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Policier/Noir/Thriller
Scylla : 5 minutes
 Publié le 11/10/19  -  10 commentaires  -  5707 caractères  -  95 lectures    Autres textes du même auteur

Aujourd'hui c'est la fin du monde, dans cinq minutes tout sera fini. Je n’ai plus que ces cinq dernières minutes à raconter, mais finalement, ça ne change rien, c’est toujours la fin de l’histoire que l’on retient le mieux. Le début de l’histoire, l’évolution des personnages, tout ça n’intéresse pas le grand public. Si on veut faire une bonne histoire, il faut une fin sensationnelle, qui marque. J’ai donc de la chance dans mon malheur, ma fin fera une superbe histoire à sensation.


5 minutes


5 minutes


Aujourd'hui c'est la fin du monde, dans cinq minutes tout sera fini. Je n’ai plus que ces cinq dernières minutes à raconter, mais finalement, ça ne change rien, c’est toujours la fin de l’histoire que l’on retient le mieux. Le début de l’histoire, l’évolution des personnages, tout ça n’intéresse pas le grand public. Si on veut faire une bonne histoire, il faut une fin sensationnelle, qui marque. J’ai donc de la chance dans mon malheur, ma fin fera une superbe histoire à sensation.


J'avais espéré dormir assez longtemps pour éviter le décompte, mais j'avais fini par ouvrir les yeux sur mon plafond de bois, du chêne ridé par le temps. J'aurais préféré rêver, des rêves riches dont il me répugne de m'éveiller depuis des années. Depuis la première bombe à vrai dire. Depuis les premières radiations, les jours se traînaient sans date ni calendrier, mais le décompte lui était toujours présent. Nous épiant, égrenant les secondes, nous rappelant jour après jour à nos erreurs passées et à notre extermination future. L’horloge régit le monde, les vies, les peurs depuis bientôt cinq ans, cinq ans dans cinq minutes, cinq minutes et tout sera fini.

Et c'est en étirant les articulations de mes mains, et lorsque celles-ci ont craqué, que j'ai compris. Les autres s’étaient enfermés chez eux pour dire adieu à leurs proches, et ceux qui étaient seuls, eh bien ils s’étaient sûrement pendus avant le décompte. J’avais encore de la contenance pour cinq minutes. Un fond de liberté conditionnelle, malgré la peur, malgré la mort aux portes, encore assez de force, je crois, pour courir, pour vivre et respirer.


4 minutes


J'avais du moins assez de force pour poser mes pieds sur le carrelage glacé, pour lacer mes chaussures, miteuses, trouées. L’heure n’était plus au luxe, une paire de chaussures, même en piteux état, valait tout ici-bas. Ce n'est qu'après les avoir enfilées que je descendis les marches quatre à quatre, en soulevant des volutes de poussière dans mon sillage. Les chiffres pulsaient encore dans certains endroits, sur le rebord de la vieille table qui ne servait plus depuis plusieurs années, ou sur la cheminée, ils nous encerclaient de partout.

C'est certainement cette impression d'étouffer qui m'a poussée à sortir, à courir, le plus loin possible d'ici, loin des horloges, de l’heure, du temps qui passe inlassablement, des secondes qui coulent sous nos yeux. Je voulais aller loin, là où mon regard ne se poserait plus sur la suite de chiffres qui nous approche de la fin. Le décompte nous enfermait depuis trop longtemps.


3 minutes


Alors, j’ai poussé la porte et j'ai couru, d'abord sur le bitume craquelé, où mes semelles ont fini par déraper, c'est peut-être pour cela que ma tête a fini par heurter le sol, ou à cause de la malnutrition, du manque d’eau. Personne ne le saurait jamais, et ça n’intéressait finalement personne. Le sang coulait du haut de mon front. Je me suis forcée à me relever, malgré la sensation de vertige, et le sang qui coulait maintenant dans un de mes yeux. J'avais les larmes au bord des lèvres et le cœur au bord des yeux, ou peut-être l’inverse ? Ma vue était dérisoire, mais je me suis forcée à marcher, j'avais envie d'avancer, je me refusais à mourir au bord d’une route, comme un chien qui aurait couru trop longtemps après la voiture de ceux qui l’ont abandonné. J’ai bifurqué sur un chemin de terre, un peu à l’aveuglette.


2 minutes


C’est en le suivant que j’ai fini par entrer dans un bois, l'odeur de la terre fraîche a envahi mes narines, l’humus embaumait l’espace. Le soleil perçait çà et là le feuillage grisonnant. Et pour la première fois depuis des mois, j’ai souri, en repensant au petit ruisseau où je me baignais étant enfant où m’emmenait mon père de son vivant. Je revois son visage, baigné dans le soleil, les rides qui creusaient des sillons sur son front, et la forêt de ses sourcils qui se rejoignait chaque fois que je m’éloignais du bord.


