Et si j’étais le messie ?
Je sais, moi aussi, ça m’en bouche un coin. Sérieusement. Penser que je suis la future parole divine sur cette planète me retourne un peu les neurones. Mais on fait avec, je suppose. Si je dois choisir entre ça et, disons, inspecteur des impôts, je choisis le boulot de messie.
Notez bien que je ne dis pas ça pour me faire mousser. Ça n’a rien de drôle, d’être le symbole de l’espoir pour l’humanité. Enfin, quand je dis « espoir »… le terme « changement » serait beaucoup plus approprié, mine de rien.
Il faudrait que cette douce rêverie prenne fin à un moment ou à un autre. Et maintenant m’apparaît comme l’instant idéal. Non pas que ce ne soit pas agréable. Mais je tiens à faire remarquer que je suis présentement attaché à une chaise, et qu’un canon de fusil à pompe me sert de langue.
- Une dernière parole, mon p’tit Gabriel ? Un dernier coup d’éclat ?
Information intéressante, le « p’tit Gabriel », c’est moi. Vous vous doutez donc bien que je suis dans l’impossibilité de répondre autre chose que :
- Hmmpf.
Onomatopée que Ray - celui qui a cru bon de me faire sucer un tube d’acier après m’avoir fait attacher - interprète correctement comme un « Va te faire foutre ». Je peux affirmer qu’il en a saisi le sens parce qu’il se marre un bon coup, et décide de retirer l’arme de ma bouche.
- Merci bien, Ray. C’est très courtois de ta part. Si tu pouvais me détacher, maintenant, je le prendrais très bien.
Bon, ma voix est un peu faible, et je manque sûrement du panache nécessaire à ce genre de comportement blasé et flegmatique. À mon crédit, il faut dire que j’ai deux doigts cassés, un genou en bouillie, et que j’ai été battu comme plâtre il y a moins de deux heures.
En même temps, je suppose que Ray est au courant, vu que : 1) je suis à moins de deux mètres de lui. 2) c’est à lui que je dois d’être dans cet état.
« Lui » englobant Ray, deux hommes de mains, sa femme, et toujours ce charmant et si sensuel fusil à pompe. En passant, je trouve que sa femme aussi est charmante et sensuelle. Mais ça, je vais éviter de le dire. Ray a beau être un garçon poli, et tout, et tout, il n’en reste pas moins qu’il est d’une jalousie maladive. Sacré Ray.
- Si tu m’expliquais un peu ce bordel, Gabriel ? suggère ce cher ange. Tu nous épargnerais bien du temps et des tracas. - Sûr, Ray. Ça fait pas de doute. Je te sens très tracassé. Ça m’invite à me mettre à table immédiatement.
Je crache du sang et une dent pour conclure ma belle réponse. Il sourit. Il a une belle gueule, ce con. Une très belle gueule. Visage fin, grands yeux innocents, sourire Colgate. Et pour couronner le tout, il se sape en Armani. Bordel.
Je déteste cette manière qu’il a de me narguer avec cette gueule de naïf. À croire qu’il ne fait jamais rien de mal. Moi aussi, je pourrais avoir cette gueule, me saper avec des costards super classe, et tout le reste. Sincèrement, je suis sûr que s’il était attaché à ma place, il aurait l’air moins beau.
Me mettre à table, hein ?
Que veut-il que je lui dise ? Où j’ai planqué les joyaux de la couronne ? Qui a tué JFK ? Mieux encore : le King est-il encore de ce monde ? Bon dieu, que je sache, je n’ai jamais planqué une valise pleine de fric dans une consigne de gare. Et le fric, c’est ça qui le fait gentiment bicher, le Ray.
Tout le monde a ses faiblesses. L’amour de l’argent est la sienne. Pourtant, si on parle en terme de commerce, Ray a tout ce qu’il faut. Il contrôle une bonne partie des tripots, les filles du quartier Est sont à sa botte, et, ça j’en suis sûr, il a un bras relativement long. Comment je le sais ? Simple logique.
