. La hauteur des sièges, l’intensité des éclairages, le volume et la forme des verres, des couverts, m’offrirent une variété de combinaisons infinie à déployer devant les tapisseries, les vasques, les sculptures et les ornementations. Le petit monde de la cour s’ouvrit progressivement à ma nouvelle sophistication dépourvue, c’est chose trop rare, disait-on, de maniérisme. Pour ma part, de poursuivre sans relâche ma nouvelle lumière intérieure j’acquis l’expertise suffisante pour donner aux braves gens quelques séances de méditation.


La lumière se trouve parfois autant dans l’ombre que l’ombre dans la lumière.


_____________________________________________

* L’évocation du plastique est un tragique anachronisme !


 
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   senglar   
9/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,


Beaucoup d'humour et un style délectable. On pense bien sûr à Louis II (Untel II) et aux châteaux de Bavière ; il y a ici une sophistication baroque qui atteint au rococo pour le plus grand plaisir du lecteur. Ce texte est lumineux et élégant jusque dans l'ombre de sa geôle. J'ai plein de références en arrière-plan, que ce soit Disney et Neuschwanstein, les aventures du baron de Münchhausen et même le duc de Malborough, celui qui a eu affaire à Louis XV jusqu'à Malbrough s'en va en guerre et là vous voyez que je deviens aussi fou que vous :)))

Bravo pour le titre ! (quoique...) Bravo pour l'anachronisme ! (quoique...) Le sujet est traité de manière très originale, véritablement inattendue avec une dérision bienvenue dans l'excès de pompe qui doit bien être à la hauteur de l'oeuvre. On vous envie cette facilité de ton et le second degré qui y affère. J'ai l'impression que vous vous observez écrivant en riant sous cape du bon tour que vous nous jouez.

Euh : UN augure, et puis aussi : ''… s'épanoui.t... abouti.e... la cour...'' tout ça dans le même paragraphe à la fin. Un coup de fatigue ou un test pour ramener le lecteur à un peu plus de sérieux car là il s'est bien bidonné. Merci !


Senglar en E. L.

Edition : Angieblue a écrit et c'est son droit absolu que le ''tueur de l'Amstel'' plaçait la barre très haut, eh bien en ce qui me concerne c'est cette nouvelle-ci qui la place très haut, cette barre : c'est du Duplantis, mieux que Bubka en son temps et mieux que Lavillenie vieillissant.

   Donaldo75   
2/4/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Désolé de le dire comme ça mais je n’ai pas aimé ce texte. Je crois que la première raison provient du fait que je n’ai pas compris. Je pense que cette phrase, « Les méandres de l'esprit prennent leurs sources dans l'obscurité impénétrée de nos synapses. », symbolise à elle-seule l’aspect brumeux de l’écriture, ce qui m’a empêché d’apprécier l’ensemble. Le style ampoulé n’est pas ma tasse de thé d’ordinaire sauf s’il consiste à parodier mais je n’en ai pas l’impression ici ou alors ce n’est pas tombé au bon endroit dans la partie « humour » de mon petit cerveau. Certaines descriptions sont indigestes sur la longueur et je ne vois pas trop ce que ce trop plein de détails enchâssés dans des considérations gratuites apportent au récit. Bref, ce n’est pas clair et ça ressemble fort à un exercice de style vu que le pitch dramatique est mince.

   Anonyme   
8/5/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
J'ai trouvé intéressant le parcours mental et esthétique de votre narrateur qui, à la suite d'une expérience contrariante, découvre en la pénombre une source d'inspiration et de lumière. Je goûte l'humour sous-jacent qui me semble parcourir tout le récit, le sens du dérisoire à l'œuvre…

Mais le style m'a un peu gênée, à mon goût trop fleuri, cajolant la complexité gratuite me semble-t-il pour exprimer ce qu'il a à dire ; je comprends que cela correspond au raffinement perfectionniste du narrateur avant qu'il découvre la geôle princière, mais alors j'attendrais un contraste ensuite quand il a connu son épiphanie et que le public chante sa
nouvelle sophistication dépourvue, c’est chose trop rare, disait-on, de maniérisme.

Or, non, ce qui me fait dire que le décorateur n'a pas été si métamorphosé par son décor acteur. Reste une histoire un poil déjantée qui ne m'a pas déplu.

