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Fantastique/Merveilleux
Lariviere : Les lézards
 Publié le 18/07/09  -  16 commentaires  -  40692 caractères  -  468 lectures    Autres textes du même auteur

...


Les lézards


Ceci est l’histoire d’une rencontre, mais d’abord…


Alors que vous étiez en train de remplir d’humeurs noires, de douleurs dentaires et de petits graviers la moitié du rhinocéros qui rouille au fond de votre jardin, elle est arrivée comme une furie, a posé ses cigarettes, déposé le tic-tac de sa montre, jeté son sac à main sur la commode et sans le moindre mot vous l’avez regardée… Vous l’avez regardée, comme le paresseux accroché à sa branche regarde le léopard qui s’apprête à le dévorer et alors, les muscles trapèzes traversés par le tonus des mauvais présages, vous avez vu brûler dans ses yeux les flammes de Persépolis, et les incendies du Reichstag et de Rome réunis.


Tandis que vous assistiez ébahi à ce formidable spectacle pyrotechnique, elle a retiré brusquement son pull à col roulé, ses frêles poignets grevés du poids de l’exaspération ont griffé l’air comme l’aurait fait un chat-huant cognant dans une cage, des sifflements sont venus crocheter de soufre l’atmosphère, ses bracelets ont tinté comme une queue de crotale, elle a enlevé ses boucles d’oreille en feu, détaché ses cheveux et, c’est étrange, vous ne savez pas si c’est sous l’effet de la colère ou de l’électricité statique mais ceux-ci sont restés raides et menaçants, suspendus dangereusement en l’air, entortillés dans l’ébullition de la pièce comme de petits orvets, regards noirs, mauvais œil, vous mâchez, passif, votre esprit médusé par l’enjeu de la joute que vous voyez venir sur le lourd rouleau du destin, les véritables ennuis n’ont pas de fin, et vous vous êtes dit en vous palpant la mâchoire qui vous faisait de plus en plus mal, que cette fois, c’était pourtant bel et bien fini… Alors, vous déglutissez sur, Un nouveau départ ?... peut-être… Sans haie à sauter… Sans gravier… Sans léopard, guépard, musaraigne géante, python pharaon à surveiller au pied de votre donjon… Vous avez repris votre souffle, oubliant le feu de vos gencives accru par l’image de ce cobra majestueux qui se trouve dressé devant vous, image tranchée par l’imminente rupture que vous ressentez pour la première fois inévitable (il y a des signes comme l’électricité statique, les bracelets de crotales, les orvets aux regards noirs, qui ne trompent pas) rupture que vous sentez, disais-je, irrémédiablement jouée à ce moment déjà…


C’est drôle d’ailleurs, mais il est souvent question de rupture dans vos récits alors qu’en définitive, vous parlez de rupture, vous ne rompez jamais, vous parlez d’une chose, il en jaillit mille autres, vous avez mal aux dents, vous ne les faites jamais soigner et c’est normal puisque vous cultivez les paradoxes comme certains cultivent les roses, un certain savoir-faire, les peurs nocturnes ou les crevettes biologiques de Madagascar car elles existent, vous l’avez lu dans le monde et vous pensez aux épines, au savoir-vivre, à Gatsby le magnifique c’est votre droit, à cette douleur fourmillante qui roule sous votre molaire, aux associations d’idées et aux imprécations invertébrées de l’imaginaire qui courent en permanence à une vitesse folle sur vos méninges et vos affects désarticulés, c’est fini et il n’y a pas de fin, vous ne savez pas comment vous exprimer, ce n’est pas clair et en même temps ça ne peut pas être plus clair, des découpes d’articles, un contre-feu, quelque chose à creuser dessous les dents, car d’abord la boue puis la plage, voilà ce que vous vous dites, perdu dans vos tergiversations vous regardez le fond de votre rhinocéros séparé en deux par une coupe transverse et vos petits graviers, dedans, dehors, puis vous la regardez elle, dedans, dehors, toujours très belle, une larme chargée fragmentée éclatée à la conjonctive, un hoquet maîtrisé, une souffrance des concessions minières enfouie dans les ocres profondes de cette vie à deux qui Se tarit… Si fait !... Le rouge à lèvres de la colère qui orne futur trophée sanglant de vous sa bouche d’amazone, mâchoire tétanisée, le piquant du cactus au bout des ongles, le cœur tachycarde, c’est la réponse du réseau sympathique à l’exaspération de la demoiselle et qu’est-ce donc encore que cette diablerie, mais de la lave à la commissure lui sort de ses lèvres et vous sert d’ultime accusé de réception quant à ses intentions… C’est à ce moment heureux, que vous apercevez entre ses dents serrées et son regard d’aspic, un tit bout d’espoir, un tit peu de trêve, du vert, de l’air, une feuille de basilic, un interstice, reliquat d’un encas rapide comme une courte éclipse sur le royaume des morts, alors, d’un spasme réflexe de vos zygomatiques, réflexe de nigaud, bête réflexe, réflexe niais, vous souriez, vous ouvrez la bouche et vous lâchez un subtil :


- Il y a quelque chose qui ne va pas ?…


Suivi d’un inconscient :


- C’est drôle, tu as un bout de salade entre les dents…


En vous disant trop tard que vous n’auriez pas dû, car alors c’est inévitable, le feu couvant sourdement du ventre depuis si longtemps est sorti de la bouche, un son tonnant comme mille volcans, et d’une voix aussi lourde et menaçante qu’un dragon du Komodo elle vous a lancé un magistral :


- Et tu te fous de ma gueule en plus ?...


… Dans la jungle de vos indécisions brumeuses, et ce cri de Cacatoès surchargé par le chant de l’orage a canalisé l’averse tant attendue :


Attends mais attends mais qu'est-ce que tu croyais ?... Tes conneries c’est fini, c’est fini maintenant, c’est bon… Stop !... C’est pas possible… C’est pas possible, tu m’entends ?!... Je t’avais prévenu !... Tu ne dis rien ?... Tu ne dis rien ? Mais regarde-toi avec ton seau rouillé rempli de gravier en plein milieu de la salle de bain… Trop c’est trop, ok ?... Tu es complètement barjot !... Cette fois, je m’en vais ! Je m’en vais !… Bon courage !


Alors, vous vous êtes enfin décidé à réagir… Toujours assis, vous avez levé les yeux. Sans demander la permission, vous avez passé votre index sur votre cou de volaille afin d’en chasser le zeste moite de perplexité… Puis, avec toute la tranquillité qu’imposait la situation, vous avez gratté le poivre et le sel de votre crâne, lissé les ailes de votre nez cabossé, réduit votre tête (pour éviter les claques) et alors, vous sentant imprégné, puissant du courage et de la magie de guerre des Jivaros, vous avez répondu du tac au tac légèrement narquois et sûr de votre fait…


- C’est ça, ouais !...


Ensuite ou à cet instant, même si le cheminement ne sera pas repris dans ses moindres détails car il serait trop long, elle a pris la porte et vous vous êtes rendu compte, avec l’effroi adapté à la situation, que l’infime différence qui sépare un moins que rien (vous) d’un plus que parfait (l’autre vous, sur l’infini d’une conjugaison encore improbable) est aussi fine que la membrane déroulée d’un soupir aux pires heures de la nuit, c’est à dire aussi mince que le fil bleu, les nuages ou le plomb d’un rasoir et que la différence, si elle existe, se situe uniquement dans le fait d’appréhender la vie du côté terre ou du côté ciel et que cette perception pourtant déterminante, est posée en équilibre fragile sur le bord d’un miroir extrêmement tranchant où la vérité c’est l’inconnu, composition et décomposition d’une ligne de vie soumise aux crues et décrues, aux rencontres et aux séparations, aux vents et marées intérieures, aux crissements de nos mâchoires, aux évidences et aux imprévisions qui se croisent mollement en nous, trouvant dans nos poitrines des axes de fortune, des feux allumés et des phares trop vite éteints, des incendies ravageurs, rupture, mais je ne sais pas où dérive ce récit, une razzia de criquets où se croisent aux confins de la savane les rayures d’un zèbre mort, ligne de flottaison sur ventre gonflé de météores et de salades, de haut-le-cœur et de ruminations, montant descendant dans le marécage… un marécage prévu multicolore et laissée monochrome sur le viseur de la vie et de ses vases perpétuelles…. Cette constatation, au lieu de vous réconforter sur la présence de vos poumons et de vos molaires, vous a plongé dans un si grand tourment que, le jour où les douleurs dentaires ont fait écho à vos ruptures, vous avez, vous le paresseux, vous l’intransigeante loutre, vous le passif lémurien, essayé de vous démarquer des primates aux dentitions trop soignées…


Dans un sens, vous avez réussi...


En essayant de répondre œil pour œil dent pour dent à la félicité, vous avez choisi l’éternel côté lourd, côté triste, étouffant, mauvais côté, maudit côté du miroir…


Conscient que votre oiseau-lyre avait l’apparence d’un paon, vous avez peut-être déposé les armes, baissant piteux la garde, la tête chue cognant le sol, vaincu, misérable, abandonné par mère courage, devenu, vous, pâté de sel et d’encre noire, vous retrouvant honteux et fendu, vrillé de votre poids de plomb, vidé de votre insoutenable légèreté de l’être, à genoux devant le talent et l’échafaud du monde qui vous toisaient d’un air méprisant, un trapèze de vitre brisée aiguisé brillant comme avenir sous les yeux myopes et moqueurs de la plèbe et le regard narquois, bien qu’absent, des Isociels de droit commun qui sont vos semblables, ne l’oubliez pas…


À ce moment où vous avez chuté de votre piédestal et que, sous une pluie de graviers, vous êtes retombé sur la planète terre comme un marabout malade, véritable dingo glacé, serpent déplumé, zèbre dépouillé de rayure, toucan aveuglé par le soleil et que vous vous êtes cogné le front contre la porte qu’elle ferma définitivement derrière elle, et même l’inflammation de vos gencives ne vous a pas permis de réchauffer le fluide glacial qui vous a parcouru le squelette. Vous avez froid à l’âme. Vous avez mal aux dents… Votre glotte devient le nœud ferroviaire de vos problèmes. Vous déglutissez. Avalant le premier grain de sable, vous mettez le doigt, vous avez mal, votre mâchoire s’ouvre sur une déchetterie sauvage. Dans cette immense décharge à ciel ouvert, une confrérie de petits chiffonniers (ce sont des lémuriens Siks fraîchement convertis) s’acharne lentement et sous les gravats de graviers ils trouvent :


Un investissement palliatif et savez-vous dans quoi ?