Parce que je le connais, le Ray. J’ai bossé avec lui. Je l’ai vu à l’œuvre. J’ai observé ses grands yeux de gamins, pendant qu’il calculait, calculait, calculait, pour pouvoir tirer un profit maximum de chacune de ses activités. La longueur de son bras dépend de ses « filles ». Si Ray était un maquereau de seconde zone – un peu comme moi à une époque, je pense qu’on pourrait le considérer comme manchot.
Mais Gueule d’Ange n’est pas du genre à vendre de la « tarifée » bourrée de came, explosée au crack, et simplement trop malade pour aiguiser l’appétit sexuel d’un quelconque être pensant. Il a bon goût. Et il apprécie qu’on le remarque. Pour lui, la réputation se porte comme un costard : avec classe. Alors, hors de question d’être reconnu comme un proxénète de base. Donc, il fait dans le produit de luxe, la professionnelle à deux mille dollars le week-end.
Et à votre avis, qui a les moyens de coucher avec des putes à ce prix-là, et de manière régulière ?
Voilà, ça commence à venir. Bon, continuons notre raisonnement, le temps que mon cerveau se remette en place et que je comprenne ce que ce bon vieux Ray me veut.
Si vous avez accroché sur le prix de nos bien-aimées putains, vous avez aussi dû remarquer le « régulier », non ? Ce ne sont plus des prostituées, que Ray largue sur le marché. Ce sont des amantes. Ce qu’il veut, Ray, c’est que le client parle. Il veut qu’en plus des billets, ses toutes belles lui rapportent des renseignements. C’est sur l’oreiller que les langues se délient, parfois. Et c’est sur ce même oreiller que Ray a trouvé le moyen de contrôler bien des gens, et d’allonger un peu plus la taille de son bras.
C’est en partie pour ça que je ne comprends pas. Ray a le pognon. Ray a le pouvoir. Et pour l’heure, Ray a Gabriel.
Je viens de me prendre un magnifique aller-retour. Double gifle, joue en feu, crâne plein de lave en fusion. Bien sûr, Ray n’a pas levé une seule fois la main sur moi. C’est le petit chauve, à sa droite, qui s’en est occupé.
Il est sec comme une brindille, il est petit comme un grain de riz, aussi chinois que ce même grain de riz, mais il cogne comme s’il avait au moins quatre-vingt-dix kilos en plus sur le corps et qu’il avait été élevé au cœur de la Sainte Russie.
Et bon dieu, ça fait mal.
- Al, cesse donc de brutaliser notre ami ! Est-ce ainsi que je t’ai appris le métier ?
Ray joue très bien les indignés. Il déteste la violence, ça coule de source. Dommage que je sois le sac de frappe du jour, sinon j’y croirais.
D’un signe de la main, Ray ordonne au deuxième homme de main de s’approcher de moi. C’est un véritable colosse. Bon, vu de ma chaise, une punaise à l’air d’un dinosaure, mais quand même… Doit bien y avoir un quintal de barbaque, dans un homme pareil. Je vois limite ses pieds s’enfoncer dans le sol quand il marche, tant il est lourd. D’une main, il nous soulève - nous, c’est la chaise et moi, toujours très liés par le sort et un lot de cordes bien solides - et nous permet de bien admirer son visage de bouledogue ravagé par l’alcool et une acné persistante.
Tente de sourire, Gabriel. Amadoue-le. Pour ce que tu as à perdre. Ce qui est agréable, c’est que le colosse m’a rendu mon sourire. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est le coup dans le ventre qu’il vient de me flanquer. Je ne sais pas si c’est ma colonne vertébrale qui a craqué, ou le dossier de la chaise. Vu que je sens encore la douleur de mon genou, je suppose que c’est le dossier.