   Jemabi   
8/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
En dehors du style d'écriture irréprochable qui fait qu'on ne s'ennuie pas et qu'on suit avec intérêt le parcours de ce décorateur dans l'âme dont le destin dépend du bon vouloir de son prince, j'ai apprécié l'humour présent le long de cette nouvelle, et mon moment préféré est quand le protagoniste décide de redécorer sa cellule de prison. L'idée est brillante. Quant au thème du concours, il est lui aussi brillamment traité puisque, de même qu'on peut demeurer dans la pénombre en plein jour, de la pénombre peut jaillir la lumière.

   Angieblue   
8/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
C’est un récit assez intellectuel et élaboré avec une vision philosophique mettant bien en scène le concept d’ombre et de lumière.
Notre protagoniste a trouvé sa lumière intérieure dans l’enfermement obscur d’une cellule car il a été contraint de regarder en lui-même, d’explorer son âme. Depuis cette expérience, il sera dans son art, davantage en quête de grandeur et de clarté.
Par contre, j’ai trouvé un peu too much le fait qu’il se mette à donner des séances de méditation, mais bon, pourquoi pas, on peut comprendre qu’il veuille également aider les autres à trouver leur lumière intérieure.
Ce que je reproche un peu à votre nouvelle, c’est que le côté allégorique ainsi que l’esthétisme de la pensée et de l’écriture tiennent un peu le lecteur à distance. Il y a une sorte de déshumanisation car il n’y a pas beaucoup d’émotions chez votre personnage comme l’angoisse, la peur, le désespoir, même si à un moment il verse quelques larmes. ça manque un peu de naturel et de spontanéité.
Sinon, je n’ai pas compris l’intérêt de ce passage : « Le petit monde de la cour s’ouvrit progressivement à ma nouvelle sophistication dépourvue, c’est chose trop rare, disait-on, de maniérisme. »
Et enfin, pour en venir à votre conclusion, je pense que vous avez davantage illustré le fait que la lumière se cache dans l’ombre, que l’inverse.
En somme, j’ai trouvé votre texte trop philosophique et sophistiqué pour le trouver passionnant. Je n'ai pas été touchée.

   Disciplus   
9/5/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Ce qui se conçoit bien, s'énonce (et s'écrit) clairement et les mots pour le dire arrivent aisément. N. Boileau
Style ampoulé et rhétorique.
Personnages simplistes aux dialogues minimalistes.
Lecture hachée par des tournures alambiquées.
Une fois déchiffrer les cinq premières phrases, une question se pose : s'agit-il d'un extrait philosophico- métaphysique d'Alain sur l'entendement ? (obscurité impénétrée de nos synapses - rugosité du monde comme par syncrétisme - compromission de l'absolu - zones de connexion - que je ne médite à l'existence)
Par bonheur, on en revient à une écriture plus classique (quoique... une invasion (de l'extérieur vers l'intérieur) en vue de conquêtes expansionnistes (de l'intérieur vers l'extérieur)). Suivent un emprisonnement improbable et une tentative de décoration minimaliste de cellule où le personnage découvre la Voie (observer le monde ./. au regard de mon âme).
De nouveau, nous avons droit à une introspection Sybilline à coups d'abstractions grandiloquentes et de phraséologie péroreuse. Tout ce galimatias pour définir un aperçu du sujet du concours de philo : dans le noir d'un cachot peut-on apercevoir sa lumière intérieure (vous avez quatre heures...).
A trop vouloir imiter la "plaisanterie sérieuse" d'un Balzac, on risque de tomber dans le verbiage hyperbolique de l'emphase..

   plumette   
9/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
j'ai failli passer mon tour à cause du titre! car il ne m'évoquait rien. Mais voilà, il s'agit du concours et j'ai décidé d'aller un peu au delà de mon tout premier ressenti.
La première phrase m'a intriguée sans me séduire. le mot syncrétisme utilisé dans le tout premier paragraphe m'a obligée à ressortir mon dictionnaire. En tant qu'auteure, je crois que je poursuis une démarche inverse de celle que je perçois ici! je me dis qu'il faut être simple et accessible pour que le lecteur entre sans complexe , ni timidité dans l'univers de l'auteur; Bon, voilà! c'est presque dit: un texte qui m'intimide! J'ai eu par moment du plaisir , en particulier lorsque le narrateur se trouve dans son cachot à réorganiser son espace avec très peu de moyens, ainsi que dans le dernier paragraphe lorsqu'il expose sa nouvelle approche de la déco.
j'ai beau déceler dans la plume de l'auteur un second degré, ma perception est finalement étouffée par la richesse lexicale.
je salue tout de même le travail sur ce thème imposé.