Votre frigo et dedans

Votre organisme et du phytoplancton

De la nourriture et

De la spiritualité

Votre estomac ne pense pas, il crie famine

Un steak de bœuf saignant et en mâchant c’est étrange, mais vous pleurez

Une baignoire, c’est la vôtre et dedans

Vos beaux manchots bleu-cyan

Un étendoir pour les égoutter

Un écran de télé et

Un deltaplane

Votre cuisine, pour ses clous de girofle

La porte de la volière et la clef où est-elle ?

Un gouffre, un nid de reptile

Votre rasoir

Au fond le placard de la douche et dedans

Du Synthol pour vos douleurs de dents

Votre cuisine et

Un bacille résistant à la méthycilline

Le sésamoïde du premier métatarse

Un chat écrasé diaphragme ouvert sur douze, vitesse d’obturation automatique

Épithètes et épitaphes

Palindromes et malandrins

Isociels et isoptères

Un reportage sur Mars, y a-t-il de la vie ?

Des crevettes malgaches

Le chas d’une aiguille et dedans

Des corpuscules méconnus d’étoiles encore entières

Une tasse de café une paire de ciseaux

Une sortie définitive

Des articles de journaux

Une bouteille de Rhum et de quoi parlait-on ?...


Nous parlions de ce sur quoi vous vous êtes alors tourné de surcroît et nous annonçons donc la terrasse de votre appartement, il fait beau, une rivière de ciel coule dessus les toits, les rues sont animées, emporté par le remous brûlant, votre copine a rompu, foudres et chimères frappent à la porte de votre cerveau battant le fer cerclé de vos molaires comme éclair vert sur carcan rouge, vous avez mal… Oui, la colonie de petits manchots bleu-cyan qui vivait dans votre bouche a disparu. La banquise a fondu sous le feu, le Synthol est un produit qui brûle l’œsophage, il est pourtant précisé sur la notice qu’il ne fallait pas, mais vous ne faites rien comme les autres et vous ne vous arrêtez pas aux simples gargarismes, alors c’est vrai vous avez avalé, et c’est vrai, guidé par la force corrosive du Synthol et l’amertume des choses vous avez pris du recul, une bouffée d’hydrogène, une lampée d’alcool et alors, du lointain, là-haut, posté un instant sur vous-même, entrecoupé par moment d’une toux d’irritation et de quelques picotements dans les yeux, vous avez abandonné votre passion pour les choses enfouies, votre thèse sur les toilettes contemporaines, bandé votre arc de marbre sur les fantaisies de l’absolu et d’un œil ouvert, l’autre fermé pour mieux viser, vous avez mis en joue le soleil et décoché en son centre une tête chercheuse. Vous essayez de suivre, le trajet. La flèche s’est perdue, consumé dans ces yeux dans les yeux sacrilèges et vous ne vous êtes pas trouvé… Savez-vous pourquoi ?...


Parce que le soleil, lui, se fout royalement de vos problèmes de dents… Imperméable aux querelles, aux gingivites, aux abcès et aux turpitudes humaines, il croise couronné, haut et altier dans le ciel…


Pour tenter de récupérer un peu, parce que vous avez un point de côté et que le mal de dents est tellement insupportable que vous ne pouvez alors plus réguler ni rythme de pensée ni douleur et que vous ressentez des éclairs de sang qui transpercent vrillent démontent gencives et méninges au gré des pulsations et que c’est un peu comme une visseuse électrique ou un bec de manchot qui vous enfonce par à-coup un pieu une vis cruciforme jusque dans la mâchoire, vous inspirez, bloquez !... Vous buvez un grand coup ; c’est du rhum et vous vous trouvez ébrieux, alors, la chaleur, la terre, les rayons, liquide chaud, terre roulante, liquide coule, terre saoule, terre qui tangue, terre sens dessus dessous, terre sans douleur et sans molaire, vous êtes une mandibule de veau blanchie par le soleil au centre du cyclone, terre de feu, dragon des mers, articles sur la fonte des glaces et la banquise tournant alors aussi autour de vous, aidé par le rhum agricole qui est un bon remède contre les maux de l’âme et de la gorge, vous vous raclez celle-ci, ça va, et pour finir, vous vous tournez enfin vers une dernière chose, l’essentielle et l’efficace, embusquée, haletante, attendant complètement déshydratée le point de ponctuation qui devrait venir atténuer ce point de côté et fermer cette phrase comme on ferme une porte ce que vous faites, après avoir salué, la dame qui vous précédait.

Vous êtes dans une salle d’attente d’un cabinet dentaire ou le dentiste est une femme avec son attirail de dentiste et de femme… Celle-ci vous soulagera modérément de vos douleurs, avec ses fraises, ses aspirateurs à salive, ses instruments en acier, sa poitrine volumineuse et ses produits anesthésiques… Vous reprenez votre souffle, naviguant en suivant les courbes qui se dessinent dessous la blouse, entre deux coups de roulette et d’aspiration bruyante…


Le dentiste, avec sa froideur et sa forte personnalité pulmonaire, vous déleste de vos problèmes de dents beaucoup plus efficacement que les clous de girofle.


Mais malgré tout, alors que vous avez dit au revoir et merci, que vous avez bien refermé la porte derrière vous et que vous commencez à ressentir l’état comateux lié à la rencontre heureuse entre Rhum et liquide anesthésiant, vous êtes rentré chez vous sceptique. Vous ne sentez plus votre bouche, vos molaires, vous ne sentez plus non plus la rupture au fond du rhinocéros mais entre deux assoupissements (oui l’anesthésie et le rhum font bon mélange), vous marmonnez dans le coton fourmillant de vos mâchoires que vous n’êtes pas convaincu…


En effet, les douleurs dentaires persistent et persisteront car vous venez de découvrir que la terre est ronde mais que la vie est plate, oui, pleine de trous, de fissures et de molaires creusées…


Désormais, vos maux de dents se révèlent comme la partie résurgente d’un iceberg prenant racine bien plus profond, à l’intérieur, dessous la croûte terrestre, dans la partie existentielle, fourmillante de votre corps.


Cet élément essentiel mis à jour, vous piquez du nez… La résine est encore chaude. L’anesthésie ensorcelante. N’essayez donc pas de creuser vous-même avec un cure-dent, encore moins avec un marteau-piqueur ou une psychanalyse sauvage, le trou de votre dent.


Celle-ci est abîmée mais pas dévitalisée, bien au contraire et le trou quant à lui, est fragile et difficile à sonder.


Il contient dans son puits, mille fissures et mille boyaux, tissés de lymphe et de vieilles histoires, venant gonfler sur les limons quadrillés des abysses, des océans de questions qui devraient clapoter dans vos yeux à chaque sourire et à chaque respiration.


Si malgré tout, vous voulez sonder car vous êtes dotés d’un cure-dent, d’une curiosité pathologique et d’une force mentale assez solide, amateur de quêtes qui transcendent vos douleurs et leurs lézardes, alors oubliez zèbres et manchots bleu-cyan, oubliez tout ce qui a été dit jusqu'à présent, le passage de cette fille avec qui vous venez de rompre sept ans de bons et mauvais moments, elle est partie, ne vous retournez pas, vous êtes seul avec votre ersatz…


Vous allez pouvoir pratiquer la descente en rappel de votre dent et de ses douleurs…


Faites-le néanmoins, avec un minimum de préparation physique. Musclez votre mental peu être un peu trop lisse, mais pas trop… Celui-ci vous alourdirait irrémédiablement et la pratique sportive demande d’être leste. Un cerveau trop plein est une prise de poids (et un allongement du récit) inacceptable, première chose que tout athlète apprend en pouponnière s’il veut aller toujours plus loin, toujours plus haut.


Ensuite, mettez-vous du talc sur les mains…


Faites quelques pas et quelques assouplissements. Vos articulations craquent. En essayant de vous redresser, vous trébuchez et c’est vrai, tout ça n’est pas très bon signe...


Le mieux serait de descendre avec prudence et pour commencer de vous rasseoir doucement sur votre chaise longue, car il est important de le préciser à ce stade de l’exploration, la descente se pratiquera avec votre imagination.


La descente débute. Le puits est profond. Ne suivez surtout pas les flèches. Elles sont piquantes, le curare est un poison qui paralyse le diaphragme, c’est triste un hérisson écrasé en bord de route, la raison est vassale de fougue du merveilleux, les anesthésistes pratiquent les sports extrêmes comme le jet-ski, le ski piste noire à Avoriaz, destin orgueilleux Madame Jam mariage sur la banquise le monde crève les rêves coulent les heures se traînent vous êtes seul et la varappe attention, ça glisse…


De multiples avens se croisent dans des salles formées de stalactites ambrées et de stalagmites de coraux anthracite…


Retirez votre frontale, vous n’en avez pas besoin… Si vous ne comprenez pas pourquoi, ce n’est pas grave… Gardez-la alors solidement amarrée à votre front… Quand vous passerez devant une crique violette où mouille un vaisseau fantôme où l’équipage c’est vous, figé dans tous les âges, et où le capitaine perplexe vous parle en polonais tout en tenant une carte de navigation constituée de mille fragments, un trapèze rayé sur un œil, une lampe sur le front, un crochet de bœuf au poignet droit, vous apprendrez alors que l’intention n’est rien, tout au plus une lanterne brisée, et que seule l’action se révèle sur le présent comme un cyclope aux mille yeux… Vous êtes bien installé. C’est là l’essentiel... Votre frontale vous sied le crâne admirablement...


Après avoir traversé une zone de turbulence où les vents contraires, les gaz sulfureux, les remous gluants, les pluies acides, les a priori et les ipso facto ont mis en évidence un système digestif tonique en pleine activité, vous vous promenez maintenant ailleurs, dans ce qui constitue les cavités immenses de votre cœur.


