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Sentimental/Romanesque
REDBUCHE : Quand nos langues s'emmêlent… [Sélection GL]
 Publié le 15/07/12  -  9 commentaires  -  36210 caractères  -  388 lectures    Autres textes du même auteur

Une histoire d'amour un brin naïve. Pour une femme, d'abord… Mais rapidement, derrière la femme, un autre amour se dessine.


Quand nos langues s'emmêlent… [Sélection GL]


Ça se passe à l'époque où je découvre tout juste Paris. Je passe mon temps à errer dans les rues, à battre le pavé en rêvassant. Je tourne autour de mon immeuble comme un chien autour de sa niche, pour mieux en faire mon territoire. Je descends puis remonte la grande rue plusieurs fois par jour, attentif aux passants, aux lieux. J'aime regarder les visages, identifier les tribus. Je suis fasciné par ce mélange de cultures, de races, de dialectes. On y distingue les vagues d'immigration successives qui ont ciselé ce quartier au cours des décennies jusqu'à lui donner les traits métissés d'une métropole.


Je suis né en Vendée, à Bourzauge. En Vendée, on n'a pas tout ça. Dans mon village, si on remonte un peu dans l'arbre généalogique, on s'aperçoit qu'on est tous de la même famille. Mes grands-parents paternels étaient cousins germains. Alors je dois dire que Paris, pour moi, c'est sacrément exotique. Quand on m'a proposé ce stage, je n'ai pas hésité. C'est sans doute ça qui m'a poussé à prendre le large. L'exotisme. Échapper à l'atavisme familial. Sortir d'un cadre connu sous tous les angles par des générations d'aïeuls consanguins toujours du mauvais côté de l'Histoire : royalistes, pétainistes, villiéristes…


Ce qui m'a d'abord sauté aux yeux dans cette grande rue, c'est l'influence asiatique. Je m'y arrête parfois pour me goinfrer de glutamate pour pas cher. Dans ces établissements tout est traduit dans les deux langues. On peut lire des petites annonces en chinois sur les murs, écouter des voix étranges et incompréhensibles. Puis aux alentours, on remarque les supermarchés casher, les boucheries hallal, les restaurants indiens, antillais, colombiens. J'ai discuté une heure dans une laverie avec un cuisinier sri-lankais. J'ai aidé une femme en boubou au fort accent africain à monter sa poussette dans les escaliers. J'ai aussi passé une soirée à boire dans un parc avec deux Tunisiens parlant un français qui me faisait penser à un tableau cubiste. Très souvent les personnes que je croise dans la rue parlent une langue dont je ne comprends pas le sens, mais dont la musique me berce et représente à elle seule un voyage et un poème. Toutes ces communautés coexistent, s'articulent et forment un ensemble foisonnant de vie, de couleurs et de sons.


Enfin il ne faut pas s'emballer, on est à Paris quand même : si l'aspect populaire tient encore bon, la bourgeoisie gagne un sacré bout de terrain. Les magasins bio poussent aussi vite que disparaissent les kebabs. Les petits bouis-bouis chinois se refont une beauté et en profitent pour doubler les prix à la réouverture… Tout prend une allure plus tendance, plus léchée, plus chic. Les bobos bien sapés avec des airs d'artistes remplacent peu à peu les vieux joueurs de cartes basanés aux terrasses des cafés. Ça parle de révolution en croisant les jambes comme des femmes et en remontant une mèche soi-disant rebelle… Ceux qui les ont vécues, les révolutions, ont déménagé quelques rues plus loin, chassés vers d'autres bistrots plus accueillants et moins onéreux. Autres temps autres mœurs.


Moi je n'ai pas vraiment de quoi m'arrêter dans les cafés, de toute façon. J'achète quelques longnecks à la supérette du coin et je pars en vadrouille, souvent dans ce parc où j'ai mes habitudes. Il s'est remis à faire beau et chaud. Résultat, tout le monde tousse à cause de la pollution, mais l'air est quand même d'apparence plus douce. Je monte en haut d'une colline et je cherche un coin d'herbe ou un banc ouvert sur l'horizon. Je me repose l'âme en admirant les arbres, en goûtant ce petit paradis de verdure si bien agencé qu'on en oublie qu'il n'a pas été fait par Dieu mais par un paysagiste inspiré. J'aime ses pentes escarpées, l'aspect sauvage, démesuré que suggère ce mélange de forêt, de roches abruptes, et l'eau qui submerge les quelques constructions humaines comme des ruines antiques. Je bois tranquillement en méditant. J'y reste longtemps, retardant le moment où j'aurai à retourner dans le salon minuscule et encombré où j'ai élu domicile, hébergé par un couple d'amis bienveillants. Puis en rentrant, je regarde encore les gens passer en essayant d'imaginer leur vie, charmé par les couleurs de peau qui vont du rose nordique au noir d'ébène en passant par toutes les nuances possibles, intrigué par la variété des styles vestimentaires des hommes et des femmes, vitrines des cultures du monde entier.


Les beautés exotiques me fascinent. J'en croise beaucoup dans mon quartier, surtout des Africaines. Des filles belles comme des soirs d'été. Celles qui me captivent le plus sont souvent grandes et minces, à la peau lisse et au regard fier décoché comme une flèche en plein cœur. Difficile de ne pas se retourner à leur passage. Des fesses fermes et haut perchées, une posture altière dont les talons et la coiffure sophistiquée rehaussent mon admiration. La nuit quand je ferme les yeux, ces filles s'invitent dans mes rêves. Elles s'installent à leur aise et ne me quittent qu'au matin.


***


Au bout de quelques semaines je rencontre Lili. Elle ne vient pas de Somalie Lili. Perdu. Elle vient du Brésil. De ce pays je connais seulement un ou deux airs de musique d'ascenseur et des clichés de grandes plages bordées d'immeubles et de bikinis. Je vais découvrir qu'il recèle bien d'autres charmes. Mais attendez, là je vais un peu vite, je rembobine.


