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Humour/Détente
MariCe : Le plat du jour
 Publié le 08/07/15  -  8 commentaires  -  5639 caractères  -  160 lectures    Autres textes du même auteur

Petite chiffonnade de mots et de phrases assassines. Bon appétit.


Le plat du jour


Depuis quelques jours, Mélanie n’est pas dans son assiette. Elle, toujours si sensible au moindre courant d’air, en est maintenant convaincue… il y a un os quelque part, qui lui reste en travers de la gorge.


Elle décide donc de mener son enquête, en toute discrétion. Elle veut le prendre sur le fait, savoir enfin si c’est du lard ou du cochon. Elle le connaît si bien, son homme, et n’ignore rien de ses préférences, ni de ses défauts. D’ailleurs, ce n’est plus un secret pour personne, il a toujours eu les yeux plus gros que le ventre et ne crache jamais dans la soupe quand il s’agit d’avoir le beurre et l’argent du beurre. Cependant, elle soupçonne pis encore, dans ses choix gustatifs par exemple… la chair fraîche y serait un mets indubitablement souhaité, à en juger par le sourire de la crémière.

La recherche n’est pas facile, et pour tout dire, loin d’être de la tarte, car pour mieux le coincer, Mélanie ne mange plus que sur le pouce, quitte à pédaler dans la semoule ensuite.


Mais il faut croire que mijoter porte ses fruits, car trois jours plus tard, l’affaire est entendue. C’est certain, surprendre la greluche pendue à ses lèvres en sortant de l’hôtel lui procure un choc manifeste, mais tout bien considéré, Mélanie se réjouit et boit son petit lait, en attendant de savourer sa vengeance qui, comme chacun le sait, est un plat qui se mange froid.


Il lui faut d’abord couper la poire en deux et choisir la meilleure manière de trancher dans le vif. Puisque la coupe est pleine, autant se munir d’une ficelle suffisamment solide pour se lancer au plus vite dans une fricassée de bécasse, version amuse-gueule. Le plat de résistance viendra bien assez tôt… lui, sera la cerise sur le gâteau.


Elle choisit donc pour l’occasion de rassembler tout le gratin de leurs connaissances, sous le prétexte d’un joyeux pique-nique, façon "déjeuner sur l’herbe", avant le jeu des chaises musicales.

C’est qu’il ne faut pas la prendre pour une truffe quand même… l’autre fait sa mijaurée à l’appétit d’oiseau, jouant la fine mouche, à minauder l’air de rien, tout sucre et tout miel. Elle n’est d’évidence pas facile à prendre avec du vinaigre, se lamente Mélanie, sifflant cul sec sa bouteille. Cependant, elle ne renonce pas pour autant, et lorsque tombe la dernière goutte, maugrée sombrement : attention, chaud devant, je vais bientôt me farcir une volaille… quand le vin est tiré, il faut le boire, jusqu'à la lie… (à ce stade, le lecteur se fera aisément une idée du pourcentage d’eau dans le gaz, proportionnel aux nombres de verres vidés par la jeune femme).


Soudain, entre la poire et le fromage, devant tous les convives, Mélanie met tout-à-trac les pieds dans le plat et, du même coup, tout le monde au parfum. Devant l’évidence de la tromperie éventée, la demoiselle devient rouge comme une tomate mais joue sa dernière carte de sainte-nitouche façon religieuse ; elle tombe dans les pommes à en faire baver une meute de loups, à en juger par la gueule grande ouverte du sien (c’était pleine lune hier, et il a toujours eu un train de retard).


C’en est trop, les carottes sont cuites. Mélanie sent la moutarde lui monter au nez. Si c’est pour mieux la croquer qu’il lui revient rusé, mine de rien, l’air mi-figue, mi-raisin, ça finira mal, très mal.

Alors, elle a une idée. Elle glisse un pot-de-vin à Igor, son copain. Depuis le temps qu’il les bassine avec son gîte à la montagne, il peut bien lui offrir ce cadeau. C’est sûr, pas un chat à dix kilomètres à la ronde ; les tourtereaux seront tranquilles pour s’offrir une seconde lune de miel.



Lui, le lendemain, à peine arrivé : Je reconnais, j’ai croqué la pomme, ma douceur. Mais c’est vraiment pas la peine d’en faire tout un plat !


Mélanie : Tu connais mon emportement, mon chou. Mais comprends-moi, faut pas me prendre pour une poire, non plus !


Lui : Allez, n’en parlons plus, montre-moi plutôt tes talents de cordon bleu, histoire que je ne me sois pas dérangé pour des prunes !


Mélanie : Tu penses vraiment que la faim justifie tous les moyens ?


Lui : Et voilà, ça la reprend. Tu ne vas pas encore me refaire ton eau de boudin ? Sers-moi plutôt un lait de poule, pour me mettre en bouche.


Mélanie : C’est ça, monsieur a l’habitude de manger à la carte, de picorer à droite et à gauche, de tremper son biscuit partout et de garder une poire pour la soif au cas où ! Mais j’espère bien que c’est fini tout ça !


Lui : Ça, c’est pas tes oignons !



Un surlendemain qui chante (ou qui déchante, c’est selon).

La sonnerie du téléphone retentit :


Igor : Alors, les amoureux, votre week-end s’est bien passé ? On s’est réconcilié ?


Mélanie : C’est-à-dire qu’il s’est senti mal, et je ne sais pas pourquoi, mais il a vomi tout son bouillon, sur le coup de onze heures, avant de s’effondrer, la tête dans le pâté… et il n’en est pas revenu. Je suis au regret de t’informer que les obsèques se dérouleront mardi.