Il fait bon… À l’intérieur, la chaleur moite règne et vous réconforte, bien que les cloisons d’ocres rougies soient affinées, vibratiles et trop poisseuses pour permettre à vos doigts contractés de vous assurer des prises convenables… Vous ne pouvez pas non plus planter de piton, car vous risquez de percer les parois et de saigner suffisamment pour engager de façon néfaste votre pronostic vital. Vos ventricules sont colorés et gigantesques. Vous traversez de grands cirques qui se découvrent au gré des galeries…


Par endroits, de petits cristaux de calcaire se sont regroupés, reflétant dans des miroirs improvisés votre silhouette légèrement pâlie et déformée par les reliefs et les draperies du karst… Du toit des oreillettes perlent des concrétions gouttelées qui suivent des lignes de vies improbables et des parcours sans fin que l’oxydation a transformés en reflet émeraude. Devant ce spectacle, votre silhouette est immense, vos mouvements se badigeonnent d’émotions, et votre ombre se met à frissonner dans des danses inconnues, des couleurs incroyables…


Comme en plein air, un torrent de vie et de Synthol promène ses petits graviers, ses troncs déracinés, ses manchots bleu-cyan, ses volières, ses systèmes solaires, ses visages, ses clous de girofle et ses coupures de presse, se frayant un passage tumultueux au centre d’immenses prairies où s’étendent des moulins à vent et des molaires en or posées comme des meules de foin sur de grandes étendues moissonnées.


Les spéculations, les souvenirs, les doutes et les sibylles roulent dans ce flot bouillonnant et c’est comme une rivière souterraine étincelante qui se déverse à gros débit à travers un fabuleux portail de nacre qui représente vos valves mitrales…


Vous êtes donc du côté gauche et le sang qui passe au gré de votre fraction d’éjection et de la modélisation cinétique provoque à l’intérieur, un roulement très impressionnant comparable au ronronnement d’un chat blanc ou d’une chaudière à bois…


En découvrant un passage étroit au-dessus de votre tête, vous vous apercevez que vous pouvez encore progresser… Vous vous contorsionnez dans un boyau jonché de songes jaunis et de souvenirs ou des images de comparables et de compatibles, rendues toutes grises par le temps et les dépôts de fientes de chauve-souris sont collés dans le désordre…


La descente est longue. Les nombreux départs de galeries, se rejoignent souvent dans les dédales des stimuli.


Au fond du gouffre, vous pouvez déjà apercevoir un bureau de recrutement des marines américains ainsi qu’une loutre vermeille qui se mordille le ventre, ce qui est incongru, mais pas moins que le reste… Regardez par exemple ce reptile visqueux et ondulant de billet vert fracassant tout sur son passage qui représente le marché financier, et vous opinerez du chef qu’en réalité, les choses incompréhensibles sont monnaie courante dans ce bas monde…


Ne vous étonnez donc pas de la loufoquerie qui règne ici-bas. La pression atmosphérique est énorme. La chaleur est de soufre. Le ciel de plomb. Le clair de lune. Le concombre de mer… Et la bière de malt… Bref ; vous êtes arrivé sans heurt et sans reproche sur les décombres de votre conscience où agonisent après avoir violemment dégringolé, les restes démembrés de votre humour potache.


Un bathyscaphe accidenté à la vignette d’assurance expirée gît éventré sur votre droite… L’expert n’est pas passé.


Vous surfez maintenant sur votre âme et sur ses fonds baptismaux.


Votre âme n’occupe aucun point bien défini. Vous pensiez d’abord que celle-ci se trouvait dans des nébuleuses impressionnantes, quelque part dans un triangle entre votre cerveau, votre cœur et votre ventre. En réalité, votre âme est immense et les espaces abyssaux qui peuplent un intérieur sont infinis. Vous avez en fait découvert la relativité quantique des dimensions et surtout, que ce que l’on appelle âme est un profond remous présent dans la moindre parcelle de votre corps, niché au plus petit creux de l’atome, imprégnant et baignant toutes les couches de vos tissus, les unifiant et les faisant vivre d’un seul souffle au gré des multiples de la perception, vous faisant flotter dans l’existence, comme flottent les méduses ou comme certains satellites unifient les marées et donnent vie au mouvement de l’eau…


Au fil des pages tricolores, vous avancez… Phosphorescentes, elles illuminent les ténèbres et forment des sémaphores sur le sol d’argile fangeux. Vous en ramassez une. C’est une page de la bible et vous reconnaissez un fragment de l’évangile selon Saint Just datant d’une séance de la convention du 13 novembre 1792… Au-dessus de ce chemin balisé, il y a du salpêtre, un panthéon, une guillotine et des lampions de bal trop lumineux, tenus par des fils de sang et des mains invisibles…


Vous passez devant une carcasse de baleine échouée qui, à vue de nez, ressemble à votre mère et commence sa phase de décomposition depuis peu...


Devant cette carcasse, vous comprenez maintenant que si vous aviez continué à écrire votre chef-d'œuvre littéraire, celui-ci ne serait jamais arrivé à quai et serait venu s’échouer dans un assaisonnement huileux difficile à digérer, un récit sans queue ni tête ni véritable ponctuation, passant de la comédie au macabre puis du macabre à la comédie, cheminant à l’aveugle sur une trame narrative au ventre mou et que tout cela, pour le lecteur, c’est décevant…


D’ailleurs, ce cétacé délavé à la dérive, malgré les apparences, n’est nullement votre mère.


Effectivement, il y a une certaine ressemblance avec celle-ci, ainsi qu’un certain rapport dans l’indice de masse corporelle qu’il serait vain de vouloir nier… Mais même s’il est vrai que les détails et les coïncidences frappantes ne s’arrêtent pas là ; l’exhalaison putride, par exemple, qui se dégage du dessous des nageoires n’est pas sans rappeler une odeur d’aisselles qui est familière à l’enfant que vous étiez, il aurait été préjudiciable à l’exactitude des faits que le parallèle soit établi aussi formellement avec votre génitrice.


C’est vrai, rappelez-vous ce bruit agréable de sèche-cheveux, le dimanche matin dans la salle de bains…


En réalité, ce cétacé, qui n’est pas une baleine mais seulement un baleineau de sexe masculin, c’est vous, en un peu plus turquoise, en un peu plus échoué, avec un peu plus de lard fissuré par les coups de bec la vie frappant paroles mordant fort, lacérant, tambourinant, s’acharnant sur ces gencives, sur cette chair molle qui a un jour été bleu-ciel, aussi fluide que l’océan, aussi bleue que la mer Morte ou mer tranquillité, aussi bleue que les yeux de cette fille auxquels vous pensez maintenant…


Vous avez affreusement mal aux dents et de petits gémissements se font entendre…


En tournant la tête, pour ne pas voir à quel point vous désirez voir cette fille revenir, vous continuez votre chemin votre cœur battant au rythme rapide des toits d’une usine sur ce qui est devenu une plage déserte, gondolant au gré de votre respiration saccadée.


Vous mettez les pieds dans un sable vaseux, mouvant mais paradoxalement solide. Des rayures noires explosent sur votre champ de vision. Ce sont des petites anguilles translucides et naissantes… Vous vous frottez les yeux… Avez-vous déjà parlé de vos débuts comme artiste photographe et de vos clichés d’animaux écrasés pris sur les bords de routes ?... Vous êtes en équilibre sur une planète qui tangue… Il y a de petites vis d’orthopédie, comme des coquillages aux aspérités d’acier incrustées sur le sol, lui donnant un aspect froid mais étoilé. Vous marchez sur le ciel et le sol est en l’air… Vous donnez du feu à cette fille et c’est tous les feux un briquet, s’éclaire le bonheur ivre sur des doigts entrecroisés, deux verres j’ai cru puis décru le ressac de tes yeux dans la poitrine une douleur tous ces rasoirs les méninges, des centaines de petites hématies volantes comme mille regards troubles assombrissent de rouge l’horizon et c’est un siroco de détresse, l’ultime soubresaut qui s’annonce… oui, votre cœur saigne… Il ne fallait pas planter de piton.


À l’horizon devenu rouge, se trouve la Mésopotamie enfermée dans les murs blanc cassé d’un foyer Sonacotra où règne la tuberculose et des excavations caséeuses qui produisent des sifflements sibyllins ressemblants, parfois au chant mélancolique des lamantins et parfois au vulgaire bruit d’une chasse d’eau dans une chambre d’hôpital… Ce n’est pas une chambre. C’est un hôpital. C’est une grande salle commune, séparée par des cloisons de toile. Dans un de ces lits, une fille trop jeune pour qui tout se finit regarde le terminus. Un interne argentin se penche à son chevet, relie la chaleur de ses doigts et de ses oreilles à la glace frissonnante de sa poitrine, écoute le souffle râpeux qui lui ronge la vie et sourit jaune de tous ses soleils mouillés, soleils chiqués par le savoir médical, connaissance des hommes posée sur les desseins mystérieux (pitoyable) du tout puissant, de Cordoba aux Saintes-Maries de la mer, vierge noire et Vénus d’Arles, docteurs feuilles ou saint Esculape, lamentable connaissance du diagnostic : septicémie à streptocoques résistants sur abcès dentaire.


