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Fantastique/Merveilleux
masdau : La parabole de la petite souris miraculée
 Publié le 08/02/09  -  10 commentaires  -  5012 caractères  -  59 lectures    Autres textes du même auteur

L'apocalypse à l'envers.


La parabole de la petite souris miraculée


Il était une fois une Terre qui n’était pas tout à fait une Terre comme la nôtre. C’était une Terre que personne ne pouvait décrire parce qu’il n’existait pas de mot pour le faire mais je vais essayer quand même de vous la dépeindre avec nos mots connus… C’était une Terre sans pays, sans continents, sans Nord, ni Sud, ni Ouest, ni Est, ni haut et ni bas. Donc il n’y avait pas de frontière à défendre, pas d'État à protéger et pas de population à guider. Ce n’était qu’une Terre, entière, sans chef, sans sous-chef et sans personne pour obéir. Il n’y avait que des gens paisibles, par-ci par-là, vivant en petits groupes ou bien tout seuls. C’était selon les humeurs de chacun. Cela n’empêchait pas qu’on s’invitait parfois, quand l’occasion se présentait ou pour le plaisir, tout simplement. Alors on prenait des nouvelles des uns et des autres, de ceux qu’on ne connaissait pas afin de s’informer de l’avancement des récoltes ou de leur santé mais jamais plus. Ce n’était pas des gens curieux. En vrai, c’est que chacun avait tellement la crainte de faire du mal à quelqu’un que personne n’osait s’exposer à la souffrance. Et cette crainte du mal remontait à la nuit des temps. Dégun ne savait exactement quand cela avait commencé. Toujours est-il, qu’au fil des générations cette crainte devint une habitude et, petit à petit, cette habitude se transforma en naturel : un naturel humain. Ces humains-là avaient naturellement peur de faire du mal.


Bien entendu, il y eut de temps à autre un quidam qui, échappant à cette nature et s’imaginant qu’il fallait avoir peur de ses voisins, se mettait à gesticuler et à haranguer vertement les passants pour les faire fuir… Voire – mais c’était rare – à jeter quelques pierres sur des promeneurs romantiques. Les gens disaient : « Ce n’est pas de sa faute, peuchère, il est né de travers ! » Et, quand on devait passer devant chez lui par nécessité de parcours, on prenait soin de se couvrir d’un chapeau à larges bords afin de se préserver des jets de pierres. C’est pour cette raison que fut inventé le chapeau à larges bords. À part ça tout allait pour le mieux. Tous les matins étaient une fête. La fête de se lever pour le bonheur d’aller vaquer. Tous les soirs étaient une joie. La joie d’aller se coucher pour le bonheur de s’endormir. Et les gens s’endormaient avec d’autant plus de plaisir qu’ils savaient que le lendemain une nouvelle journée de bonheur les attendait. Les gens étaient heureux sans même avoir l’idée de l’être. Et quand quelqu’un venait à mourir ce n’était jamais par accident ou maladie mais simplement parce qu’il était trop fatigué et trop vieux pour rester éveillé une journée entière. Il mourait donc la nuit, tranquillement, parce qu’il n’avait plus l’idée de se réveiller le matin suivant. Bref, les gens aimaient la vie. À dire vrai ils étaient La Vie.


Mais un jour, vers le milieu de l’après-midi, au moment même où on commençait à sortir de la sieste pour envisager le travail restant à accomplir en cette fin de journée, un bruit étourdissant se fit entendre des quatre coins de la Terre alors qu’une lueur aveuglante envahissait le ciel. Au même instant un vent d’une force inouïe emporta tout sur son passage, les arbres, les habitations, les bancs, les pierres, l’eau des rivières et toute la poussière du monde, jusque dans le ciel.


Ce fut un cataclysme fulgurant et total qui dura sept jours. Le premier jour le soleil disparut derrière la poussière et la nuit tomba en plein jour. Le deuxième jour la poussière retomba, comblant les mers et les océans, les transformant en d’immenses bourbiers. Le troisième jour les poissons et autres animaux aquatiques périrent étouffés. Le quatrième jour ce fut la végétation qui succomba sous la poussière.


Le cinquième jour les animaux terrestres trépassèrent. Le sixième jour les gens ne purent plus résister à l’asphyxie et tous moururent. Le septième jour enfin le silence total envahit la planète et le soleil put refaire son apparition dans le calme et la désolation.


