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Réalisme/Historique
JohanSchneider : Décadents
 Publié le 18/11/22  -  15 commentaires  -  16414 caractères  -  102 lectures    Autres textes du même auteur

Dédiée à la vraie Nelly, où qu’elle soit à présent, qui a réellement été ma guide en Bulgarie en 1980 et m’a engueulé pour être entré sans me déchausser dans une mosquée. À part ça toute la nouvelle est pure fiction.


Décadents


Mardi 19 août 1980, Рилски Манастир (monastère de Rila, Bulgarie)


« Ils vont me rendre folle ! » pensa Nedelya, désespérée. Naguère elle avait une meilleure opinion de la France. N’avait-elle pas étudié sa langue, sa littérature, son histoire ? Pendant ses études elle avait rencontré quelques Français : des enseignants, des diplomates. Des gens très différents de ceux dont elle s’occupait à présent.

Nedelya aimait son métier de guide-conférencière car elle était fière de faire découvrir la Bulgarie aux touristes étrangers. On lui confiait des groupes de vingt à quarante personnes. Elle avait déjà accompagné des Occidentaux, mais le plus souvent on lui confiait des Français car elle était l’une des guides qui maîtrisait le mieux leur langue. Pourtant il y avait eu un ou deux incidents causés par des malentendus linguistiques. Le français de Nedelya était excellent mais trop châtié et plutôt hermétique à une certaine trivialité bien gauloise. Rien de grave au fond. Cela s’était réglé dans un esprit égalitaire et fraternel d’amitié entre les peuples, avec force libations et toasts baignant dans la Schwärmerei (« Le peuple français est un grand peuple, le peuple bulgare est un grand peuple »). Les régimes d’outre-rideau de fer étaient friands de ces démonstrations rhétoriques.


Mais le groupe de Français avec lequel Nedelya était partie de Varna quelques jours plus tôt s’était distingué comme le plus pénible qu’elle ait eu à supporter. Les femmes étaient odieuses et les hommes de parfaits mufles. Le premier jour du voyage Nedelya, qui s’habillait toujours de façon austère, s’était risquée à étrenner une petite robe d’été à fleurs importée d’Allemagne de l’Est, pays qui passait pour avoir la meilleure industrie textile du Comecon. La robe, bien que parée de boutons nacrés, était assez quelconque, mais avec ses vingt-cinq ans et son joli visage ovale au type plus oriental que slave, Nedelya était ravissante. Moins effarée par les œillades appuyées des hommes du groupe en direction de ses jambes et de sa poitrine que par les regards de haine pure que dardaient les moitiés de ces messieurs, Nedelya fit dès le lendemain disparaître la robe au profit d’un t-shirt et d’un jean. Les hommes se renfrognèrent tandis que ces dames ne se déridaient nullement.


Pourtant deux membres du groupe semblaient échapper à cette maussaderie moutonnière : le couple Altar.

La femme, Dalia, était blonde et grande. Elle traitait Nedelya en égale, ni comme une rivale ni comme une employée. Elle s’adressait à elle de femme à femme, et avait l’élégance d’éviter la condescendance bienveillante que leur différence d’âge aurait pu instaurer.


Guy, le mari, était courtois et réservé. Nedelya les aimait bien. Ils différaient du reste du groupe. Ils ne riaient pas aux plaisanteries sans esprit de leurs compagnons de voyage. Comme cette manie imbécile de montrer du doigt tous les commerces en s’écriant d’un ton niais : « Oh ! Un pektopate (sic) ! », lecture ignare de l’alphabet cyrillique. Il fallait lire ресторант et prononcer « restaurant », comme en français. La blague, involontaire au début, avait pu être drôle la première fois. Répétée à longueur de journée, elle menaçait de donner des idées de meurtre à Nedelya.


Sa mission consistait entre autres à montrer à ces Occidentaux que la Bulgarie était, elle aussi, riche d’un passé prestigieux tout en étant également une nation moderne tournée vers l’avenir. Les visites de sites historiques, la plupart témoins de la lutte contre l’occupation ottomane et du combat pour l’indépendance, alternaient avec des conférences interminables consacrées aux performances de tel ou tel combinat qu’on ne voyait que par les vitres de l’autocar (visites impossibles « pour raisons de sécurité ») et qui ne lui attiraient que des hochements de tête ennuyés et méprisants. Nedelya était loyale mais réaliste : elle savait que la puissance industrielle de son pays était infime comparée à celle de l’Union soviétique et même à celle de la France.


La Bulgarie avait besoin des devises occidentales que rapportait le tourisme de masse pour parachever l’édification du socialisme. Contradiction ou paradoxe que personne ne se risquait à discuter car c’était d’une part la ligne du Parti, d’autre part cela eût revenu à insinuer que l’aide des pays frères du camp socialiste ne valait pas grand-chose.


