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Humour/Détente
moschen : Autoportrait
 Publié le 08/05/14  -  11 commentaires  -  5623 caractères  -  129 lectures    Autres textes du même auteur

Autoportrait...


Autoportrait


J'ai la lèvre charnue, pulpeuse diront les unes. Le front sillonné de mille rides qui me confèrent ce teint ténébreux, sévère, obscur mais bien loin de ces crépuscules où se bousculent mes soucis. La largeur de mon mufle le dispute à la taille de mon sourire. Le démiurge en ce lieu aura fait bel effort pour composer une truffe, un nez fort, j'en suis fier. Le milieu cartilagineux de cet appendice serait en proportion d'une coudée au triple de la largeur harmonieuse des ailes nasales dont les veinules exhibent galamment un réseau de sang gorgé. J'ai donc la capacité d'inhaler un volume de souffle en rapport sept fois supérieur à la normale. Je pourrais m'en flatter, mais une humilité naturelle me contraint à ne point trop en faire. Mes dents sont saines, mes gencives pleines, vu mon grand âge ce serait de ne point les avoir trop gâtées de ces sucreries qui corrompent l'âme en poussant à la paresse, paresse de la mastication, voilà le tort nommé.

Une poitrine, un coffre, une armoire que dis-je, fort semblable à celle des chevaux de bois et un air volubile qui s'y engouffre et m'enorgueillit les sangs, à tel point qu'on s’époumone au passage. J'aspire le respect. En expirant, je m'exhibe, mais d'inspiration nul besoin. Cela rentre par le haut et sort pas le bas, dans un cycle immuable en tout point semblable à celui qui parcourt mes veines. Mon corps apprécie les cercles, les sphères enfin toutes ces formes qui tournent une danse, genre de transe que l'on ne souhaiterait jamais devoir contrôler. De lui-même, il gonfle naturel, il pompe et cogne et ma trogne sans vergogne lui ressemble. Le visage est sanguin. Le rapport de mes chairs au poids de mes os est en proportion de l'eau aux sels minéraux qui nourrissent le chêne.

Si ma peau est mate, elle vire tout de même à la candeur d'une peau d'ange. Étrange. Certains disent que le sang mêlé y serait pour quelque chose. Ceux-là ne se trompent point mais que faire de cette affirmation péremptoire. L'imbécile se reconnaît à la taille des vérités qui lui obstruent le paysage. Mes cheveux sont crépus. Cela est un signe. Mes ancêtres ont été soumis. Ils auraient prononcés des oui à l'infini. Ce déséquilibre en grand nombre qui tache et fâche à la fois, me fait entrer en des sourdes colères, des rages d'enfants d'où jaillissent toutes les négations retenues qui subitement se disputent une sortie hasardeuse. Trop de négations refoulées, cela n'est pas banal. Que le oui l'emporte, cela n'est point un malheur, à l'endroit de certains, au moment adéquat, il faut un non calme, posé, raisonné et pesé. Si l'esprit s'en trouve enhardi, nul doute que le volcan qui se déchaîne, relâchera un beau jour sa peine. Un non qui s'impose sans raison n'est en rien recommandable.

J'ai les bourses boursouflées. Cela pourrait choquer si une intention transparaissait en lieu et place du simple constat anatomique. Mais ici rien de la sorte. Les peaux se contractent et se dilatent, les gonades vivantes montent et descendent en un huit éternel, tel un boulier voilà le pareil. Seule la femme peut y remédier, mais sans excès. Je les ai reçues en héritage et je les ai acceptées. Les gènes, les astres et une heureuse providence, se sont penchés sur mon pucelage. De ces atours dont je me félicite et qu'il me faut bonifier. Ils sont ainsi bien plus à mon avantage. Il suffit stupidement de les voir tels qu'ils sont et d'en faire bon usage.

Tout cela ne serait qu'un verni infime, un de ces glacis que l'on détruit d'un bout d'ongle, de ces ongles dont je me ronge les sangs, les nuits d'insomnie quand le rêve m'oublie. Les pensées qui fuient, l'inquiétude qui me gagne. Tourne en rond, tourne sur toi-même, autour de ton amour, tourne et le tournis t'emporte.

