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Sentimental/Romanesque
Perle-Hingaud : La pêche à la truite en Savoie [concours]
 Publié le 15/05/12  -  10 commentaires  -  10923 caractères  -  99 lectures    Autres textes du même auteur

Chronique d’altitude.


La pêche à la truite en Savoie [concours]


Ce texte est une participation au concours n°14 : Relations textuelles consenties ! (informations sur ce concours).



J’aurais dû insister pour prendre le volant. Marc est venu me chercher à l’aéroport. Sans Marie. Les femmes sont restées là-haut, avec les enfants, et même si je m’y attendais, je suis un peu déçu. Mon cousin s’en aperçoit, se moque gentiment : « T’inquiète, tu vas la retrouver, ta chérie, mais ça servait à rien qu’on descende tous, non ? » Si, bien sûr, mais… Je ne dis rien. « Tu verras, on a aménagé une deuxième chambre en bas, c’est mieux, vous serez plus tranquilles. » Je hoche la tête, les yeux sur la route. J’avais oublié à quel point Marc conduisait vite dans l’ascension vers Lachat, à quel point la vieille Renault tanguait le long du ravin.


Je me cramponne à la portière. Les vitesses souffrent, grincent et hoquettent sous l’effort. Les virages les plus étroits, là-même où la roche en surplomb est contenue par de dérisoires mailles métalliques, sont négociés sans égard pour ma sensibilité de citadin. Deux coups de klaxon, seule concession aux éventuels imprudents qui oseraient nous croiser. À gauche, dans un lacet, les cimes des sapins apparaissent, mer calme dans le vent d’altitude. Le sous-bois humide semble marqueté d’aiguilles, mais pas le temps de m’attarder, nous sommes déjà au lacet suivant, le paysage imposant de la vallée sinueuse, le ciel transparent et dur. Le vertige me guette et je me concentre, chasser l’odeur d’essence et la radio qui claironne, fixer l’asphalte et suivre la rigole d’eau vive sur le talus, repérer la cascade à peine plus haut, la repérer un instant avant qu’elle ne disparaisse dans le virage suivant.

Marc est chez lui, ici. Dès les dernières neiges domptées, la route du haut dégagée, Lachat s’ouvre au monde. Et les enfants de Lachat reviennent aussitôt que possible, attirés par… je ne sais pas ce qui les attire ici, mais le visage de mon cousin, concentré, impatient, ce visage sombre et maigre marque sa détermination. Arriver, sans tarder. Et moi, l’expatrié à la capitale, je rentre à mon tour, je réponds à l’appel, comme avant.


***


Enfin, le plateau s’offre à nous, la voiture se reprend, récupère. Marc ralentit ; des quelques chalets épars pourraient jaillir des enfants, des chiens ou des ballons. Nous sommes arrivés ou presque. La route s’élargit brusquement, le soleil prend son élan pour les heures à venir, les champs qui grésilleront de longues sauterelles ailées, les fleurs animées d’insectes enivrés, bourdonnant stupidement et effrayant les petits.


Devant l’ancienne grange aménagée, la voiture de Pascale, échouée, criarde de tôle écarlate. Et les volets qui s’ouvrent à notre arrivée, là-haut dans le dortoir, Vasco qui passe la tête, ébouriffé, hilare : « Papa ! Parrain ! Ils sont arrivés ! », les autres qui se frayent une place dans l’encadrement, mêlée de cheveux bruns et blonds, sourires et cris, puis les têtes qui disparaissent. J’imagine la cavalcade pour descendre par l’échelle, je compte jusqu’à trois et j’ai gagné, la porte s’ouvre à la volée, les sept enfants déboulent, nous entourent. Derrière eux les femmes s’avancent, Pascale tient une cigarette entre les doigts, Marie me sourit :


— Vous êtes déjà là ? Venez, on en est au café…


Marie et ses yeux bleus, c’est idiot d’être encore si amoureux, si désarmé, si soulagé aussi de la retrouver. Cette dispute stupide, son silence ces derniers jours… Une semaine de solitude alors que dix-sept ans nous lient, nous entremêlent, une semaine de séparation, ce n’est rien, mais je n’aime pas me quereller avec elle et ne pas prendre le temps de me réconcilier. Enfin, je la retrouve et je me sens mieux. À ma place.


