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Geigei
27/11/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
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Le narrateur est Jean-Robert.
Le titre ne nous trompe pas. Il contient le cœur du propos, l'ordre. Jean-Robert nous conte un rêve (éveillé ?) qui le mènera - spoiler alert - du cube à la sphère. Il rêve de pouvoir accepter le désordre et rire au chaos. La forme est très poétique. L'onirique est poétique. Le métro, c'est le désordre : "cohue", "tohu-bohu", "charivari" Jean-Robert ne monte dans aucune rame. L'océan : "vagues indéfiniment répétées. Mesure et démesure, ordre et désordre, en harmonie.". Et le jeu de carte : "Pique cherche pique, roi cherche roi, cœur cherche cœur. Et les deux visions mêlées : "je vois des bateaux de cartes qui dérivent" Le lexique est riche. Les émotions liées à la crainte du désordre, ou, en creux, à l'obsession de l'ordre, sont si bien évoquées qu'elles en deviendraient communicatives :-) Un bon moment de lecture. Ou comment passer du temps dans le métro sans s'ennuyer :-) |
jeanphi
27/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Bonjour,
Nous sommes plongés dans les pensées du narrateur, mais aussi dans sa conception du monde en transformation et peut-être nous faites-vous voyager quelque peu à travers son subconscient. Un texte bouleversant, plein d'esprit, de sagesse, de fraternité. La personnalité du narrateur paraît très contemporaine, dans sa manière ouverte et extrêmement critique d'envisager l'existence, le rapport social, ... Je vois une critique de l'immediateté, de l'exubérance, de l'excessivité, de l'individualisme et du conformisme ; plein d'humour, de drame et d'ambivalence. En même temps qu'un grand message de confiance en la force de l'être qui, confronté aux question de l'homme moderne développe des expériences et des modes de compréhension nouveaux. L'écriture est poétique, reposante et vous dépeignez la profondeur de la relation d'un humain avec son temps, au moyen d'un vecteur simple et intéressant. Vous amenez le lecteur à se comprendre mieux, ou du moins à s'observer dans ses propres mécanismes d'adaptation au monde. "Je ne veux pas me mettre à l'ordre du jour, je veux me mettre à l'ordre dans mes jours." Toutes les phrases sont à citer, vous me permettrez de vous relire !?. |
Jemabi
27/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
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Un texte qui séduit par sa belle écriture au service d'un thème contemporain, l'ultra moderne solitude à laquelle n'échappe pas l'individu noyé dans l'anonymat des grandes villes. Plus il y a de monde autour de soi, plus on se sent seul. Le métro et son décor froid est un bon exemple de l'isolement qui guette le personnage principal, prisonnier de son "métro, boulot, dodo", comme bloqué sur ce quai dont il ne semble pas pouvoir décoller. Dans cet environnement, la moindre trace d'humanité attire son regard désabusé, et puis son esprit s'échappe, ses pensées divaguent. Ce qui se passe ensuite, entre rêve et réalité, intrigue car on quitte soudain le naturalisme pour entrer dans une dimension poétique. Même si la métaphore de la fin, l'enfant et sa construction de cubes, ne me convainc qu'à moitié., et que le dernier paragraphe est trop explicatif, l'ensemble reste d'un haut niveau.
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Catelena
28/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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D'emblée le ton est donné. Le monde se présente par son bon et son mauvais côté.