On avait interdit à Nedelya de révéler son prénom bulgare à ses touristes. Elle avait au moins eu le choix de son pseudonyme et opté pour Nelly qui sonnait un peu comme son vrai prénom tout en faisant occidental. Elle avait du mal à s’y faire et était minée par l’impression de trahir quelqu’un ou quelque chose, mais qui, quoi ? Était-elle la même femme, Nedelya ou Nelly, quand, débarrassée de sa horde de péquenots sans éducation, elle se retrouvait toute seule le soir entre les draps rêches de sa chambre d’hôtel, tandis que ses ouailles se prélassaient dans des chambres climatisées avec télévision et rakija à volonté ? Certes on ne recevait que les deux chaînes nationales et une chaîne roumaine mais le rakija, hors de prix, était de qualité supérieure, c’est-à-dire supérieure à l’alcool auquel avait accès le citoyen lambda.


Nedelya détestait l’alcool et les ivrognes. Ce qui lui avait valu quelques moqueries de certains collègues qui ne plaignaient pas la bouteille et s’amusaient à lui demander si son aversion était culturelle ou idéologique. Quant à eux, ils n’hésitaient pas à pousser les « hôtes étrangers » à boire plus que de raison, les faisant ainsi dépenser davantage en alcool supposé être « duty free ». Nedelya préférait se retirer dans sa chambre dès qu’elle voyait que son groupe commençait à être un peu parti après quelques verres. Pour être juste, il ne s’agissait pas de l’ensemble du groupe. Elle avait été dûment chapitrée sur ce sujet durant sa formation. En cours de psychologie des masses, on lui avait enseigné qu’un groupe d’individus, quelle que soit sa taille, obéit toujours à la loi du leadership et du suivisme : il y avait un petit noyau de meneurs, qui avait comme satellites quelques suiveurs, le reste du groupe étant désigné comme « la majorité silencieuse ». Nedelya avait vite repéré les meneurs. Ils étaient quatre, qu’elle connaissait par leurs prénoms car ils ne cessaient de s’interpeller les uns les autres à longueur de journée : Claude (dit Claudius), Roland, Louis et Francis. Il y avait aussi deux ou trois suiveurs insignifiants tellement dépourvus de personnalité que Nedelya n’avait pas retenu leurs noms. Mais la bande des quatre, comme elle les appelait, lui posait des problèmes.


Ils s’étaient tenus tranquilles les deux premiers jours du voyage. Mais il y avait eu cet incident à Razgrad. La visite de la mosquée Ibrahim Pacha était au programme. Le monument était désaffecté mais Nedelya avait tenu à ce que tout le monde se déchausse. Un vent de rébellion s’était alors levé. La bande des quatre y avait trouvé l’occasion de se distinguer en soutenant les récalcitrants : « On garde nos pompes, et merde au grand mufti ! » Nedelya avait abrégé la visite et la troupe, qui chaussé qui déchaussé, s’était hâtée en désordre vers la sortie sous l’œil amusé d’autres guides ayant la chance de piloter des groupes plus disciplinés. À la sortie de la mosquée, les larmes aux yeux et d’une voix sifflante de colère, elle avait engueulé la bande des quatre et juré que personne ne lui avait jamais infligé une telle honte de toute sa vie. C’était maladroit. Elle venait de commettre sa première faute professionnelle. On ne crie pas sur les hôtes étrangers, même quand ils sont stupides et mal élevés.


Mais Nedelya n’avait pas le temps de s’en soucier. Autrement préoccupante était l’ambiance délétère qu’elle avait décelée entre le couple Altar et le reste du groupe, en particulier la bande des quatre. C’était plus qu’une antipathie réciproque : un antagonisme qui semblait enraciné, une détestation rampante qui empoisonnait l’ambiance. Nedelya n’était pas loin de penser que monsieur et madame Altar étaient haïs de la bande des quatre.


La visite du monastère s’achevait. Elle avait été longue et pénible. Le groupe, vite remis de sa surprise de constater que les lieux étaient toujours habités par d’authentiques moines, s’était égaillé dans toutes les directions. Nedelya tenta d’empêcher Claudius et Francis d’importuner un vieux moine à la barbe interminable qu’ils voulaient photographier. Ils la rembarrèrent : « Puisqu’on vous dit qu’on va lui donner la pièce. » Elle dut rappeler à l’ordre des curieux s’étant introduits dans des cellules, qui ne se visitaient pas. Elle tança Louis et Roland alors qu’ils suivaient de très près un groupe tchécoslovaque composé de lycéennes court-vêtues. « Vous n’avez pas honte ? s’indigna-t-elle, furieuse. Que vont penser mesdames vos épouses ? » Son français suranné les fit rire. Nedelya haussa les épaules et cracha avec mépris une insulte bulgare leur suggérant de subir un coït furtif perpétré par un loup des Carpates. Deuxième erreur : on n’insulte pas les hôtes étrangers, même quand ils sont vulgaires et libidineux. Alors qu’elle rassemblait tout son monde pour regagner l’autocar, Nedelya avait l’impression que les nerfs allaient lui jaillir hors de la peau. Elle était en retard sur l’horaire. L’étape du soir était Sofia et il restait plus de deux heures de route. La bande des quatre, qui avait disparu à un moment quelconque de la visite, surgit soudain de nulle part. Ils étaient essoufflés, une lueur mauvaise dans les yeux. Nedelya compta ses touristes : il lui en manquait encore deux, les Altar.