L’air est encore trop vif pour s’attarder dehors, nous fermons la porte et la salle s’assombrit, elle bruisse de l’agitation des petits. Chacun parle et veut raconter le premier, tire une manche ou s’accroche à un genou. On se coule le long de la table sur le banc étroit, Pascale pose deux bols et sert le café, Marc saisit le pain et plonge un regard vers la confiture, myrtilles ou griottes ? Ma main effleure l’épaule de Marie, remonte sur sa nuque. Elle se penche vers moi, nos lèvres se frôlent, j’ai envie d’elle et elle le devine, je le sais à sa façon de plisser les paupières, à ses lèvres qui s’étirent, à sa main qui glisse sur ma cuisse et reste posée là. « Tu m’as manqué », me souffle-t-elle, et tout est éclairci.


***


Plus tard, on descend chez Papi Pierrot, par le chemin de derrière, celui qui longe l’Arly. Les enfants nous précèdent, les femmes papotent entre elles, éclats de rire et messes basses, et nous deux marchons à la traîne, complices. Le niveau du torrent est haut pour la saison. Envie subite :


— On va à la pêche, demain ?

— Mmmh, j’avais pensé à une randonnée vers la dent de Cons…


Je soupire. Pas vraiment chaud pour un départ à cinq heures et une marche forcée avec mon sportif de cousin. Il considère mon visage qui s’allonge, l’œil moqueur :


— Ok, pêche au fario pour le flemmard… Fais-moi penser à demander le matos à Pierrot.


Je longe l’eau, transparente, vive. Je crois apercevoir une silhouette argentée, mais peut-être n’est-ce qu’un reflet du fond granitique. C’est que la belle est rusée… Je conçois les plans de bataille, capturer des sauterelles ce soir pour demain les jeter à la surface, comme si un saut mal calculé avait propulsé l’insecte dans la gueule du monstre… ou alors, brutale, moins élégante, la traque sous les rochers… Pierrot a-t-il du premier plomb léger ?


Denise nous accueille à la porte du chalet. La table est déjà mise dehors, sous les parasols, et Pierrot a dressé depuis plusieurs heures le chaudron à polente sur le feu. C’est qu’il en est fier, de sa polente, cuite à l’ancienne, tournée sans fin avec une longue cuiller en bois qui restera bientôt fichée dans la marmite.

Pierrot prend doucement de la pesanteur avec ses cheveux blancs. Depuis que l’aciérie l’a enfin relâché, en bas, il vit pour son potager et ses copains du club des Boules Lyonnaises. Ici, le plus souvent. La maison d’Ugine reste fermée tout l’été, aussi endormie que la gare désaffectée. De son passé d’ouvrier, Pierrot a gardé la silhouette trapue de l’homme fort, court et carré d’épaules. En short et marcel, il bêche et répare sans relâche, promène ses petits-enfants et leur apprend à sculpter le bois, parle peu mais sait sourire.


Les jeunes ont faim, les jeunes ont toujours faim. La salade de tomates du potager, le civet de lapin, la polente. Le chat qui tourne dans nos jambes, ce chat roux trop gras dont je me méfie – je n’aime pas les chats.


Soudain un aboiement, un gros bâtard noir surgit de la route, bondit vers nous. La tablée s’égaille en criant.


— Maman !

— Il sort d’où, ce chien ?

— On dirait celui de Bertrand, à La Palud…

— N’aie pas peur, regarde, il veut jouer, c’est tout…


Nico décide, en adolescent inventif, d’attirer l’animal vers le lavoir. Une douche glacée le fera peut-être fuir ? Mauvaise idée : le chien s’amuse du seau d’eau, et revient s’ébrouer sur les petits qui protestent à coup de hurlements suraigus. Même Denise s’énerve :


— Pierrot, fais quelque chose ! Elle va renverser la table, cette sale bête !


Pierrot se lève pesamment :


— Je vais chercher la fourche, attends un peu, il va comprendre…


Je n’ai pas envie de violence, alors je m’entête à repousser le chien vers la route, sans succès. Il n’a pas de collier, impossible de l’attacher à un tronc d’arbre pour déjeuner en paix. Marc me suit :


— Laisse, je vais le ramener.


Mais trois caresses ont suffi pour que l’animal se prenne d’affection pour moi et refuse de me quitter. Tant pis pour les fraises à la crème, allons donc jusqu’à La Palud, une petite marche nous fera du bien. Le chien semble ravi de la promenade. « Toujours ici à l’année, Bertrand ? » Mon cousin répond à voix basse :


— Oui, toujours là, tant que le bled aura besoin d’un mécano… mais, tu vas voir, il est pas en forme.

— …

— Sa femme l’a plaqué le mois dernier. Ça couvait depuis l’hiver. Elle a emmené le gosse.


