Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Aventure/Epopée
Neojamin : Noctambulesque
 Publié le 24/01/15  -  16 commentaires  -  10992 caractères  -  149 lectures    Autres textes du même auteur

Ce soir-là, j'attendais sur le bord d'une route. C'était devenu une habitude. J'avais appris à me sentir mieux ici qu'ailleurs. Aussitôt que je quittais ma routine, c'était comme si je respirais de nouveau. La vie, la vraie, c'était le départ, la route, le mouvement.


Noctambulesque


Ce soir-là succédait à une longue échappée solitaire dans les terres inconnues du Nord de l'Afrique. Après avoir déambulé dans les souks, les rues bondées de monde, les autoroutes bruyantes, je m'étais soudainement retrouvé en bordure de civilisation. Derrière moi, un tapis de lumières artificielles s'étalait jusqu'à l'horizon. Devant moi, un manteau d'encre recouvrait le désert et dans le ciel brillait un milliard d'étoiles.

J'attendais sous un réverbère. La patience je l'avais apprise de force, sur la route. L'espoir n'était jamais vain, je le savais. Il me fallait parfois attendre tout le jour mais infailliblement, une voiture s'arrêtait.


Ce soir-là pourtant, je ressentis comme une certaine impatience me ronger de l'intérieur. Planté sous le halo du réverbère, comme attaché d'un fil à cette civilisation qui traînait derrière moi, je scrutais l'obscurité, cherchant l'inconnu. Je me sentais comme aspiré, l'aventure me happait. Je n'ai pas hésité longtemps, un dernier coup d'œil sur ces cubes de bétons disgracieux, ces conteneurs débordant d'ordures, ces lumières trop jaunes pour la nuit et je me suis mis en marche.

Je ne sais pas trop combien de temps il m'a fallu pour quitter le monde. Je ne voyais que la route qui scintillait sous les étoiles. Le halo de la ville était à peine perceptible au loin. J'étais quasiment seul. Quelques voitures passaient de temps en temps, je levais mon pouce, machinalement, vainement, sachant que ce bref éclairage des phares ne suffirait pas pour attirer la pitié d'un conducteur. De fait, peu m'importait qu'un véhicule s'arrêtât ou non. Je marchais dans la nuit et j'étais bien.

Plus j'avançais et plus le flux de voitures diminuait, les bruits de moteur s'espaçaient pour enfin disparaître, le silence reprenait ses droits, pas un souffle de vent. À l'horizon, le désert se confondait dans la nuit.

Puis, j'ai distingué une lueur vaciller dans l'inconnu, droit devant moi. J'ai accéléré le pas et j'ai discerné comme une ampoule nue qui émettait un éclair de lumière. Elle était accrochée à un lampadaire d'environ un mètre cinquante, lui-même relié par un fil à une petite maison esseulée sur le bord de la route. Je me suis approché, un bruit de courroie rythmait ma marche. J'ai toqué et ce fut de nouveau le silence. La lumière a faibli, puis s'est éteinte.

"Entrez", a crié une voix rauque de l'intérieur. J'ai ouvert la porte. Le grincement a repris, la lumière a clignoté puis s'est rétablie, révélant un homme qui pédalait tranquillement sur un vélo d'intérieur. Sa cadence était régulière et souple. Il avait la mine joyeuse malgré ses rides. Il portait une longue toge bleue qui lui couvrait tout le corps. Il m'a fait de grands yeux comme s'il était étonné de me voir et me salua.


– Bien le bonjour ! Vous êtes perdu ?

– Non, répondis-je instinctivement.

– Ah, tant mieux. Je ne vois pas beaucoup de monde par ici ! Tu viens d'où ?

– De la ville.

– Et que fais-tu par ici ?

– Je marche… j'attendais et puis, j'en avais marre d'attendre.


Les muscles saillants de ses bras luisaient à la lumière de la lucarne, son visage tout en sueur rayonnait.


– Et vous qu'est-ce que vous faites ?

– Je pédale.

– Et… pourquoi ?

– Pour faire de la lumière !

– Mais… il n'y a personne ici.


Il ralentit la cadence et planta son doux regard dans le mien.


– Tu es là toi non ?

– Euh… oui.