Je vais être honnête, pour l’instant, la pensée d’être toujours en vie ne me réconforte pas plus que ça. Je jette un coup d’œil à Ray, juste pour avoir une idée de ce qu’il pense. Peine perdue. Il est trop occupé à se chercher un petit cigare pour prêter attention au pauvre Gabriel.
J’essuie trois coups de poing extrêmement efficaces le temps qu’il l’allume et qu’il tire une taffe ou deux et qu’il se tourne enfin vers ma pomme.
- Gabriel, Gabriel… Si tu cessais de t’acharner pour me dire enfin ce que je veux savoir ? Sois sérieux, mon p’tit. Crache le morceau !
Mon silence, plus dû à la douleur qu’à une volonté farouche de tenir tête, ne m’apporte qu’un nouveau coup dans l’estomac. Et là, pour cracher, je crache. Ah bon Dieu ! J’aurais peut-être pas le loisir d’arracher les yeux du colosse et de son copain le Frelon Vert, mais au moins, j’aurais salopé les fringues de l’un d’entre eux. Le colosse me jette par terre et recule en arborant un air dégoûté.
Je ne sais pas si c’est le visage congestionné de la brute ou simplement les limites de mon corps, mais j’ai fini par craquer nerveusement.
- Mais bordel, Ray ! C’est quoi, cette histoire ? Qu’est-ce que tu me veux ? (Je crache, j’éructe. C’est un miracle que je sois compréhensible.) Si c’est du fric que tu veux, tu sais que j’ai pas un rond ! J’ai tout perdu aux cartes dans un de tes putains de tripots à la con !
Aucune réponse. Il fume toujours son cigare, jette parfois un coup d’œil énamouré à sa femme, mais rien d’autre. Je continue à beugler, je répète que mon argent, c’est lui qui doit l’avoir désormais. J’ai tout sacrifié dans le temple du jeu dont il est le gardien. Il me laisse m’égosiller, m’énerver, m’épuiser. On dirait qu’il compte les secondes, qu’il regarde le baromètre de ma frustration, qu’il calcule mon degré d’impuissance et d’abattement.
Quand, enfin, il en a assez, il tend une main que sa femme saisit. Elle se lève avec grâce. Son corps, délicieusement enserré dans une robe de satin bleu qui dévoile ses épaules et son décolleté, semble onduler avec langueur, esquissant les premiers pas d’une danse hypnotique. Mais je n’arrive pas à me concentrer sur la beauté de ce corps, ni sur les cheveux noirs et soyeux qui caressent la peau nue de son dos. Elle me fixe comme on fixerait un animal mort, un bout de viande qu’on s’apprête à dévorer. Ses pupilles vertes me scrutent avec une telle intensité que j’ai l’impression qu’elles sont fluorescentes.
Il y a quelques instants, j’ai dit qu’elle s’était levée avec grâce. J’allais ajouter avec une grâce « léonine ». Je suis plutôt content de ne pas être allé aussi loin dans ma description. Il n’y a rien de félin, en elle. Rien de cette souplesse, de cette majesté que j’aurais voulu voir.
Non. C’est une grâce serpentine, une sensualité de prédateur que je vois maintenant. C’est l’amour de la violence et du sang, un amour tout ce qu’il y a d’animal, qui la rend si belle et si captivante. Et je vais me faire dévorer vif si je ne trouve pas ce que Ray veut.
Alors cherche, Gabriel. Cherche !
Tu as bien dû faire quelque chose au cours des derniers mois. Une chose qui aurait pu éveiller la convoitise de Ray et de son cobra de femme ! Cherche ! Non, trouve ! C’est ça, trouve ! N’importe quoi, le premier truc qui te semble coller à la situation.