Je ne réponds rien, parce que rien ne conjure le mauvais sort.

Le chien nous abandonne brusquement, queue basse. Il fait plus froid, ici, peut-être à cause du torrent dont le grondement monte derrière la maison. Les volets du haut sont hermétiquement clos. Un homme est assis sur les marches du perron. L’animal l’évite, va se coucher plus loin, pose sa tête entre ses pattes, oreilles dressées. J’ai du mal à reconnaître Bertrand, un an que je ne l’ai pas croisé, c’est long, un an, parfois ça peut s’étirer autant qu’un chewing-gum sous une semelle, mou, terne, écœurant. Une sale année.


Marc avance :


— Salut Bertrand, on te ramène ton chien. Il cherchait de la compagnie…

— Oui, dis-je, il voulait jouer avec les enfants.


Mon cousin me lance une œillade assassine. Putain, quel con je suis ! Sûr qu’ici, le chien ne joue plus avec un petit…

Bertrand lève un bras, en signe d’excuse ou d’incompréhension. Je remarque la bouteille de porto à ses pieds, le verre, le paquet de chips.


— Désolé pour Flibuste. Un apéro, les gars ?


Alors je m’assois à ses côtés. Que peut-on faire d’autre que de s’asseoir à côté d’un homme dans une déprime noire ? Marc entre dans la maison, ressort avec deux verres à moutarde, me verse une rasade.

On discute de choses sans importance, du temps et des bagnoles, des mots destinés à tromper l’ennemi, à camoufler le gris sous les yeux, le sillon d’amertume autour de la bouche. Aucun de nous n’est dupe, le sort de la nouvelle station de ski nous est bien égal, ce qui compte c’est le son d’une voix humaine, rien d’autre qu’une voix humaine.


Puis, on se tait. Bertrand nous tend le paquet de chips, on grignote.


— T’es là pour longtemps ? me demande-t-il.

— Non, un long week-end. Marie est venue la semaine dernière avec les enfants, on repart tous lundi.

— …


Marc suit la crête des yeux, en face. Un parapente s’est élancé, un autre se prépare. Le regard toujours fixé sur eux, il propose :


— Tu veux venir avec nous deux, demain ? On va à la pêche.


Bertrand hausse les épaules.


— Ouais. Pourquoi pas…


On reste encore à tuer le temps, ça n’en finit pas. Le chien s’est endormi. Marc se déplie enfin, lentement.


— Bon, à demain, alors.


Bertrand cligne des yeux, ça doit vouloir dire oui.


En repartant, je longe les restes d’un feu sur le bas-côté. Des boîtiers de CD à moitié calcinés, des magazines de fille, des bouquins gondolés par la pluie. Le titre d’un livre échappé du désastre me tire l’œil : « La pêche à la truite en Amérique ».

Ici ou ailleurs, les jours se ressemblent et se racontent. Des vies d’hommes, des histoires infimes dans des matins clairs.


 
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   Anonyme   
8/5/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Je suis mitigée. Dans sa deuxième partie, à partir de la rencontre avec Bernard, je trouve que le texte réussit bien à transmettre la difficulté d'être, atteint à l'évocation de la condition humaine, mais avant, pour moi, il illustre uniquement ce proverbe : "Les gens heureux n'ont pas d'histoire". Cette partie m'a ennuyée parce que je trouve le bonheur des autres ennuyeux (du moins en littérature), il ne m'apprend rien.
L'équilibre est difficile à trouver. Par moments cette deuxième partie m'a paru trop appuyée dans le genre "la vie est dure ma bonne dame" (cf. mes remarques plus bas), tandis que la première, à mon avis, péchait par insignifiance.

Reste une tentative touchante de transcrire quelques instants de vie ordinaire, banale et intense. Ce n'est pas facile et je salue le défi.

"Aucun de nous n’est dupe, le sort de la nouvelle station de ski nous est bien égal, ce qui compte c’est le son d’une voix humaine, rien d’autre qu’une voix humaine." : cette sentence est trop appuyée pour moi, répète l'évidence.
Même remarque pour la toute fin à partir de "En repartant, je longe les restes d’un feu", les objets calcinés et le bouquin sur la pêche, plus la morale explicite. Le pathos, pour moi, est tout proche.

   Lunar-K   
9/5/2012
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Un texte assez touchant dans sa "banalité" je trouve. Pas vraiment ce que je prise en littérature, l'exposition du quotidien et du particulier, mais je dois néanmoins reconnaître que c'est plutôt bien fait ici, avec une belle sensibilité dans l'écriture et dans les descriptions notamment.

