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kass : Le coup de poing de Bukowski
 Publié le 17/05/13  -  6 commentaires  -  5987 caractères  -  206 lectures    Autres textes du même auteur

Deux écrivains sur un ring…


Le coup de poing de Bukowski


La nouvelle à proprement parler


Jusqu’à cet instant de l’an …, je n’arrive pas à croire que Bukowski, qui se faisait appeler Chinaski dans ses nouvelles, ait pu battre Ernest Hemingway dans un combat de boxe. Sur un vrai ring entouré de cordes protectrices et avec tout ce que cela impliquait de sueur, de douleur, de sang et de contusions.

Ils étaient tous les deux grands, bien baraqués et musclés. Leur penchant pour la bagarre et la provocation était légendaire. Les biographies qui leur sont consacrées regorgent d’histoires de rixes en public où ils utilisaient leurs poings pour cogner, se défendre ou corriger ceux dont la tête ne leur revenait pas.

La différence résidait dans le fait qu’Hemingway était un vrai boxeur et avait une technique de frappe du poing gauche qui lui était propre. Il l’a décrite dans un chapitre de son livre « Paris est une fête » où il racontait sa rencontre avec le poète Ezra Pound. Ce dernier lui prodiguait des conseils précieux concernant l’écriture en échange de leçons de boxe.

C’est certain qu’il aurait mis Chinaski ko et l'aurait fait tomber de toute sa hauteur tel un taureau de corrida. Et Chinaski était un vrai taureau quand il n’était pas en train de fignoler une de ses belles nouvelles. Des nouvelles qui se lisent avec l’impression d’être des scalpels enfoncés dans la réalité miséreuse de notre monde où on s’esquinte à être heureux en vain, arrachées à vif à l’urbain stressant. Il ne respectait ni n’épargnait personne quand il en avait marre de tout, du monde et de lui-même ! Il devenait de mauvais poil, insupportable, un emmerdeur de première. Il était capable alors de battre à coups de poing rageurs toute personne qui aurait l’idée de l’empêcher d’assouvir un plaisir. Lever une femme, boire un coup de trop, jouer au tiercé, rosser les critiques conservateurs et puritains qui oseraient dire du mal de ses nouvelles.

Bukowski a raconté cette histoire de combat de boxe dans son recueil « Au sud de nulle part » (édition de poche n° 6162) dans une nouvelle écrite avec une maestria de précision et de maîtrise, avec tout ce que le lecteur aime en matière de suspense et de plaisir.

Mais cette histoire de combat me laisse perplexe. Chinaski a-t-il vraiment mis Hemingway ko ? La question demeure et me taraude la tête. Où l’a-t-il battu ? Sur un ring ou au fond d’une ruelle new-yorkaise comme dans le film « Barfly » dont il a écrit le scénario ? Ce film où l’acteur Mickey Rourke, le parfait alter ego de Chinaski, punissait un envieux serveur de bar qui lui cherchait toujours des noises par jalousie allant jusqu’à lui souffler sa copine du moment, la divine déchue incarnée par l’exquise Faye Dunaway. Ou l’a-t-il rossé sur papier comme cela peut arriver dans les compétitions sportives à la suite d’un manquement à la règle de jeu ? Cette dernière hypothèse me paraît la plus plausible. Car je ne crois pas qu’un Chinaski puisse réellement mettre Hemingway à terre. Donc c’est une affaire réglée sur papier, de la pure littérature. Un coup de poing littéraire, « nouvellistique » ! Et pour aboutir à cela, Bukowski a transposé le tout sur un ring. En professionnel. Il faut dire qu’il était à l’époque un jeune apprenti écrivain et il lui fallait vaincre, dépasser un maître, un père. Il a décrit le combat comme une boucherie, comme une « mort dans un après-midi », du nom de l’un des livres d’Hemingway sur la corrida espagnole.

En se réveillant dans les vestiaires, Chinaski s’est excusé :


– Pardon papa, on ne gagne pas à chaque coup.


Bien sûr après, Bukowski est devenu un champion en littérature, un grand écrivain. Un nouvelliste très talentueux à l’égal d’Hemingway et ça se vérifie dans sa nouvelle en question qui s’intitule « Class ».


Fin de la nouvelle


Note nécessaire :


Je dois avouer que je me suis mis à rire bruyamment lorsque j’ai terminé la rédaction de la nouvelle ci-haut. À part le fait heureux de lui avoir trouvé une chute logique. Car au début, je les ai imaginés en train de se bagarrer réellement. Ernest Hemingway vieilli, la barbe bien fleurie et piquante, la taille gigantesque, la main encore agile et capable de boxer et d’éviter les coups, même s’il continuait à picoler sans arrêt. Bukowski, lui, jeune homme qui rêvait d’écrire, le visage laid plein de boutons grotesques avec au milieu son gros nez défiant, essayant de donner des coups dans tous les sens, poussé par sa rancœur éternelle et un état de soûlerie très avancée qui lui donnait des ailes.

Je les ai imaginés, Hemingway frappant juste et avec précision et Bukowski incliné, le corps ramassé, la tête cachée dans le gros ventre de celui-ci. Hemingway vaincrait sûrement. Après, las, fatigués et esquintés tous les deux, ils iraient boire dans le bar le plus proche et riraient longtemps. Vers le matin, chacun s’installerait devant sa machine à écrire et commencerait une nouvelle ou finirait celle commencée la veille.