Alors, c’est vrai, votre cerveau n’est pas ce creuset linéaire de néant offert au temps disponible des gazouillis, nous nous en excusons, mais plutôt un espace dense, fertile, sinusoïdal, rempli d’hippocampes de jais et de gargouilles, de rhinocéros et de cochenilles, et encore autant d’incroyables échiquiers peuplant les mornes cases de votre tête, traçant sur mille trajets de cire et de larmes séchées les mouvements potentiels de fétiches païens, de dieux grecs ou scandinaves et de tout autres pièces du jeu, pion fou ou arlequin, souvenirs entomologiques ou ménagerie de puces savantes, pharaon ou aède égaré, bossu, roi, reine, vache, cochon, buste d’Hippocrate, manchot bleu-cyan, ce fameux Nabuchodonosor déchu de Babylone, jeune fille morte, un taureau une sangsue, la tour est renversée, chiens écrasés page douze demi-colonnes de droite cette paire vous va si bien madame, et le cavalier est cloué, il boite, cette fille vous ne la reverrez plus, ses sabots taillent en trente-sept et ses ailes brisées sont bleues sur peine, les visions de toutes ces planètes et de cette paire d’escarpins oubliés, elles, vous crèvent les yeux doucement…


À côté de tout ça, comme c’est étrange, sont posés sur la promenade des Anglais, cent une mannequins des pays de l’Est en peaux de dalmatiens. Vous interpellez l’une, elle bouge, en lui disant :


- Hello, baby (vous êtes sur la promenade des Anglais, je vous le rappelle…)… Pas trop froid, j’espère ?... (Ce n’est pas vraiment ce que vous voulez lui dire…)


Ce à quoi elle vous répond :


- Bonsoir chéri !… Je vais l’amour sans préservatif et j’aime la France. Je vœux me marier avec toi !... (Ce n’est pas vraiment ce qu’elle veut vous répondre…)


Elles sont jeunes. Elles sont belles. Mais, si froides et délavées, elles ne sont déjà plus que pulpes et caresses fanées, pierres de lunes dépolies, plastiques trop blanches, cuirs usés, coup de rabot, lèvres lasses, peaux vêtues, dévêtues, forages et mer Caspienne à explorer, verre d’eau à boire et noyés au milieu de celui-ci, les débris d’un airbus A310 et d’un airbus A330, la mer Rouge, le livre de l'intranquillité, les rives du Jourdain, un petit haïtien mangeant un chat encore vivant ; vous lui dites :


- Dézod Timoun ! Li fé pa manjé chat !... *


Il vous dit :


- Ale fè chimen blanc !... Deskè manjé m chat sé paské pa gen m manjé anyen !

Epi répran lession morale w, é don kob, blanc !... Nan zafè m… Pou ki sa foumis sé zami yo é pa n yo moun, ki sé n lanmou là du papa bon dié… *


Et en plus des chimères du bidonville de Cité-soleil, il y a aussi la mappemonde flottant dans ce verre à moitié vide à moitié plein, il y a les larmes, le sang et la misère planétaire, des enfants soldats et dans leurs yeux 36 chandelles, la peur et la haine, la faim, des poux, la soif des nœuds aux tripes, 1000 et 1 étoiles de l’estomac, un 44 ou un 357 magnum, un AK 47, un vrombissement de Puma modèle AS 332 M1, le 12850 et unième soldat américain et le 200 unième soldat français morts respectivement en Irak et en Afghanistan, ce qui vous donne, en plus d’un récit bourré de chiffres utiles à toute sortie par voie cabalistique, une certaine avance sur les tragédies, que l’histoire, si elle est heureuse, sera venu contredire par l’élection du quarante-quatrième président des États-Unis d’Amérique…


Au milieu de toutes ces choses campées dans des positions contestées par la raison mais validées par l’imaginaire, est posée une chose rouge et molle qui ressemble à un énorme nénuphar écarlate où un enfant juché minuscule avec une mine de conquistador triste, joue de la balançoire dans un labyrinthe. Pour mieux voir, vous vous rapprochez.


Le nénuphar bouge… Des soubresauts l’animent par moment… Vous regardez les lignes de vie de vos mains tremblantes et vous vous apercevez que ce nénuphar translucide veiné de pourpres est un placenta qui prend toute sa place démesurée, gigantesque sous vos pieds, battant au cœur de vos molaires…


Vous déglutissez difficilement… Vous venez de trouver le nid de vos maux de dents.


Au fond des choses, une nuée de corneilles s’envole brusquement, en y écartant le gluant et le désagréable, vous apercevez un caddie inutile rempli de chats noirs, mais surtout que le sort des autres est une dague venimeuse qui vous est plantée étrangement entre deux côtes et qu’il y a, à l’intérieur du placenta, dans un pentacle entouré de clous de girofle et de fraises de dentistes, un petit nid douillet, humide, construit avec du duvet bleu-cyan, des morceaux de tissus, des étiquettes de rhum déchirées, des articles de journaux et des boules de papier mâchouillé emprunté à des romans à gros tirage et aux introspections sordides, ceci dit sans vouloir blesser personne et surtout pas Christine Angot.


À l’intérieur de ce nid placentaire, de petits cris résonnent faiblement… Vous découvrez alors, en vous touchant les gencives du fond, vers votre quatrième et cinquième molaire et leur inflammation, la présence palpable de petits êtres à l’aspect reptilien, filiformes, enroulés dans une pelote faite de mille gaines hurlantes multicolores aux stries d’argent ou marbrée de rouge, grouillantes, écailleuses, lisses, enchevêtrées de cous aux colliers de couleurs criardes ou peaux sombres comme comètes caillées, figures libres de douleurs interminables, nuit sans étoile et voies lactées éraflées, firmament entaché de malaises, sourires déchirés, doigts écrasés, vertiges inexplicables, l’univers, l’imparfait et l’indicible, zébrures fugaces ou bouts d’âmes trop élastiques, bouts de cœurs étrillés du nord au sud sur chaud et froid, haut et bas, sphère et stratosphère, système nerveux autonome et gargouillement impénitent de l’estomac…


Vous avez trouvé l’origine de vos problèmes dentaires. Une origine profonde, mouvante, invraisemblable et pourtant affreusement réelle, chaude et palpable sur votre mâchoire ; et alors, vous avez compris que cette douleur dentaire ne disparaîtra plus, ou bien seulement quelquefois quand il fait chaud et beau, certains soirs où le ciel d’été reste un moment sur l’azur, calqué comme en apnée sur votre souffle et vous devinez que cela sera rare, providentiel, toujours pour mieux laisser revenir cette douleur pulsatile, gloutonne, gonflant au rythme de vos petits lézards dont vous ne vous débarrasserez maintenant plus jamais…


Résigné, il faudra simplement s’y faire, et mine de rien oublier vos douleurs, oublier cette fille et ses feux, ces soldats et leurs mannequins, ces lézards, vos gencives, ce poignard empoisonné planté entre vos côtes, ce baleineau ou ce roman échoué, cet univers inabouti qui tangue sous vos pieds et vivre en restant ivre avec tout ça.


Le véritable souci, c’est que ces petits lézards grossissent vite et qu’ils deviennent rapidement des hôtes turbulents et insatiables. Ils vont alors s’acharner, peut-être sans réelle volonté de nuire, à pomper le plus d’eau possible, et ainsi déséquilibrer votre biosphère, surtout au niveau de votre cavité buccale, devenue le gîte et le nœud criard de vos problèmes.


C’est pour cela qu’hier, quand vous avez parlé à la voisine qui est toujours sur une planète insaisissable, ce qui la rend pour le moins étrange et parfois même infréquentable, vous aviez la bouche affreusement sèche… Par la faute de vos lézards trop voraces vous ne pouvez pas articuler vos répliques, ces petits liens déjà étroits entre vous et les autres. Vos petits trublions sont gorgés de votre salive et on asséché complètement votre marécage, ce n’est pas commode, vous parlez vite, vos phonèmes sont inachevés, le ton est grésillant, un thermomètre qui flotte mercure en ébullition vous manquez d’air, d’eau, de fluidité, vos propos sont rétrécis, fissurés, hachés, occlus, ils sont incompréhensibles, vos lézards saturent et remuent incroyablement, obstruant le passage, déformant les diphtongues, empêchant le moindre mouvement synchronisé de votre langue… Vous passez pour un demeuré, un abruti, un type jamais vraiment réveillé, au mieux pour un autiste, mais certainement pas pour un artiste génial qui s’applique à oublier ses lézards en illustrant dans un petit journal, la vie de ses semblables de leurs faits insignifiants.


Installé sur la chaise trop longue de votre terrasse invariablement trop petite, vous êtes las, absent sur le plateau de votre tête. Vous somnolez, complètement vidé, en regardant l’horizon qui se résume à une simple barre noire où se stratifie toute la crasse du monde. Vous buvez… Votre sourire s’emboîte sur vos lèvres tordues comme un casse-tête chinois et, aidé par le rhum ambré, vous laissez échapper un rire bruyant.


Vos lézards sur le toit, pompent de leurs corps immobiles le sang chaud du soleil…


La journée s’est écoulée comme une veine tranchée, vite, très vite, vidée de vie et de couleur, remplie d’alcool et de solitude, vous laissant à la fois exsangue et saturé, obnubilé par le creux de tous ces points d’interrogation qui flottent déshydratés autour de vous, anesthésié et parcouru par une foule de pensées, d’électricité et de soupirs morcelés en collages dadaïstes…


Ce soir au crépuscule, alors que vos lézards sortaient de leur sommeil et recommençaient leurs sarabandes, facétieux au possible, s’agrippant sur les fibres en tension de vos méninges, sautant de liane en liane, grimpant avec leurs petites ventouses le long de vos neurones, clapotant dans les vasques de vos contrariétés et tournant et retournant sans répit toutes les questions de l’univers, vos douleurs dentaires se sont réveillées et se sont mises à claquer de façon assourdissante comme l’on fait claquer des dominos, là-bas, ou comme claque encore le cosmos, quand je le jette dans tes yeux...


Alors, devant ce vacarme, vous avez abandonné l’idée d’un article sur l’inauguration du mausolée en mémoire de Nicéphore Niepce, maudit vos lézards, leurs dominos et vos douleurs de dents et décidé de changer l’eau stagnante de vos idées en allant au Bowling pour faire un Strike avec tout ça…


Votre sortie au bowling sera moment léger, moment d’une rencontre, suite logique où se révélera les passions, dans un mouvement porteur, nous l’espérons, d’atmosphère moite, de fraîcheur coulissante mais aussi, nous l’entrevoyons, d’un peu de ciguë, cette amertume obligée et mortelle déposée sur les lèvres vermeilles de la vie, la vie, toujours elle, avec ses lézards, ses maux dentaires, et l’absolu de ses respirations…


Nous vous laissons sur cette idée d’ivresse et de conjugaison aller faire un tour ailleurs pour respirer et voir si vous y êtes, c’est fini et il n’y a pas de fin, cassure dans le récit où le héros et la suite c’est vous, moi, dans les stries éparses de nos douleurs et de nos vies satellites éclatées d’égocentrisme, rupture, récit qui se veut court, récit qui se révèle long, soir d’été jeté aux orties, amour, cosmos, lézards caméléons, manière peu élégante de retirer brutalement de la bouche l’histoire, l’eau, le piment comme un chien rouge entré dans un jeu de quilles, alors naturellement, promis, pour la prochaine fois, l’amour, deux êtres, les Strike, le piment… Les lézards… Tout cela.




