Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Brèves littéraires
Myndie : Moesko Island
 Publié le 25/01/25  -  8 commentaires  -  2071 caractères  -  145 lectures    Autres textes du même auteur

« Toutes les eaux sont couleur de noyade. » Michel Cioran


Moesko Island


Mieux valait la folie. Devenir cinglée. Entrer dedans de plein fouet, s'y jeter corps et âme comme on entre en religion : par conviction profonde, par attrait viscéral. C'était un appel. C'était l'ombre de Nadja qui flottait au-dessus d'elle depuis qu'elle avait 16 ans mais elle ne le savait pas encore. Cette certitude, si latente qu'elle ne lui était jamais apparue autrement que par flashes, n'avait cessé de la hanter au fil des années.

Ou alors elle partirait. Elle s'enfoncerait. Tellement loin, tellement profond qu'on ne la reverrait plus jamais. De là viendrait son salut, elle l'avait toujours pressenti. Cette pensée ne l'effrayait pas car elle s'était lourdement fourvoyée en s'entêtant sur un chemin qui n'était pas le sien.

Parfois elle regardait les enfants bouger, vivre leur vie d'enfants ; elle se surprenait alors à écarquiller les yeux, comme s'il avait fallu qu'elle se pinçât pour admettre que, oui, ces merveilles incroyables, miraculeuses, venaient bien d'elle, faisaient partie d'elle. C'était comme si, brusquement, elle reprenait pied. Mais en vérité, elle ne faisait que reprendre son souffle avant de plonger à nouveau. Est-ce ainsi que font les gens ? Où est la clef ?

Ce présent avait été désiré, fabriqué en dépit de tout, en dépit de son bon sens. Alors que tout en elle lui criait d'inverser le mouvement. Quand les symptômes étaient apparus, elle aurait dû y prendre garde et saisir le message au vol. Oui, mais non. Elle était passée outre, aveuglément portée par son espoir de ressembler aux autres, d'être dans le rang, elle qui virevoussait aux antipodes de leur monde. Mais qu'y faisait-elle donc, dans leur quotidien ancré dans l'absurde et le mensonge ?

J'ai le droit de le faire et personne n'a celui de me juger. Une pensée l'effleura, un souvenir ; lui déjà frappé par le mal infamant et sordide, déjà talonné par l'urgence, l'imminence du départ, lui qui se sentait si vivant.

Elle ressentait exactement le contraire.

Je ne me sens pas vivante ; le monde est simplement posé là autour de moi, sans que j'y participe…


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   Cyrill   
25/1/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
J’ai lu un texte qui a des résonances particulières en moi. Je retiens de mes petites recherches que "Moesko Island", titre d’un film d’horreur, est une île imaginaire. Peut-être faut-il y voir l'intériorité, la part de folie de la protagoniste.
D'autant qu'apparaît le prénom de "Nadja", titre aussi d'un récit d’André Breton, et personnage éponyme, qui souffre de désordres mentaux. Elle-même, la narratrice, n’a pas de prénom. C’est remarquable alors qu’on parle de maladie mentale. Elle.
Ici, le récit de vie s’attache à explorer ses dispositions d'esprit, de celles qui sont déterminantes. On nous décrit le moment charnière, le choix qui a conduit à ce qu’elle est aujourd’hui, avec les sentiments qui s’y rattachent.
J’apprécie particulièrement que soit posé ce profond malaise social, celui qui lui fait adopter des comportements adaptés pour donner le change, qui l’a fait choisir une vie de normalité, des enfants. As If. Comme si elle était cette femme-là, « aveuglément portée par son espoir de ressembler aux autres, d'être dans le rang ».
Entrer en folie « comme on entre en religion : par conviction profonde, par attrait viscéral. » : j’aime beaucoup cette proposition, même si elle défie la réalité de ce qu’on connaît de la maladie mentale. Il y a du romantisme dans cet appel, la folie est vécue au travers de lectures, même si la souffrance de ne pas appartenir au monde est bien réelle.
J’avoue ne pas trop savoir comment intégrer le souvenir, ce « lui » évoqué à la fin, sinon qu’il s’agissait d’un qui n’a pas fait de concessions à la normalité. Il lui permet de mieux cerner ce qu’elle ressent, entre vie et mort.
Bravo pour cette plongée dans les affres de la conscience.