Roland m'a invité à le retrouver dans un club d'un quartier branché de Paris. Il est intermittent du spectacle. On était au collège ensemble à La-Roche. Un musicien qui règle ses factures en tenant le bar d'un café-concert. C'est donc au comptoir de son bar que je suis convié, j'ai l'espoir d'y sauver quelques euros sans pour autant épargner mon foie, car dans les soirées parisiennes j'ai souvent constaté la tendance inverse. On part avec cinquante euros en pensant s'offrir une bonne nuit de débauche et on rentre à moitié sobre et sans un sou en poche. La-Roche-sur-Yon c'est moins animé, certes, mais c'est aussi moins cher.


L'endroit est plutôt chicos, style club de jazz des années 30, avec ce soir une programmation de haut niveau : en tête d'affiche un trompettiste américain légendaire qui vient y fêter ses soixante-dix ans. En arrivant à l'entrée de la boîte, j'ai tôt fait de remarquer que mon invitation en rend certains envieux. Le gorille ne sourcille pas en entendant le nom de mon pote puis le mien, je fais mon entrée confiant, déjà un peu ivre et un poil exalté. Ça sent les grands soirs. Je suis à l'aise dans mes pompes, j'ai sorti le must de ma garde-robe. La soirée va être bonne.


Bref, mon ami sert jusqu'à la fin du concert. Je reste accoudé au bar à taper la causette avec lui et d'autres clients, profitant de l'ambiance intimiste créée par la musique. J'enchaîne des whisky-colas bien dosés. J'en paye qu'un sur deux, de quoi nous réjouir, moi et mon portefeuille.


C'est après le concert que tout est devenu plus intéressant. Au bout de deux ou trois heures du matin, le bar ferme et seules une cinquantaine de personnes restent à l'intérieur. Il y a quelques stars de la musique que je connais plus ou moins, des producteurs et des gens du spectacle, de très belles filles qui pourraient être des mannequins… À moins que ce ne soit des hôtesses.


Ça sent quand même beaucoup le fric et le botox. Mais le buffet à volonté est assuré par un grand hôtel et des serveurs parcourent la salle pour remplir nos flûtes de champagne. C’est le genre d'ambiance qu'on ne boude pas longtemps. Je déambule tranquillement en sirotant ma coupe quand tout à coup, une panthère au visage envoûtant me saute aux yeux en me barrant la route :


– C'est fou hein cette soirée, t'as vu ?

– …

– Je connais personne… avec ma copine on a vu des gens qui étaient à l'entrée alors on est arrivées et le videur nous a demandé si on voulait faire un tour à l'intérieur. C'est super ! Tu as vu là-bas ? Marcus H. ! Et ici c'est Herbie M. !


Elle mesure au moins un mètre quatre-vingts, sa peau est d'un brun profond qui fait ressortir avec éclat ses yeux et son sourire. Le genre de fille à qui on propose de rentrer dans les soirées VIP, quoi. Je dois sûrement rêver.


– Oui carrément ! Moi pareil… C'est un pote qui m'a invité… Je sais pas trop ce que je fous ici mais j'aime bien !

– C'est clair, c'est trop bien, tu te rends compte ! Je vais jamais dans des trucs comme ça ! Tu t'appelles comment ? Reste près de moi ! Tu pars pas surtout ! Ma copine elle est partie parler avec ce mec là-bas, me laisse pas toute seule !


Si tu y tiens, ma jolie, je me dis. Je ne suis pas près de te lâcher !


***


Je reste en sa compagnie sans me faire prier. La conversation pétille autant que le contenu de nos verres. Les musiciens continuent d'animer la soirée et se relaient sur scène en nous offrant un bœuf jazz endiablé. Nos visages se touchent presque quand nous parlons. Ça sent bon la noix de coco. Je ne la connais pas depuis cinq minutes et pourtant sa voix sensuelle m'enlace, je suis comme un gamin dans les bras de sa mère. C'est peut-être le fait de devoir lever la tête pour la regarder… Elle a aussi un petit accent étranger qui m'intrigue mais je n'ose pas encore lui demander d'où elle le tient. Je savoure ma chance d'être tombé sur cette beauté imprévue, en me disant que cela ne durera pas, qu'elle retrouvera son amie et disparaîtra subitement.


Mais le temps passe et elle est toujours là. On commente les invités, essayant de reconnaître les stars ou de deviner le métier d'Untel par son look et ses manières. On fait des suppositions sur les chances qu'a sa copine de sortir avec l'homme qu'elle a abordé. Grisés par le luxe, on laisse les serveurs remplir nos coupes avant même de les avoir vidées. Je lui propose de se mêler aux autres mais elle préfère rester à l'écart, intimidée par ce monde si radicalement différent du nôtre. Elle est d'ailleurs vêtue assez simplement, d'un justaucorps bleu ciel et d'un pantalon noir moulant. Mais sa taille impressionnante est magnifiée par une paire de chaussures à hauts talons. Elle porte des grands cercles de cuivre aux oreilles. Un mélange de simplicité naturelle et de classe un peu outrée. Malgré sa timidité, certains invités prestigieux l'ont remarquée. Un pianiste américain mondialement célèbre, qui discute dans un groupe tout près de nous profite de s'être rapproché d'elle pour engager la conversation, et en deux paroles échangées, essaye de l'inviter à se joindre à lui pour la soirée. Mais elle refuse avec un geste gêné et un anglais approximatif.


– Tu te rends compte ! C'était Herbie M. ! Il m'a demandé si j'étais libre ce soir, et si je veux passer la fin de la soirée avec lui, il est fou ! Je ne peux pas faire ça quand même !