   Vilmon   
9/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
n'aime pas
Désolé, je n’ai pas tellement apprécié cette nouvelle où le contenant écrase le contenu. Très bien écrit, j’en conviens, mais le récit se résume à : un décorateur estimé de la cour trouve l’inspiration lors de son court séjour au cachot. Pourquoi le cachot s’il était si estimé ? En garde à vue, enfermé en résidence ou déplacer au loin aurait mieux sied à sa position. Tout comme pour ce personnage dont la décoration est plus important que tout le reste, je trouve que le texte, très floral et avec beaucoup d’humour, décore une histoire plutôt banale. Je n'ai pas compris comment cette révélation, cette lumière dans l'obscurité du cachot, a transformé la manière du personnage de décorer.

   Geigei   
9/5/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
"Le petit monde de la cour s’ouvrit progressivement à ma nouvelle sophistication dépourvue, c’est chose trop rare, disait-on, de maniérisme."
Merci pour cette phrase. C'est presque le commentaire que je voulais faire, en remplaçant "dépourvue" par "enflée".
C'est du Lagerfeld du début à la fin, l'affectation pompeuse encore plus poussive.

Le poussif : "je m’intimais à maintenir une activité d’aménagement"
Aussi précieux, mais possible : "je m’intimais le maintien d'une activité d’aménagement"

"Mon esprit, qui m’avait si souvent paru une entité insondable" était déjà écrit à la première phrase :
"Les méandres de l’esprit prennent leurs sources dans l’obscurité impénétrée de nos synapses."
Ça redonde !

C'est du second degré. Soit.
Le texte se donne l'excuse du lieu, esthétiquement sophistiqué puisqu'il s'agit du Château de Louis II de Bavière. La chantilly du texte se marie bien avec celle de l'architecture.

Pour autant, tous les décorateurs en font-ils des tonnes ?
J'aurais dû rire à ce cliché ?

Et surtout, quel rapport avec le sujet proposé ?
Les décorateurs s’intéressent tous à l'éclairage.

J'ai craqué en lisant : "La lumière ne jaillissant plus hors de ma pensée vers l’extérieur, il s’agissait plutôt de la laisser pénétrer, infuser, s’abîmer éternellement dans mon esprit."
C'était peut-être un humour banal à la cour, à cette époque. Comment savoir ?

   Asrya   
10/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
D'abord bravo pour l'intrusion dans la thématique du concours, le sujet est original et il sied, à mon sens, parfaitement à celle-ci.
Il y a peut-être un peu trop d'insistance sur le vocabulaire choisi ; le caractère redondant de la dichotomie "ombre / lumière" dans le récit n'était pas nécessaire pour que l'on perçoive l'univers du concours.
En tout cas de ce point de vue, rien à dire selon moi.

Le début de la nouvelle s'annonce assez mal avec ces premières phrases, drues, qui n'invitent pas, mais alors pas du tout à poursuivre la lecture.
La première partie est du même acabit, ce n'est pas engageant, heureusement, cela se disperse légèrement sur la deuxième moitié de la nouvelle.
Ceci-dit, le registre de langage utilisé colle assez bien avec le caractère du personnage narrateur, le côté "précieux" et "guindé" de ce dernier permet d'employer ce type de langage, ce type de vocabulaire, sans que cela ne soit choquant avec un peu de recul.
Il faut admettre que, ce qui fait défaut ici, c'est la capacité du lecteur à s'alourdir la lecture avec du maniérisme.
Cela m'a gêné, mais d'un point de vue stylistique et en terme de cohérence narrative, c'est plutôt légitime.

Etonnamment, alors que la première partie ne m'emballait pas sur la forme, c'est bien celle-ci qui m'a fait le plus apprécié votre nouvelle. La trame est bien dessinée, nous embarque progressivement dans la vie de votre narrateur, son art décoratif, l'ambiance est peinte rapidement mais avec efficacité, c'est prenant. Et alors que la seconde partie me paraissait plus "accessible" sur la forme, pour le coup, la finalité n'est pas si bien rendue.
Vous exprimez le fait qu'avoir été enfermé a changé (?), modifié (?), amélioré (?) sa manière d'appréhender la décoration, seulement, cela n'est pas perceptible à la lecture.
Vous nous demandez d'y croire, sans le ressentir, sans l'expérimenter. C'est dommage. Il y avait vraiment de quoi en mettre plein la vue avec cette chute, avec ce cheminement philosophique et artistique, mais vous nous laissez dans l'obscurité, sans nous aider à nous représenter ce qui a fait la complétude de sa "dimension décorative". Vous nous livrez bien une belle énumération, mais qu'y-a-t-il de novateur à propos ? Je n'y lis que les gages d'un "bon" décorateur ; j'aurais probablement apprécié plus de fantaisie, d'audace dans cet art.