– Alors c'est pour toi que je pédale !


Il accéléra sensiblement la cadence. La lumière s'accentua et je pus deviner un lavabo derrière lui à côté d'un hamac. Sur le mur, une peinture représentait le désert au coucher du soleil. J'ai senti que le moment était venu de me retirer.

Lorsque j'eus marché une bonne demi-heure, je me suis retourné. L'ampoule ne représentait plus qu'un point lumineux à l'horizon. Le vent s'était levé et elle oscillait au lointain, comme un phare en pleine mer.

J'ai marché un peu plus longtemps. L'obscurité s'était de nouveau emparée de la route. J'essayais de trouver une étoile à suivre mais la Terre tournait légèrement trop vite ou peut-être que c'était la route qui s'inclinait légèrement sur la gauche. Le fait est que dès que j'en choisissais une, je débordais sur le sable et devais en choisir une autre pour continuer sur la route. Je n'avais vu aucun véhicule depuis ma rencontre avec le cycliste. Aucune idée de l'heure, je n'avais plus faim, pas sommeil, je me sentais capable de traverser le monde.

J'ai continué dans la nuit noire jusqu'à ce que je distingue une ombre au loin. Pas sur la route mais dans le désert. Cette ombre semblait se balancer avec le vent, dans les airs, suspendue à quelques mètres au-dessus du sol. En avançant, je parvins peu à peu à distinguer des poteaux de bois plantés à intervalles réguliers. Un fil les reliait les uns aux autres. Arrivé au niveau de l'un d'eux, je m'arrêtai et plissai les yeux pour identifier cette ombre qui s'agitait. Après un instant d'observation, j'en conclus que c'était un être humain qui tenait une sorte de perche. Il s'approchait de moi et semblait danser sur le fil. Bientôt il arriva à ma hauteur. La lune était maintenant haute dans le ciel, à quelques jours de sa grosseur maximale, elle projetait une lumière blafarde. Le funambule se recroquevilla sur le haut du poteau et m'interpella :


– Hé en bas ! Bonsoir !


Je demeurai sans voix, cherchant à imposer quelques explications sur ce phénomène qui me saluait.


– Je ne pensais pas croiser quelqu'un à cette heure-là ! À croire que je ne suis pas le seul fou par ici ! dit-il en éclatant de rire, un rire joyeux et puissant qui résonnait dans l'immensité.

– Qu'est-ce que tu fais ? demandai-je finalement.

– Je me présente, Raphaël de la Souche, funambule émérite, explorateur de l'inconnu, repoussoir de limites… humain, avant tout !

Enchanté !


Je suis resté sans voix à regarder ce monsieur filigrane qui ne semblait pas peser plus qu'un enfant.


– Je traverse le désert sur un fil. Ça ne s'est encore jamais fait et étant né pour braver l'impensable et démontrer au monde que l'impossible n'est que vulgaire création humaine, j'ai décidé de m'atteler à cette tâche.

– Oh ! Tout le désert ? me risquai-je.

– Bien entendu, je ne fais pas les choses à moitié.

– Mais c'est impos…

– Taratata ! Oh, je te comprends, nous sommes éduqués pour croire en cette chimère. Cependant, je t'en prie, ne m'insulte pas et abstiens-toi d'utiliser ce résidu de non-sens. La traversée sera longue et ardue mais sera ! Sur ce, je te laisse, l'immobilité est difficile sur un fil ! Prends soin de toi et à la prochaine.


Je n'eus pas le temps de le saluer, déjà il repartait sur son fil. Je me remis moi aussi en route, essayant en vain d'apporter quelque cohérence à cette rencontre. Un peu plus loin, je me suis retourné dans l'espoir de ne rien voir et me convaincre que j'avais rêvé ou que cet hurluberlu n'était qu'un mirage nocturne. Il était bien là pourtant, je pouvais le voir au loin, gesticulant sur ce fil invisible qui vibrait de quelques douces rumeurs. Sa perche, en se balançant de droite à gauche, capturait les reflets de la lune. Il ressemblait à un oiseau défiant la gravité.