Quelques minutes passèrent, qui parurent interminables à Nedelya. Elle était sur le point de retourner au monastère lorsqu’elle les vit descendre lentement l’escalier principal. Dalia soutenait comme elle pouvait Guy qui avait le nez en sang et se tenait la tête à deux mains. Ils repoussèrent l’aide de Nedelya pour monter dans le car. Ils lui expliquèrent d’un ton bref que Guy était tombé dans un escalier mal éclairé. Dalia refusa sèchement l’offre de Nedelya de faire un détour par un dispensaire ou l’hôpital le plus proche. Nedelya n’osa pas insister et ce fut sa troisième erreur : on ne laisse jamais les hôtes étrangers blessés ou malades sans soins médicaux. L’équipement de bord de l’autocar comprenait une trousse à pharmacie que Nedelya proposa timidement à Dalia. Celle-ci la lui arracha des mains sans un merci et se pencha vers elle en la regardant droit dans les yeux. Il n’y avait plus la moindre bienveillance dans son regard gris acier tandis qu’elle murmurait : « Dès qu’on arrive à l’hôtel, je veux téléphoner. Vous avez compris ? » Nedelya acquiesça sans dire un mot. Elle comprenait surtout que les ennuis allaient lui pleuvoir dessus.


***


Une fois à Sofia, Dalia passa un long coup de téléphone, puis le couple s’enferma dans sa chambre. Peu avant le dîner, Nedelya fut appelée à la réception de l’hôtel. Elle y trouva les Altar avec leurs bagages, habillés de pied en cap. Ils firent mine de ne pas l’avoir vue. À leurs côtés se tenait un jeune homme vêtu d’un complet strict que Nedelya identifia d’instinct comme un cadre du Parti. Il négligea de se présenter et entraîna Nedelya à l’écart tandis que le couple parlementait avec l’employé de la réception qui se faisait prier pour restituer leurs passeports.


— Que s’est-il passé au monastère ? questionna-t-il rudement.

— Je ne sais pas, balbutia Nedelya, monsieur Altar a fait une mauvaise chute…

— Petite sotte ! la rabroua l’homme. C’est ce qu’ils t’ont raconté ? Moi aussi j’ai eu droit à la version de l’escalier. La vérité c’est que quatre des touristes dont tu avais la responsabilité étaient en train de serrer de très près une étudiante tchèque qui s’était laissé semer par son groupe. Elle était bien partie pour se faire violer. Le père Altar s’est interposé et s’est fait tabasser. Avant de venir ici j’ai passé un coup de fil au monastère. Un moine a été témoin de l’incident. Les étrangers lui ont donné de l’argent pour qu’il tienne sa langue. Vieil imbécile ! Ces curetons et ces Occidentaux sont tous à mettre dans le même sac : décadents et corrompus. Quant à toi…


Il laissa sa phrase en suspens et toisa Nedelya avec mépris. Puis il désigna Dalia d’un signe de tête :


— La vieille a téléphoné à leur ambassade, où ils ont apparemment des relations. Pour eux le circuit touristique est terminé : ils prennent ce soir un avion pour Paris. Je les emmène à l’aéroport.


Par les portes vitrées du hall d’entrée, Nedelya vit une GAZ Volga garée devant le perron de l’hôtel. L’homme lui tourna le dos et retourna à la réception où il engueula l’employé qui se résigna à sortir les passeports d’un coffre-fort. Il escorta les Altar jusqu’à la voiture et les y installa. Alors qu’il s’apprêtait à monter à côté du chauffeur, il parut se souvenir de quelque chose. Il rentra et rattrapa Nedelya alors qu’elle se dirigeait, mélancolique, vers la salle à manger. Il la retint par le bras :


— Pas si vite, camarade ! Ne va pas croire qu’on en a fini avec toi. Je vais adresser un rapport à tes supérieurs. Il y aura des suites.

— Des suites ? répéta faiblement Nedelya.


L’homme, curieusement, sourit en lui disant :


— Cette affaire est politique. Tu as tes papiers sur toi ?


Croyant l’impressionner, Nedelya lui fourra sous le nez sa carte de stagiaire du Parti.

Le sourire de l’homme s’élargit :


— Tiens, tiens ! Nous sommes presque collègues, hein ? Voyons ça : Ismaïlova, Nedelya, née le 30 juillet 1955 à Silistra…


Le sourire s’effaça :


— Tu es turque ?

— Par mon père.

— Es-tu musulmane ?

— Je suis communiste ! affirma Nedelya en reprenant sa carte avec brusquerie. En quoi cette histoire est-elle politique ?

— Puisque tu es membre du Parti, je vais t’expliquer. La Bulgarie va déposer un dossier pour que le monastère de Rila soit inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. De quoi aurons-nous l’air si des jeunes filles s’y font agresser et si des touristes s’y battent comme des chiffonniers ? Voilà pourquoi cet incident est politique. Ta négligence est politique, car tu aurais dû a priori te méfier de ces types et les avoir à l’œil. Tu le savais pourtant : ces pourritures de capitalistes sont obsédés par la boustifaille, le cul et le pognon.


« Dans cet ordre ? » faillit rétorquer Nedelya, choquée au fond d’entendre un langage aussi cru dans la bouche d’un cadre. Elle baissa la tête en s’efforçant de montrer un repentir sincère.