Par rapport à l'histoire en elle-même, j'ai davantage été interpellé par la seconde partie. Peut-être bien, précisément, parce que ce n'est que là que le quotidien est à peu près rompu par l'arrivée du chien et, finalement, par la rencontre avec Bertrand. Le cours ordinaire des évènements se trouve alors sensiblement détourné. Le narrateur, qui a lui aussi bien sûr ses petits tracas, se retrouve face à quelqu'un de vraiment malheureux, et surtout se retrouve, semble-t-il, totalement désarmé face à cela. Sans doute relativise-t-il alors ses propres problèmes, notamment sa dispute avec sa femme (qui, cela dit, met bien vite de côté son animosité...). Cela n'est pas explicitement dit, mais ça me semble tout à fait plausible. En tout cas, il y a dans cette rencontre comme un malaise. Malaise rendu tout à fait tangible par ces silences et ces précautions à l'égard de Bertrand. J'ai bien aimé cette scène, finalement très simple, mais néanmoins porteuse.

Par rapport à l'écriture, maintenant... Comme déjà dit, j'y trouve une belle sensibilité. Cela est surtout visible dans la première partie, celle qui précède la rencontre avec Bertrand donc. Même si c'est cette partie que j'apprécie le moins, il me faut néanmoins y reconnaître quelque chose de tout à fait remarquable selon moi. A savoir que, bien qu'il ne s'y passe pour ainsi dire rien du tout, je ne me suis pas ennuyé. Et cela est dû, je crois, à un équilibre parfaitement trouvé dans les descriptions qui, sans non plus être surabondantes ni, de ce fait, envahissantes, restent suffisamment précises pour poser clairement le contexte et les personnages qui y évoluent. Cela sans jamais être lourd ni, donc, ennuyeux. Il me semble qu'il y a là quelque chose qui mérite d'être signalé. Car c'est souvent dans ses descriptions que ce genre de texte peut perdre ses lecteurs. Mais pas ici...

Bref, un bon texte. Pas du tout ce que j'apprécie habituellement, mais plutôt réussi dans le genre. Un texte en tout cas très touchant, tout à fait crédible également, parfaitement contextualisé mais sans jamais trop en faire. J'ai bien aimé.

   brabant   
13/6/2012
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Bonjour Perle-Hingaud,


Comme souvent chez Perle-Hingaud je trouve les personnages masculins trop féminins. Marc a des hésitations et des peurs de gonzesse (lol), ce qui fait que je l'ai longtemps pris pour une fille au côté du cousin dans la vieille Renault ; le cousin est trop beau, trop sportif, trop propre sur lui pour être vrai (d'ailleurs il n'a pas de nom !) pour exister vraiment ; quant à Bertrand il se soûle (et prétend se détruire ?) avec un apéritif de femme (le porto) et n'arrive même pas à bout d'un paquet de chips, reste trop policé dans son malheur...
Le cousin renonce à la randonnée ; Bertrand accepte bien facilement la partie de pêche ; Marc a quémandé un pardon. Ce texte manque à mon avis de testostérone. Les comportements masculins sont vus, idéalisés au travers d'un oeil féminin. Le comble de la viriliuté y est une partie de pêche. Ce texte m'apparaît d'une certaine manière unisexe.

A quand un texte dont les personnages principaux seraient des femmes ? pour voir... et les hommes au second plan pour voir (aussi) ce qui en ressortirait, quels caractères leurs seraient attribués qui les différencieraient des femmes, ou ne seraient-ils que des faire-valoir ?
Ici les femmes sont absentes et les hommes n'existent pas.

Texte trop élégant, même le vieillard en short et marcel y est propre et le chien à s'appeler Flibuste y fait BD.

   Anonyme   
15/5/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bien aimé ce récit pudique, on pourrait presque se croire chez Sautet. La fin me paraît bonne, c'est celle qui convient à cette nouvelle sur le temps qui passe. Histoires infimes ou "vies minuscules". Poétique.

PS Le porto, pas terrible par contre :o)

   Anonyme   
15/5/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Un texte que j'ai aimé.

Je trouve ce texte très joli dans sa simplicité, un moment de vie comme un autre, calme et "doux" avec des aspérités.
Il n'y a rien d'exceptionnel certes, mais rien de catastrophique. La vie en somme quelque part !
Je salue le talent de conteuse de l'auteur qui m'a amené du début à la fin sans temps morts, sans ennuis.

