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jeanphi
1/2/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
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Bonjour,
Le ton général est tenu de part en part du récit, je dirais même que c'est un peu trop plane, trop lisse. Tout passe de ce sentiment ambivalent de ne pas avoir suffisamment vécu sa vie de front, et de n'en regretter que les mauvais résultats sur les jeux en réseaux à l'autosatisfaction du narrateur. Vous choisissez bien vos exemples tous sur le mode enterrement, qui sont justement des évènements dont l'enfant prend peu conscience dans la mesure du possible, et qui laisse un goût d'échec quoi qu'il puisse en être. Avant dernier paragraphe, j'inverserais les mots engrenage et illusion, attaché au sens plutôt qu'à la symbolique que je suis. |
Perle-Hingaud
21/1/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Bonjour,
J'ai beaucoup aimé cette histoire. J'apprécie la maîtrise du style mais surtout l'équilibre entre profondeur des thèmes abordés, réflexions et concepts sous jacents, et la simplicité, l'accessibilité du récit, sa sensibilité. L'entame m'a paru maladroite dans les premiers instants ("je suis un petit garçon de 9 ans") mais très vite je suis intriguée et tout se met en place. Le fil se déroule, de la belle ouvrage, avec Gaspard en fil rouge, le chien, fidèle compagnon, qui relie l'homme à sa part naturelle dans un monde dé-naturé. Merci ! |
Malitorne
6/2/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
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J’ai moi aussi joué à Ico que j’ai adoré. Le dépouillement des décors, la relation entre les deux enfants, la poésie qui s’en dégage typiquement japonaise. Un jeu daté mais prenant. J’ai par contre délaissé The last guardian qui souffrait de mauvaises critiques à sa sortie. Si vous aimez ce type de jeux contemplatifs, je vous invite vivement à plonger dans Journey, une véritable pépite. Voilà pour le côté PlayStation...
Concernant l’aspect littéraire, beaucoup moins emballé. J’ai l’impression que vous vous répétez, que vous nous resservez encore une fois cette histoire de chien décédé en rajoutant des prolongements. Comme si vous exploitiez à fond un filon qui avait bien marché sur le site. C’est dommage de réduire ainsi son imagination à du déjà-vu, je suis certain que vous avez bien d’autres choses à raconter que servirait votre style impeccable. |
Eskisse
1/2/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Bonjour Keanu,
Une nouvelle très émouvante dans laquelle le traitement qui y est fait du deuil vous laisse scotchée : le double, la projection comme mécanisme de défense face à la mort et à l'abandon est en soi une idée originale. Peut-être que la petite fille virtuelle sauve le narrateur autant qu'il la sauve... Le tombeau et le sarcophage virtuel qui s'ouvre permet la maîtrise du "je" dans le jeu . Comme un mode d'emploi anti-chagrin. J'ai donc beaucoup aimé l'intrication du virtuel avec le réel ( le lecteur au début est lui aussi "entré" dans le jeu vidéo), constante jusque dans les noms. La nouvelle convoque aussi le thème de la mémoire, la manière dont se façonne la mémoire , (comme nous associons un événement à une musique ou un événement marquant à une image, un lieu : " la mémoire appartient à la chair du lieu" ) ... pour montrer à quel point le deuil demeure traumatisant : " la rémanence monstrueuse d'un chagrin". "Chair", "incarnation" interrogent notre identité et la mort. Les enjeux de cette nouvelles sont inépuisables... Ce à quoi il faut ajouter la qualité littéraire de cette prose. |
Cox
5/2/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
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Tiens, un texte que je n’avais pas vu passer en EL… Tiens, un très bon texte…