En disant ça, elle prend un air faussement choqué où se devine le plaisir évident d'avoir séduit une célébrité. Elle ouvre grand sa bouche et roule des yeux en une pantomime craquante. Nous allons ensuite nous asseoir sur une banquette en cuir dans un coin lounge, où l'on nous apporte une part du gâteau d'anniversaire du trompettiste émérite. Elle m'apprend qu'elle est brésilienne et qu'elle vit à Paris depuis déjà cinq ans. Son nom c'est Liliane. Étrange pour une Brésilienne. Mais elle m'explique que le kitch français marche très bien au Brésil, surtout pour les prénoms. Nous apprenons à nous connaître, sans précipitation, amusés par cette soirée insolite comme des gosses dans un parc d'attractions.


Imaginer ce grand félin exotique attiré par moi est plutôt incertain. Mais j'ai déjà enfilé un bon nombre de coupes de champagne. La salle commence à se vider et mon copain est rentré chez lui depuis déjà plus d'une heure. Je me décide donc à tenter discrètement ma chance en passant un bras sur le haut de la banquette. Par-dessus son épaule. Elle se raidit et fait un léger geste de recul, sans toutefois perdre de sa cordialité. Mais je comprends qu'il n'y a rien à espérer, je ravale ma fierté et ramène mon bras avec le plus de naturel possible. Après cinq minutes et quelques propos incohérents, je prends congé d'elle. Nous nous échangeons nos numéros de portable et je l'invite, sans grand espoir, à me rendre visite là où je bosse. J'en profite pour embrasser ses joues moirées et emporter un peu de l'odeur de coco et de beurre de karité qui émane de ses tresses.


La rue est presque déserte. En mettant le nez dehors, j'ai l'impression de remettre les pieds sur terre. Sans dessoûler pour autant. Je me rends compte que j'ai toujours ma coupe de champagne vide à la main. Un couple passe devant moi, serrés l'un contre l'autre. Il a plu pendant la soirée, l'asphalte est humide et dégage une odeur douceâtre qui me donne envie d'allumer une clope. Je m'exécute et commence à tituber, sans me presser, jusqu'aux arrêts de bus. Je traverse les deux ponts en humant le vent frais, et dans cet intervalle, perdu entre les deux bras de la Seine, je réalise à quel point cette ville est magique et ensorcelante. À l'arrêt de bus, j'attends un quart d'heure, puis mon œil se pose sur un écriteau. Grève des transports. Pas de bus ce soir. Les chauffeurs en ont marre de recevoir des coups de batte de baseball et des cocktails Molotov dans la tronche quand ils font leur boulot. Difficile de leur en vouloir. Je commence à marcher en suivant la ligne de métro. Décidément, si flâner dans les rues devenait un sport olympique j'obtiendrais une médaille. Ça me laisse le temps de repenser à ma soirée. À Liliane. Surtout à Liliane. Quelle sacrée minette ! Belle mais avec un air ingénu, comme si elle ignorait tout de ce pouvoir qu'elle détient sur les hommes. Tellement gaie, dynamique, et accessible avec ça, Liliane ! Enfin, accessible… plus ou moins.


Sur les grands boulevards la nuit, on trouve toutes sortes de gens. Plus ou moins ivres, plus ou moins patibulaires. Surtout des fêtards forcés de rentrer à pied, comme moi, par la grève des bus. Des destins variés plongés dans un torrent d'exubérance et d'ivresse qui finissent par s'écouler ensemble dans le grand courant des avenues parisiennes. Je passe dans une supérette et achète une canette de bière. Ça m'aide à penser. Tout en marchant et buvant, je continue à flotter dans le parfum de Liliane et l'ambiance feutrée du jazz club.


***


Et je flotte encore quand, trois jours plus tard, une collègue me passe un petit morceau de papier. Un mot pour moi. Une certaine Liliane est passée. Elle a fait sensation. Grande, sensuelle. Comme je n'étais pas là elle m'a écrit ce petit mot. L'écriture est jolie. Ample et ronde comme ses hanches. Mais ce qui frappe surtout c'est cette langue. Étrangère mais transparente. Les mots semblent porter la sensualité et le naturel présents dans l'inflexion de sa voix.


Olá

Tudo de bom pra ti.

Um beijo da sua parceira da festa de aniversário do Quincy D.

Liliane


À côté de son nom, un petit visage souriant, dessiné maladroitement. Derrière, son numéro de téléphone et son email.


Tudo de bom pra ti… Um beijo. Quelle expression juste et sonore pour traduire la sensation si douce, si charnelle d'un baiser. Je n'aurais jamais cru qu'elle viendrait. Et je ne savais pas non plus que cette langue, encore peu familière mais déjà si attirante, deviendrait plus tard une partie de moi-même.


Nous avons décidé de nous retrouver dans un bar d'ambiance latino le vendredi suivant, dans une rue animée et festive du nord de Paris. Elle est très amicale au téléphone, son accent me fait frissonner. Je suis là dix minutes avant, comme à mon habitude. Je commande mon troisième demi quand Liliane arrive, environ quarante minutes après. Je me rends compte lors de nos rendez-vous suivants qu'elle a fait un effort pour être ponctuelle ce soir-là, le retard étant chez elle une seconde nature. Je ne me souvenais plus qu'elle était aussi grande, sa démarche chaloupée me captive quand m'ayant repéré au fond de la salle, seul à ma table, elle avance pour me rejoindre. Elle a profité du temps particulièrement doux en cette fin de saison pour se vêtir entièrement de blanc. Dès les premiers mots, je sens qu'elle me regarde comme on se délecte d'avance d'un plaisir interdit, un peu comme une fille qui tient à sa ligne contemple une mousse au chocolat. Je m'en réjouis et m'en étonne. Elle ne tarde pas à annoncer la couleur :


– Ce n'est pas très bien de donner rendez-vous seul à une femme mariée, comme ça, le soir ! Tu cherches à me faire faire des bêtises ?