Arnaque à l’assurance, y a quelques mois de ça ? Pour autant que l’expérience t’ait semblé amusante, mon petit Gabriel, ça m’étonnerait que ce soit ça. Voler des vieux qui veulent assurer leur mort - ou plutôt leur vie, c’est peut-être lucratif, mais pas assez pour intéresser Ray. Oui, oui, je sais. Tu vas me répéter qu’il adore l’argent, qu’il voue un culte au pognon, qu’il a des soubresauts orgastiques à la simple vue des billets verts. Mais soyons sérieux, ce ne sont pas les vingt mille dollars que tu as pu grappiller qui vont le faire saliver. Il a plus, largement plus. Vingt plaques, ça ne correspond à rien, pour lui. Tout juste de quoi remplir la tirelire de Noël.
Le braquage, alors ?
Bon Dieu, Gabriel, je t’ai dit de laisser tomber tout ce qui avait un rapport avec le fric ! Tu es sourd, ou simplement con ? Cette histoire est du même acabit que celle des vieux. Faudrait voir à rester logique quelques secondes tout de même. À moins que….
C’est vrai qu’on en a trahi, du monde, sur ce coup. En l’occurrence les quatre complices qui ont eu le plaisir de se faire alpaguer pendant que tu prenais la tangente avec le fric. Possible que dans le lot il y ait eu le petit frère de Ray ? Son cousin ? Pire… l’amant de sa femme ?
Je me disais bien que j’aurais dû chercher et réfléchir plus vite. Il fallait que je divague et que je commence à songer à ÇA.
L’amant de sa femme…
Non seulement cela m’a rappelé quelques grands moments de mon existence, mais en plus j’ai eu le culot de glousser malgré la peur qui me bouffait le ventre. Le résultat ne s’est pas fait attendre, la vipère m’a collé un coup de talon dans l’épaule gauche.
- Putain ! La salope !
Oui, oui. J’ai crié ça, sur le coup. Je suis un idiot, je vais finir par le savoir. En même temps, est-ce ma faute si sa femme m’a marché sur l’épaule ? Est-ce aussi ma faute si la moitié de la ville - moi y compris - est passé sur cette foutue vipère du temps où elle bossait pour Ray ? Il y a des réflexes, des petits noms, qui ne se perdent pas. Comme le fait de dire que la femme de Ray est sans doute la pire salope que la terre ait jamais porté. C’est pour ça que je me suis mis à me marrer, quand j’ai envisagé que l’un des hommes de mains puisse être l’amant de cette jolie cracheuse de venin.
Bon dieu, les probabilités de bosser avec un homme ayant déjà « commercé » avec elle sont plutôt grandes. Pendant que Ray écartait du monde pour se faire une place au soleil, elle écartait les cuisses pour faire une place au client. À noter : elle était tellement professionnelle que Ray lui-même a fini par craquer.
Il n’empêche que, pendant que je vous expose ces menus potins, je suis en train de me faire trouer l’épaule à coups de talon aiguille. C’est très douloureux.
- Ray ! Je sais pas de quoi tu parles, je te le jure ! Pas la moindre idée ! J’ai cherché, fouiné, fais le tour de mes conneries… - Et tu ne vois pas, je suppose. - C’est ce que je me tue à te répéter !
Enfin, quand je dis « Je me tue », je me comprends…
Ray secoue la tête, l’air dépité et sincèrement navré. Quelque chose me dit que ça n’annonce rien de bon. Il fait un signe à sa femme, qui a l’obligeance de cesser de me confondre avec un paillasson, puis donne l’ordre à ses hommes de redresser la chaise et son misérable occupant.
- Gabriel, tu sais que je t’aime bien. Tu sais aussi que je suis quelqu’un de généreux, qui déteste avoir recours à ce genre de méthode.
Tu devrais répondre oui, Gabriel. Je te rappelle qu’il y a quelques secondes à peine, tu étais prêt à le supplier pour qu’il te libère.
- Tu m’excuseras, mais mon épaule, mes doigts, ma mâchoire et mon ventre ont un mal de chien à te croire…
Tu es un con, Gabriel.