L'ordre du jour en titre - où l'on peut comprendre l'ordre du rangement avec son côté ordonné, mais aussi l'ordre en tant que consigne et impératif- joue le fil conducteur d'une histoire où l'on risque à tout moment de basculer là où l'on ne le veut pas. Le narrateur n'est dupe de rien. Il connaît la turpitude du milieu où il évolue. Il choisit son camp comme l'on s'accroche à une bouée de sauvetage qui ne tiendra pas ses promesses. Tout commence par un long monologue d'auto-persuasion, où l'on assiste à cette bagarre entre la volonté de se maintenir en équilibre au bord d'un abyme omniprésent, dans lequel, tôt ou tard pourtant, tout finira par basculer. C'est du moins ce sentiment qui se dégage à ma lecture. Le texte n'est pas facile à aborder, à pénétrer... Le personnage, faux naïf lunaire, comme serait lunaire tout ce qui se tient au-dessus et en même temps au cœur de la réalité, donne une ambiance surnaturelle au tableau. Une ambiance floutée aux accents irrémédiablement oniriques. Les anges omniprésents rajoutent leurs charmes en souriant tous azimuts. Comme d'habitude, je me suis laissé envoûter par la richesse de l'écriture, et des vastes images qui se donnent sans compter, avec une précision d'arpenteur méticuleux qui fouille les moindres recoins de la nature humaine avec un cœur immense. Comme d'habitude, j'attends avec intérêt de connaître les intentions de l'auteur. Celles qui m'ont échappé. J'ai bien aimé, entre autres, le chaos dans « Leur ordre si pervers, et leur malignité à eux tous, me laissent chaos », et aussi « ma moitié, mon trois quarts d'ego » Cela m'a valu quelques sourires en retour. Merci, Louis. Cat-Elena, sœur de Jean-Robert (sans rire) |
Annick
28/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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C'est un monologue intérieur.
Le locuteur se fixe un but : éviter le chaos du monde, prendre le contrôle de sa vie. Il croit être libre en choisissant son propre ordre du jour : " il faut savoir sourire à la vie." Mais il reproduit pourtant les codes de la société. C'est un sourire forcé qui ne fonctionne pas. C'est un comportement bien éloigné de sa propre sensibilité, de son affectivité. Il prend peu à peu conscience des choses. La dernière partie du texte, celle du souterrain du métropolitain est une étape importante où l'onirisme, la poésie surréaliste émerge en même temps que sa prise de conscience. Comme une libération, un séisme, une éruption volcanique. C'est ce à quoi cela me fait penser car cela vient de l'intérieur. "La délicatesse d'une main" semble être son ange gardien, son subconscient. Les peurs s'effacent. Le texte se termine par un ordre du jour définitif. Il découvre alors son propre chaos, son moi pluriel, pulsionnel, instinctif, affectif, source de vie. C'est un très beau texte où l'on s'attache à ce personnage qui nous ressemble. . |
Eskisse
28/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Bonjour Louis,
Un héros timoré dont la quête est de vivre, de trouver sa place dans l'existence. Pour moi la clé du personnage Jean-Robert ( qui a quand même le même prénom qu'un dictionnaire ) est dans son langage à l'instar des personnages de Proust qui sont caractérisés par leur façon de parler. Et il ressort que le langage de cet homme est "enfantin" : il repose sur des inversions de termes, des échanges de mots, " rangé / dérangé", des expressions en miroir, des paronomases : "des bateaux de cartes" comme dans La belle lisse poire du Prince Motordu de Pef. Quand il emploie une expression qui relève du patrimoine culturel ( La vie est un songe de Caldéron /La vie n'est pas un songe- encore une expression détournée) c'est comme si le bagage culturel s'effaçait derrière la bonté du personnage. C'est un homme qui ne sait par quel "côté" exister dit-il au début, les côtés de ces cubes qui symbolisent la vie effondrée dans la vision finale. Le narrateur parvient finalement à s'émanciper grâce à son parcours au travers des cartes à jouer ( image du hasard ou du destin) et grâce à sa pensée, à sa détermination et au langage . C'est un "magicien" qui sait désormais transformer les cubes en sphères, ses étoiles dansantes. C'est finalement en détournant les expressions, en faisant le détour par les mots de ce monologue, donc par la courbe, que J-Robert trouve son salut et sa sphère. |
EtienneNorvins
29/11/2023
trouve l'écriture
très aboutie
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aime beaucoup
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Une prose très poétique, pleine de trouvailles, dont l'humour fait d'abord irrésistiblement songer à l'univers de Sempé. Cela fonctionne presque comme la mécanique musicale d'une montre ou d'une horloge - sauf qu'elle va en se détraquant, jusqu'à une fin qui me semble être faussement lumineuse : la citation en exergue et un récent commentaire de votre part m'invitent à lire dans cette nouvelle comme la "naissance d'une tragédie".