Je n'en reviens pas.


– Tu es mariée ?

– Bien sûr ! Je suis mariée depuis cinq ans. Tu n'as pas vu mon alliance ? Je cherche pas à la cacher !


Les modulations exotiques de sa voix roulent et rebondissent contre la paroi vide de mon crâne. Elle me présente sa main aux longs doigts effilés et un peu tordus où brille une seule bague, d'une luxueuse simplicité.


Elle me fixe en jouant des sourcils avec un air mi-amusé mi-interrogateur, attendant ma réaction. Son visage beau, large aux grands yeux espacés et profonds semble m'encourager à la corrompre. Je tente de retenir la foule de questions qui m'oppresse. Mais, ton mari te laisse sortir toute seule ? Où était-il l'autre soir ?


Je décide de jouer l'homme expérimenté, pas impressionné pour un sou. À vrai dire, à Paris ce genre de situation doit être monnaie courante. Et l'expérience est intéressante. Une femme mariée. Qui l'eût cru ? Je laisse filtrer ma curiosité à petites touches.


– Mais si tu es mariée depuis cinq ans tu as dû te marier très jeune ?


Elle ne tient pas à me dire son âge, par pudeur ce qui est très compréhensible, mais elle me laisse entendre qu'elle est plus âgée qu'il n'y paraît… Par un jeu de devinettes, je finis par en déduire qu'elle a plus ou moins trente-quatre ans. Presque dix ans de plus que moi. Je ne lui cache pas mon étonnement :


– C'est extraordinaire, tu en fais vingt ou vingt-cinq pas plus !


Elle m'explique que la mélanine, une substance que l'on trouve dans les peaux mates atténue le vieillissement. Hum, intéressant. J'ai décidément une raison de plus de trouver les filles de couleur aussi attirantes.


Nous passons le temps à boire des cocktails et à flirter le reste de la soirée. Je fais le beau et pousse le cliché jusqu'à lui montrer un tour de magie, en faisant disparaître une pièce de deux euros pour la faire réapparaître derrière son oreille. Le vieux truc est un peu ringard mais son effet est plutôt réussi. Eh, chacun joue de son charme comme il peut, non ? Je cherche le contact, pose ma main sur la sienne. Je remonte une mèche de ses cheveux, j'en profite pour lui caresser la joue. Mais elle continue sur la défensive, ramenant toujours le sujet à son mari, m'expliquant qu'elle ne l'a jamais trahi, qu'elle lui a toujours été fidèle pendant leur cinq ans de mariage. Qu'elle ne pourrait pas lui faire ça. Mais ses yeux, son attitude, sa présence ici. Tout s'accorde à me faire penser autrement. Finalement elle m'explique qu'elle doit partir, que son mari était sorti avec des collègues de boulot et qu'il va bientôt rentrer. Je la raccompagne au métro et nous nous engageons dans la rue. Les bars sont encore ouverts, l'atmosphère est bruyante et très animée. Déjà un peu éméché, j'essaie de la prendre par la taille quand nous parlons, de lui prendre la main, mais elle m'en empêche. Elle réagit en me donnant des petites tapes sur le bras et en me grondant :


Não me pega! Não me pega!


Cette phrase chantante sort de sa gorge sur des notes aiguës et traînantes. Elle sonne plus à mes oreilles comme un encouragement que comme une intimidation. Elle ne veut pas être remarquée ici avec moi, me dit-elle. Le monde est petit, elle pourrait croiser des connaissances. J'ai l'impression de rentrer à pas de loup dans le costume de l'amant, celui qu'on rencontre en cachette. Je peux déjà me voir dans une chambre, enfermé dans un placard. Mais enfin, rien n'est encore fait. Avant de la quitter, j'arrive finalement à trouver ses lèvres pour un baiser furtif, un peu frustrant mais riche de promesses. Je regarde cette grande gazelle disparaître dans la bouche du métro et l'envie me titille de galoper après pour lui asséner un coup de patte dans le flanc et la manger toute crue. Il est encore tôt. Je me dirige en rêvassant vers une supérette où j'achète une de ces longnecks dont j'ai l'habitude pour conclure la soirée.


***


– … Et au fait la fille de l'autre soir, avec qui tu as passé la soirée à discuter, ça s'est terminé comment ?

– Bah écoute, on s'est revus vendredi dernier. Petite soirée très sympa. On a discuté en buvant des cocktails. Mais elle a dû rentrer tôt.

– Ah bon ça c'est mal passé ? J'ai eu un arrivage de whisky récemment, tu vas m'en dire des nouvelles ! Je t'en sers un petit ?

– Oui vas-y… En fait non ça s'est plutôt bien passé, c'était chouette mais… Elle est mariée. Donc je sais pas trop ce qu'elle veut, si ça va se faire ou pas. Mais on s'est quand même légèrement embrassés. Alors je ne sais pas trop à quoi m'en tenir.

– Moi, ce que j'en pense c'est que tu as toutes tes chances, les femmes mariées n'attendent que ça de trouver un prince charmant en intérim pour redonner un peu de piment à leur vie. En plus si tu dis qu'elle t'a déjà embrassé, ça m'a tout l'air d'être une sacrée s…

– Wohh ! Je t'arrête tout de suite c'est pas son genre, elle fait que de me répéter qu'elle n'a jamais trahi son mari. Remplis mon verre, ça m'aide à penser… T'as peut-être raison ça se tente. En plus tu verrais les messages qu'elle m'écrit c'est très chaud. Je comprends pas toujours comme c'est en portugais mais… D'ailleurs cette langue, je sais pas comment l'expliquer… Tianinho, elle m'appelle. C'est comme des formules de sorcières style abracadabra, ça me captive. Et quel corps ! J'ai envie de lui sauter dessus, je la boufferai toute crue…

– … Moui, calme-toi. Un peu trop grande à mon goût. Et ses fesses, je dois dire que je les trouve un peu trop volumineuses. Mais toi tu aimes quand il y a de la chair. Hein, mon salaud ? Moi je me contente des os, je les aime bien du genre chétif. Alors comment il est ce whisky ? Tu vois je me fous pas de toi ! Un single malt seize ans d'âge tout droit débarqué des îles de l'Écosse et vieilli dans des fûts de Bordeaux !

