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Sentimental/Romanesque
Melorane : La brosse à dents
 Publié le 23/07/20  -  11 commentaires  -  3013 caractères  -  113 lectures    Autres textes du même auteur

Chaque jour, j'ai 15 minutes de bonheur.


La brosse à dents


7 h

Bip… Bip…

7 h 02

Ma main atteint le réveil. Je me redresse, me tourne vers toi et comme chaque matin depuis quatre ans je te laisse tes dix minutes supplémentaires de sommeil. Je me lève, ne pouvant te quitter des yeux, je me cogne le genou au coin de l’armoire, tu sais juste là où il y a ce petit creux dessiné au cours du temps. Tu te retournes et je traverse le salon. Mon regard dérive bien malgré lui vers cette photo de nous deux. Tu te souviens ? Celle que l’on avait prise en haut de la tour Eiffel, tu souriais tellement, tu es si beau. Ironiquement, c’est l’un des plus beaux et l’un des pires jours de ma vie. La journée avait été si belle, j’étais tellement sûre que tu allais me poser La question. Mais rien n’est venu, alors j’ai pris mon courage à deux mains, je te l’ai posée et tu as dit non. Je me détourne.

7 h 07

Je passe la porte de la cuisine enfin plutôt le chambranle. D’ailleurs, ça fait plus d’un mois que je te demande de la réparer, mais bien sûr pas une réponse.

7 h 08

J’allume la machine à café, je sors deux tasses et le lait.

Vroum… Vroum…

Accoudée au plan de travail, j’ai une vue dégagée sur l’entrée. Mon long manteau rouge, celui que tu m’as offert pour mon anniversaire, il y a deux ans, est un peu usé maintenant, mais c’est toujours mon préféré. À ses pieds, une paire de chaussures, mes éternelles bottines noires, avec lesquelles j’ai fait tant de trajets jusqu’à chez toi à nos débuts.

Ding.

Je verse la boisson dans nos tasses respectives, la mienne noire avec « I love Paris » en rouge sur le devant, la tienne blanche, avec cette petite entaille sur l’anse due au jour où je l’ai laissée tomber. Je rajoute un peu de lait dans mon café et sors te réveiller.

7 h 11

Je m’arrête dans mon élan, tu es déjà là sur mon fauteuil, celui qui selon tes mots est « aussi vieux que Vercingétorix », mais que pourtant tu adores. Tu te souviens tu voulais l’emmener chez toi, après Paris ? Je pose la tasse sur la table basse. Tu me regardes et ne dis rien. Ça fait deux ans que tu as arrêté de me remercier pour ton café, alors je retourne dans la cuisine boire le mien.

7 h 13

Je me retourne, tu n’es plus dans le fauteuil. Tu as sûrement dû aller le boire dans ton bureau.

7 h 14

Je rejoins la chambre et ouvre le placard. Pourquoi est-ce que la moitié droite est vide ? Qu’importe j’ai des affaires pour la remplir. Je prends un jean, un chemisier blanc, celui en soie et dentelé sur le haut du dos et les épaules, une culotte, un soutien-gorge, couleur chair évidemment, une paire de chaussettes et je me dirige vers la salle de bain. J’allume la douche et me déshabille. Je me glisse sous l’eau.

7 h 15

Mon regard vagabonde et s’arrête sur le miroir devant lequel se tient fièrement ma brosse à dents. Le café commence à faire effet. Mes yeux se baladent sur la console, jusqu’au verre vide, et mes larmes se mêlent à l’eau sur mon visage. Je me souviens tu n’es pas là, plus là. Tu es parti.


 
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   Anonyme   
26/6/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
À partir de "mais bien sûr pas une réponse" je me suis dit que l'Aimé de la narratrice devait être absent. Trajectoire narrative attendue donc en ce qui me concerne, et plutôt bien menée à mon avis, dévoilant peu à peu l'étendue du déni à l'œuvre... jusqu'à la fin et sa révélation que je trouve ratée parce que provenant de la narratrice même : je ne vois pas pourquoi finalement elle recouvre (provisoirement sans doute) sa lucidité.

Je pense que votre texte se clorait de manière bien plus élégante si cette révélation indiscutable provenait d'une perception erronée de la narratrice que le lecteur ne pourrait interpréter que comme une preuve d'égarement. Mais, en tant qu'auteur, peut-être avez-vous souhaité laisser un espoir pour votre personnage d'une évolution favorable, qu'elle se remettra de son traumatisme...

   in-flight   
29/6/2020
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai tout de suite en tête la phrase de Paul Coelho: "Si vous pensez que l'aventure est dangereuse, essayez la routine, elle est mortelle".