Jean Robert est pris au piège des mots, dont il est comme marqué au front. Il porte en effet le patronyme d'un dictionnaire (merci Eskisse) - tout en étant Mr JEAN / Mr GENS donc Mr Tout-Le-Monde en puissance ? Par un jeu qui semble parodier le Pater Noster, il semble recevoir du ciel son 'mot quotidien', qu'il utilise comme une colonne vertébrale pour donner une ligne rouge à chacun de ses jours : Courage, Sourire, Prudence, etc... Mais cela échoue à chaque fois. De sorte qu'avant même que soit mentionné le nom, lors de l'apparition de l'enfant, Jean Robert est un Sisyphe. Seule variation : il commence chaque jour avec une pierre qui lui semble nouvelle, mais qui se fracasse invariablement sur l'ordre des autres, sorte d'ordre apollinien qui tourne à vide, jusqu'à rester littéralement à quai. Il est en effet de plus en plus paralysé intérieurement par un autre ordre, pulsionnel, dionysiaque, qui rend la réalité commune d'une 'inquiétant étrangeté. Cette allusion freudienne, faite comme en passant ("Cette étrangeté inquiétante, au fond… ce bouillonnement…") fait pointer vers l'inconscient l'origine du détraquement progressif de la machine Jean Robert. A sa décharge, l'ordre politico-économico-socio-sentimental ambiant (ah ! la tyrannie du trois quart d'égo, comme s'il était écrasé par un surmoi femelle...) lui interdit toute sublimation - sinon aberrante : et c'est là que le texte verse de l'étrangeté dans l'inquiétant. Depuis le début, Jean Robert semble présenter des troubles un peu autistiques - ainsi prend-il chaque mot 'au pied de la lettre' et reste incapable de s'adapter à des variations (scène du quémandeur : "Euh, je n'ai rien, je n'ai que mon ordre, je n'ai que mon jour.") Mais cela bascule peu à peu de l'autre côté du miroir, jusqu'à ces apparitions 'Carolliennes', dont la scène du jeu de Cartes semble le sommet quasi métaphysique, qui rappelle Alice aux prises avec la Dame de Coeur, en même temps qu'elle introduit le lecteur dans le 'coeur nucléaire' de l'univers Jean-Robertien... (Aparté : le réveil matin est-il une allusion au lapin blanc avec sa montre - et son obsession de ne pas être en retard ; ce qui fait suggérer que chaque matin, Jean Robert suit un lapin blanc dans une sorte d'anti-Monde des Merveilles, qui est notre quotidien ?) Alors il semble bien que depuis le début, on a dérivé lentement mais logiquement (la folie ayant sa rationalité particulière - une rationalité intransigeante comme l'ordre du jour que Jean Robert s'assigne arbitrairement chaque matin : "Je ne veux pas me mettre à l'ordre du jour, je veux mettre de l'ordre dans mes jours") vers cette sorte de longue bouffée délirante, hallucinatoire, mêlée des sentiments océaniques, qui semble coaguler pour devenir un univers alternatif, où va se réfugier/sombrer le narrateur. (2ème aparté : la main qui le prend, le mène soudain, m'a donné le sentiment qu'il y avait du Mouchette chez Jean Robert. Lui qui s'interroge sur les anges, n'est-ce pas là un démon - fût-il son démon intérieur ?) Ainsi, les routines de Jean Robert étaient-elles peut être comme autant de digues contre l'invasion de ces bouffées délirantes, qui virent finalement à une rire futur très ambigu - le mot final "éclats" peut indiquer une libération comme un effondrement... Merci pour ce texte aussi agréable à lire que subtil dans sa structure, et dérangeant dans sa possible peinture de le condition de l'homme moderne, pris au piège entre deux univers, l'un inhumain et l'autre déshumanisé - au point peut être de n'avoir d'autre alternative que d'aller se pendre au cou d'un cheval dans une rue de Turin ? EDIT : M'est revenu entre temps le souvenir du chapitre des 3 Métamorphoses dans le Zarathoustra : du chameau qui dit tu dois, en lion qui dit je veux, en enfant qui est l'innocence du Oui au Devenir. Le parallèle est sensible dans le texte, et permet d'envisager une lecture plus 'triomphale' - plus en accord avec 'la mise au monde d'une étoile dansante'. J'avoue qu'elle ne me convainc pas vraiment... Je reste donc dans l'attente de vos lumières. |
Vincente
30/11/2023
trouve l'écriture
aboutie
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aime bien
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J'ai été gêné dans la première moitié de la nouvelle, jusqu'à "Une main dans la mienne", par une discordance entre le ton et l'expression de la sphère de pensée du narrateur. Le personnage est un "petit bonhomme" bringuebalé par la vie, il subit toutes ces contingences qui lui permettent d'exister, mais aussi qui le meurtrissent petit à petit avec une telle force récurrente qu'elles le meurent à petit feu. À côté de ça, son besoin de survie lui intime de réfléchir, comprendre ce qui lui arrive, tenter ce qui se révèle comme des échappatoires (voir cette bonne résolution de sourire à la vie benoîtement qui ne lui apportera que des déboires…).