Note à propos de la note précédente :


Il est à dire que le héros de la nouvelle que Bukowski écrirait ne serait que Chinaski lui-même jouant son rôle de toujours : un bruyant picoleur au fond d’un bar sombre. Elle serait bien construite, plaisante et gorgée de surprises. Elle aurait une chute qui fonctionnerait comme un coup de poing donné sous le menton projetant le corps en dehors du ring. Et la vie semblerait après digne d’être vécue, car toute hypocrisie en serait délestée.

De même, il est à noter que la nouvelle qu’écrirait Hemingway serait une merveille de style, bien épurée. Une écriture sans fioritures, épluchée. Ainsi elle offrirait une ambiance de suspense singulière. Le héros errerait par exemple dans les steppes éternelles, là où l’homme se mouvrait solitaire et assumant son destin d’homme. Elle créerait une telle émotion qu’elle donnerait l’impression de prodiguer des uppercuts mettant le corps à genoux, mais guérissant l’âme de l’insignifiance du monde.

La nouvelle ressemble à un combat de boxe. Elle doit finir par ko.


 
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   alvinabec   
9/5/2013
 a aimé ce texte 
Bien
Ah! l'exégèse fictionnelle, la meilleure en soi, bien sûr...Il n'empêche celle-ci me laisse sur ma faim, comme si cette nouvelle n'en était pas une in fine, mais c'est pêchu quand même bien qu'un peu court.
La phrase 'le héros errerait...homme' me semble à revoir entièrement pour la discordance de ses sonorités.

   brabant   
17/5/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Kass,


Bon, eh ben vous connaissez vos deux lascars sur le bout des poings... et aussi la boxe. Trop de règles cependant là où j'aurais aimé voir une bagarre de rue.

J'ai bien l'impression que le véritable KO de l'histoire ce soit ces deux gaillards qui vous l'aient infligé ; rassurez-vous le lecteur est knock down lui-aussi, assommé par ces géants. Vous avez dit "groggy" ?

Tournée de "Papa double" !

Boire ET Ecrire...

Lol

::D

   Anonyme   
17/5/2013
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Bonjour, Kass,

Je n'aime pas me montrer désagréable pour une première, mais je ne vais pas tourner autour du pot : je suis déçu par le texte.

J'attendais sa parution, depuis que j'ai vu hier le nom de Bukowski dans son titre.
Pourquoi suis-je déçu ? Peut-être est-ce parce que je m'attendais à retrouver un peu du style de Buko. Ou alors parce que je pensais trouver une véritable histoire, ou alors une véritable réflexion. Peut-être parce que la nouvelle de Chinaski que vous évoquez est très très loin d'être ma préférée.

Bon, votre idée qui, si je la comprends bien, est une sorte de renversement de la nouvelle de Buko, n'est pas mauvaise. Lui imaginait un combat de boxe pour représenter la lutte littéraire avec son maître. Vous, vous imaginez réellement une lutte à la machine à écrire, qui finit par un coup de poing littéraire.
Pourquoi pas, mais je trouve tout cela assez plat. Il faut pour y parvenir lire une sorte de mini biographie, de rappels concernant Buko et le texte qu'il a écrit, qui n'intéresseront probablement pas beaucoup le lecteur qui ne connait rien de l'un ni de l'autre, et apprendront que dalle à celui qui les connait.
L'écriture est correcte, pas de problème de côté là, mais je me suis ennuyé. J'aurais préféré plus de rudesse là où je n'ai trouvé que platitude. Tant qu'à faire, pourquoi n'avoir pas imaginé, après que les deux aient terminé leurs nouvelles respectives, qu'ils se soient envoyés leurs machines à écrire à la gueule ?
Enfin, ou autre chose, je sais pas, mais quelque chose qui bouge, alors que là...

Désolé. Ce sera pour un autre texte, j'en suis sûr.

   Anonyme   
18/5/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup
A mon humble avis, quelqu'un qui s'intéresse à Hemingway (qui n'était pas si gigantesque que ça, sous le rapport de la taille - pas plus d'1 m 80 alors que Flaubert "notre maître à tous" dixit Hemingway faisait déjà 1,83 m à 18 ans), et Bukowski (combien mesure-t-il, lui ?) ne peut avoir que de bons fondamentaux pour l'écriture, même si ce texte, malgré tout ce que je peux lui trouver d'attachant, reste très perfectible.

   AntoineJ   
18/5/2013
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
bon .. depuis le début j'ai attendu quelque chose de "vif" de "dérangeant" de "brutal" ...


je n'ai eu que : "Il est à dire que le héros de la nouvelle que Bukowski écrirait ne serait que Chinaski lui-même jouant son rôle de toujours : un bruyant picoleur au fond d’un bar sombre. Elle serait bien construite, plaisante et gorgée de surprises. Elle aurait une chute qui fonctionnerait comme un coup de poing donné sous le menton projetant le corps en dehors du ring. Et la vie semblerait après digne d’être vécue, car toute hypocrisie en serait délestée."
=> ben ... elle est la nouvelle alors ?

Bref, bien écrit, exercice d'érudit, intéressant mais sans âme, sans fun, sans dérive, ...

   in-flight   
25/11/2018
 a aimé ce texte 
Pas
A travers vos analyses d'analyses, il y a un effet poupée gigogne, une sorte de méta-littérature.
Mais je n'ai pas saisi le sens du texte, j'y vois un hommage ou une interrogation historique, mais au final je suis resté sur le pas de la porte...


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