édit : je passe probablement à côté de quelque chose en ne connaissant pas ce film qui donne le titre à ton récit, Myndie. J'en suis désolé :-/

   Vincente   
25/1/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Le terrible état des lieux cérébral de cette femme étreint le lecteur dans cette brève où s'exprime en direct, sans faux-fuyant rhétorique un mal-être viscéral, irrépressible, toujours sous-jacent, prêt à rejaillir même dans les moments les plus joyeux comme dans les plus anodins.
Là, sous une psyché qui ne cherche en rien à "cultiver" une fragilité qui pourrait dans ses aveux lui servir d'appel à l'aide, voire de justification pour se morfondre dans un rôle de victime, le personnage affiche sans complexe ce fond de pensée qui l'obsède et lui laisse toujours vacante la réponse à cette question : "Où est la clef ?", comment "font les gens" devant ce précipice omniprésent devant elle ?

J'ai trouvé très convaincante l'expression où, dans une formulation portée par un narrateur omniscient, se révèlent les mots/maux du personnage lui-même comme s'il s'adressait directement au lecteur. Cette fusion induite par l'écriture opère en peu de phrases une proximité qui porte à l'empathie et reporte avec prégnance sur lui l'inquiétante douleur de vivre avec un tel lourd fardeau.
Ce qui peut rassurer, mais sans libérer plus que cela, c'est que le malaise se contient ici dans un stoïque renoncement, ultime sagesse face à son impériosité, et d'accepter que "le monde [soit] simplement posé là autour de [elle], sans qu'[elle] y participe…".

   Dimou   
25/1/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
La technicité saute aux yeux : Un texte saisissant presque plus par son tenant que sa teneur : par ses phrases courtes et percutantes. Pas de superfetacie lexicale. La ponctuation est à sa bonne place, comme des cordes tendues à la perfection sur un ring, en le sens que peut-être l'écrivaine l'a voulue très impactante, pour souder le propos. Elle ne nous laisse pas le temps de reprendre notre souffle, tel la narratrice suffocant en son monde, on s'étouffe, mais à-demi. Le talent d'écriture déployé sera notre bulle d'air. Point d'échappatoire pour nous autres lecteurs. À l'image de ton personnage. Je te livre mon ressenti après deux lectures Myndie c'est comme c'est. Je tente ma chance quoi.

Texte court, amples sensations. Bravo à toi, merci du partage.

Bon week-end Myndie

   Cristale   
26/1/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Myndie,

Vivre une vie qui n'aurait pas dû être la sienne "pour entrer dans le moule", c'est aller à l'encontre de sa propre nature.
Mais la société n'accepte pas la "différence" alors, entrer en folie "comme on entre en religion" semble la seule issue.
Quelle tristesse d'observer sa vie, ses enfants, avec la conscience de l'avoir vécue comme madame tout le monde : "Alors que tout en elle lui criait d'inverser le mouvement."

Quand on ne peut plus déconstruire il ne reste qu'à vivre dans ses ruines mentales.

"J'ai le droit de le faire et personne n'a celui de me juger."
Si seulement cela était possible...

La dernière phrase est terrible.

De belles et fortes images formulées clairement ont rendue ma lecture agréable, lecture que j'ai interprétée en oubliant le titre. Ce format court me convient bien.

Bravo et merci Myndie.