Ce qui m'a gêné, c'est que je n'ai pas pu entendre comme venant d'un même individu ces deux champs d'existence, la pensée à la fois un peu simplette et aussi très introspective du "p'tit bonhomme" et son phrasé, sa compréhension de ce qu'il est et de ce qui lui arrive, fin et élaboré. Je trouve que le récit gagne toute sa maturité justement à partir de cette "main" qui vient prendre locuteur et lecteur et les mène vers une plénitude très bien endossée par les images océaniques qui nous accompagneront alors. J'ai été vraiment emporté dans ce premier paragraphe de la deuxième partie, et alors j'ai pu me laisser accaparer par tout ce qui enflamme le récit jusqu'à la fin : - La formidable association entre le symbolisme des cartes de jeu, aux couleurs et formes qui se retrouvent et justifient des éléments de l'environnement urbain et métropolitain : " Et ma main est froide. Une rame de métro. Je suis sur le quai, debout, pique planté sur le carreau de la gare devant des cœurs affolés, des as stressés, en tous sens des dix et des cents, des dames pressées, des valets partout. Je suis là, et maintenant si las de toute cette agitation." - Et surtout l'excellente analogie du jeu d'empilement de l'enfant (toujours plus haut pour apprendre à accepter que de toute façon il y aura écroulement, mais où chaque brique posée est un grandissement précieux, tout cela étant très excitant, etc…) avec l'empilement de nos éléments de vie. Dans ce final, la nouvelle prend une dimension puissante dans une fantasmagorie très poétique mais d'un réalisme cru et fou. Vraiment impressionné par ces deux derniers paragraphes ! Jusqu'à leur chute extrême où avec Jean-Robert l'on voudrait pouvoir en "rire aux éclats". Pour revenir à cette première partie, j'ai l'impression qu'elle gagnerait à devenir plus modestement introductive, en quantité (bien plus courte) et en qualité (peut-être en gommant le côté un peu benêt du personnage). |
Eki
3/12/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
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Quel voyage extra ordinaire dans le quotidien de Jean Robert !
Voici un homme fantasque dégingandé qui sème la pagaille dans son cerveau...mais ses désirs ne font pas désordre. Tout semble désarticulé dans ce remue méninge mais pas que...aucun mot n'est laissé sur le carreau même dans ce jeu de cartes tout chamboulé... J'aime tout...de ce Jean Robert qui devient monsieur même pas peur dans ces turbulences aspirées par la spirale du chaos. Bravo, bravo...pour ce monde onirique que vous nous dessinez ! |
in-flight
4/12/2023
trouve l'écriture
aboutie
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aime bien
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On retrouve la capacité de l'auteur à plonger son lecteur dans un univers fantastique (cf: "Sangomar" ou " La chose" du même auteur).
Ce renversement du quotidien, cette remise en cause de l'ordre des choses (ici de l'ordre du jour) est toujours aussi bien retranscrite, la scène de l'enfant jouant aux cubes sur le quai est éloquente. J'ai toutefois trouvé qu'un texte plus court aurait mieux servi le propos et aurait eu un effet plus frappant dans mon esprit. Même si nous sommes toujours influencés par l'environnement extérieur dans le que le nous lisons le texte. |