— Je suis désolée, murmura-t-elle.

— Doris Bilek s’en fout pas mal que tu sois désolée, fit sèchement le cadre. C’est la gamine qui a failli être violée. Elle a dix-sept ans. C’était son premier voyage à l’étranger sans ses parents. Ses parents qui pensaient qu’elle serait en sécurité chez nous, tu comprends ? Et ce qui n’arrange pas tes affaires, c’est que son père est un ami personnel de notre ministre du tourisme : ils ont lutté ensemble contre les nazis pendant la guerre.

— Que va-t-il se passer maintenant, pour… ces hommes ?


L’homme éclata de rire.


— Qu’est-ce que tu t’imagines ? Rien, naturellement. Ce sont des porcs, mais ils sont riches. Notre Bulgarie est pauvre et malheureusement elle a besoin de leurs devises. Au mieux, on les invitera peut-être, poliment mais fermement, à ne jamais remettre les pieds ici. Mais tu ferais mieux de te soucier de ton propre avenir.


Nedelya le regarda fixement, les yeux agrandis par l’appréhension.


— Il est clair, conclut l’homme, que ta carrière dans le tourisme est terminée. C’est du moins ce que je recommanderai dans mon rapport. Et ton avenir au Parti est également compromis. Au revoir, camarade Ismaïlova.


Il tourna les talons et se dirigea à pas pressés vers la sortie.


ÉPILOGUE


Nedelya fut chassée de son emploi et du Parti. Elle fut envoyée dans un combinat près de Plovdiv où, devant un tour, elle perçait des trous dans des boutons de fausse nacre. Elle ne sut jamais que les boutons qui ornaient sa robe d’été est-allemande sortaient de cette usine. Le 19 août 1989, neuf ans jour pour jour après l’incident du monastère, elle fut expulsée vers la Turquie en même temps que plus de trois cent mille citoyens bulgares de souche turque.


 
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   Anonyme   
23/10/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Quand j'ai lu ceci :
l’ambiance délétère qu’elle avait décelée entre le couple Altar et le reste du groupe, en particulier la bande des quatre.
je me suis dit qu'il allait se passer quelque chose de violent impliquant les personnages sus-cités. Bingo.

J'ai trouvé l'histoire intéressante par sa révoltante injustice et sa noirceur, même si personne n'est sérieusement blessé. Une narration trop linéaire à mon goût, mais j'admets que ce n'est pas le type de récit qui demande des fioritures ou sauts périlleux stylistiques ; cela risquerait de dévoyer le sujet.
Ce qui m'a davantage gênée, c'est le volume du début, de l'exposition de la situation. Il me semble que cela amollit nettement l'ensemble, que jusqu'au fragment cité plus haut il conviendrait de resserrer pour avoir une meilleure dynamique. Mon avis, rien d'autre. (En rejetant un œil, je me dis que j'ai la même impression sur le dialogue entre Nedelya et le cadre du parti, je le trouve trop long et appuyé pour bien me faire saisir, à moi lectrice, les enjeux. En conséquence, Nedelya m'y apparaît un peu dure de la comprenette, son interlocuteur doit tout lui mâcher pour qu'elle saisisse !)
En tout cas, la nouvelle m'a paru plutôt bien menée (à part, donc, sa longueur), l'écriture adaptée à l'histoire et non l'inverse. Un point positif à mes yeux.

   cherbiacuespe   
24/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Chronique d'une période trouble de la guerre froide, plus complexe qu'il n'y paraît. La simpliste opposition du rouge contre le bleu, ou inversement, a masqué de vastes hypocrisies humaines. En cela, cette nouvelle mérite que l'on s'attarde sur son contenu.

D'abord le style, la narration, le choix de composition, simple et souvent direct, l'absence de sensiblerie exacerbée. Il en résulte un texte facile à lire, captivant jusqu'au bout.

Le fond met en exergue les contradictions des deux mondes opposés et leurs affinités, leurs hypocrisies, parfois, aussi. Ce texte mérite d'être lu et relu, contesté, pourquoi pas (pas dans le factuel bien sûr) ? Il trouvera sa place, à mon avis, une bonne place, dans le catalogue Onirien.

Cherbi Acuéspè
En EL

   Anonyme   
25/10/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Une nouvelle qui nous plonge en Bulgarie, un pays que j’avoue ne pas connaître du tout, et d’un groupe de touristes accompagnée par leur jolie guide. Un quatuor de touristes français beaufs et alcoolos refusent de se déchausser alors qu’elle les emmène visiter une mosquée. Incident. Au monastère ils font chier les moines avant de mater de jeunes étudiantes tchèques « court vêtues ». On a l’impression d’être dans un album des Bidochons de Binet. Comme si ça ne se suffisait pas, la pauvre guide a provisoirement perdu deux de ses ouailles, elle les retrouve mais l’homme a le pif en chou-fleur. Et la voilà aux prises avec un politicard de bas étage qui lui explique qu’elle n’a pas assuré une cacahuète, avec menaces à l’appui. Elle finira virée du parti et de son travail avant d’être finalement expulsée en Turquie.