Devant, le néant m'attendait. Je pensais qu'il devait être bien tard pour que le trafic se soit arrêté ainsi. J'ai marché un peu plus jusqu'à ce que j'entende une rumeur courir dans la nuit. Au fur et à mesure que j'avançais, la rumeur se faisait plus insistante et, peu à peu, se transforma en mélodie. Au loin, une lumière se balançait sous le vent. En dessous, je distinguai une sorte de canapé qui me tournait le dos. La mélodie venait de là.

En m'approchant, je pus discerner les paroles, elles étaient prononcées par une voix enjouée :

"I am a rich and lonesome cowboy…"

Le fauteuil était ample et semblait confortable, une lampe à huile gigotait au-dessus, pendue à un poteau en bois. Je me raclai la gorge pour m'annoncer, et le fauteuil tourna sur lui-même, le chanteur m'accueillit avec un grand sourire.


– Bonsoir étranger, me lança-t-il gaiement.


Ses sourcils se haussaient sans arrêt au-dessus d'une vieille paire de lunettes rafistolée avec du scotch.


– Quel bon vent vous amène ? me demanda-t-il.


À ce moment, une bourrasque plus violente me fit chanceler. La lampe oscilla violemment et manqua de s'éteindre.


– Je… je marche…

– Et où marches-tu ?

– Je ne sais pas trop… je vais dans le Sud…

– Ah, très bien, c'est une bonne chose que de ne pas savoir où l'on va, ça permet de savoir où l'on est ! conclut-il en rigolant, il reprit sa guitare et commença à chantonner quelque chose.


Je me risquai à l'interrompre.


– Justement, où sommes-nous ?


Il s'arrêta de jouer, plissa les yeux en me regardant, comme s'il cherchait à sonder le pourquoi de ma question, puis répondit en haussant les épaules :


– Ici. Où veux-tu que nous soyons ?


J'ai laissé échapper un sourire. En plein milieu du désert, éclairée par une lampe à huile sur le point de s'éteindre avec, pour seul témoignage de la société, un fauteuil usé et une guitare grinçante, sa réaction me semblait des plus pertinentes. Toute autre réponse m'aurait paru des plus absurdes.

J'ai repris ma route, il a repris sa chanson.

"I am a rich and lonesome cowboy…"

Sa voix résonnait dans l'immensité et le halo de la lampe à huile scintillait joyeusement.

J'ai marché encore un peu et puis j'ai senti la fatigue. J'ai fermé les yeux pour reposer mes paupières, je devinais aisément l'asphalte sous mes pieds, le vent me guidait, le silence m'accompagnait. Puis un coup de klaxon retentit. J'ai sursauté. Derrière moi, une Mercedes s'était arrêtée en plein milieu de la route et braquait ses phares sur moi.


– Tu vas où ? demanda une voix fluette portée par un accent méditerranéen.

– Le plus au sud possible !

– Allez monte, je t'emmène.


Je suis monté à bord de ce bolide qui semblait surgir d'un autre temps, je ne l'avais pas entendu venir.


– Ça fait longtemps que tu es là ? m'a demandé le chauffeur.


Je n'ai pas su quoi répondre, je ne savais pas. J'ai hésité à lui parler du cycliste, du funambule et du guitariste. J'essayais de reconstituer un ensemble cohérent de ces rencontres. La fatigue l'emporta sur le désir. J'ai souri en haussant les épaules.


– Tu peux dormir si tu veux, tu as l'air fatigué.


J'ai dormi d'une traite jusqu'à l'arrêt de la voiture. Le chauffeur m'invita à sortir avec un joyeux "On est arrivé !". Je suis descendu de la voiture pour me retrouver dans une rue silencieuse d'un petit bled endormi. Le chauffeur démarra et bientôt, j'avais oublié son nom. La nuit était plus sombre encore, épaisse et mystérieuse, j'y ai cherché des lueurs, quelqu'un, quelque chose, en vain.

Je me suis senti soudainement très seul. Je savais pourtant que cette solitude était bien relative, que quelque part dans ce monde, un cycliste pédalait pour éclairer l'obscurité, un funambule repoussait les limites du connu pour porter l'humanité et un pèlerin chantait le bonheur pour personne d'autre que lui-même.


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   Anonyme   
5/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une jolie histoire, je trouve ; grâce à la dernière phrase, j'y lis la conviction symbolique d'un espoir pour l'avenir. La fantaisie humaine ne s'éteindra pas.