* - Mon enfant, ça ne se fait pas de manger des chats…


* - Si je mange un chat c’est que je n’ai que ça pour me nourrir, blanc !...Alors, reprends ta morale et donne-moi un peu d’argent… Les fourmis s’aident bien, elles… Alors pourquoi pas nous, les hommes, qui sommes en plus, amour, par extension ?...




 
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   widjet   
21/7/2009
Après avoir commencé ma lecture de façon régulière, j’ai commencé à lire une ligne sur deux, sur trois, jusqu’à sauter un paragraphe puis deux…

Difficile donc de donner un avis solide et constructif, mais je peux d’ores et déjà annoncer la chose suivante :

Ce texte va diviser et faire parler de lui. Forcément. Et pas qu’un peu (d’ailleurs, je m’en doutais un peu en voyant que le temps qu’il est resté en attente de publication, je me suis dit : c’est pas un texte simple). N’est-ce pas ce que souhaite l’auteur au fond ? D’ailleurs Larivière s’en doute puisque lui-même anticipé nos réactions. Il a prit les devants en mettant déjà des commentaires ; à ce titre chacun y verra ce qu’il veut dans cette manœuvre (manipulation du lecteur ? Audace, sabordage de l’auteur lui-même ?...).

Le premier sentiment qui me vient – mais qui peut changer tant il est évident qu’un pareil texte mérite une lecture approfondie (mais a-t-on envie et la capacité de le faire ? Car il faut aussi de sacré références….), est celui d’un formidable…gâchis.

Presque un petit suicide artistique. Cela peut énerver un peu.

Oui. Quand on possède un tel vivier de mots, une telle richesse d’images (ça donne le tournis), une telle puissance dans ses doigts, on serait tenté de se dire : « Pourquoi en faire autant ? ».

Lari a du talent, c’est certain. Beaucoup de talent. Faut être aveugle ou con pour le nier. Mais ici, on pourrai croire qu'il nous le fait payer. Cher même.
J’ai cette impression d’un brillant artisan pâtissier qui m’a oblige à bouffer 3 Paris-brest d’affilée.

Ici, on assiste à un véritable déluge de phrases interminables, de métaphores étourdissantes qu’il semble impossible d'apprécier en l’état tellement on est assommé, (écœuré ?) par leur foisonnement…

Un délire, une véritable crise d’épilepsie littéraire, voilà ce qu’il en ressort. On croule sous le poids d’un style qu’on jugera plombant ou génial. Faut-il ausis y voir une gentille mise à l'épreuve, une petite bravade de l’auteur (jusqu’où allez vous me suivre lecteurs ?).

J’ai rapidement étouffé, suffoqué. Tout en reconnaissant la facilité manifeste, je m’y suis abimé (le cerveau, les rétines) aux contacts de ces phrases. Ce que j’ai lu m’a déjà exténué. Agacé, un peu aussi. Pardon.

Mais je précise que j'ai lu. Avec mes armes, mes compétences, mes notions, mes références. Je reste convaincu qu’il y a du bon, du très bon même (d’ailleurs j’ai assez aimé la petite entaille sur Christine Angot !) comme je pense aussi qu’il y a de l’inutile, du surfait et du prétentieux.

Ce texte divisera je disais.

Voilà mes premières impressions. Mais je relirai, je le promets…Le texte, l’auteur – que je respecte beaucoup - le (se) mérite amplement.

Mais un doute m’assaille : vais-je y parvenir ?

W.

EDIT : Lecture du 21/7 toujours un peu en diagonale.

Une meilleure compréhension (enfin meilleur je sais pas, mais une compréhension) et donc appréciation du texte. La première moitié parle de sa rupture amoureuse où l’auteur un peu comme un spéléologue va ensuite aller creuser, sonder à l’intérieur de lui-même, de son cœur, de son âme pour trouver et comprendre la source de ce mal. Je continue de penser que le procédé demeure risqué et que les occasions de perdre le lecteur en route sont nombreuses (notamment à cause des phrases à rallonge qui – je crois comprendre un peu – donne cette sensation d’apnée).

En revanche, je retire le terme de gâchis qui à la réflexion n’est pas le plus approprié. Je me suis trompé sur le mot, mais je trouve que l’abondance, l’épaisseur de certains passages, la multiplication des images et des comparaisons portent souvent préjudice à l’essence du texte.

Le récit fait réfléchir et me faire dire (interprétation personnelle) que la rage de dent comme la migraine compte peut-être parmi les douleurs les plus difficiles à supporter. Au point de vouloir mourir, de se flinguer même (dans le sens premier du terme). Alors, peut-être que ce mal de dent est presque salutaire, car il (nous) détourne d’une autre douleur encore plus dévastatrice, celle qui (nous) fait souffrir encore plus : la perte d’un amour.

Je relirai (toujours de biais) pour mieux comprendre (notamment la seconde partie, cette rencontre)

W

   Anonyme   
20/7/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Dire que j'ai tout lu dans le détail serait mentir, toutefois je crois avoir cerné le principal, et pis l'écriture me plaît beaucoup comme d'habitude. A l'inverse de widjet je ne pense pas que l'auteur gâche son talent... Bien au contraire il "l'utilise" comme il en a envie et c'est bien là le plus important. On peut parfois c'est vrai, en lisant ce texte, "passer son index sur son cou de volaille afin d'en chasser un zest moite de perplexité" mais aussi un squame de jubilation, tant les mots sont associés de façon brillante et originale.
J'y reviendrai évidemment, les détails dentaires notamment...
Bon, sinon je ne suis pas persuadé que l'auteur souhaite (ou espère) des coms constructifs étant donné la taille et la densité du texte... Par précaution il les aura déjà gravé lui-même. Et la réalité dépasse parfois la fiction à ce sujet....

Simplement de bien tristes banalités pour dire que j'ai bien aimé poser mes perpeilles sur ce texte et que je se suis ben incapable d'en faire autant...
Force et inspiration!

   calouet   
18/7/2009
 a aimé ce texte 
Pas
C'est sans doute plein de qualités, mais je t'avoue ne pas avoir supporté l'empilement lexical... Bon, évaluer un texte qu'au final on n'a pas lu en entier, c'est délicat, mas en même temps si je ne l'ai pas lu en entier, ça n'est pas par hasard... Donc je note faiblement, j'en suis désolé, mais j'y rviendrais sans doute, par curiosité plus que par plaisir hélas.

   solidane   
18/7/2009
Un texte quelque part attendu... par moi. Un texte qui s'insère dans une démarche pas prévue, Sélenim, Solidane puis Larivière... pourtant là n'était pas son propos.
une avalanche, voilà ce qu'est pour moi cette première lecture, incomplète d'ailleurs. Tous les effet d'un avalanche,... sonné, absence de sensations. trop, c'est trop, était-ce le propos humoristique ?
"Fascination" de la richesse des images, extravagance du flot, mais aussi où est-ce que je me retrouve la-dedans, quel fil ou sens pour moi ? Aucune idée. Etouffement, faut d'abord que je sorte de cet amas de neige tassée.
Il me faudra le relire, réellement ou ne pas le faire, et en attendant, je ne peux évaluer.
En tant "qu'auteur", m'intéreserait plus de comprendre ton désir dans cet écrit. Mais ce peut être aussi ton "secret".

   Anonyme   
18/7/2009
Bonjour Larivière ! J'ai parcouru le texte, trop touffu pour moi, mais par contre j'ai beaucoup aimé la partie commentaires dont certains sont vraiment savoureux... et à ma portée ! Très bien pour ce second volet.

   David   
18/7/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Larivière,

C'est un commentaire, mais d'abord...

Des lézards en sarabande mangent les mots sur mes doigts qui s'en vont les pianoter sur le clavier, j'ai sauvé ce que j'ai pu.

"Ceci est l’histoire d’une rencontre, mais d’abord… "

Ça m'a rappelé une citation, signature d'un célèbre onirien :

"Un livre, c'est le seul lieu au monde où deux étrangers peuvent se rencontrer de façon intime.
Paul Auster"

C'est bien comme ça que j'ai lu cette nouvelle, même si au départ, je me retrouvais à lire une rupture dans un couple, un narrateur au prise avec un mal de dent, à lire également une faune onirique et bigarrée, plutôt reptilienne et effrayante.

Je crois que le texte ne veut pas que le lecteur s'assoie, il n'est pas contre les mondanités, mais rocambolesques alors, le texte voudrait que le lecteur s'éparpille avec lui, d'où le test des vingt premières lignes avec un parallèle entre la rupture du couple, et celle avec ce lecteur, qui aura déjà eu le temps de noter plusieurs étrangetés dans le cours du récit :

"rupture que vous sentez, disais-je, irrémédiablement jouée à ce moment déjà… "

La rupture, elle sera nécessaire, mais à ce moment-là, c'est à prendre comme un défi de continuer, je crois. Et d'ailleurs, le texte se fait plus drôle déjà, avec comme des rampes le long des escaliers, mais ce ne sont pas des accoudoirs, ce n'est pas encore le moment de s'asseoir, le lecteur doit continuer de s'éparpiller avec le texte, jusqu'à la poupée-gigogne...

J'appele comme ça le passage en vers, j'appelle ça des vers car ils ne prennent pas toute la ligne, à chaque ligne, et "poupée russe" c'est parce que se suivent des "et dedans... "

Le lecteur, bien éparpillé, est infiniment réduit afin d'entamer une descente, dans cette fameuse dent, dans un être-monde je dirais, pour reformuler. Le but serait de délivrer la quête :

"Oui, la colonie de petits manchots bleu-cyan qui vivait dans votre bouche a disparu."

Où sont-ils ? Que sont-ils devenus ?