   Pouet   
27/1/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Slt,

il y a la narratrice et puis il y a ce "lui", probablement le compagnon dont on (je) imagine le suicide, peut-être lors d'une phase maniaque et/ou lors d'un "raptus", cette impulsion paroxystique, violente crise psychologique, à la limite de l’acte volontaire et du réflexe.
La "folie" est un vaste sujet , peut-on y "entrer" volontairement, peut-être, je ne sais pas.
Toujours est-il que la souffrance profonde peut se mouvoir en voile, en filtre distordant de la réalité.
Au-delà de la démence, la dépression mélancolique, ce que m'évoque les mots ici, s'assimile à un désespoir insondable, à un tunnel interminable dont on ne voit, par définition, ni fin, ni petite lueur claudiquant à sa sortie.
La narratrice semble n'exister que par procuration, elle se voit posée là, sur les rives de la réalité, sans pouvoir plonger dans l'océan de l'existence.
Elle, sur son îlot de triste.
Mais. Nadja, de "nadesja" qui signifie en russe "espérance", ce passage "... Tu écriras un roman sur moi. Je t'assure. Ne dis pas non. Prends garde : tout s'affaiblit, tout disparaît. De nous il faut que quelque chose reste."
Demeure alors les mots, se perdre dans l'expression de l'inexprimable. Pour, un peu, se retrouver.
Se distraire. De soi-même et du monde. C'est un néant dont on émerge sans le savoir.

   Lil   
27/1/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Un texte fort, poétique qui reflète une angoisse profonde face au monde. La référence à Nadja dès les premières lignes montre la folie non comme un mal mais comme une délivrance.
La suite prône un départ quasi définitif.
Seuls les enfants parviennent à retenir (mais si temporairement qu'on sent venir le moment le moment où ils n'y parviendront plus) dans le réel.
Ce texte je l'ai lu et relu plusieurs fois car il est très universel et pose des questions quasi existentielles : Faut il se conformer à un quotidien insatisfaisant (absurde et ancré dans le mensonge) ou se laisser dériver vers un autre monde plus attirant, en suivant son instinct
J'ai apprécié l'écriture avec de phrases fortes, poétiques et qui claquent.
La référence à "lui" est très énigmatique (mort et qui se sentait si vivant ?) et le "Je ne me sens pas vivante" m'a laissé un gout très amer.
Merci beaucoup

   Vilmon   
28/1/2025
trouve l'écriture
convenable
et
n'aime pas
Bonjour,
Contrairement aux autres commentaires, désolé, je n’ai pas vraiment aimé. C’est flou, c’est redondant (pour un texte court en plus) et ça ne tient que dans un seul instant du moment, comme une réflexion flash sans la profondeur de la réflexion, comme un dégout subit sans explicite raison. De quelle différence parle-t-on ? Qui sont ces enfants, en quoi le fait qu’ils grouillent est mauvais ? C’est qui lui, d’où vient-il, en quoi faut-il le blâmer ? Pourquoi faire porter la faute au monde entier ? Pourquoi jeter le bébé avec l’eau du bain ? Pour moi, ce n’est qu’un tout petit éclat de verre du miroir brisé de la vie du personnage, une part insuffisante pour dresser un portrait complet de son vécu et de pouvoir partager sa peine au travers de ma lecture. Ce commentaire rejoint un peu ce court texte puisqu’il n’entre pas dans le moule et on va le mépriser pour cette raison.
Vilmon

   baldr   
29/1/2025
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Bonjour Myndie,

Il me semble que le scénario est remplacé par un commentaire ou une analyse de celui-ci, un ressenti sur la vie plutôt que l'histoire d'une vie. Quel est ce chemin où elle s'est fourvoyée ? En quoi s'enfoncerait-elle ? Par ailleurs, je n'ai pas compris si Nadja choisissait la folie ("Mieux valait la folie") ou si elle avait une "conviction profonde". Il faut dire que lorsqu'on bascule dans la folie, ce n'est par raison.

Je ne comprends pas : "Est-ce ainsi que font les gens ?" Il y a un problème de structure du discours car il n'est pas indiqué que les gens fassent quelque chose : simplement Nadja regarde des enfants. Peut-être l'avez-vous indiqué dans une version précédente de ce texte et que vous l'avez effacé, sans le remplacer par quelque chose.

"Leur quotidien ancré dans l'absurde et le mensonge" : c'est un programme narratif intéressant, une critique sociale riche de potentialités mais vous vous contentez de l'évoquez comme dans un commentaire.

"Lui qui se sentait si vivant" : qui ça ? Le départ se sent vivant ? Le mal infamant ?

Bon, ce texte est difficile à évaluer, car ce n'est pas une nouvelle, ni je pense un poème en prose car alors il serait beaucoup plus écrit.


Oniris Copyright © 2007-2025