L'acceptation sereine du monde dont chacun fait montre dans ce texte me paraît réconfortante ; il y a comme une douceur qui traverse toute cette histoire, un désabusement souriant. Tout est absurde mais c'est pas grave, on a un fauteuil et une guitare. J'aime bien ce genre d'ambiance...

   Anonyme   
24/1/2015
Bonjour Neojamin

J'ai lu et ça m'a beaucoup plu. Une belle ambiance et de belles rencontres empreintes de magie et j'aime beaucoup le titre.
.
Votre texte semble correspondre parfaitement à ce qui est demandé ici

http://www.estellefaye.fr/butitsmyonlyline/appel-a-textes-on-cherche-des-nouvelles-sur-la-route/

Peut-être serez vous intéressé ?

Bon courage pour la suite et surtout bonne continuation !

   Automnale   
24/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Le décor, à la porte du désert, est bien planté. L'écriture est très agréable. Nous suivons le narrateur avec bonheur, en se demandant bien où il va nous conduire... Nous ne nous ennuyons pas.

Non loin du cycliste d'intérieur, nous remarquons une ampoule accrochée à un lampadaire... Le funambule - ce qui est normal pour un funambule ! - est suspendu à un fil reliant des poteaux de bois... Et une lampe à huile, pendue à un poteau, éclaire le guitariste... Je relève ceci, amusée, me disant qu'il y a peut-être une explication "psy" - mais je ne suis pas experte - dans ces fils et poteaux ! A moins que tout simplement, dans le désert, qui plus est la nuit, nous ne pouvons remarquer que ce qui est surélevé...

Pour les infimes détails, j'ai pensé que le cycliste aurait pu dire "Bien le bonsoir !"(et non "bonjour", puisque la marche a lieu de nuit)... J'ai noté - je pinaille - le "Je n'avais plus faim" (rien ne nous disant, si j'ai bien lu, que le narrateur avait faim au début du récit, peut-être que "pas" serait mieux approprié que "plus" ?)... Et, enfin, je ne suis pas certaine que le mot "repoussoir" (de limites) soit le bon ?

Ne quittant guère les pas du narrateur, je me pose, par instant, la question de savoir si les faits sont réels ou rêvés... Dans un but d'évasion, je préfère opter pour la réalité.

Quant à la chute, que vais copier/coller ci-dessous pour le plaisir de la relire, je la trouve magnifique, très poétique : "Je savais pourtant que cette solitude était bien relative, que quelque part dans ce monde, un cycliste pédalait pour éclairer l'obscurité, un funambule repoussait les limites du connu pour porter l'humanité et un pèlerin chantait le bonheur pour personne d'autre que lui-même."

Merci beaucoup Neojamin... J'ai beaucoup apprécié cette balade en Afrique du Nord.

Pour rejoindre votre présentation, mais un tantinet à l'inverse, j'ai appris à me sentir mieux ailleurs qu'ici... Et je n'oublierai pas l'originalité d'un cycliste, d'un funambule et d'un guitariste du désert.

Encore merci, et bravo !

   dodo-chan   
24/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour, Neojamin


L'écriture est correcte, faussement simple, et travaillée à mon avis.

Le récit est une symbolique, un rêve, qui tente à nous communiquer la nostalgie, la chaleur des êtres, la beauté qu'on ne voit pas mais qui nous entoure. Le nord de l'Afrique tente de donner une réalité au récit, ce qui ne fonctionne pas trop, je me suis vite senti dans votre espace-temps créatif, et vous m'avez montré ce que vous vouliez faire voir, et les personnages ont cooépérés sans resistance.

J'ai aimé la teinte de l'histoire, les couleurs, les odeurs. Je regrette juste qu'avec "Air Neojamin" il n'y a pas de surprise, on sait que le voyage va bien se passer, zero turbulence, attérissage en douceur.

A bientôt.