En préambule, je vous remercie de donner aux jeux vidéo un traitement qui les élève au rang d’art à part entière : celui qui fait partager des émotions, embrasser des expériences nouvelles, etc… C’est pas si courant, et pourtant il y tellement de petits jeux indés qui ont un scenario et des dialogues mieux écrits que bien des nouvelles… Bref, Je suis content de les voir présentés sous un jour touchant, de manière si réussie et immersive. Je ne connais pas Ico, et n’ai malheureusement joué que quelques heures à The Last Guardian, le temps d’une soirée chill où il avait remplacé Netflix, mais je me souviens avoir été très impressionné par la poésie et la sensibilité qui se dégageaient du jeu. Pour en revenir au texte : Au début, je grognais un peu dans ma barbe en trouvant que la narration était étrangement menée, très extérieure au récit et donnait l’impression que le narrateur ne vivait pas la scène. On apprend bientôt que l’on assistait à une cinématique de jeu vidéo et que le « personnage » ne se fait incarner que plus tard : c’est donc exactement la bonne impression. Je remballe ma critique à la con et je dis chapeau l’artiste. Au long du texte, la réalité et le virtuel se mêlent, se superposent pour donner une dimension et une profondeur nouvelles au jeu. Les émotions se diffusent de l'un à l'autre, tout se fait écho et les pixels deviennent un portail qui emmène le narrateur jusqu'au bout de sa mémoire et de ses émotions. Tout est mené avec un style peu commun et très maîtrisé. Au rayon des critiques, je commencerai par un truc tout à fait subjectif : je ne suis personnellement pas si fan du style plus analytique/explicatif/métaphysique que vous employez parfois. Par exemple la digression sur les italiques, ou sur la nature du « rituel machinique » de communion me sortent un petit peu de l’ambiance générale, et me distancient de l’émotion que vous commenciez á me faire partager, pour m’inviter à l’examiner plus rationnellement. Ça reste très bien mené, et intéressant, juste un peu moins à mon goût. Le passage un peu Proustien sur l’écoulement du temps dans un jardin riverain me laisse sur le bord de la route par exemple. Peut-être un peu plus objectif : on force un peu trop, par endroits, sur la corde de l’émotionnel facile (par ex., 1ere phrase : « Je suis un petit garçon de neuf ans », et on insiste : « Mes pas de petit garçon », « je suis un enfant »). Le texte ne tombe pas encore dans le pathos excessif pour autant, mais avec le choix du sujet, il faut faire attention au traitement : c’est un équilibre instable entre le touchant et le tire-larme. Au final, je ressors surtout avec le sentiment d’une lecture vraiment originale, avec un style propre qui se dégage puissamment. Des émotions, des idées nouvelles, un symbolisme assez unique avec la transposition du deuil dans l’onirisme en pixels : du très bon ! Merci pour le partage ! |
dowvid
7/2/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
n'aime pas
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Bien écrit, mais je n'ai pas pu me rendre à la fin, désintéressé trop vite par le ton utilisé.
Et les chevaliers, les châteaux m'émeuvent peu. D'autant plus quand c'est un jeu vidéo. Désolé |
Louis
13/2/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Une œuvre d’hantologie, qui pourrait prétendre à une place dans une anthologie au « panthéon des lettres penchées ».
Comment en sortir ? Là semble se loger « l’énigme », et comme le disent les mots qui donnent fin au texte : « cette même énigme à parcourir en fermant les yeux ». Car tout commence par un enfermement. La première scène se situe dans le monde virtuel d’un jeu vidéo, mais elle est présentée comme une scène réelle. D’emblée une confusion, ou une ambiguïté règne entre le virtuel et le réel. Le narrateur parle de lui-même comme d’un autre, ce qui laisse pressentir qu’il n’est peut-être pas celui qu’il dit être, et qu’ainsi le narrateur serait distinct de son personnage. Distinct, mais engagé dans un processus d’identification : « Je suis un petit garçon de neuf ans… » Ce jeune garçon est emporté, malgré lui, sous la contrainte, par des « cavaliers dont on ne voit pas le visage » vers une « immense citadelle » qui va s’avérer le lieu d’une vaste nécropole, une sorte d’immense sépulcre. Il est remarquable que ce lieu lugubre, sorte de lieu du séjour des morts ne soit pas souterrain, comme c’est le cas dans de nombreux récits mythiques, et qu’il ne s’agisse ni de catacombe ni de crypte. La citadelle se situe dans une horizontalité géographique, non dans un hypogée. Il se situe en bout, à l’extrémité horizontale du monde, en une « fin de continent ». Devant lui, s’ouvre l’infinité de la mer. La géographie a ici son importance. Le voyage forcé que l'enfant