– C'est clair que, de ce point de vue-là, elle est généreuse. Quand je la vois elle me rappelle ce poème de Baudelaire qu'on avait étudié au collège de La-Roche : Du temps que la Nature en sa verve puissante / Concevait chaque jour des enfants monstrueux,/ J'eusse aimé vivre auprès d'une jeune géante, / Comme aux pieds d'une reine un chat voluptueux… Très bon le whisky. Tourbé. Tout en nuances, pas trop agressif. Des notes boisées… ça se boit tout seul !

– Et sinon tu vas la revoir ? Tiens goûte celui-ci, c'est un whisky japonais. Je te préviens, c'est différent, mais c'est pas mal du tout !

– Les Japonais, ils font du whisky ? Ah oui tiens, intéressant. Moins rond, moins parfumé mais un peu plus sucré, non ? J'ai rien contre les Japonais mais je préfère l'autre ! Je dois la revoir mercredi après-midi, pendant que son mari travaille. On va se balader dans le parc près de là où je loge. Le lendemain je prends la route. Mon stage est terminé, je dois rentrer au bled.

– Bon alors pourvu que le poisson prenne, cette fois ! Trinquons à tes amours ! Santé !

– C'est ça. Santé !


***


Je regarde ma montre : elle a déjà un quart d'heure de retard. Je me donne encore un autre quart d'heure avant de l'appeler pour savoir si elle vient toujours. Bon, après tout être assis sur ce banc à attendre n'est pas désagréable. Je me trouve particulièrement décontracté pour un rendez-vous galant, j'ai la tête vide, l'esprit serein, comme si le tour était joué d'avance. J'ai le sentiment que je n'ai plus qu'à me laisser porter, que tout arrivera comme il faut. Le soleil est de la partie. Il y a peu de badauds aujourd'hui au parc. Les Parisiens nous ont gentiment laissé le champ libre pour roucouler en paix.


Cette fois-ci à son arrivée, j'ai droit à un baiser passionné. Ma bouche sur sa bouche, large et pulpeuse. Nos langues qui se mêlent et s'entremêlent. Nos dents qui se mordillent. Un vrai baiser. Long, sensuel et sauvage. Um beijo. Un de ceux dont on garde le goût bien longtemps après l'avoir consommé.


Nous nous promenons dans le parc un moment puis nous nous installons sous les arbres, au bord de l'eau. Allongés sur l'herbe l'un contre l'autre, nous profitons des rayons du soleil.


– Je t'ai appelé hier soir, gatinho. Tu te rappelles ?

– Oui, j'ai décroché mais tu n'as pas répondu…

– Normal j'étais avec mon mari en train de faire l'amour sur le divan. Je voulais que tu entendes. J'ai pensé à toi.

– Mais tu es folle Lili ! Et s'il s'en rendait compte ? Je pensais que c'était une erreur, que tu ne voulais pas m'appeler. J'ai rien entendu, j'ai raccroché au bout de quelques secondes.

– Dommage… Tu sais, je n'ai jamais eu d'amant. Quand mes copines mariées me parlent de leurs aventures, moi je trouve ça dingue. Je me dis que jamais je vais faire quelque chose comme ça. Si ma mère et ma sœur elles savent ! Meu deus! Je serais morte de honte !

– Mais ça se passe bien avec ton mari ? Si tu es ici c'est que ça ne doit plus marcher aussi bien qu'au début non ?

– Ah je sais pas. Je l'aime. Mais c'est différent. Il est très gentil avec moi. Mais on parle presque pas, il est toujours devant son ordinateur. Il préfère aller boire avec ses amis ou aller à la muscu. Il veut pas sortir avec moi le soir. Moi je voudrais aller écouter de la musique, danser. J’ai besoin de ça, c'est important pour moi. Puis j'ai repris mes études et lui il travaille, je suis souvent toute seule…

– Vous vous êtes connus comment ?

– Il a travaillé dans la même entreprise que moi au Brésil, à Recife. Je l'ai connu et on est tombés amoureux. Là-bas, pour une femme noire comme moi, trouver un bon mari, un Européen, c'est beaucoup de chance. Alors quand je me suis mariée avec Jacques, j'ai été très heureuse. Je suis allée en France avec lui. Lui il est suisse mais il travaille ici à Paris… Toi tu es meu amigo. Tu dois aller au Brésil aussi. Je vais te présenter ma sœur. Elle est très belle, plus belle que moi ! Tu vas tomber amoureux tout de suite. Tu vas faire un très bon mari pour elle !

– Tu es folle ! Tu sais demain je retourne en Vendée. Mon stage est fini.

– C'est vrai ? Nãooo meu gatinho! Reste ici avec moi ! Je vais avoir beaucoup de saudades de toi… Mais c'est mieux comme ça je pense. Je suis mariée. J'aime Jacques. Toi tu es mon ami. C'est mieux si tu pars. Embrasse-moi.


Elle me quitte finalement pour retourner auprès de son mari. Nos câlins sont restés chastes. Quand ma main s'aventurait trop précisément sur son corps, les petites tapes et les não me pega aux syllabes qui s'allongent retentissaient aussitôt. Elle a dû répéter une dizaine de fois que j'étais son ami, sans pour autant résister à mes baisers… Sur le chemin du retour, je me demande si je n'aurais pas dû être plus insistant. Est-elle réellement prête à tromper son mari ou cherche-t-elle simplement à pimenter sa vie en s'inventant une aventure qu'elle sait qu'elle ne consommera jamais ? Enfin maintenant la question ne se pose plus. Je prends la route demain. Retour en Vendée. Elle, elle part en Suisse pour les vacances, dans la famille de son mari. Nous avons promis de nous appeler, de nous envoyer des mails.