Tout ça est assez tristounet pour cette pauvre jeune femme. Sans être réellement passionnée, j’ai suivi ces aventures sans ennui. Et je devine que malgré l’avertissement en préambule, certains épisodes sont tirés d’un vécu.

Merci pour la gratuité et la balade douce-amère aux portes de l’Orient.

Anna en EL.

   Vilmon   
2/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,
Une histoire triste, j’avais cru à un revirement de situation, mais c’est un vortex qui tourne et qui s’enfonce. La description de la situation politique socialiste ou communiste m’a fait pensé à certaines scènes du film Citoyen X. Des mauvais voyageurs se croyant tout permis, il y en a dans presque tous les groupes de voyages organisés, mais j’en n’ai jamais entendu d’aussi effrontés que ces quatre. On oublie vite que notre monde démocratique est précieux, ce récit permet d’en savourer la valeur et de prendre soin de la préserver. J’ai beaucoup apprécié le style de narration.

   Anonyme   
18/11/2022
Ce que j’ai aimé :
_____________
L’originalité du récit qui m’a plongée dans un pays dont on ne parle jamais : la Bulgarie. J’aime apprendre des choses quand je lis une nouvelle et le contexte politique décrit a l'air bien documenté.


Ce que j’ai moins aimé :
__________________
Juste le style que je n’ai pas trouvé exceptionnel mais il sert correctement l’histoire.



Ma Conclusion :
_________
Pour moi, c’est une bonne nouvelle qui sort des sentiers battus et qui m’a vraiment intéressée.

   plumette   
18/11/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Dépaysement géographique et temporel pour cette nouvelle centrée sur la jeune Bulgare Nedelya débordée par un groupe de touristes français plus que lourdingues. Je me suis dit un instant que c'était également un peu lourd de présenter ainsi la bande des 4 : alcoolisés, grossiers , concupiscents et violents mais finalement, la loi du groupe fait que ces comportements là sont parfois exacerbés.

Si on ne visite pas vraiment la Bulgarie, on est replongé, avec efficacité dans l'ambiance des années 1980 avec son lot d'injustices.

Peut-être quelques longueurs dans la mise en place, mais une écriture dynamique avec des trouvailles: un ex parmi d'autres "Nedelya avait l’impression que les nerfs allaient lui jaillir hors de la peau"

   Malitorne   
19/11/2022
 a aimé ce texte 
Un peu
Autant dire tout de suite que j’ai largement préféré Moleskine, qui portait un thème fort, que cette nouvelle pour moi bien en dessous. Pas franchement passionnante, trop longue pour ce qu’elle a à dire, avec des éléments caricaturaux. « La bande des quatre » par exemple est taillée à la serpe et j’ai dû mal à croire, aussi abrutie soit-elle, qu’elle est voulue commettre un viol. Les lignes du scénario sont trop grosses. Quant à cette brave Nedelya je ne lui ai trouvé au bout du compte que peu d’intérêt, lisse, pas très crédible non plus dans son rôle de guide. Reste la description d’un pays mal connu sous le Rideau de fer. Il n’est jamais facile de romancer des souvenirs, on est coincé entre un souci de réalisme et l’apport de fiction. Ici il me semble que ça n'a pas fonctionné.

   Jemabi   
19/11/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Il faut bien reconnaître que, nonobstant votre superbe écriture, cette histoire n'a pas un énorme interêt et qu'elle ne prend tout son sel qu'au regard du contexte, celui-ci étant encore plus présent quand Nedelya se fait réprimander par le cadre du parti. On sent alors tout ce que ce régime policier avait de castrateur dans sa volonté de désigner des coupables en toutes occasions. Un système qui se voulait tellement parfait qu'il ne pardonnait pas le moindre manquement. Il a finit par s'autodétruire, c'est encore la meilleure qu'il ait faite.

   Angieblue   
19/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une histoire qui fait froid dans le dos en montrant que l’humain et la justice passent, dans certains milieux, après les intérêts politiques.
Le cadre est bien posé et documenté, et les personnages sont tous bien décrits et de manière détaillée, par exemple la bande des quatre salauds. Ça fait très réaliste et on arrive facilement à se représenter chacun des protagonistes de cette histoire ainsi que les lieux et le contexte. Bravo pour cela ! J’imagine que vous avez dû aller en voyage dans ce pays et que vous avez lu des ouvrages politiques.
Maintenant, en ce qui concerne l’intrigue, elle est bien menée. Quand le couple avec le mari blessé revient du monastère, on ne s’attend pas à la tragédie crapuleuse qui s’est déroulée à l’intérieur des murs : la tentative de viol, le tabassage et l’achat du silence du moine témoin des faits.
On peut être étonné que le couple regagne le bus en gardant le silence. J’en déduis qu’il n’y avait pas le téléphone dans le monastère pour prévenir tout de suite les autorités. Ça se passe dans les années 80, je pense, donc le téléphone portable n’existait pas encore.
Ensuite, la gestion de cette affaire en raison du contexte politique est bien réalisée. Il n’y a de loi que celle de l’argent. Les petits sont sacrifiés comme cette guide touristique qui se retrouve dans une usine de confection de vêtements dont on imagine les conditions de travail. Et bien sûr, l’omerta pour des raisons politiques. J’ai trouvé assez subtile, à la fin, l’allusion à la robe que portait la jeune guide lorsqu'elle a rencontré pour la première fois le groupe de touristes.
En somme, un scénario bien ficelé qui tient la route et qui est bien représentatif de la complexité du milieu décrit, ce qui n'est pas simple à réaliser.
C’est très cinématographique. J'ai vu un vrai thriller à suspense se dérouler sous mes yeux. Je ne regrette pas ma lecture.