La Terre était devenue une grosse boule uniforme, sans colline, sans vallon. Un monde plat et cotonneux. Cotonneux et gris.

Mais voilà que sous la lumière toute neuve, la Terre se colora suivant des veines tortueuses. Des milliers de couleurs moiraient sous la couche de poussière comme autant de rivières souterraines de glaces immobiles et ondulantes. La planète ressemblait à une pierre précieuse. Et puis, d’un coup, il y eut un frémissement au ras du sol. Un tout petit frémissement sur un tout petit carré de terre. Puis le petit carré devint monticule comme poussé par la montée d’une graine qui germe. Le monticule se fissura et un tout petit bout de museau apparu, puis une tête, puis un petit corps menu et enfin une queue. C’était une souris. Elle resta un moment circonspecte comme étonnée par l’endroit où elle se trouvait. Puis, regardant autour d’elle lentement, longtemps, elle dit :


- Que c’est beau ! Que c’est beau !




Roussillon, le 17 juillet 2006


 
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   xuanvincent   
8/2/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Merci à l'auteur pour ce joli petit conte (j'avais bien apprécié aussi le précédent) !

L'histoire m'a fait penser au début aux Shadocks, puis à la création biblique, sous forme de conte. J'ai surtout apprécié la première partie du conte (avant la création en six-sept jours).

La naissance de la souris, d'une montagne précisément, m'a amusée.

   Menvussa   
8/2/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↓
C'est curieux cette sorte de création à l'envers, cette impression que le tableau un fois parachevé, il faut tout effacer pour recommencer. Un sacré coup de balai.

Un petit conte agréable à lire mais dont la morale n'est peut-être pas si évidente que cela.

   jensairien   
8/2/2009
il a raison xuanvincent c'est l'histoire de la montagne qui accouche d'une souris.
un petit conte qui ne va pas très loin cependant. L'auteur était-il vraiment convaincu par son histoire ?

   Claude   
8/2/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Un monde meurt, un autre nait. C'est une loi de la nature, que l'ancien soit remplacé par le nouveau.

C'est peut-être ça, une montagne qui accouche d'une souris. Mais il arrive que la souris, avec un peu de foi, déplace les montagnes...

   Pistodrake   
9/2/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
petit conte sympa, c'est bien écrit, mais vu les mots utilisés parfois "dégun", "peuchère", publicité mensongère que de prétendre que c'était une terre sans sud ^^.
Je n'ai d'ailleurs pas trop compris le but de ces deux mots régionaux, leur sens dans l'histoire, si c'est un décalage voulu je le trouve trop léger pour ne pas paraître anomalie.
Sinon c'est une jolie petite utopie assez bien évoquée bien que courte avec une fin intéressante.

   Nongag   
11/2/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Un conte qui s'amuse à nos frais... Léger, original, amusant, il se termine en queue de... souris...

Malheureusement.

J'aurais bien aimé la comprendre cette finale.

   masdau   
11/2/2009
je vous conseille d'aller faire un tour à Roussillon, en Provence, et vous comprendrez le sens de ce conte. Sur!

   Anonyme   
17/2/2009
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai apprécié ce conte de la création...La montagne qui accouche d'une souris, soit. Mais paradoxalement, ce n'est pas la morale qui me touche le plus, c'est la description de ce monde idéal, sans frontières, sans souffrance, sans guerre. Et puis, cette idée de la Mort à laquelle je n'avais jamais songé t qui me semble bien réconfortante.

Bref, je préfère la première partie, cette description d'un paradis perdu...

   Brandnew   
8/6/2009
Des images qui méritent qu'on s'y pose, de curieux sens pas aussi évidents que la forme ne laisserait à penser. Personnellement, j'apprécie l'expression simple d'idées complexes, et (heureusement) je ne perce pas encore ce qui s'y cache, difficile donc de donner une note au-delà d'un ressenti et d'un certain appétit.

   Anonyme   
14/6/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Excellente description allégorique d'un paradis perdu.
Quand on survit à un tel cataclysme (ou évènement dramatique),
on mesure à quel point notre place miraculeuse (de petite souris) est dérisoire.
Après une période de grande désolation, on retrouve (mais parfois on découvre) le goût et la beauté de la vie dans toutes les petites choses simples.

C'est beau.... c'est beau.... c'est trop beau !!

   Anonyme   
14/6/2013
Commentaire modéré


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