***


Un des premiers effets de la distance est d'exacerber les affects. Puis quand l'état de dépendance est passé, que le souvenir se fait moins pressant, la relation s'étiole et l'on commence à revenir sur terre. On se demande alors pourquoi on s'est laissé aller à se sentir si proche, à se confier à cette personne que l'on considère tout compte fait comme étrangère. L'autre possibilité est que la cristallisation fasse son effet, que d'une simple rose, l'on fasse un jardin éclatant. On additionne alors à la réalité du souvenir, des qualités imaginaires qui rendent l'être aimé encore plus unique et indispensable. Les affects gonflent alors jusqu'à l'explosion. C'est ce qu'il s'est passé avec Lili. Elle prend un malin plaisir à se laisser aller à des paroles aguicheuses pour aussitôt les bannir et jurer qu'elle fera les efforts nécessaires pour se contrôler et ne plus s'y abandonner. Je me laisse entraîner dans ce petit jeu en lui envoyant des messages romantiques en jouant parfaitement le rôle de l'amant transi par l'absence de sa maîtresse. Et petit à petit, la rose se transforme en jardin…


De lilinha83@gmail.com

À etienne.gaborit@hotmail.fr :


Tianinho,

Tu as fait du vaudou, je sais pas, je suis sur que tu m'as ensorcelé…

Quand on s'est quitté j'ai essayé de ne pas regardé derrière moi, c'était difficile…

Tu as passé dans ma vie et as pris un peu de moi en me laissant un peu de toi…

Même si rien de plus s'est passé entre nous, je deviens accro de toi.

Désolé par mon français, plusieurs fois c'est Jacques que m'aide avec la grammer, mais là, il pourra rien faire. Il faut que je dorme, je vais essayer.

Je reviens dimanche soir.

Bon weekend

Beijos carinhosos,

Oublie pas, on est que des amis…

Liliane


De etienne.gaborit@hotmail.fr

À lilinha83@gmail.com :


Lilinha carinhosa,

Je ne fais pas de vaudou mais je pense qu'on a été ensorcelés tous les deux.

En lisant les mots que tu m'écris je me sens tout troublé, ça réveille les émotions que je ressentais en te serrant dans mes bras.

Je suis encore sous le choc de tes paroles caressantes,

je sais bien qu'il faut que j'arrive à te considérer comme une amie et que j'oublie mes rêveries plus sensuelles mais c'est difficile avec l'impression que tu me laisses.

Te revoir et entendre ta voix si agréable avec ton petit accent brésilien va me rendre fou !!!

Je te fais des tonnes de bisous sur tout le corps, estrela do meu coração.

Beijos. Saudade.

Seu Tianinho.


De lilinha83@gmail.com

À etienne.gaborit@hotmail.fr :


Tianinho, gatinho querido

Je crois que mon cœur va finir par se calmer avec la distance et le temps, mais par le moment, je n'arrête pas de penser à toi.

Tenho muita vontade de beijar tua boca. Ah, je sais, il faut me contrôler, je te promets de ne plus écrire de cette façon. Et en plus, je fantasme avec toi. Je deviens folle.

Un dernier bisou torride sur tes lèvres, avec ma langue que parcourt ta bouche…

A partir de maintenant je te ferai juste des bisous sages sur les joues, comme des bons amis !

Com carinho de quem te quer bem (j'ai une peur énorme que ça devienne plus que tendresse).

Tambem tenho saudades.

Tua gata


De lilinha83@gmail.com

À etienne.gaborit@hotmail.fr :


Tianinho

J'ai failli t'appeler à 2 heures du matin pour écouter tes mots doux et imaginer tes bisous parcourant mon corps. J'ai tellement envie de toi, ça devient obsessionnel…

C'est pas de la provocation, mais je besoin de te dire mes désirs les plus profonds.

Excuse moi, je ne pas le droit de te blesser, je me fais du mal aussi, j'ai honte de tout ça.

Liliane


De etienne.gaborit@hotmail.fr

À lilinha83@gmail.com :


Olà gatinha,

Quand je te lis je crois entendre ta voix sexy chanter à mon oreille, ça me fait du bien…

Tu n'as pas à avoir honte. Moi aussi j'ai terriblement envie de te revoir. Je ne sais pas si c'est très raisonnable de continuer à nous exciter à distance comme ça. Il faut qu'on arrive à tenir le coup, même si c'est dur.

Bisous

Seu Tianinho


De lilinha83@gmail.com

À etienne.gaborit@hotmail.fr :


Seu Tianinho

Merci beaucoup d'avoir m'appelé hier.

Je promets, je te promets, je te promets, je te promets, je te promets

Je te jure, je te jure, je te jure, je te jure, je te jure, je te jure, je te jure

Ne te plus parler sur des bisous torrides, beijos calientes, des caresses, mes envies, mes désirs, bla, bla, bla et etc, ok?

Si je le fais on va finir notre amitié.

Quand je dis "meu amigo" en portugais, cela veut dire un ami, pas mon ami, mon chéri, juste pour éclaircir et ne plus faire de confusion dans ta tête.

Je vais me contrôler et être raisonnable.

Beijinhos

Lilinha


De etienne.gaborit@hotmail.fr

À lilinha83@gmail.com :


Lilinha querida,

Tes mots sont comme des petits bisous et des caresses sur ma peau. Il est très doux de te lire.