C'est dit à la fin, faut lire.

C'est un passage difficile cette métamorphose, aussi le texte accompagne encore un peu le lecteur, il lui pose les pythons pitons pour cette spéléologie particulière, l'étape serait d'atteindre ce point-là :

"Le mieux serait de descendre avec prudence et pour commencer de vous rasseoir doucement sur votre chaise longue, car il est important de le préciser à ce stade de l’exploration, la descente se pratiquera avec votre imagination."

Si ce passage correspond au - Vous êtes ICI - de son horloge interne, le lecteur a toutes les chances de triompher. D'ailleurs, il est enfin invité à s'asseoir.

La rencontre, le mystère de la faune et le sort des "petits manchots bleu-cyan" continuent par là.

Puis il y a la rupture, la vraie à mon avis, pour ceux qui se seront rencontrés avec un inconnu, dans la suite des commentaires. Combien de chefs d'oeuvre ont laissé leur lecteur éparpillé aux quatre coins de leur rencontre, de leur rupture, de leur être-monde où il n'était plus guère que des "Isociels et isoptères" ?

La nouvelle serait, finit par, un pont sur son Styx ? un ascenseur pour son arc-en-ciel ? En tout cas, un très bon moment de lecture.

   florilange   
19/7/2009
1 commentaire de + (vrai ou faux, qu'importe?)

Je ne dirai pas que ce texte est bon, ni qu'il est mauvais, parce que je n'en sais rien. Pour ça, faudrait le relire & je n'en aurai jamais le courage. En +, je me demande ce que cela m'apporterait. La seule chose que j'ai cru comprendre c'est que la plupart des lecteurs sont trop bêtes ou trop incultes (manque de références) pour comprendre & manifestement, c'est mon cas.

Pour moi, il s'agit de la logorrhée en couleurs de quelqu'un qui, par suite d'excès de douleurs mentales & physiques, a trop bu, trop fumé ou abusé de stubstances illicites. Quelque part, 1 sorte d'inventaire à la Prévert... Pour le reste, 1 vocabulaire riche, sans nul doute & c'est tout 1 défi que de placer cette avalanche de mots en enfilade. Donc 1 certain talent. Mais qui ne me touche pas. Navrée, vraiment, de n'avoir pas compris.
Florilange.

   NICOLE   
21/7/2009
J'ai, en effet, mal aux yeux : certains paragraphes font jusqu'à quatorze lignes, sans le moindre espace,...si, si, j'ai compté,... et quand je compte au lieu de lire, c'est pas bon signe.
Sinon, l'idée d'un paralléle entre mal de dents et mal de vivre me semble plutôt une bonne trouvaille, mais est-ce que j'ai bien tout compris ? Pas sùr.
Par souci de transparence, je tiens à confesser qu'à partir du milieu du texte, j'ai lu un peu en travers. Je précise également que je suis décidée à en reprendre la lecture, exhaustive cette fois, un autre jour. J'ai l'impression que ce texte en vaut la peine quand même.
Je ne note pas, pour cause de lecture déficiente.

   Marite   
22/7/2009
J’ai lu les premiers paragraphes jusqu’à « C’est ça ouais » Assez stupéfiant ! Une fois accrochée par les premières expressions j’ai continué, d’un trait, aspirée par ce déluge de mots et le tourbillon de la scène qui se déroulait devant mes yeux. J’ai dû arrêter, ne serait-ce que pour reprendre pied. Après je n’ai pas pu continuer c’était trop dense. Je m’intéresse plus au héros qu’à l’écriture. Je me demande si avec de tels remous, il pourra échapper à ce qui est arrivé à celui de Togna dans « la Voix ». A moins qu’il n’ait une capacité de résistance particulière. A vrai dire j’aimerais assez qu’il résiste. Par curiosité j’y reviendrai quand j’aurai respiré un grand coup… C’est une écriture vraiment originale. Je ne trouve pas de qualificatif pour cette nouvelle dans l'éventail proposé. Sûr que ce n'est pas faible ni moyen mais les autres ne me semblent pas non plus convenir.

   Selenim   
20/10/2009
Un texte ? Non ! Un immense canular.
L'auteur assène durant 40.000 caractères une pseudo allégorie sur l'acte de création. Oui mais comme disait Mulder, la vérité est ailleurs : dans les commentaires fictifs.
Le récit en lui même est une boursouflure intellectualisée à l'extrême. La lecture en est tellement traumatisante qu'un orgelet a poussé instantanément dans mon oeil droit à l'approche du sixième paragraphe.

Par contre les commentaires sont savoureux, cyniques, acerbes. Déguisé derrière des pseudos trafiqués, empruntés à des oniriens qu'il côtoit et qu'il connait, l'auteur pose un regard froid et introspectif sur son propre travail, sur son statut d'auteur et l'image qu'il projette sur le site.
Le texte indigeste du début n'est qu'une caricature, une illusion laissée par l'auteur pour se parodier lui-même. Il écrit non pas comme il le ferait lui mais comme les autres le voient.

Lorsque l'auteur a rédigé les commentaires, il l'a fait individuellement, en se projetant dans la peau d'un onirien à chaque fois. Arriver à anticiper les réactions des lecteurs, cataloguer les commentateurs et adopter leur tics de langage et leur modus operandi analytique... j'ai trouvé ça humble et cynique et triste.

Il faut une sacrée dose de recul et d'auto dérision pour accoucher d'un tel machin littéraire, sorte de Keyser Söze de la nouvelle onirienne. Il y aurait encore à dire mais ça relèverait de la psychothérapie.

Une évaluation ? A quoi bon, l'auteur s'en moque. Il voulait juste faire réagir les lecteurs sur l'identité d'un auteur onirien qui se construit au travers du regard des autres.
Pari réussi.

   Anonyme   
1/7/2010
 a aimé ce texte 
Passionnément
18/7/2009
Ce n'est pas un texte simple non... mais c'est un p**ain de bon texte... que j'ai dévoré en une traite la première fois que je l'ai lu... et toutes les autres ensuite.
Ce n'est pas un texte évident à commenter, peut-être même plus encore quand on a les clés...

L'histoire annoncée d'une rencontre qui ne vient pas, d'une rupture dont on ne sait rien, et d'une introspection dérangeante puisqu’elle nous force à entrer dans les entrailles de son propre for intérieur... et puis la fin, qui nous promet une suite, qui finit sur « oups, tiens j’étais tellement lancé dans mon truc que j’ai oublié ce que je voulais vous raconter au début »…

D'abord, j'aime le déroulement narratif, la façon (et le talent) avec lequel tu nous balade au fil (dentaire hahaha) du récit,. Comme si rien de tout cela n'était prévu, comme si rien de tout cela n'était logique... et pourtant... (comme dans chat noir chat blanc, mais encore plus poussé) il y a derrière tous ces petits nœuds tellement de choses différentes qu'il vaut mieux ne pas pratiquer la lecture diagonale...
Bon, d'abord, il ne faut jamais lire en diagonale... mais on sait que Lari est un auteur à lire attentivement, on sait que chaque mot est réfléchi, posé bien à sa place... et que quand on prend la peine de le lire on en ressort gagnant. Mais il faut pouvoir...

J'apprécie ce texte parce que le fond colle parfaitement à la forme, qu'on y retrouve cette espèce de structure déstructurée propre à ce qu'on peut trouver dans sa tête quand les choses ne se passent à priori pas comme on l'avait prévu, que le monde s'effondre et que tout ce qui nous choque ce sont ces petites douleurs (dentaires, du genoux, ça aurait même pu être la visite du plombier, peu importe...) accessoires mais qui prennent toute la place, jusqu'à ce qu'on accepte d'aller voir où le mal est vraiment... en soi, au fond à coté de la carcasse et des chats noirs abandonnés, sous une rasade de rhum ambré (avec une branche de menthe ou non).

Oui, c'est un texte difficile à commenter parce qu'on y ingurgite tellement de choses qu’il faudrait presqu’une analyse type dissertation pour expliquer toutes les subtilités qu’on y retrouve.

Et puis moi, j’aime que tu me balades dans un monde (finalement fantastique/merveilleux c’est pas trop mal comme choix de catégorie^^) qui mêle plusieurs formes d’écriture (toujours terriblement poétique à l’image du passage où le narrateur tombe sur le baleineau, et aussi terriblement terre à terre au-delà des images) comme la rupture dont on ne comprend tous les rouages qu’après avoir remonté avec le narrateur le cours de sa conscience…

L’image des lézards est assez heureuse… ça grouille, et puis quand on leur coupe la queue elle repousse indéfiniment…
L’auteur a trouvé là une métaphore assez parlante qui nous change du criquet gentillet de Pinocchio…

Le narrateur énerve, et puis en même temps on le comprend…

Ensuite, l’insertion des faux coms : alors là je peux commenter beaucoup plus facilement

Je pense qu’on peut très bien envisager les deux séparément : le texte et les commentaires… mais les deux pris ensemble donne un résultat assez interpellant.

Oui, c’est un risque, un risque calculé, comme le reste.

On peut imaginer, mais alors on ne comprend pas bien l’intention de l’auteur, que Lari a décidé de mettre ces faux commentaires, comme le souligne W pour des raisons obscures …
Comme on peut imaginer que ces commentaires sont une suite logique à la nouvelle, ce qui est le parti que je choisis de prendre.

Ces commentaires viennent renforcer, selon moi, l’impact de la nouvelle.

Et puis ça pousse le risque un cran plus loin. Il aurait été facile de laisser la nouvelle parler d’elle-même, de ne pas en faire plus.

Oui les lézards se suffisent à eux-mêmes…

Mais l’introspection ne s’arrête pas juste à la nouvelle en soi… l’introspection balaye tout…
Les faux commentaires sont à mes yeux plus un retour d’introspection qu’autre chose.
Et en même temps, il y a ce côté réaliste, terriblement réaliste qui fait un peu « anticipation » et qui vient ajouter un facteur supplémentaire à la nouvelle en elle-même.
Ça choque !