Je pourrais paraître prétentieux dans cet exercice solitaire que je veux honnête. Voilà mon ambition. Je sais que cette tâche est cruelle, que tendre à se connaître est bien vaniteux. Que l'esprit fuit. Mon enfance fut heureuse, de ces bonheurs qui inondent une existence. Des grâces en dons. Naïf et pathétique, je serais entré en paternité sans y avoir été préparé. J'ai omis, j'ai sauté, occulté cette époque où l'on renie et son père et son âme. Arrivé à l'âge mûr, je me récuse. Aussi ai-je encore un travail à mener, une lutte inférieure, une de ces batailles dont on ne sort pas immunisé. Est-ce que je regarde toujours de l'avant ? Ou bien est-ce que des pensées nuisibles, des idées pernicieuses me tirent vers mon passé et me rapproche du fond. Négro spiritual. Nègre par l'écrit, et spirituel par les vapeurs d'alcool qui flottent dans les alcôves. Imbibé, conservé dans la saumure, suis-je satisfait de mon sort ? Ai-je un ego démesuré ? Et la reconnaissance qui me serait due ? Oui sans doute. Ou bien me tairais-je définitivement, tout simplement. Si j'écris vainement, c'est donc qu'un mal me ronge. Si j'étais apaisé, tel que je le clame, en mon for intérieur, aurais-je besoin de le crier ? Une lutte de titan, voilà ce qui me hante. Nul ne saurait en prédire la fin. Rien n'y fait, tout bouillonne. Si l'on m'avait aimé, moi l'entre-deux, et si on m'aime encore qu'on me le dise alors. Le silence un jour recouvrira à jamais le tombeau de ces mots que je foule. Cette voix comme une folie passagère trahit un désarroi. Je me consume. Ma vie entière je vais la consacrer à cette quête du beau, de l'éternité. Sous toutes ses formes, le bonheur joint le bien qui me procure cette joie ineffable que je vais répandre. De quel moule, suis-je fait ? Où est cette âme qui saurait me guider, m'accompagner ? Ainsi armé, sur le chemin, pour ce voyage, je marcherai le cœur léger.


 
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   fergas   
14/4/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Voilà un texte qui interroge. J'ai pensé successivement à un singe, à un poulpe, à un phoque, à un éléphant, et même à une automobile, c’est dire comment l’auteur nous mène par le bout du nez, que j’ai aussi cartilagineux.

Peut-être ne faut-il pas chercher de sens, et se laisser bercer par les paroles et les états d’âme du héros ?

La qualité d’écriture est bonne, la lecture est aisée. Ne boudons pas notre plaisir à parcourir ce texte dépaysant.

Je ne saurai donc pas qui est ce porteur de "lèvre charnue", mais peut-être un autre Onirien plus futé que moi me vendra la mèche.

   Anonyme   
21/4/2014
 a aimé ce texte 
Bien
C'est un pari osé que de tenter un auto-portrait par l'écriture, comme vous dites justement « tendre à se connaître est bien vaniteux ». En effet, grand est le risque de tomber dans une forme de narcissisme. Heureusement vous ne vous en sortez pas trop mal grâce à une pointe d'humour et à un style particulièrement dense et truculent. Vos phrases alambiquées ne sont pas toujours faciles à décrypter mais ont le mérite de jouer avec les mots : « Le milieu cartilagineux de cet appendice serait en proportion d'une coudée au triple de la largeur harmonieuse des ailes nasales dont les veinules exhibent galamment un réseau de sang gorgé ».

Davantage que la description d'une personne, nous assistons à un exercice de style. II est dommage néanmoins que vous ayez tendance à forcer le trait, sans doute par crainte de cette auto-célébration. Une simplification du vocabulaire qui bascule souvent vers la grandiloquence n'aurait pas nuit à votre propos.

La dernière partie de votre texte est plus portée sur des considérations existentielles où je retiens ces deux remarques qui me parlent : « Si j'écris vainement, c'est donc qu'un mal me ronge. Si j'étais apaisé, tel que je le clame, en mon for intérieur, aurais-je besoin de le crier ? ».

   Lulu   
8/5/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Se dire soi-même dans un récit n'est pas aisé, mais c'est un pari, là, bien réussi. Bravo. L'écriture est simple et agréable, déchargée de toute lourdeur narcissique.
J'ai bien aimé l'idée de la description physique. Je l'ai trouvée originale. En lisant le titre, en effet, je ne m'attendais qu'à un autoportrait relatif aux traits marquants de votre personnalité. Nous avons eu droit au deux, tant mieux !
Enfin, l'humour est ici très subtil.