- Cependant, ma patience a certaines limites, et tu t’apprêtes à les dépasser ! Je pourrais te faire sauter une jambe ou deux, pour te faire parler. Remercie-moi de préférer la méthode archaïque qui consiste à te laisser en vie !
Tais-toi, Gab. Tais-toi ! Quand Ray rugit, la savane entière se couche. Valable pour les insectes dans ton genre, mais aussi pour les serpents. Il te suffit de regarder la tête de sa femme.
- Comme tu n’as pas l’air de goûter à ce genre de chose, je me vois dans l’obligation de durcir quelque peu notre entrevue, Gabriel.
Le nain jaune attrape le fusil à pompe et le charge. Ça ne me rassure pas des masses, mais je dis que s’il me tire dessus, frêle comme il est, le recul lui arrachera les bras.
- Maintenant parle, Gabriel. Parle ou Al s’occupera de faire de ton corps une série d’États indépendants. - Okay, okay, Ray. Je vais te dire ce que tu veux, tout ce que tu veux ! J’suis déjà en position d’infériorité, non ? - Tu l’étais à la naissance…
Connard, je t’emmerde.
- Si tu veux aussi. Mais aide-moi un peu, d’accord ? Sois plus précis. Quand je dis que je ne vois pas ce que tu veux, je ne vois vraiment pas, je le jure ! - Al... Sois un bon citoyen, libère la jambe gauche du joug tyrannique de ce jeune homme. - Raaaay ! Je mens pas, bordel ! Tu crois qu’un homme attaché à une chaise et à deux doigts de se faire truffer de plomb te raconterait des conneries ?
Mon dieu… Je vois les sillons de la réflexion creuser son front d’ordinaire si lisse. La logique et l’intelligence du couard… C’est une chose qu’il ne doit pas connaître. À côté de lui, Chinese Al commence à s’impatienter. Il est tendu comme un mec prêt à jouir, et ne rêve que d’une chose : vider son chargeur.
- Dis-moi juste ce que tu veux… précisément. Et je te répondrai, ou te filerai toutes les infos que j’ai en tête. J’ai pas envie de crever, Ray. - D’accord. Mais tu as une chance de me prouver ta bonne foi. Je vais te poser une question, pour être sûr, et après, j’aviserai s’il est bon de poursuivre notre petite conversation. - Tout ce que tu veux, Ray. Tout ce que tu veux.
Je commence à fatiguer, mine de rien. Je perds pas mal de sang, j’ai les nerfs prêts à craquer, les muscles en feu… L’épuisement risque de m’emporter avant la cartouche du fusil. Mais je me force néanmoins à avoir l’air vivant, juste pour le principe.
Ray sourit benoîtement, pendant qu’il réfléchit à sa question. Il cherche ce qui va pouvoir me piéger et m’obliger à dire la vérité. D’ailleurs, un petit éclat malicieux, dans son regard, me fait dire qu’il a trouvé.
- Gabriel…Tu as baisé Caroline ?
Et merde. Pile la chose que je ne voulais pas entendre.
Comme je l’ai dit, Ray est d’une jalousie maladive. Il est prêt à tuer quiconque lui rappelle que sa femme a été à elle seule le plus grand bordel de toute la ville.
Traduction, si je répond « oui », il se vexe et décide de me faire sauter le caisson. Et si je répond « non »… Il doit savoir ce qu’il en est… Quelle que soit ma réponse, je suis sûr de faire répandre ma cervelle sur le sol.
En même temps, je suis surpris de voir que Caroline n’a aucune réaction. Je me serais au moins attendu à ce qu’elle lui jette un regard courroucé, ou qu’elle écrase la clope - qu’elle vient d’allumer - d’un geste colérique et rageur.
Mais que dalle.
Elle tire latte sur latte, comme si elle n’avait rien entendu.
- Gabriel ? Réponse, s’il te plaît.
Il regarde sa montre.
- Tu as trente secondes.
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