Pas grand chose à dire si ce n'est que quiconque a vécu suffisamment en couple sait que ce genre de scènes est monnaie courante dans les ménages. Alors ça touchera une partie du public concerné.

Moi ça ma touché.

Après relecture: on peut aussi imaginer que la narratrice fantasme sur la presence de l'être aimé alors que ce dernier est absent (rupture, mort...). Cela change le message du texte, mais pas son intensité.

   Anonyme   
5/7/2020
 a aimé ce texte 
Un peu
Un texte court, vraiment très court, ce qui fait qu'on se demande rapidement quelle sera la chute. La moitié droite vide du placard l'évente malheureusement avant la fin, tant pis pour la surprise. Plus d'éléments en faveur de la présence de l'autre sur un texte moins court auraient pu apporter plus de suspense... là on se doute de la chute dès le début, où l'autre répond "non" à la fameuse question...

Dommage !

En EL.

   Anonyme   
23/7/2020
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour Mélorane,

Si le thème de la nouvelle, l'absence, me plaît bien, la révélation finale m'a semblé attendue assez tôt dans le récit. Le dialogue intérieur avec l'être aimé m'a gênée je ne sais trop pourquoi ; il vise à rendre l'absent présent dans la conscience de la narratrice comme si de rien n'était mais il me semble peu plausible.
Le texte gagnerait peut être en profondeur si l'on sentait, derrière le déni, sourdre une certaine anxiété et si, à la fin, transparaissait davantage la détresse de la jeune femme. ( pas seulement par les larmes ) .

   placebo   
23/7/2020
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

Un peu mitigé également, la nouvelle semble tendre vers la révélation qu'on peut anticiper à travers les indices, mais aussi je ne comprends pas trop le brouillage des pistes, avec "tu es déjà là sur mon fauteuil", par exemple.
La narratrice a-t-elle un souvenir très réaliste qui flotte devant ses yeux, un reste de rêve qui l'accompagne à son réveil, et qui disparait quand ses yeux se décillent avec le café ?

L'atmosphère est bien rendue à travers l'écriture sinon, les petits gestes quotidiens très réalistes et auxquels on peut se rattacher. Les minutes rythment notre vie matinale…

Bonne continuation,
placebo

   Anonyme   
23/7/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour,

Je ne suis pas à l'aise devant ce texte dont je ne comprends pas la pente.

J'ai bien compris que le thème traité est celui de l'absence mais je ne comprends pas ces tours et ces détours pour exprimer la tristesse de la narratrice.

Ce n'est pas mal écrit (je parle de la qualité de l'expression) mais ce texte est comment dire...insuffisant, trop peu charnel, le souvenir est constamment jalonné par les objets qui jonchent le récit sans véritable consistance et cela ne m'atteint pas.

J'aurais aimé regretter l'absence avec la narratrice, j'aurais aimé que vous me donniez envie de la prendre dans mes bras pour la consoler mais cela ne s'est pas fait, je n'ai pas été ému.

Ce n'est pas bien grave, ce n'est qu'un avis parmi d'autres.

Je note l'expression écrite sans m'attarder au traitement du sujet très insuffisant pour moi.

   IsaD   
23/7/2020
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour Mélorane

La lecture de votre texte m'a fait me poser plusieurs questions.

"mon regard dérive bien malgré lui vers cette photo de nous deux. Tu te souviens ? Celle que l'on avait prise en haut de la tour Eiffel, tu souriais tellement, tu es si beau. Ironiquement, c'est l'un des plus beaux et l'un des pires jours de ma vie"... ensuite " Mais rien n'est venu alors j'ai pris mon courage à deux mains, je te l'ai posée et tu as dit non."

Dès le début, quelque chose m'a gênée. Dans la narration autour de la photo, je me suis imaginée deux personnes jeunes s'aimant passionnément. Or, aussitôt, on arrive à La question (je suppose qu'il s'agit de la demande en mariage puisque visiblement ils vivent déjà ensemble) à laquelle une réponse est donnée : Non.
Pourquoi ? Si l'homme a l'air si heureux (puisqu'il souriait tellement), j'ai du mal à imaginer qu'au fond il n'a aucune envie de vivre à long terme avec la personne avec qui il pose en selfie d'une manière aussi épanouie. Ce "non" résonne donc pour moi comme un couperet, sec et définitif, en totale contradiction avec ce qui précède.