effectue ne le fait pas pénétrer dans un autre monde, souterrain, mystérieux, mais le maintient dans le monde "à l’air libre’", en surface, mais avec la singularité de se trouver en l’un de ses points particuliers : un bout, une extrémité d’une ligne segmentée. Le personnage est enfermé dans un sarcophage. Il est « enfermé vivant ». Il occupe vivant la place d’un mort. Il acquiert donc ce statut particulier de « mort-vivant ». Quand le sarcophage « bascule » et s’ouvre, indépendamment d’une action de sa part, le jeune garçon n’est pas libre pour autant. La citadelle dans son ensemble constitue un « gigantesque tombeau », une forteresse-prison, sombre et labyrinthique, pleine de « pièges et de secrets ». Elle apparaît encore comme un lieu d’ « exil sans mémoire ». Un lieu donc d’oubli, où, y demeurer sans pouvoir s’échapper revient à n’être plus rien pour autrui. C’est un lieu du refoulé où « sont condamnés les enfants porteurs de malédictions », c’est-à-dire de handicaps, de malformations congénitales, d’infortunes, qu’une sombre superstition exige qu’ils soient miss à l’écart par crainte du courroux divin. L’histoire est écrite dans « le livret », une prédestination, un destin écrit d’avance pèse sur le personnage. La situation ainsi mise en place, le « jeu » peut commencer. À partir d’une « situation », comme dirait Sartre, non choisie, s’initie une liberté en un sujet « je », confondu avec le jeu : « à partir de là je peux véritablement contrôler mon corps, incarner mon image, prendre en main mon récit. » L’enfant dispose d’une liberté d’action, et d’une liberté de choix. Que peut-il en faire ? Choisir de sortir de ce lieu ou y rester. Demeurer dans le royaume des morts, ou bien rejoindre celui des vivants. Il semble choisir de s’évader de ce lieu, de franchir les obstacles à toute fuite, et de combattre les « ombres » qui défendent les issues. S’engage une lutte farouche pour en sortir : « Durant des heures et des heures, j’affronte les gardiens… » La vie est à gagner, et un « je » épaissi d’une histoire, dans ce jeu des luttes où s’exprime la puissance de vie et d’exister. Une jeune fille, Yorda, est rencontrée, qui devient complice d’une tentative de fuite, mais compagne avec laquelle la communication s’avère impossible. Une fugue se joue à deux, et pourtant solitaire. Une sortie du jeu se présente, mais de nature extrinsèque, de façon à la fois brusque, cruelle, et douce : « Papa ouvre doucement la porte du salon et m’annonce qu’il a fait piquer Gaspard ». Le narrateur, des larmes aux yeux bien réelles, n’en sort pas immédiatement, il reste dans le jeu, et continue d’incarner son personnage. Refus d’une réalité ? fuite dans le virtuel ? Le chien devait être malade et souffrant pour qu’on le « pique ». Plus qu’une fuite hors de la réalité, plus que sa dénégation, le virtuel paraît par anticipation une lutte imaginaire contre la mort, la propre mort du narrateur, qui est aussi exil et solitude, et si celle-ci peut être vaincue, celle de Gaspard pourrait l’être aussi. Le virtuel se présente donc comme une lutte pour rester vivant. Il n’y a pas simple dénégation, simple refus d’une réalité douloureuse, mais un combat pour ramener à la vie. Gagner au jeu virtuel, c’est gagner la vie, c’est la regagner, contre une perte, contre la mort. Le virtuel permet cet état superposé qui ajoute la vie à la mort, sans soustraire l’une à l’autre. La mort est cet exil d’où il faut sortir, un emprisonnement dont il faut se libérer. Le retour à la réalité semble effectif quand il faut enterrer le chien au fond du jardin. Mais il n’en est rien. Le réel ressemble au virtuel. Une similitude est constatée entre le réel et le virtuel. Mais le rapport s’inverse : c’est le réel qui ressemble au virtuel. C’est le réel qui est le reflet du virtuel : « Je me rends compte que ma maison, elle aussi, est un tombeau abandonné entre les arbres et le courant et gardé par les ombres » Le virtuel n’était pas une échappatoire au réel. Comment en sortir ? Quand le réel copie le virtuel ? Quand réel et virtuel interfèrent ? Comment sortir du tombeau tout autant réel que virtuel ? Par la distance temporelle ? Le narrateur est devenu adulte. Il a quitté la maison, son jardin, et la rivière. Mais il y a la mémoire. Mémoire associative, qui