   Louis   
25/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Cette nouvelle montre la situation de l’individu confronté au collectif : le groupe, le parti, l’État.
Elle suit le destin tragique d’une individualité, écrasée par les mécanismes de pouvoir qui traversent ces formations collectives ; destin d’une jeune femme dont la singularité sera niée, la féminité réprimée, l’humanité bafouée, et qui perdra son identité professionnelle, son identité ‘communiste’ membre du parti, et jusqu’à son identité nationale.

Nedelya est une jeune « guide-conférencière » bulgare, dont la fonction consiste à « faire découvrir la Bulgarie aux touristes étrangers », et plus particulièrement aux touristes français.
Elle doit exercer une autorité sur les groupes qui lui sont confiés. Il lui faut encadrer les touristes, surveiller leurs comportements, contrôler leurs agissements. Une entente est souhaitable, entre elle et les visiteurs étrangers, favorisée par des directives bienveillantes, et un consentement de la part des groupes à suivre ses instructions, de façon à pouvoir assurer au mieux son rôle de guide.

Cette tâche, source pour elle de plaisir et de fierté, est soumise pourtant à de nombreuses contraintes, en termes d’images. Il lui faut « montrer » que la Bulgarie est « un pays, lui aussi, riche d’un passé prestigieux tout en étant également une nation moderne tournée vers l’avenir ». Elle doit faire en sorte que, dans sa personne et son mode d’agir, le pays qu’elle représente apparaisse à la fois accueillant et sûr, garant du bien-être et de la sécurité des personnes.

Le destin de la jeune fille se joue lorsqu’elle reçoit un groupe difficile, « pénible » : dit-elle.
C’est un groupe de durée provisoire, qui rassemble une quarantaine de personnes tout au plus, probablement réunies au hasard, en une période pendant laquelle se développe le ‘tourisme de masse’.
Et pourtant, vont naître dans ce groupe restreint des rapports de pouvoirs, et donc des rapports de forces, en son sein d’une part, et dans la relation avec la jeune guide d’autre part.
Se trouvent ainsi mis en évidence les éléments et les mécanismes de ce que Michel Foucault nomme une ‘micro physique du pouvoir’, un pouvoir dans ses ondes et corpuscules.
Des rapports de la jeune guide avec le groupe « pénible », ne naît donc pas une connivence, une confraternité, mais au contraire un affrontement, dans lequel la jeune femme va se trouver en position de faiblesse.

Un premier conflit est provoqué par la tenue vestimentaire de la jeune bulgare. Elle troque un vêtement « austère » pour une «petite jupe d’été ».
Par sa fonction, elle est « en vue », et sa féminité se trouve mise en valeur, elle qui est une jeune femme « ravissante ».
Son apparence provoque alors un regard ‘machiste’ de la part des membres masculins du groupe.
Elle apparaît désirable, et ce qu’elle montre d’elle suscite alors plus d’intérêt que ce qu’elle a à montrer de son pays. Les femmes du groupe, de leur côté, voient en elles une « rivale », et la considèrent de façon hostile, avec « haine ». Leurs compagnons libidineux ne sont pas mis en cause, mais celle qui est objet de désirs, celle qui est supposée avoir acquis la puissance attractive du désirable ( alors que rien n’est désirable en soi ; alors qu’il n’ y a que du désiré et non du désirable)
Nedelya se trouve contrainte de nier sa singularité et sa féminité. Il lui faut apparaître ‘non- genrée’ comme disent les sociologues, dans une tenue qui masque ses formes féminines, et la fait paraître à l’image du pays, tel que les visiteurs se le représentent, c’est-à-dire de façon peu flatteuse.

Parce qu’elle représente son pays, en effet, sous le régime politique ‘socialiste’, son apparence désirable ne peut être admise par le groupe, et se trouve en contradiction avec le pays visité qui, lui, n’est pas considéré comme ‘enviable’ ; le désir qui les a menés dans ce voyage touristique est de curiosité, de confirmation peut-être de l’infériorité du régime par rapport aux régimes libéraux occidentaux. L’apparence agréable de la jeune fille heurte donc leurs convictions. Pour résoudre le paradoxe, la jeune guide n’est considérée que par son corps, sa présentation plutôt que sa représentation, présentation sexuée, érotisée par le regard masculin.

L'affirmation de son individualité féminine se trouve donc réprimée par l’effet du pouvoir machiste traditionnel, d’une part, et par celui des relations de pouvoirs politiques internationaux, d’autre part.

Par ailleurs, les autorités bulgares la contraignent à renoncer à son prénom. Or le prénom participe de l’identité d’une personne. Ainsi est-elle victime d’une ‘dépersonnalisation’, et d’une ‘aliénation’ au sens où elle devient comme étrangère à elle-même.
En se donnant un pseudo, avec pour seule liberté la possibilité de le choisir, elle éprouve une «impression de trahison », d’une infidélité à elle-même, et à sa culture ( d’autant que ce pseudo, Nelly, « fait occidental »)

Sous le feu de puissances et de pouvoirs croisés, l’identité de la jeune fille se trouve ébranlée.