   Alice   
25/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un très joli texte/conte/récit de voyage. Je me suis laissé porter. Pas de doute, vous avez le sens de la formule: "Ici. Où veux-tu que nous soyons ?". Seul le dialogue avec le funambule me semble moins achevé, peut-être les répliques de ce dernier ne sont-elles pas assez aériennes et syntaxiquement chancelantes pour ressembler à une conversation du haut des airs, perché sur un fil :P
Autre petite chose qui me taraude: POURQUOI faut-il que tout le monde soit joyeux??? Même le chauffeur, personne la plus en contact avec le monde réel s'il en est une? Déjà, en mettre un mélancolique ou ne simplement pas mentionner l'humeur d'un des personnages éviterait des répétitions des mots "gai", "joyeux" et j'en passe...

Une bien jolie écriture, beaucoup de plaisir à vous lire. Merci.

Alice

   Shepard   
26/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour !

Voilà une bien étrange histoire, j'avoue que j'ignorais ou le récit allait m'emmener, et à chaque fois, une surprise. De ce côté là c'est une réussite.

Au départ je m'attendais à un récit plus classique sur le type qui décide de tout plaquer pour partir en pleine nature, bon, ça ne m'emballait pas plus que ça mais le style est clair, sans fioritures donc j'y vais.

Le type qui pédale, un doux dingue, mais il y' avait encore un minimum de plausibilité. Cependant la chute du dialogue est tellement attendue :

"– Tu es là toi non ?

– Euh… oui.

– Alors c'est pour toi que je pédale !"

J'aurais préféré l'idée que l'homme pédale pour une autre raison, peut-être quelque chose d'encore plus surréaliste et moins "gentillet".

Le funambule m'a beaucoup plus satisfait avec son défi absurde mais tellement sûr de lui. J'ai par contre buté sur une répétition

" gesticulant sur ce fil invisible qui vibrait de quelques douces rumeurs."

et après 2 lignes plus loin "'ai marché un peu plus jusqu'à ce que j'entende une rumeur courir dans la nuit."

Je pense que la première "rumeur" aurait pu être remplacée par autre chose.

Du reste, le guitariste est au summum, le dialogue qui s'impose comme une évidence est beaucoup mieux amené que le premier avec le type qui pédale.

Je regrette un peu que le conducteur se montre si "normal". A la rigueur j'aurais aimé le ressentir comme un mirage tout aussi improbable que les 3 rencontres précédentes, mais cela ne transpire pas autant au travers du dialogue.

Il y a une sorte d'ambiance "conte" qui m'a plu dans votre histoire avec une conclusion simple et agréable.

Dans l'ensemble c'est un bon moment de lecture !

   molitec   
26/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien
J’ai trouvé cette lecture plaisante, un texte qui a un air de compte philosophique, mais plus proche du monde contemporain, j’ai aimé aussi les dialogues qui se fondent bien dans ce genre d’histoire.
Apres une introduction mesurée et claire, on a déjà une image du parcours du personnage, ou est ce qu’il était, et ou il allait, par contre on ne sait pas très bien pourquoi, et c’est d’ailleurs la question qui soutient un peu l’intrigue ; il part rechercher de la solitude, ou bien la fuir.
Les rencontres sont certes invraisemblables et improbables, mais dans ce genre de récit, que je crois être un compte philosophique en plus court, ça passe naturellement.
Néanmoins, j’aurais aimé avoir une pensée de plus, ou bien un souvenir, une émotion, enfin juste un petit indice qui m’aurait laissé entrevoir juste un peu les pensées ou volontés du personnage, juste avant la première rencontre par exemple, ailleurs je crois qu’il n’y aurait pas de place, et que c’est déjà harmonieux.
La fin est aussi harmonieuse avec le reste de l’histoire, et c’est là le moment ou quelques pistes de réflexions commencent à surgir, comme chercher la solitude là ou les autres ne se douteraient pas de la probable existence de rencontres uniques, ou bien fuir la solitude là ou les autres ne voyaient pas de solitude, et d’autres réflexions tournant autour du même thème.
Merci pour cette lecture, a bientôt.

   Anonyme   
30/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour, Benjamin, je suis venu lire ce matin cette nuit étrange, ancrée (encrée) dans ce désert, et j'ai retrouvé ce petit grain de fantaisie qui n'appartient qu'à toi, ce décalage, cette ambiance (blonde) dorée, malgré le noir dans cette obscurité. Voilà comment j'aimerais être, un passant qui ne rend de comptes à personne mais qui , plutôt, rencontre des personnes, des êtres, humains, véritables.
Un rêve, un espoir, une victoire sur la nuit...Le néant. BRAVO, une fois encore !

   jfmoods   
31/1/2015
Il manque, selon moi, quelques virgules.