Au plaisir de vous lire à nouveau et bon courage pour le concours !
Asrya.

   Catelena   
13/5/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
aime un peu
On ne dira jamais assez combien les premiers mots sont importants pour aguicher (ou pas) le lecteur potentiel. Ici, cela commence mal. J'ai été obligée de m'y reprendre à deux fois pour décrypter le message délivré par la première ligne... Plus encore un petit détour pour vérifier le genre de la nouvelle...

Alors comme ça, ''La noirceur et le plein jour sont indissociables'' ?
L'auteur a vraiment décidé de me prendre par la main...

L'écriture est maîtrisée, si ce n'était un trop plein d'exceptions où le style s'emberlificote dans des tournures ampoulées, du genre ''… advint pour seule issue à cette nuit de me réfugier hors de mes craintes dans ma pensée.'' où le temps de trouver qui, quoi, que, comment me sort inopinément de ma lecture. Tout comme de chercher à comprendre ce qu'est ''la substance d'une planche'', etc...

Néanmoins, je persiste et finis par saisir le second degré qui s'est glissé subrepticement entre les lignes, sans être toutefois complètement persuadée qu'il s'agisse bien de second degré... Il ne faut pas oublier que le trop est souvent l'ennemi du bien...

Par contre, je trouve le thème original. Il joue pleinement le jeu de l'ombre et de la lumière. J'ai ''vu'' la poussière de ciment s'écouler d'une jointure, ainsi que les grosses larmes qui perlaient comme de grands soleils.

C'est à partir de là, d'ailleurs, que l'écriture devient plus fluide, plus compréhensible, plus poétique dans sa réflexion, et que je peux enfin me laisser aller à l'histoire sans ne plus tourner autour du pot.

Merci pour le partage, et bonne chance pour le concours.

   Cyrill   
20/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,
Voilà un récit original. La fonction du narrateur - homme de l’ombre qui met en lumière - est parfaite pour creuser le thème du concours, et on est servi de ce point de vue. On peut suivre l’évolution de sa réflexion lors d’un épisode de sa vie où on assiste à un changement de statut. Témoin importun, le voilà mis à l’ombre. J’ai trouvé particulièrement réussi l’épisode de la cellule. Sa tentative d’aménagement, détaillée jusqu’à l’obsession, se solde par un échec dont il saura faire usage : de l’ombre jaillit la lumière.
Le narrateur en vient finalement à dispenser des séances de méditation. Il semble, au regard de la dernière phrase et de l’introduction, que l’auteur veuille lui aussi nous faire méditer les notions d’ombre et lumière. Ce pourquoi j’aurais plutôt classé ce texte en réflexion/dissertation.
Ironie de l’histoire : au service d’un prince anonyme – Untel, le bien nommé, reste dans l’ombre - tout occupé de conquêtes dont nous ne saurons rien, l’esthète conquiert une « dimension décorative » qui me laisse songeur et souriant, une intériorité et une position de respectabilité plus grandes. La « sophistication dépourvue [...] de maniérisme » dont il s’enorgueillit fait écho à un personnage obsédé par sa valeur.
Il y a un jeu constant de votre part, auteur, entre ombre et lumière. Je sens une certaine malice à exploiter les nuances sémantiques, dans leur acception aussi bien concrète qu’abstraite.
Merci pour le partage.

   Pouet   
17/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Slt,

j'ai particulièrement apprécié l'écriture et le fond en légère folie de château intérieur porteur de geôle de la lumière ou plus sûrement l'inverse. Quoique.
Ah, "ma dimension décorative"...
Tout à faire avec du rien, c'est la base de l'ennui, père de toutes les vertus.
Se cacher à soi-même n'est pas forcément gage d'illuminations non plus et puis le pif derrière une poutre on voit toujours un peu en forme d'écharde, ça égratigne la clarté.
La rumination, n'est hélas pas que pour les bovins. Mais je salue l'optimisme!
Bien sûr un théâtre d'ombres, quant à l'éclairagiste il est parti faire caca derrière l'église, oups pardon pour ma vulgarité.

   Anonyme   
12/7/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Jeanphi,
C'est très exagéré, mais dans le bon sens du terme- une multitude de détails fabuleux, des phrases riches, des mots savants, je peux l'affirmer, ce texte fait penser à Huysmans - à rebours - de part sa description, ses nuances et sa force.
Bravo !
ericboxfrog


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