Tout à l'heure, je faisais la sieste et je t'imaginais blottie dans mes bras, c'était très agréable…

Tu me manques tellement, j'ai envie de retourner à Paris pour te voir. Qu'en dis-tu ? Est-ce que tu oseras me retrouver ? Ah mais je ne veux pas te causer de problèmes excuse-moi de te proposer ça, ce n'est pas bien. Cheguei.

Je t'embrasse très fort en te faisant de gros bisous d'amitié sur les joues,

Seu Tianinho


De lilinha83@gmail.com

À etienne.gaborit@hotmail.fr :


Tianinho

Ne me parle pas comme ça, sinon j'aurai envie de te faire plein de bisous et d'autres choses…

Tu me manque aussi, j'ai envie de te revoir… Sim vem! Vem me ver aqui!

Beijos, beijos, beijos

Lilinha


Et me voilà donc de retour vers la ville lumière. Le soir tombe et le trafic est fluide sur l'autoroute. Le trajet de La-Roche-sur-Yon à Paris n'est pas des plus simples, mais que ne ferait-on pas pour une femme. Après quelques coups de fils passionnés, on s'est mis d'accord sur un petit hôtel dans le Quartier latin, quelque chose de ni trop misérable ni trop onéreux où l'on se retrouvera. Son mari doit retourner chez sa mère, en Suisse, pour une histoire de famille de dernière minute. Même Liliane ne semble pas vraiment savoir de quoi il retourne. Une occasion rêvée pour assouvir nos fantasmes communs. Après un trajet plutôt rapide, je me gare enfin dans le parking de l'hôtel. Je remplis les papiers à la réception et monte dans la chambre. Elle sent un peu le renfermé mais l'ensemble est agréable. Des savonnettes parfumées et des gobelets en plastique trônent sur la petite table collée au mur en face du lit. Il est presque l'heure, j'ai donc encore un peu de temps. Je décide de prendre une douche puis d'aller boire une bière au bar que j'ai aperçu au rez-de-chaussée. Soudain mon téléphone retentit.


C'est le numéro de Liliane qui s'affiche. Je décroche, et à ma grande surprise, c'est une voix d'homme qui répond :


– Salut connard. Je sais qui tu es, où tu habites et comment tu t'appelles. Si tu tiens à la vie t'as intérêt à ne plus t'approcher de ma femme. Espèce de fumier…


Je raccroche.


***


Je ne suis pas du genre Rambo, à faire le caïd pour une femme. Et encore moins, de surcroît, pour la femme d'un autre. Je n'ai jamais rappelé. Je tiens à la vie.


J'ai passé la nuit à l'hôtel. Seul. J'ai essayé d'appeler Roland mais il ne répondait pas. Sans doute en train de bosser. Comme j'étouffais dans la chambre, je suis sorti pour prendre l'air. J'ai fait le tour du quartier, observé les passants. J'ai essayé de me changer les idées. Il y avait de l'animation dans les cafés et j'avais vraiment besoin d'un remontant. En faisant le compte de ce que j'avais dépensé avec l'hôtel et le trajet pour venir ici, je me suis dit que prendre une cuite dans un café du Quartier latin n'était pas raisonnable. J'ai préféré entrer chez un petit épicier arabe et m'acheter quelques longnecks, que j'ai bues dans ma chambre car le temps s'était nettement rafraîchi.


***


Je n'ai donc pas connu l'intimité de ton corps, Lili. Nous n'aurons finalement jamais été amants. J'espère que tu n'as pas eu trop d'ennuis à cause de moi. J'ai essayé de te recontacter par mail, environ deux ans plus tard, quand l'eau sous les ponts avait passé, mais tu n'as pas répondu.


Un jour, j'ai laissé derrière moi ma Vendée natale pour aller au Brésil. Grand bien m'en a pris. Je n'y ai pas rencontré ta sœur et nous ne nous sommes pas mariés. Mais grâce à toi j'ai été emporté par une langue aux intonations ensoleillées, aux volutes sonores sensuelles et caressantes, vers une autre pensée, une autre culture. Vers un monde exotique et enivrant que je ne veux plus quitter.


Amei e agora faz parte de mim.

Obrigado Lili.


 
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   Anonyme   
26/6/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
J'ai bien aimé le côté "coitus interruptus" de cette histoire, je trouve que tout sonne vrai : l'ambiguïté de la femme, la patience rusée de l'homme, la fin penaude d'une histoire qui n'a pas commencé... En plus, pour moi, les ambiances sont bien croquées, les dialogues naturels.

Bref, un bon texte à mon avis, sur un sujet qui au départ ne me passionne pas ; j'ai suivi l'histoire avec intérêt. La description de la soirée parisienne, avec les célébrités, m'a toutefois paru un peu longue.

"Nous nous échangeons nos numéros de portable (...) Derrière, son numéro de téléphone et son email. " : le narrateur ne devrait-il pas déjà avoir le numéro de Liliane ?

   Perle-Hingaud   
8/7/2012
 a aimé ce texte 
Un peu
Une histoire à lire l'été... l'incipit n'est pas tout à fait respecté, à mon sens, car l'autre amour, derrière celui porté (ou imaginé), n'est évoqué qu'en trois lignes. Dommage. Les mails sont trop nombreux à mon goût, ils ralentissent le rythme et apportent le "trop" de mièvrerie à l'histoire. Sinon, l'écriture est sympathique, les ambiances joliment croquées. J'ai bien aimé la nuit parisienne.
Merci pour cette lecture.

   matcauth   
11/7/2012
 a aimé ce texte 
Bien
bonjour,

C'est une histoire agréable et bien écrite, un rythme léger qui va bien avec l'histoire, même si il y a quelques longueurs.

C'est vrai que cette histoire traîne un peu trop, mais elle raconte de façon si réaliste l'histoire de ce héros (malheureux ou heureux) et l'ensemble est cohérent, c'est pourquoi il s'agit plus d'une remarque que d'une critique.