Quelques tournures m'ont gêné:

"la pêche au fario" : à LA fario il me semble; c'est pas le truite mais la truite. :)

" Mais trois caresses": j'aurai mi une virgule après mais, ou transformé le mais en mes.

Un texte fort agréable que j'ai apprécié, bravo et merci.

   pieralun   
16/5/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Personnellement, j'ai toujours admiré les auteurs, les livres, les films également qui sont capables de m'entraîner dans leur douce musique en racontant peu de choses: le film " et au milieu coule une rivière ", les livres de Jean Paul Dubois, les ambiances de Proust.
S'ils ne possédaient pas une belle image ou une remarquable écriture, la magie n'opererait pas. Sur quoi repose cette écriture, quels sont ses critères de qualité, il est difficile de répondre.
Chez Perle, ces critères sont présents, et j'ai avalé goulûment cette petite nouvelle sur ma tablette peu pratique pour la lecture sans sourciller.
J'ai pénétré les paysages, entendu les cris des enfants, vu le manège de réconciliation du couple.
Petit bémol, je n'ai pas été convaincu par le personnage abandonné de tous, sauf de son chien.
Mais cette belle écriture, n'est-elle pas l'atout indispensable de la littérature? Combien de romans qui avaient sûrement quelque chose à dire ont été sacrifiés à partir de la 50 eme page sur l'autel de l'ennui; non pas à cause de la médiocrité de l'histoire, mais bien de l'imperméabilité de l'écriture.
Alors, bravo et merci à Perle.

   matcauth   
16/5/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup
En lisant les autres commentaires, je vois bien que ressort l'idée de banalité, de simplicité. Mais écrire simple, qu'est ce que c'est difficile : la preuve, on ne voit pratiquement jamais ça sur le site.

C'est une drôle d'alchimie, dont j'aimerais avoir l'antimoine, car retranscrire une tranche de vie, avoir l'oeil pour ces détails (la polente, les chips, les deux verres à moutarde, le chien qui embête tout le monde arf!) c'est pas facile. Rester spectateur, ne pas chercher à prouver au futur lecteur qu'on est un génie en déblatérant deux-trois traits de morale, ça! c'est dur!

alors bien sûr, l'histoire pourrait être plus intrigante, bon. Mais déjà quinze mille caractères c'est court, poser une atmosphère, une ambiance, donner les moyens à l'auteur de s'identifier, en si peu, c'est dur. ça m'a fait penser à du Christian Signol, version Savoyarde.

"On discute de choses sans importance, du temps et des bagnoles, des mots destinés à tromper l’ennemi, à camoufler le gris sous les yeux, le sillon d’amertume autour de la bouche. Aucun de nous n’est dupe, le sort de la nouvelle station de ski nous est bien égal, ce qui compte c’est le son d’une voix humaine"

tout est dit dans ce paragraphe, la description précise et pas seulement physique mais aussi psychologique, un ressenti très exact, de ceux qu'on a tous vécus.


une chose, quand même, et je ne sais pas de quoi ça vient : j'ai du m'y reprendre à plusieurs fois pour m'ôter l'impression que le narrateur était une narratrice.

   macaron   
16/5/2012
 a aimé ce texte 
Bien
Une histoire agréable à lire, bien construite, joliment écrite. Pas facile d'appuyer sur le point sensible sans tomber dans le larmoyant ou l'artificiel. Tout est dans le dosage émotionnel et je le trouve plutôt réussi. La vie de tous les jours se confond parfois dans une poésie simple qu'on rechigne à reconnaitre. Cela est pourtant tout à fait salutaire!

   Perle-Hingaud   
27/5/2012

   Anonyme   
21/8/2012
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
"Devant l’ancienne grange aménagée, la voiture de Pascale, échouée, criarde de tôle écarlate."

"Je longe l’eau, transparente, vive. Je crois apercevoir une silhouette argentée, mais peut-être n’est-ce qu’un reflet du fond granitique."

J'ai un avis mitigé. J'apprécie les histoires qui racontent les petites choses de la vie, des bouts de presque rien. Ici, c'est vrai, on a ces moments volés à la simplicité, au quotidien.

Sauf que l'écriture oscille entre le plat et l'alambiqué à peine dissimulé. Les personnages quant à eux manquent de relief, la psychologie très féminine du protagoniste qui se cramponne à une portière, a des vagues à l'âme, Marie, les yeux bleus, la dispute... On sursaute à la lecture et on y croit pas. Un texte aux qualités inexploitées.


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