   Robot   
8/5/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Le succés de ce texte c'est d'avoir réussit finalement à se cacher subtilement derrière un autoportrait. Une écriture dynamique qui ne laisse pas de place à l'ennui. C'est déjà quelque chose.

   placebo   
8/5/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Pas très emballé par le résultat. C'est difficile je le reconnais. Et il y a des points de vue atypiques, du vocabulaire. Mais je trouve l'ensemble trop froid, sous couvert de portrait et d'humour je ne sens personne, en particulier dans le dernier paragraphe.

Bonne continuation,
placebo

   jaimme   
9/5/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour moschen (le pseudo a-t-il un rapport avec l'autoportrait ci-dessus????),
J'ai pris un grand plaisir votre texte. Une nouvelle c'est un fond et/ou une forme. Quand l'un des deux aspects brille l'autre a moins d'importance. C’est vrai qu'on pourrait reprocher le manque de fond, mais je n'en suis même pas persuadé.
Nous sommes tous des métis.
En tout cas la forme est splendide. C'est magnifiquement ciselé, et il est bien rare d'avoir un rythme de lecture, une musicalité et une richesse en même temps dans l'écriture. La longueur est adaptée au propos.
Le titre serait, en revanche, à améliorer. Un peu plus accrocheur sans doute, ou plus poétique.
Quand on est à ce niveau je n'ai pas envie de chercher de défauts (il y en a toujours, chez tous les auteurs publiés).
Merci et au plaisir de vous lire à nouveau.

Jaimme

   Anonyme   
9/5/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Un texte.

C'est UN texte pour de vrai.
Pas une nouvelle, un essai plutôt. Un essai sur "se voir vraiment", oser se dire, oser se dévoiler et dire ce que l'on pense de ce strip tease...

Très bien écrit, avec vivacité, les idées ricochent sur la pensée, s'éclaboussent l'une l'autre, s'égarent, reviennent à la surface puis coulent à nouveau.

L'humour est là, une certaine cruauté aussi, une lucidité sans apitoiement mais avec un attendrissement par effleurements et cette façon d'écrire en apparence contradictoire relance l'intérêt.

Un descriptif de votre attribut nasal splendide ! Je ne parle pas de vos autres "atouts" physiologiques...

Bravo et merci de cette leçon d'écriture et de vérité.

   marogne   
9/5/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Et bien quelle tristesse...

L'auteur nous ballade dans ce presque vide, cet entre deux. On crois partir pour une lecture plaisante et on trébuche sur la douleur. Bel exercice et réussi.

Mais en tout cas, et même si j'aurais sans doute préfère une écriture moins ampoulé, un texte plaisant à lire sur plusieurs plans.

Marogne

   in-flight   
10/5/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

Tout d'abord le texte gagnerait à être plus aéré sur la forme afin de faciliter la lecture.

Bon, je crois comprendre que ce récit illustre une sorte de quête identitaire du métis (ses racines et son devenir). En tout cas plusieurs indices me mènent à cette conclusion.
J'ai trouvé le style très ampoulé et finalement je ne vois pas très bien la finalité d'un tel texte. Je vois encore moins ou est situé l'humour, à aucun moment je n'ai franchement rigolé. Catégoriser des textes n'est pas le plus important certes mais tout de même, franchement déçu à ce niveau là. D'ailleurs, le premier paragraphe relatant les proportions du corps façon "Homme de Vitruve" aurait vraiment pu faire un passage humoristique.

"les gonades vivantes montent et descendent en un huit éternel" --> passage burnesque... euh burlesque mais gare à la torsion testiculaire avec ces tours de manège.

J'ai trouvé une belle réjouissance dans ce texte: "L'imbécile se reconnaît à la taille des vérités qui lui obstruent le paysage." --> Superbe!

Bonne continuation.

   carbona   
15/10/2015
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Bonjour,

Je n'ai pas accroché à votre texte. Votre prose m'a laissée de marbre. Quelques éléments clés intéressants : la bouche, le nez, les bourses mais trop de passages opaques pour moi et le dernier paragraphe qui part en considérations psychologiques /philosophiques me laisse en plan.

Désolée.

Merci pour votre texte.

   jfmoods   
14/5/2024
Au fil de la lecture, on peut remarquer...

- deux fautes d'accord (« Ils auraient prononcés », « me rapproche »)
- des virgules manquantes (« Cette voix comme une folie passagère trahit un désarroi. », « Ma vie entière je vais la consacrer à cette quête du beau... »)
- des virgules en surnombre (« Ce déséquilibre en grand nombre qui tache et fâche à la fois, me fait entrer en des sourdes colères... », « … nul doute que le volcan qui se déchaîne, relâchera un beau jour sa peine... », « … les astres et une heureuse providence, se sont penchés... », « De quel moule, suis-je fait ? »)
- deux conditionnels présents qui présentent plutôt l'aspect de futurs simples (« je serais entré en paternité sans y avoir été préparé », « Ou bien me tairais-je définitivement, tout simplement »)
- un futur simple qui présente plutôt l'aspect d'un conditionnel présent (« … pour ce voyage, je marcherai le cœur léger. »)

Je suggère deux points ici...