Les sentiments du narrateur sont apportés par petite touche, le comportement de Lili également, tout avance au rythme de la réalité, permettant de plonger dans cette histoire et de la suivre comme si on était en face d'un ami qui nous la raconte.

Les longueurs, par contre, concernent aussi les dialogues, qui, cette fois, n'ont rien de réaliste, pour moi. De plus, le whisky arrive là par hasard, sans raison et le narrateur s'y attarde un peu trop.

De la même manière, la correspondance Internet vers la fin est trop longue pour accoucher de finalement pas grand-chose. Elle est répétitive, également.

Je trouve dommage que la langue portugaise soit aussi présente, il n'y avait à mon avis pas que ça pour présenter le Brésil.

La fin est plutôt bien puisque moi, je ne m'y attendais pas.

Voilà, je retiendrai une belle écriture, maitrisée et ne tombant pas dans les écueils grammaticaux et de vocabulaire, une histoire qui se laisse lire facilement malgré les gros paragraphes et ça, c'est à souligner.

Mais il y a pour moi trop de choses un peu inutiles ou qui durent trop longtemps.

Une lecture agréable, en tout cas.

   Palimpseste   
13/7/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Jolie tranche de vie... Histoire simple, émouvante malgré quelques passages un peu rapides (mais on est dans une nouvelle, rien ne dit qu'on n'a pas le doit à séduire un peu plus vite que dans la vie statistiquement habituelle)...

Tout petit détal, il aurait été judicieux de mieux séparer les emails, même avec une série de tirets.

Côté écriture, c'est impeccable.

Le titre n'est pas terrible, ça fait un peu mot d'humour en la pelle profonde et le langage de chaque protagoniste.

   Anonyme   
24/7/2012
Juste un mot sur un détail....On ne dira de personne au Brésil et surtout pas à Recife qu´il a fait du vaudou... C' est le seul passage qui n´est pas crédible... A Recife il y a bien des terrains, mais ils sont de Condoimble ou de Pai de Santos et on n´y utilise pas ce mot ci
Le reste est agréable à lire...

xaba

   brabant   
27/7/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour RedBuche,


Une Brésilienne qui reste cinq ans à Paris sans dépérir, ça n'existe pas. Six mois à la rigueur, allez, huit pour vous faire plaisir !

Bon, pour tout vous dire, je me suis senti de trop dans ce jeu amoureux, et j'ai eu envie de laisser Etienne et Liliane à leurs papouilles, à leur chaste intimité. Il sont mignons tout plein tous les deux, de vrais collégiens ayant heureusement passé l'âge des boutons et je n'ai pas trop aimé jouer les voyeurs. Bon, il fallait bien que je termine le texte par ailleurs passablement bien écrit.

Sémillante cette jeune femme ! A propos, au début, Etienne lui accorde de hautes fesse fermes agréablement proportionnées et plus loin le copain qui l'héberge la qualifie quasiment de vénus callipyge comme dans ce film sur la vénus hottentote que j'ai revu récemment. Attention, je ne porte pas de jugement de valeur hein, chacun a les fesses qu'il veut ou qu'il peut, d'ailleurs les miennes... non je ne dirai rien. Ha !

Qu'ai-je retenu de cette longue histoire ? Ben, que j'irais bien faire un tour au Brésil moi-aussi !

lol

   Pepito   
27/7/2012
 a aimé ce texte 
Vraiment pas
Je ne jugerai pas la forme pour la bonne raison que ce genre de texte m’ennuie de toutes manières.
Si je l'ai lu (parcouru en fait) c'est à cause des allusions au Brésil.
Et là, pour le coup, je trouve le fond assez lamentable.
Si vous aimez le Brésil, comme vous le laisser entendre, il est vraiment curieux que vous n'ayez trouvé que des stéréotypes TF1nesques à nous prodiguer.
Je passe sur la proposition du mariage avec la sœur, fleurant bon la vente aux esclaves, les allusions ridicules aux prénoms français, le vaudou et surement plein d'autres choses...
Heureusement, vous nous avez évité le pire, au final Lilianne n'était pas un travesti.
Je ne sait pas de quand date votre histoire (qui m'a malheureusement tout l'air d’être vraie), mais le Brésil change. Heureusement !
On ne sera bientôt plus confronté à ce genre de poncif.

Pepito, mari de Pepita...

   Dunkelheit   
30/7/2012
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Ce que j'ai apprécié par dessus tout c'est le réalisme qui émane de ce texte, la relation qui se déroule lentement , sans aucune promesse, le désir des deux côtés et finalement la désillusion et le retour à la réalité.

Je ne jugerai pas les allusions culturelles au Brésil, je ne connais que trop peu ce pays, mais il me semblait que le vaudou appartenait plus à la culture africaine. D'ailleurs je ne sais pas pourquoi, mais il m'a été difficile de voir une brésilienne, je ne voyais qu'une grande africaine au charme sauvage, rien de bien brésilien là-dedans.

Par contre, gros point négatif, la longueur du texte. Je n'ai rien contre les longs texte, mais celui-ci pourrait se départir de quelques paragraphes, de quelques descriptions aussi, et de tous les mails qui me semblent bien superflus ici. J'ai trouvé que ça nuisait à la lecture, ça floutait les émotions, endormissait une relation déjà timide.
La preuve est que même vous, vous vous perdez parfois dans vos descriptions, disant une première fois qu'ils s'échangent leurs numéros de téléphone, puis plus tard elle lui donne à nouveau. Elle a des fesses fermes et hautes et plus tard elle les a bien fournies...

Un effort sur le style à faire donc, se débarrasser du superflu surtout ! Bonne continuation tout de même !

   KarlRuhe   
7/9/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aime beaucoup ce narrateur juste assez naïf pour ce perdre dans une passion amoureuse foireuse. Un text plein de générosité et de sensualité qui me paraît parfaitement crédible, une écriture simple et légère. Un beau réalisme.


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