« Je m’arrête dans mon élan, tu es déjà là sur mon fauteuil… » La formulation m’a interpellée. L’homme était supposé être allongé dans le lit, et tout à coup, « le voilà assis sur un fauteuil ». Je n’ai pas bien compris l’intérêt de cette précision (sauf pour amener le fait que ce fauteuil, l’homme voulait l’emporter avec lui, « après Paris », on imagine donc que la rupture fait suite à leur balade sentimentale à Paris.

« Ça fait deux ans que tu as arrêté de me remercier ». Depuis deux ans, la personne prépare le café tous les matins pour une personne qui n’est plus là ? Ca fait long.

« Je prends un jean, un chemisier blanc… une culotte, un soutien-gorge, de couleur chair évidemment » Là je me suis demandée si un indice avait été posé. Pourquoi de couleur chair « évidemment » ? Mais aucune réponse à cette précision…

« Mon regard vagabonde et s’arrête sur le miroir devant lequel se tient fièrement ma brosse à dents ». Je n’ai pas compris pourquoi la brosse à dents se tenait « fièrement »

« Le café commence à faire effet. Mes yeux se baladent sur la console, jusqu’au verre vide… Je me souviens tu n’es pas là, plus là. Tu es parti » En lisant cette fin, j’ai pensé que la personne se réveillait tous les matins dans le déni (depuis deux ans, je réitère, ça fait long quand même) et après avoir bu du café, elle « retrouve ses esprits » pour s’apercevoir qu’elle vit seule.

L’idée était bonne mais j’ai trouvé beaucoup de maladresses pour amener l’histoire là où vous avez voulu aller. J’aurais aimé que les sentiments soient un peu plus détaillés, qu’il y ait un peu plus de profondeur dans le personnage principal. Je pense que cette nouvelle aurait dû être plus longue car je suis arrivée à la fin avec une impression de survol. Dommage.

Par ailleurs, votre écriture est fluide et se lit bien.

Ne prenez pas mal ce que je vous dis. Je trouve qu’Oniris est un site très intéressant pour progresser, c’est pourquoi je propose aussi quelques textes.

   plumette   
23/7/2020
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
le texte est court, comme le moment décrit mais j'ai été gênée par le minutage...
Puis, au cours du récit, assez sensible, j'ai bien vite deviné que la narratrice voulait redonner chair à un absent.
Dès le début, avec l'attente de la demande ( en mariage ? ) on sent le déséquilibre amoureux.

j'ai trouvé bizarre que la "mémoire" ou "la lucidité" lui revienne devant le verre déserté de la brosse à dents. il s'agit certes d'un objet qui dit l'intimité, mais le placard vide d'un côté aurait pu être aussi le déclencheur de la tristesse?

un thème touchant mais un traitement qui ne m'a pas totalement convaincue.

   solo974   
24/7/2020
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Melorane,
J'ai trouvé votre nouvelle plutôt émouvante.
Le titre est par ailleurs incitatif.
Malheureusement, selon moi, la chute perd de son intérêt, dans la mesure où elle est dévoilée - du moins en partie - dès la fin du premier paragraphe :
"Mais rien n’est venu, alors j’ai pris mon courage à deux mains, je te l’ai posée et tu as dit non. Je me détourne."
Bien à vous et à vous relire.

   Corto   
24/7/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour Melorane,

J'aime bien le parti pris de rentrer dans cette histoire comme avec une loupe où chaque minute, chaque geste a sa signification.
Une démarche pointilliste en quelque sorte, comme on dirait en peinture.
Cela sent le réel, le ressenti, où chaque élément participe à construire une ambiance qui se dévoile progressivement.

A partir de cette démarche vous auriez pu étoffer les événements et leur signification. Car ici tout est trop sobre, un peu fruste pour que le lecteur sente monter en lui les mêmes sentiments que vit la narratrice.
La charpente du récit est présente mais il faudrait lui donner du corps pour mieux capter le lecteur.

Pour le final j'aurais préféré une évocation plutôt qu'une explication car le "Je me souviens tu n’es pas là, plus là. Tu es parti" parait inutilement explicatif.

Merci de ce partage.

   Melorane   
25/7/2020


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