Oui, le texte (et ses commentaires) est loin, terriblement loin des standards Oniriens, des standards tout court… (et puis pas tellement en fait dans certaines sphères, on aurait pu dire à Larivière, hé! Mon gars... t'as pas été assez loin... t'as mis un lexique! Merde!!!) mais c’est là qu’est tout l’intérêt de l’exercice. (enfin à mes yeux de lecteur et d'auteur qui pense que l'art est une façon de livrer SA PROPRE perception du monde, sa vision aussi déformée soit-elle des standards... oh! Comme Picasso, Van Gogh ou Chagall et Dali ont du se sentir seuls...)

Oser livrer quelque chose d’aussi symbolique et admettre que le lecteur puisse passer à côté ou non (et ce traité avec un humour en décalage total avec le ton de la nouvelle) est une prise de risque, mais aussi quelque part une suite logique.

Pour le reste je persiste à dire que si on prend le temps de lire, de vraiment lire, on se retrouve tous quelque part dans ce voyage initiatique à l’intérieur de nous même en même temps qu’on plonge à l’intérieur de la tête, de l’œsophage, de la baleine et du rhino éventré, du nid à lézards, de la conscience du narrateur…

Et plus que tout, je pense que l’auteur a bien fait. Bien fait de ne pas faciliter le travail du lecteur.
Bien fait de ne pas tomber dans le piège de dire les choses de manière évidente, bien fait de ne pas nous mâcher le travail.
Merde, si l’art se résumait uniquement à bien se faire comprendre par la masse ça se saurait. Je ne vois pas l'art comme ça!

Ici le but est de toucher celui qui a envie de l’être, comme je suppose il faut passer au-delà de la répulsion pour les huitres pour pouvoir trouver des perles…

Alors on peut passer à coté de l’intention, normal, on peut reprocher à l’auteur de n’avoir pas facilité la tache du lecteur, normal, mais je ne pense pas qu’on puisse dire que le texte soit fermé ou hermétique.
La preuve moi je n’ai eu aucun mal à le lire ou à le comprendre. Oui, mais moi je ne suis pas objective ! Soit ! Alors on peut imaginer que l’intention est de perdre le lecteur, ou d’accrocher ceux qui feront l’effort.

Moi j’y vois juste un moyen d’exprimer quelque chose de très difficile à exprimer (à l’écrit, mais je pense qu’à l’oral ce serait pareil, et que si Lari s’exprimait de manière picturale on aurait une peinture pleine de couleurs sombres, avec des pointes flamboyantes et que ça s’apparenterait tellement à du surréalisme que ça en serait finalement… et d’office on est alors loin des vierges de Maeterlinck et de la Dame à la licorne de Raphaël) il faut pouvoir comprendre le symbolisme, se laisser porter par le texte, le lire et donner à l’auteur la liberté de prendre notre esprit, de le passer à l’essoreuse tout en sachant qu’on en ressortira peut-être en morceaux… ou pas.
Et c’est vrai que ça, ce n’est pas donné à tout le monde. L’abandon dans l’art est quelque chose de difficile, qui présume qu’on veuille faire confiance à l’auteur et le laisser nous balader. Ce qu’il fait ma foi, avec un brio que j’applaudis pour ma part des deux mains…

Alors on pourrait demander à Larivière d’écrire du Club des Cinq… on pourrait lui demander de ne pas nous prendre pour ce que l’on est finalement pour la plupart : des lecteurs…
Et qu’en tant que tels on a notre propre gout, nos propres sensibilités et notre envie ou non d’entrer dans son univers, qui est et n’en déplaise à certains : dense, alambiqué, profond au point de passer pour hermétique et réfléchi…
Mais pour ma part, comme quand j’ai lu Chat noir chat blanc, Ce jour là, ou même Nuit d’ivresse, je me satisfais de ce que Larivière nous distille, comme ce que c’est : le style assumé de quelqu’un qui a compris que l’expression est quelque chose qu’on s’approprie ou non.

Et peut-être que plus que ses autres textes, il nous demande avec Les lézards, de lui faire confiance et de se laisser porter. Par son style. Par son processus de pensée. Par sa façon à lui d’exprimer tout ce qui ressort du texte au premier plan et en pointillés, entre les lignes.
Mais toujours en assumant la seule chose qui soit importante en écriture, à mes yeux : son style et sa personnalité pour raconter quelque chose.

Merci pour ce texte : un pu**in de bon texte ! Et des pu**ins de bons faux-commentaires qui méritent à eux seuls une note au dessus du niveau de la mer (ne fut-ce que pour l’analyse des commentateurs, de leurs réactions possibles et ce avec une auto dérision et un réalisme sur sa propre façon d’être perçu qui ne sont pas donnés à tout le monde, du risque de tellement coller aux coms surréalistes qu’on peut croiser sur ce site que ça ne peut-être que dérangeant aux commentateurs qui se reconnaitraient dans les coms… exercice terriblement difficile et ici aussi, réalisé avec main de maitre… comme les autres auteurs qui se sont risqués à l’exercice pourront en témoigner…).

Je rebondis, mon com date du 18/07... juste pour dire que je ne suis pas d'accord avec l'analyse de Selenim sur le seul et unique point du caractère "inutile" voire "accessoire" du texte en soi.
Je pense véritablement que le texte est à lui seul une perle du genre. Mais bon, là aussi, faut être familier du genre...

Merci Lari, c'est toujours un plaisir.

Bon, voilà, j’ai sûrement approché le record du commentaire le plus long de Pat, j’aurais pu ouvrir un forum aussi mais je préfère laisser ma trace sous celle de mon alter-égo kiwiesque de faux coms…




Lien vers le forum ouvert par l'auteur à propos du texte


Bises,
Estelle2L

   Lhirondelle   
20/10/2009
Commentaire modéré

   Ninjavert   
5/11/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Je tiens à porter plainte auprès du Comité Editorial.

Non, parce que que l'auteur prenne ses lecteurs pour des couillons avec cette parodie de texte passe encore. Mais s'il croit que je ne vais pas relever l'allusion vicieuse, la pique sournoise, l'odieux croc-en-jambe que représente cet ersatz de moi, ce Ninjanoir, ce commentateur à la manque qui manque de commentaire ! J'exuge des exquises, comme le diraient Dupond et Dupont.

Ci-fait et tant va Larivière à l'eau qu'à la fin il déborde.

Car c'est bien de celà qu'il s'agit : Larivière déborde. De tout. D'idées, d'images, de phrases. D'amour aussi, car s'il est ici question d'un amour brisé, il en est un autre, intact celui là, c'est l'amour des mots. L'amour des maux, aussi, tant l'auteur semble prendre un malin plaisir à nous dépeindre ces douleurs insoutenables : de dents, de tête et ... bien sûr... de coeur.

J'ai lu plusieurs trucs de Larivière, mais mon esprit spongieux n'a gardé de souvenir clair que de "Chat noir, Chat blanc", qui donnait déjà cette impression de capharnaüm de mots, de déluge d'idées, de fatras de pensées... et déjà divisait les lecteurs.

Les faux commentaires sont amusants et je les ai pris pour ce qu'ils sont : un clin d'oeil amusé d'un auteur qui connaît l'accueil qui sera fait à ce genre de textes. La seule erreur vient (à mon sens) des notes moyennes distribuées dans les (faux) commentaires, car ce texte ne peut que difficilement laisser une impression mitigée. On aime ou on déteste. Souvent, on ne comprend pas.

J'avais rien pigé à "Chat noir / Chat Blanc", seulement aimé l'exercice de style. Pourtant ici, j'ai tout compris. Etrange. Je ne pense pas avoir fait de gros progrès intellectuels entre temps. Ce qui m'a frappé, c'est que ce texte est aux antipodes de ma façon d'écrire, et c'est peut être (par opposition) ce qui fait que je l'ai particulièrement bien accueilli.

Ce texte m'évoque ces gigantesques fresques, ces portraits, ces paysages, qui sont en réalité composés d'une infinité (relative) de petites images. J'ai un souvenir d'un portrait (une photo, en fait) d'Einstein, composée d'une infinité de la même photo en plus petit, de tailles et de couleurs différentes. Le procédé est connu.

Pourtant je n'aurai jamais imaginé pouvoir le transposer à un texte. Or c'est l'effet que m'ont fait Les Lézards. Chaque phrase, chaque paragraphe est une image, parfois figée, parfois mouvante, parfois solitaire, parfois incluse dans une succession d'autres images. Ces images sont souvent absurdes, folles, délirantes, on est sans cesse aggressé, ébloui, aveuglé par ces peintures grand-guignolesques, ces délires picturaux absurdes et imperméables à qui n'a pas envie de s'y ouvrir. On est baigné de Dada, de Picasso, de Dali.

Et pourtant, tout ce fatras surréaliste est formidablement construit. Lari m'a dit un jour que mes nouvelles étaient construites au compas et au cordeau. Je crois sincèrement que malgré la fausse impression de chaos qui prédomine ici, la formule est nettement plus juste chez lui. Car rien, à mon avis, rien n'est hazardeux, rien n'est gratuit (je peux me tromper). Quand on lit -et c'est là que le bât blesse, pour apprécier ce texte il faut le lire, pas le survoler ni le parcourir, et pour avoir moi-même décroché par endroits je sais que c'est difficile- on s'aperçoit que certaines phrases, certaines formules, certaines images sont trop parfaitement évocatrices pour être dûes au hasard.

Ce texte m'évoque un peu (toutes proportions gardées) l'univers. Quand on y lève les yeux on ne voit qu'un gros bordel d'étoiles, regroupées en galaxies biscornues, qui partent dans tous les sens sans aucune logique.
On sait aujourd'hui combien c'est faux. Combien les lois et les règles qui régissent l'univers sont précises et complexes. Comment tous ces élément en apparent chaos sont liés les uns aux autres et interragissent ensemble.

C'est ici (pour moi) une formidable démonstration de construction. Comme ces motifs complexes du Pérou, qu'on ne peut voir de manière claire que du ciel.

On se perd facilement dans ce texte (mais c'est aussi le but, quiconque a déjà vécu cette situation, cette douleur intenable qui est la perte d'un être aimé, cette remise en question intolérable de notre propre responsabilité, cette prise de consicence terrible, sait à quel point on peut se sentir perdu, abandonné, en proie à des impressions, des sentiments qu'on ne comprend pas, qui nous poussent à agir de manière totalement irrationnelle). Mais si on se perd, l'auteur ne nous abandonne jamais pour autant.