(en aparté, après avoir raccroché)

Le plat du jour, comme tu le désirais, mon chou… encore aurait-il fallu t’assurer de la fraîcheur des ingrédients… Allez, je t’en veux plus, va, d’autant que tu peux bien te reposer et manger tous les pissenlits que tu veux par la racine. C’est vrai quoi, tu n’auras plus jamais de Paris-Brest à prendre… je te fiche la paix maintenant… d’autant que je reconnais aussi mes faiblesses, je t’ai assez pressé comme un citron…


Ah, j’allais oublier… ne t’inquiète pas pour moi, je vais me faire dans le courant du mois un avocat ou une grosse légume ; que veux-tu, mon chou, faut bien vivre, et mettre du beurre dans les épinards maintenant que tu n’es plus là…


 
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   bigornette   
21/6/2015
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour.

Voilà une histoire en forme d'inventaire de nos bonnes vieilles expressions culinaires. Mais en fait d'histoire, votre texte ressemble beaucoup plus à une performance, ce que je ne goûte pas, si vous me passez l'expression. J'aurais préféré quelques jolis usages au lieu de cette collection exhaustive. On dirait un dictionnaire thématique, à l'entrée : cuisine. Or il y en a, des jolis usages, comme "tu peux bien te reposer et manger tous les pissenlits que tu veux par la racine", "Monsieur a l’habitude de manger à la carte, de picorer à droite et à gauche, de tremper son biscuit partout et de garder une poire pour la soif", et quelques autres. Et sinon, est-ce que vous écrivez vraiment ?

   in-flight   
24/6/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Sympathique,

la limite de ce genre de texte, c'est qu'on est dans l'expectative du prochain jeu de mot en lien avec le thème.

ENTRÉE: Terrine de doutes.

PLAT: légumes gratinés et sa mise en scène

DESSERT: Glace à la vengeance

Une nouvelle toute menue dont la carte offre un florilège de bons mots. Reste à savoir si on aime ce genre de restaurant spécialisé.

   hersen   
25/6/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Je comprends bien que le ton est à la farce (pour cadrer avec le sujet) mais j'ai quand même du mal à accrocher. On est un peu trop submergé par les expressions toutes faites qui sont la base de l'histoire. Au fil de ma lecture, je les attendais : ah tiens, voilà celle-ci, ah, maintenant c'est celle-là.
D'un autre côté, l'histoire est bien construite, il y a une logique. Mais elle est enfouie sous toutes ces expressions populaires. C'est ce qui donne du piment (yesss) à l'histoire ? Oui, mais parce que l'histoire est archi simple.
Dans son genre, cependant, ça se laisse lire car le style est sans fioriture et ça va son train de façon alerte. Mais je ne suis pas sûre que ce soit suffisant.

   Lulu   
29/6/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un bel exercice de style avec ces expressions toutes faites que l'on connait bien.

Je me demande si tous les francophones saisiront cette subtilité de la langue française, sachant que les expressions sont aussi le fait de la région... Ainsi, connait-on toutes ces expressions au Canada, en Afrique de l'Ouest... etc ?

J'ai bien aimé lire ce texte. Je l'ai trouvé très fluide, bien agréable à lire.

Personnellement, j'aurais dit "rouge comme une pivoine" plutôt que "rouge comme une tomate", mais on dit les deux, il me semble...

Bravo, et bonne continuation.

   AlexC   
11/7/2015
 a aimé ce texte 
Bien
Chère MariCe,

L’exercice de style est remarquable. Un vibrant hommage aux idiotismes gastronomiques.

Le pitch est sans prétention, nécessairement simple et concis je pense. Dès le départ, on sait que l’on est là pour les jeux de mots et non le contenu. L’écriture fonctionne, je n’ai buté que rarement et le tout est plutôt fluide et entraînant. Rien à dire, c’est du beau travail.


“quitte à pédaler dans la semoule ensuite.” : quitte à pédaler ensuite dans le semoule, sonne mieux à mes oreilles…

Mélanie surnomme son homme mon “chou” à plusieurs reprises, elle aurait peut-être pu varier : mon lapin, mon poulet, mon canard, mon sucre-d’orge, mon coco...

Je tique :
“Mais il faut croire que mijoter porte ses fruits”
“Le plat de résistance viendra bien assez tôt… lui, sera la cerise sur le gâteau.”
“tremper son biscuit partout”

Je jubile :
“ça, c’est pas tes oignons !"

J'ai résisté à la tentation d'écrire tout ce commentaire à la sauce gastronomique... Et zut, voilà c'est raté ! Quelle difficulté d'éviter toute référence à la table et ses plaisirs ! Bref, votre texte m'a donné envie de découvrir en détail et d'exploiter ce vaste et fascinant champ lexical.

Merci pour cette délicieuse mise-en-bouche.

Alex

   carbona   
10/10/2015
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Un exercice fort sympathique et j'imagine que vous y avez pris beaucoup de plaisir. Ce qui est chouette c'est que vous avez réussi malgré tout à créer une petite histoire. J'avoue qu'au cours de récit, je me disais bof, si c'est juste pour la performance, ce n'est pas un régal pour le lecteur. Et non, vous avez bien relevé le défi avec cette fin qui m'a surprise et qui m'a plu. Bravo !

Merci pour votre texte !

   henriette   
8/2/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
une histoire de coeur et de cul en l'air à la sauce Bocuse , j'ai salivé !
Bel exercise de jeux de mots culinaires ! Eh Toque !
Merci et pour la faim , mettre Hercule Poireau au saveur , il est végétarien !

   PatriciaBD   
16/6/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bel exercice de style dont j'ai goûté tout le sel.
Amusante utilisation de toutes ces expressions dans ce vaudeville épicé à la fin délicieusement amorale.


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