Cet épisode nocturne, désertique et filiforme, représente un morceau d'innocence arraché à l'espace et au temps. Le fil qui jalonne le texte, nous retenant d'abord (« comme attaché d'un fil à cette civilisation qui traînait derrière moi »), nous permettant d'élever notre regard par la suite, a-t-il un autre but que de mettre en avant la nécessité vitale d'une prise de hauteur ? Définition même de la poésie : chercher un envol, fuir un instant cette relation purement utilitaire aux choses, revenir à la gratuité première des gestes. Divers effets de décalage rendent compte de cette liberté retrouvée. L'élément le plus prégnant du texte, qui semble en résumer le propos, c'est cette vérité profonde que dissimule le paradoxe : « c'est une bonne chose de ne pas savoir où l'on va, ça permet de savoir où l'on est ».

Merci pour ce partage !

   Louis   
1/2/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un récit de voyage en Afrique du nord, mais qui ne révèle rien sur l'Afrique et les Africains. Ce n'est pas un voyage à la découverte de cette région du monde, et des hommes qui y vivent ;
c'est le récit d'un voyage, où l'on part à la rencontre de soi-même.
L'itinéraire suivi est un chemin initiatique.
C'est un voyage en solitude, «  en bordure de civilisation  », en marge donc de la vie sociale, en retrait de la relation à autrui ; voyage au bord du désert où l'on se retrouve seul avec soi.
Le temps du récit, comme l'espace, renvoie à la solitude, à l'effacement des autres, de la civilisation, de la société ; c'est un temps de nuit, quand la vision du monde se rétrécit, quand ne se voit que ce qui est au plus proche de soi.
Désert et nuit ne font plus qu'un : « Le désert se confondait dans la nuit ». Espace-temps de l'isolement, loin des autres, loin du monde.
Le « manteau d'encre », image de ce qui recouvre le désert est significatif. Là se trouve l'encre d'une écriture : le désert, source de l'écrit, réservoir de ce qui permet l'écriture.

Le narrateur est marcheur, nomade.
Sur la route qui se détourne des autres et du monde, sur le chemin qui s'enfonce dans le noir, dans le désert et le silence, il perçoit une lumière, une lueur dans la nuit.
Alors survient la première rencontre : un vieil homme produit de la lumière, avec ses jambes, avec ses pieds, en pédalant. Il pédale comme on marche. Il est un marcheur immobile. À l'image du narrateur. Le voyage immobile, en route vers soi, est un éclairage sur soi. L'homme qui pédale le dit clairement : « c'est pour toi que je pédale ! »
Le narrateur trouve le sens de son nomadisme : le voyage en solitaire l'éclaire sur lui-même. Il l'éloigne de tout mais pour aller au plus près de soi, pour l'éclairer soi ; une errance pour se trouver, pour se mettre soi en lumière.

La deuxième rencontre est celle d'un funambule, qui franchit le désert sur un fil. L'homme a pris de la hauteur, où il se tient en équilibre instable. Il s'est élevé un peu-au dessus de tout ; il repousse les frontières du possible, celles des capacités humaines.
Le narrateur découvre un nouveau « double » de lui-même. Il se découvre funambule dans ses voyages, marcheur risquant la chute, marcheur dont la vie ne tient qu'à un fil, mais dans une élévation d'âme que fait naître le nomadisme, une exploration de soi qui pousse jusqu'à l'extrême de ses limites, de ses capacités. Sur un fil tendu au-dessus du monde, le narrateur marche de soi à soi, et cherche à se dépasser, soi, à s'élever encore, au-dessus de soi.