Toutes ces images sont là pour décrire les sentiments, les impressions, les angoisses, les sensations, les pensées, les non-dits, les non-pensées... ces mots bizarres, que Lari emploie à outrance ne font que donner vie à des choses que nous n'avons pas l'habitude de voir : maux de ventre, de tête, de coeur. Errement de la pensée, souvenirs, regrets. On ne parle que de choses très réelles, finalement. Mais très déformées. Comme si, pour décrire ce qu'il ressentait (ou avait / aurait ressenti, j'ignore s'il y a du vrai là-dedans, même si c'est tellement parlant que je suppose que oui) l'auteur s'était mis dans une sorte de transe chamanique, où les sensations, pensées, craintes s'expriment souvent sous la forme d'animaux, d'esprits, de formes étranges et mouvantes.

Car au final, on suit tout du long un fil directeur : de la rupture à la prise de conscience, qui mènera soit à une descente aux enfers, soit (et c'est plus probable) à une lente et douloureuse reconstruction qui n'effacera jamais les blessures subies. On passe tour à tour de la violence des émotions brutes à la prise de recul, à la reflexion, la remise en question, jusqu'à la prise de conscience. Tout ceci traduit sous formes d'images cabalistiques, d'animaux surréalistes, de situations improbables.

Je disais que l'auteur ne nous abandonne jamais totalement. Régulièrement, comme des bouées de sauvetage, sont distillées de petites phrases très réalistes, qui nous renvoient à l'autre. A cette femme qui est partie. Ces petites phrases qui nous rappellent pourquoi on est là. Comment on en est arrivé là. Cette ponctuation (seule vraie ponctuation du texte d'ailleurs, tant ce dernier nous coupe le souffle, nous assèche la gorge comme ces fameux Lézards qu'on découvre à la fin après les avoir tant attendus au fil de cette ménagerie infernale), est là pour nous resituer dans ce processus émotionnel et psychologique. Elles marquent des étapes dans ce parcours qui mène à la compréhension et à la prise de conscience. Ces petites phrases qui nous envoient à des éléments tangibles de la réalité du personnage (la fille, les escarpins bleu (dont le bleu se retouve régulièrement sous la forme de ces putain de manchots bleu-cyan) etc.), balisent ce "parcours initiatique". Et ces repères exigent une vigilance continue, pour ne pas les rater, au risque de se perdre... à moins que l'errance ne fasse partie du jeu ? On finit toujours (à force de vigilance) par retrouver un repère et retrouver son chemin.

Je ne ferai pas d'analyse précise sur la forme, c'est fort, ça prend à la gorge, ça essouffle. Un exercice un peu pénible, de par la longueur, des phrases, du texte, la succession d'images et de formes apparemment déccorelées les unes des autres.

Mais qui a dit que la lecture devait être reposante ? Il est bon parfois d'être malmené par un texte autrement que par ses idées. Ici, tout est viscéral. Le fond comme la forme. Et ça surprend, je conçois parfaitement qu'on puisse passer totalement à côté. J'avoue que je ne lirai pas un livre comme ça, ce serait trop éprouvant.

Ce texte, comme la plupart des oeuvres de Lari, est un ovni littéraire. Mais c'est avant tout une histoire. Un texte qui, comme le parfum de Süskind, met des mots sur des choses indescriptibles.

Je me demande souvent comment je pourrai décrire, avec des mots, le monde qui nous entoure à un aveugle / sourd. Comment décrire une couleur à quelqu'un qui n'a jamais vu ? Comment décrire un son à quelqu'un qui n'a jamais entendu ? Comment décrire une forme ? Un mouvement ? Des choses tellement simples quand on sait ce que c'est, et pourtant tellement conceptuelles et difficiles à décrire avec de simples mots.

Si j'étais né aveugle et sourd, j'aurais aimé que le monde me soit montré par Larivière.

Ninj'

   Togna   
13/11/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément
Je n’ai pas le talent de certains des précédents commentateurs, mais mon admiration pour tes textes m’impose de te dire ma pensée.

Sur le fond, tout a été dit. Tu sauras trier. Moi, j’y retrouve cette souffrance latente en toi qui fluctue au gré de ta vie et te donne cette extrême sensibilité, laquelle fouette ton imagination, l’incite à sortir toujours des sentiers battus.

Je n’ai pas compris le choix de la catégorie. Je n’ai ni vu de fantastique ni de merveilleux, mais plutôt un discours métaphorique d’une personne en souffrance. En lisant lentement, je n’ai pas eu de difficulté ni de lassitude à le faire parce que ton écriture, est riche, entre autres, d’un vocabulaire servant bien la précision de ta pensée pour une prose de haute tenue, qui souvent, et c’est tant mieux, ne peut juguler la vision du poète.
Mon appréciation est, comme d’habitude, plus que sur l’histoire elle-même, basée sur l’écriture et l’imagination.

Pardonne-moi si mon commentaire n’est pas constructif, mais je n’ai pas l’intellect suffisamment affuté pour critiquer un tel texte.

   Mellipheme   
9/3/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je suis arrivé aux lézards guidé par la liste des textes les plus controversés d'Oniris, avec l'idée un peu simpliste que l'art, qu'il soit littéraire ou pictural, lorsqu'il ne ronronne pas, suscite souvent la controverse.

Je n'ai pas été déçu. J'ai lu d'une traite la nouvelle avec un grand plaisir, et je la relirais surement dans quelques jours. Je n'ajouterais pas de longs commentaires. Ceux provenant de certains lecteurs (Estelle2L, Ninjavert, Togna, David) disent mieux que je ne saurais le faire la beauté de ce style au service d'une "explospection" physio-psychologique.

Ceux venant de l'auteur lui-même sont drôles, mais la parodie est purement à usage interne de la communauté Oniris et n'apporte rien au texte. Mon appréciation très positive eut été la même sans cette plaisanterie de khâgneux.

   Anonyme   
16/6/2010
Un texte qui se passe de notations, qui se passe de commentaire, j'irais même jusqu'à dire qui se passe de lecteurs tant il s'autosuffit.

D'ailleurs, quand je dis texte je parle du premier, du véritable, pas de la blague en forme de projection-dérision- qui le suit. Pouvait-il exister indépendamment de ces faux commentaires ? Oui. Mais sur une plateforme publique (Oniris) ? Non.

L'auteur l'a dit lui-même dans le forum correspondant "la partie humoristique, voire satirique correspond peut être plus à ce que je peux donner de meilleur aux lecteurs..."

Je dirais qu'il s'agit là d'une pioche dans la paroi, à laquelle s'accrocher ; que le lecteur puisse dire, dans un sursaut mêlant le soulagement à la confusion, au rire nerveux, "Ah ! Larivière nous a bien eu !" et finalement, se rassurer.

Parce qu'on -je-, ne peut que perdre pied face à ce texte. D'abord parce qu'il est complexe, ensuite parce qu'il est bouillonant (d'idées, d'images, de références, d'émotions), enfin parce qu'il est génial.

Pour ma part, je ne l'ai trouvé ni franchement drôle (malgré quelques petites touches d'humour subtiles, appréciables), ni "canularesque"- mais très tendre, finalement. Quelque chose d'infiniment doux-amer, d'excessivement humain, qui sonne juste, qui fait mal en donnant le sourire.


C'est évidemment très bien écrit. Mais ce serait insulter l'auteur que de réduire son texte à ce seul critère - il n'y a pas que de la technique, il y a aussi de la vie, ici, un flot d'intensité vibrant de bout en bout, qui laisse complètement épuisé au final (Je parle encore une fois en mon nom propre).

Tous les sens sont requis à la lecture - qui ne peut par conséquent pas être passive, et pourtant, on se sent forcément, malgré tout ce qu'on peut ressentir, en quelque sorte exclu parce que bordel, c'est maitrisé, c'est personnel, c'est estampillé Larivière et ca reste hors de nous.

Mais c'est justement parce que ça nous échappe que "c'est tellement bon".

Sur le fond de l'histoire en elle-même, que dire ? L'intrigue est ici sans y être, esquissée en filigrane et devinée par petites touches plutôt que dressée à grands traits aux couleurs criardes.

Une allégorie, sans doute. Presque une fable.

Peut-être que finalement, la seconde partie est la seule réellement destinée aux lecteurs : elle dédramatise le texte (au sens où elle lui ôte toute gravité, importance, puissance même), tout en le défendant, en parant à l'avance les attaques potentielles, dans un esprit du "je sais déjà" - se met du côté des lecteurs donc, en fait une nouvelle à double tranchant, frôle le cynisme.

Peut-être que je me plante magistralement sur le "but" de ce texte (si tant est qu'il en ait un), sur les intentions de l'auteur, sur ce qu'il y avait ou non à comprendre ...

Pour moi, c'est une formidable leçon d'humilité.

Injustement, au hasard, puisqu'il faut au moins en choisir un :

"En réalité, ce cétacé, qui n’est pas une baleine mais seulement un baleineau de sexe masculin, c’est vous, en un peu plus turquoise, en un peu plus échoué, avec un peu plus de lard fissuré par les coups de bec la vie frappant paroles mordant fort, lacérant, tambourinant, s’acharnant sur ces gencives, sur cette chair molle qui a un jour été bleu-ciel, aussi fluide que l’océan, aussi bleue que la mer Morte ou mer tranquillité, aussi bleue que les yeux de cette fille auxquels vous pensez maintenant…"

Merci Larivière.

   Anonyme   
29/12/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une lecture pas évidente, ce n'est pas à mettre sous les yeux d'un lecteur non averti. Avertie je ne le suis pas plus qu'une autre mais je suis entraînée à lire. Une écriture dense, dansante aussi quelquefois. Une grande maîtrise de la construction d'un texte et de grandes prises de liberté. Je suis presque embêtée de devoir noter parce que la note quelle qu'elle soit ne dit rien de la maîtrise qui est évidente, du savoir faire indéniable. Ma note exprime simplement le plaisir que j'ai eu à la lecture de ce bon texte.


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