sans cesse fait retour. « Aujourd’hui, dès que je pense à Gaspard, je suis transporté dans Ico », Ico, le nom du jeu vidéo. Devenu adulte, le narrateur n’est pas sorti de son état de « mort-vivant » Pas de temps "chronos" pour le narrateur, mais un temps "aïon", ligne temporelle d’une durée dans laquelle quelque chose insiste ou subsiste, prise comme écrivait CH. Péguy dans Clio en « un cercle vicieux parfaitement allongé en une sorte de droite indéfinie qui est la ligne même du temps, ou plutôt la ligne même de la durée » Se produit un devenir-fantôme du narrateur et du chien Gaspard. Images hantées : « Les fantômes et les animaux… ils ressemblent à des images » Pas de sortie, mais une permanence de la "hantise". Le narrateur-enfant, Gaspard, la maison, les cendres de la « mémé », le tombeau-forteresse et ses ombres, font retour, hantent le narrateur, qui se trouve pris dans la « revenance » pour parler comme Derrida. Mais c’est le retour d’un impossible retour, d’une impossible sortie hors du tombeau-prison ; et revient sur la ligne du temps ce qui ne peut revenir en un retour d’un mort-vivant-revenant. Et le deuil s'avère impossible. Situé quatorze ans plus tard par rapport à la première scène, est relaté un retour « aux côtés d’un immense griffon » Cette entrée dans « le château », avatar du tombeau-prison-forteresse d’un nouveau jeu, n’est que le retour de ce qui n’a cessé de faire retour dans la "hantise". Dans ce nouveau jeu vidéo, Gaspard, le griffon-chien devient un griffon-mythologique ; chien, il devient aigle, prend l’allure d’une chimère, à la fois aigle et lion, par un glissement de signifiant. « Aigle mangeur d’hommes », n’a-t-il pas déjà dévoré le personnage-narrateur ? La hantise ne s’est-elle pas faite dévoration ? Gaspard « n’est pas tout à fait un être de fiction, mais plutôt la rémanence monstrueuse d’un chagrin virtuellement archivé. Mon animal s’est lové dans l’écran au lieu de s’éteindre en moi » : le narrateur reconnaît l’absence de deuil ; une forclusion plutôt qu’un refoulement, et Gaspard, forclos, reste pour toujours enclos dans un fort ; ou une "projection" qui produit l’intrication entre l’image, le virtuel et le réel. Forclos, Gaspard-fantôme dévore un homme. Tout se tient ici sur une ligne spatio-temporelle. Sans coupure. Sans discontinuité. Tout est sur une même ligne, en surface, sur un même plan, où les images varient mais, par l’effet d'un prolongement, restent les mêmes : « la poésie lumineuse et funéraire de la forêt prolonge mon jardin » Pas de ligne de fuite vers un ailleurs. On n’en sort pas. Effet de géographie. Effet de géométrie plane à deux dimensions : « l’alliance précède la filiation » : avant la verticalité, l’alliance, la contiguïté. Tout se noue sur un même plan de contiguïté. Pourtant la « verticalité de la famille peut être remplacée par la profondeur de la géographie », or cette profondeur est aussi un effet de surface ; elle n’est pas un ailleurs, un au-delà (comme commenté plus haut). La surface reste une horizontalité, « la profondeur » n’est pas le substitut d’une autre verticalité. Pas de discontinuité non plus entre l’image, le virtuel, et le réel. Ils ne sont pas séparés et différents, mais expriment de façon diverse un même vécu. Une blessure qui ne guérit pas. Une libération qui ne réussit pas à gagner sa liberté. Une impossible ligne de fuite. Mais ces mondes à leur tour ne font qu’un avec la fiction littéraire, et Gaspard, en italique, au « panthéon des lettres penchées » pourrait être le titre d’une œuvre écrite. « Ce qui est beau, c’est que rien n’est jamais expliqué » : ajoute le narrateur. Pas d’explications comme causes, origines ou justifications, mais une "explication" tout de même, non pas mentale mais objective, au sens du mot compris comme un étalement, un déploiement, une exposition sur une ligne géographique. Merci Keanu pour ce texte riche en contenu, et très bien écrit. |
solinga
23/5/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
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Une grande maîtrise stylistique et une profondeur dans l'introspection et le sentiment qui me feraient presque admirer (moi absolue néophyte) cette moderne et féodale pratique des jeux vidéos.
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