La troisième rencontre est celle d'un musicien et chanteur, installé sur un canapé ou un fauteuil.
Image encore du voyage immobile. Le voyageur est installé dans son fauteuil. Image cette fois d'un confort du voyage. Pas de pédalage, pas de marche sur un fil en hauteur, risqué, mais la position de repos et de calme dans un fauteuil.
Un chant, une mélodie s'élève dans le désert. La musique aussi est un voyage.
Le guitariste « chante le bonheur  pour personne d'autre que lui-même  ».
C'est dans le voyage que l'on se trouve soi, et que l'on trouve la sérénité, un bonheur ; c'est dans le voyage que l'on trouve l'écriture ( l'encre du désert) et la parole chantante pour dire sa situation heureuse.

Dans son isolement volontaire, le voyageur risque d'éprouver le sentiment douloureux de solitude :
« Je me suis senti soudainement très seul ».
Mais le voyage, et ces rencontres qui le jalonnent, enseignent que la solitude n'est pas une douleur, elle n'est pas à craindre, elle peut être sereine ; tous les personnages, en effet, tous ces doubles de soi, expriment gaieté et sérénité. Nulle place dans le voyage initiatique pour la peur, la tristesse ou la mélancolie.
Il y aurait donc de la sérénité dans la solitude.
Une découverte sereine de soi serait possible. Ou plutôt une sérénité est à gagner dans cette marche vers soi.

Un texte, Neojamin, intéressant par son fond, agréable à lire dans sa forme.

   Coline-Dé   
8/2/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aime bien quand ça décolle ! Et c'est le cas ici : ça décolle du réel, de la banalité, ça " quitte", ça cherche avec bonheur...
Le style est classique ( peut-être le décalage avec le réel aurait-il gagné à être accompagné d'un décalage dans l'écriture ?) mais pîmentée de formules qui font mouche "(ce monsieur filigrane", – "Ici. Où veux-tu que nous soyons ?"
J'ai un peu renâclé devant la disparité de temps ici : "Il m'a fait de grands yeux comme s'il était étonné de me voir et me salua."
C'est une broutille, mais c'est dommage...
Une sorte de conte qui m'a procuré un très bon moment de lecture !

   Anonyme   
9/2/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Jolie histoire. Agréable à lire et facile à imaginer. Simple dans sa construction mais originale quand aux péripéties. Laisser planer le doute sur la réalité des rencontres permet de se faire ses propres théories. Le fait que la fin n'ait rien de surprenant ne dérange pas du coup.

   Anonyme   
28/2/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'aime beaucoup l'ambiance et le message véhiculés dans cette histoire! J'ai cependant une l'impression de répétitions peut-être maladroites des auxiliaires avoir et être... Et je trouve dommage que le soleil ne se lève pas à la fin de l'histoire, pour signifier la conviction toute neuve du protagoniste. Mais le tout est quand-même très beau, et le côté marginal, presque mystique des personnages me fait penser à un livre: Vladimir Roubaïev ou les provinces de l'irréel, de Serge Lentz que j'adore! On y retrouve la quête de soi, (dans les grands espaces de la Russie).
Enfin bref ce fut très agréable à lire merci!

   Hecbulls   
15/3/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Super nouvelle, le thème de l'inconnu et du flou est très recherché, et l'histoire est très bien écrite très agréable à lire.

   hersen   
13/5/2015
 a aimé ce texte 
Passionnément
J'adhère tout de suite ! Le genre d'ambiance qui me transporte là où va l'auteur, sans retenue. Quand je lis ça, je suis bien, je suis réconfortée que quelqu'un s'invente son monde pour apprivoiser la solitude. Se construire un havre où l'on peut revenir, l'auteur nous le dit tellement bien à la fin.
Un peu d'accord avec Alice, au niveau stylistique, on pouvait jouer sans doute de la spécialité de chacun. Mais je ne suis pas sûre que le texte y aurait gagné. C'est cette simplicité qui rend ce voyage si beau.
Mes félicitations.

   micherade   
25/1/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une histoire originale et profonde. Il y a dans ce texte une grande fantaisie, de l'absurde. Mais les personnages rencontrés ont su trouver un sens à leur vie en dehors des normes de la civilisation. Une leçon de vie, un espoir de vie. Des personnages aussi d'une grande humanité.
Des phrases comme des aphorismes: " c'est une bonne chose que de ne pas savoir où l'on va, ça permet de savoir où l'on est".
La fin est une belle conclusion.


Oniris Copyright © 2007-2023