Un conflit d’images s’instaure entre le groupe et la jeune fille.
Les plaisanteries du groupe, fondées sur l’ignorance de l’alphabet cyrillique, exaspèrent la jeune guide. Elles lui apparaissent comme une offense pour son pays, et pour elle-même ; elles brisent l’image qu’elle se faisait des Français, cultivés et courtois.
Chacun est déçu par l’image de l’autre. Elle s’attendait à des individus correspondant à une image plus élevée des touristes ; ils s’attendaient à une personne plus dégradée du guide, conformément à l’image présupposée du pays.

Ce groupe de touristes français à l’étranger, se comporte comme s’il était délivré des règles et lois de son pays d’origine, et non tenu de respecter celles d’un pays qu’ils visitent mais n’est pas le leur.
Le pouvoir institutionnel auquel les individus sont habituellement soumis est devenu plus lâche, plus lointain, dans le phénomène de groupe qui semble favoriser la séparation de l’individu par rapport à la société, et qui se trouve comme livré à lui-même.
Traversé par les désirs dominants de certains de ses membres, naissent en lui les relations de pouvoir.
Non seulement s’instaurent de telles relations entre ses membres, entre « meneurs » et « suiveurs », ainsi que des rapports de forces avec le guide, mais aussi des antagonismes, des rapports conflictuels avec un couple, « le couple Altar », qui refuse le ‘suivisme’ et le comportement de rustres des membres du groupe.

Un nouvel incident se produit au cours de la visite. De façon indécente et irrespectueuse, sous l’impulsion des meneurs, une partie des touristes refuse de se déchausser dans une mosquée, malgré les consignes expresses données par Nedelya. L’autorité de la jeune guide s'en trouve compromise. Elle « engueule » les meneurs, mais commet ainsi « une faute professionnelle » selon le narrateur.
S’il s’agit d’une faute, alors elle n’a aucun moyen d’asseoir son autorité. Elle est sans défense. Livrée au pouvoir des meneurs du groupe, hommes sans scrupules.
Mais sa responsabilité aux yeux du pouvoir politique bulgare est totale. Elle se trouve prise dans une situation intenable : une responsabilité maximale, et une autorité minimale, dans les moyens de l’assurer et l’exercer.

Elle connaît les rudiments de la « psychologie des masses », ou ce qu’on appelle aujourd’hui « la dynamique de groupes », qui lui ont été enseignés. Elle sait que des rapports de pouvoir s’instaurent en eux, et qu’émergent du groupe un ou des ‘leaders’ ou « meneurs », dont elle doit contenir l’influence.

Les meneurs, identifiés au nombre de quatre, désignés « bande des quatre », tendent ainsi à diriger le groupe, à susciter des actions en lui qui contreviennent aux exigences de la jeune guide ; cherchent à lui ravir toute autorité, à usurper son mince pouvoir de faire agir les touristes selon ses consignes.
Son savoir ne suffit pas pourtant à conserver les rênes de la tribu de touristes qu’elle a en charge.
Non pas qu’elle soit ‘faible’, mais la situation dans laquelle elle se trouve prise, soumise à des contraintes multiples, la laisse démunie dans sa capacité à diriger le groupe.
Commet-elle une succession d’« erreurs » ou de « fautes professionnelles » comme le suggère le narrateur ? Mais ne rien dire, ne pas « crier sur les hôtes étrangers, même quand ils sont stupides et mal élevés », lui aurait-il donné le moyen d’être plus efficace dans son rôle ? C’est peut-être une faute, mais aux yeux du pouvoir bulgare, soucieux de l’image du pays.
De même « ne pas insulter les hôtes étrangers, même quand ils sont vulgaires et libidineux », en quoi est-ce une « erreur » ? Pour la déontologie de sa fonction, peut-être. Mais non du point de vue de l’efficacité du contrôle du groupe. Sans ces insultes, sans les cris et reproches faits aux meneurs, la catastrophe aurait-elle pu être évitée ?

Mais elle est survenue, cette catastrophe, lorsque l’ensemble du groupe n’a plus été sous son regard, et donc sous son contrôle, « le groupe (… ) s’était égaillé dans toutes les directions »
Elle ne l’a pas vu, mais apprendra par un cadre du parti, qu’un homme a été victime de violence, Guy Altar. Pire, il s’est fait «tabasser » par la bande des quatre pour avoir voulu s’interposer, lorsque les quatre gaillards libidineux importunaient, jusqu’à tenter de la violer, une jeune fille tchèque.
Un moine, de plus, témoin de la scène, a été corrompu par de l’’argent par les quatre français, afin qu’il ne parle pas.

Un cadre du parti convoque Nedelya , et, bien qu’absent de la scène, il est bien informé…
Le parti, lui, a les moyens de tout voir, de tout contrôler, de tout savoir. Rien n’échappe à sa vigilance.