« … tel un boulier : voilà le pareil. »

Un grand merci à Louis pour les échanges toujours riches en mp ! Sans sa disponibilité, sa générosité, sans son regard d'aigle, j'aurais très probablement renoncé à pousser plus avant l'étude de ce texte fascinant.

I) Une prise à parti du lecteur

1) La reconnaissance des aspérités d'un pacte autobiographique

Plusieurs obstacles se dressent devant celui qui, en pleine conscience, se livre au regard des autres. En premier lieu, on trouve l'orgueil mal placé. Le locuteur espère bien, par une exigence clairement marquée, parvenir à se départir de cette tentation trop facile (« Je pourrais paraître prétentieux dans cet exercice solitaire que je veux honnête. »). Il y a, ensuite, le questionnement sur soi, le caractère insatisfaisant, insaisissable de la démarche introspective (« tendre à se connaître est bien vaniteux. L'esprit fuit. »). Enfin, au-delà de toute la complexité d'une quête, au delà de la traversée des apparences, se niche la certitude que l'oubli s'abattra tôt ou tard sur l'aveu que l'on ose formuler (« Le silence un jour recouvrira à jamais le tombeau de ces mots que je foule. »).

2) La nécessité de démêler l'écheveau intime

Une phrase pose, en termes rudes, la problématique (« Aussi ai-je encore un travail à mener, une lutte inférieure, une de ces batailles dont on ne sort pas immunisé. »). Pas moins de sept questions illustrent l'aridité du rapport à soi. Quatre questions fermées (« Est-ce que je regarde toujours de l'avant ? », « suis-je satisfait de mon sort ? Ai-je un ego démesuré ? », « aurais-je besoin de le crier ? »), deux ouvertes (« De quel moule suis-je fait ? Où est cette âme qui saurait me guider, m'accompagner ? »), une question insoluble, comme jetée dans le vide (« Et la reconnaissance qui me serait due ? »). Sans compter ces deux interrogatives qui échouent en affirmatives (« Ou bien est-ce que des pensées nuisibles, des idées pernicieuses me tirent vers mon passé et me rapprochent du fond. », « Ou bien me tairais-je définitivement, tout simplement. »).

II) Une quête de l'identité

1) Des racines douloureuses

Un contexte familial est brossé (« Mes ancêtres ont été soumis. »). L'évocation d'un chant (« Négro spiritual ») renvoie à l'époque de la traite négrière, de l'esclavage du peuple noir. Un événement traumatisant, dont l'ombre inquiétante semble s'esquisser (« les vapeurs d'alcool qui flottent dans les alcôves »), a fait du locuteur un métis (« ma peau est mate », « Certains disent que le sang mêlé y serait pour quelque chose. », « moi, l'entre deux »). Le terreau douloureux de cette naissance, longtemps tenu à distance (« Mon enfance fut heureuse », « Naïf et pathétique, je serais entré en paternité sans y avoir été préparé. »), s'impose avec d'autant plus de force aujourd'hui (« J'ai omis, j'ai sauté, occulté cette époque où l'on renie et son père et son âme. Arrivé à l'âge mûr, je me récuse. »).

2) La recherche d'un équilibre

Le langage est sommé d'investir le champ laissé en friche de l'identité (expression : « Nègre par l'écrit »). Le locuteur se scrute, obsédé par la démesure (« mon mufle le dispute à la taille de mon sourire », « Le milieu cartilagineux de cet appendice serait en proportion d'une coudée au triple de la largeur harmonieuse des ailes nasales », « un volume de souffle en rapport sept fois supérieur à la normale », « Le rapport de mes chairs au poids de mes os est en proportion de l'eau aux sels minéraux qui nourrissent le chêne »), cherchant à rétablir un équilibre (« Ils auraient prononcé des oui à l'infini » / « il faut un non calme, posé, raisonné et pesé. ») qui sera le gage de l'acceptation de soi, d'un rapport au monde enfin apaisé, pacifié (« Ma vie entière je vais la consacrer à cette quête du beau, de l'éternité. »).

Merci pour ce partage !


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