Jugée responsable, Nedelya perdra son emploi, sera exclue du parti, et sera même expulsée de Bulgarie pour être de « souche turque », elle perdra ainsi sa nationalité bulgare.
L’individu compte bien peu, face aux intérêts d’État.
Dans ‘l’intérêt supérieur de la nation’ la valeur de ‘justice’ elle-même se trouve renversée, les véritables coupables ne seront pas punis, la jeune femme innocente le sera.
Au nom toujours de ces mêmes intérêts, au nom de l’image du pays, la ‘faute’ de Nedelya sera considérée comme « politique » et donc grave. Puisque le pays, pour son image, pour son prestige, veut proposer la candidature du monastère, où se sont déroulés les fâcheux événements, au patrimoine mondial de L’Unesco.

Et qu’importe le sort d’une jeune fille, qui compte si peu, si négligeable aux yeux de la ‘raison d’État’ et du jeu des rapports de puissances étatiques.

L’auteur confronte, dans cette nouvelle, deux systèmes politiques différents, et montre qu’en chacun d’eux, peu de place est laissée à la liberté individuelle.
Sous le régime communiste bulgare, le pouvoir ‘molaire’ institutionnel ( Pour reprendre le vocabulaire de G. Deleuze ) le contrôle sur chaque individu est total ; mais de l’autre côté, dans celui qui pourtant est dit « libéral », la liberté n’est pas assurée non plus.
Naissent dans les groupes sociaux, et le groupe de touristes n’en est qu’un exemple, des rapports de forces, des pouvoirs 'moléculaires'. S’engendrent des suiveurs, non des êtres libres ; émergent des individus soumis à leurs passions aveugles, incapables de se contrôler, esclaves de leurs désirs, usant de violence à l’égard de ceux qui résistent à leurs volontés, non des êtres libres. Et les hommes au masculin restent encore des prédateurs, et les femmes sont leurs proies.

Les flux de pouvoirs qui traversent tous les systèmes collectifs rendent donc difficiles le respect de l’intégrité de chacun, la construction d’une subjectivité libre garantie à tous.

   Blitz   
11/12/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Vraiment très intéressant et bien écrit. On est plongé dans cet univers stalinien et la description de ces touristes en complet décalage accroche bien le lecteur.
On aurait aimé en savoir un peu plus sur la situation des Bulgares d'origine turque, mais cela donne envie de se documenter un peu plus.
J'ai relevé quelques adjectifs qui me semblaient un peu maladroit car trop forts, surtout dans la première partie: Elle traitait Nedelya en "égale", idées de meurtres, haine pure, rajika à volonté (vraiment?).
Une lecture très agréable.
Dans le genre, mais en Chine, je recommande le livre du regretté Michel Testard: "Ma Chine", souvenirs d'un voyageur de commerce dans la Chine maoiste des années 70..

   Marite   
16/12/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Pas très étonnée par les incidents provoqués par les quatre touristes sans aucune éducation, sans culture, estimant que leurs portefeuilles bien pourvus en devises donnent tous les droits. Ils sont si limités dans leurs esprits qu'ils sont incapables de réaliser l'indignité de leurs attitudes. Quand on va découvrir un pays ou une culture étrangère à celle dont nous sommes issus, la première des choses est d'observer, de respecter et de veiller à ne pas heurter les sensibilités côtoyées. J'ai été aussi bien attristée par les conséquences subies par la guide Nedelya. Cela dit j'ai apprécié l'écriture qui m'a permis de suivre le récit sans être arrêtée par une quelconque incompréhension.

   ferrandeix   
17/12/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Le point positif de ce récit est certainement qu'il se lit facilement sans jamais engendrer d'ennui. D'où peut provenir cette qualité? Probablement des dissensions et oppositions troubles qui apparaissent dans l'histoire et dont on attend la résolution. Malheureusement, j'avoue trouver moins d'intérêt dans la logique de l'intrigue, une histoire triviale qui se termine de manière assez incompréhensible, mêlant des évènements dont on ne voit pas la motivation (s'agit-il d'une critique du Parti, d'une critique des mœurs occidentales, d'une critique du sentiment anti-turc en Bulgarie ?...). Les récriminations du couple agressé contre la guide ne me paraissent pas crédibles car elle est plutôt bien intentionnée à leur égard. Trop de thèmes s'entrecroisent. Je retire donc un sentiment de satisfaction globale mitigé à l'issue de la lecture, même si elle ne m'a pas ennuyée.

Quant à l'écriture, elle me semble plutôt de qualité. Attention cependant aux doubles compléments de noms.

   Tadiou   
20/12/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Scènes de la vie ordinaire, il y a quelques années, dans un pays communiste de l'Europe de l'Est. On est en plein Kafka.

L'écriture est sobre, simple. Le récit est lucide; comme un reportage; on reste largement dans le domaine du factuel.

Donc ce récit m'évoque Kafka et aussi, curieusement, Soulages et son noir. Pas de place pour une lueur, si faible soit-elle, ni pour un espoir.

J'aurais aimé que le personnage de Nelly soit davantage mis en avant, avec sa chaleur et sa bonne volonté. Une belle lumière aurait pu venir de ce côté-là, malgré son destin tragique.

   JohanSchneider   
17/1/2023


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