C’est là-bas que j'avais envie de mourir, il me suffisait de continuer sur quelques mètres, il le fallait, je me suis adossée à un tronc d'arbre pour refouler une terrible envie de vomir mes tripes. Ma tête brûlait, et mon ventre tenaillait. Repenser à mon père ne me réussissait jamais, c’est pour cela que je ne m’autorisais que de rares moments sentimentaux.


J'ai réussi à atteindre le ruisseau, sans vraiment m’en rendre compte, sans me souvenir du chemin que j’avais parcouru et ce avant que le temps ne me rattrape.


J'ai plongé mes mains dans l'eau glacée, je les ai regardées être purifiées par le courant. J’ai contemplé mon reflet, j’étais lamentable, mes joues étaient creusées, mes yeux exorbités, mes cheveux tombés par poignées, une vraie enfant du Tchernobyl moderne. Le vent aurait pu souffler mon corps avec la plus légère brise. J’aurais pu m’envoler, loin, mais si je n’avais pas fini avec les ailes brûlées par le soleil comme Icare, les vapeurs chimiques se seraient chargées avec plaisir de cette tâche.


1 minute


Je me suis donc allongée dans l'herbe, sous le pâle soleil, j’ai pris le temps d'examiner un brin d’herbe qui passait à ma portée, et l'espace d'un instant, tout s'est figé, il n'y avait plus que moi et ce brin, un simple brin, ni beau, ni laid. D’un vert tirant vers le gris cendre, fade, aux couleurs passées, comme le reste du monde.


Jusqu'à ce que retentisse un sifflement d'enfer, aigu à vous percer les tympans. Les cloches de la mort sonnaient dans le sifflement. Il n'y avait plus que moi, le brin d'herbe dans ma paume et le ciel, gris sombre. J'ai fermé les yeux, j'ai entendu la bombe heurter le sol et la déflagration dévorer le monde, tout ça et puis plus rien que du noir.


 
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   ANIMAL   
11/9/2019
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un texte bien noir, plaisant à lire, très descriptif pour ces "cinq dernières minutes".

Après avoir survécu terrée jusqu'au dernier moment de cette fin du monde annoncée, l'héroïne n'en peu plus d'être enfermée et une pulsion la pousse à aller mourir dans une nature pavée de souvenirs. Elle trouve la volonté de parcourir les derniers mètres et achève son existence en tête à tête avec un modeste brin d'herbe. C'est original. J'ai apprécié aussi le détail de l'omniprésence des calendriers et des horloges.

La seule chose qui me gêne est dans l'entrée en matière de la narratrice : "ma fin fera une superbe histoire à sensation". Encore faut-il en laisser une trace. Sur quel support ? Et qui va la lire puisque tout est fini ? J'aurais donc mis ici un conditionnel.

En définitive, ce désir de raconter sa propre disparition inexorable ressemble plus à un exercice mental, un exorcisme contre la peur de la mort plutôt qu'à une réelle volonté de témoigner.

Un bon récit de fin du monde. On aimerait en savoir plus sur les causes de tout ceci.

   maria   
13/9/2019
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

Cette lecture me laisse indifférente ! Ca n'arrive pas souvent, et je n'aime pas ça.

Un texte peut être court, et raconter beaucoup, avec peu de personnages et d'action.

On ne sait rien.
Comment a t-elle su qu'une bombe va exploser ? Pourquoi ? Qui veut la fin du monde ?
Il faut un minimum d'information.

Elle s"abandonne au souvenir de son père pendant ses derniers moments sur terre.
Ce n'est pas assez, à mon avis pour qu'on s'intéresse au texte.

Je pense que cette nouvelle, pour " fonctionner " devrait être un abîme d'une histoire plus consistante.

Un point positif : je trouve que c'est bien écrit.

Merci pour le partage et bonne chance.

   Sylvaine   
14/9/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Quoique le sujet - la fin du monde vue par les yeux d'un tout dernier témoin - ait déjà été traité par bien des auteurs de SF comme Ruchard Matheson - la nouvelle, bien menée, n'en est pas moins prenante. Le décompte des minutes scande la fatalité tragique, la peinture d'un environnement dégradé et d'un corps qui agonise est bien rendue, l'afflux des ultimes souvenirs est émouvant. Il y aurait juste quelques petites maladresses stylistiques à corriger, comme la succession des deux relatives introduites par "où" qui complètent l'évocation du ruisseau (où je me baignais enfant où m'emmenait mon père) ou la formule "soufffler mon corps" qui me parait une impropriété.

   Donaldo75   
19/9/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

J'ai trouvé cette nouvelle bien écrite, avec un parti-pris poétique dans la narration, surtout au vu du sujet. C’est très agréable à lire et l’impact de la nouvelle est d’autant plus fort au vu du format très court. Le décompte est un bon principe narratif car il découpe l’ensemble et laisse respirer le lecteur. De plus, l’intensité dramatique est portée différemment, à travers les éléments propres à la nature, ce qui unit tous les êtres humains.

Bravo !

   Jean-Claude   
20/9/2019
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour,

Je vais entamer par quelques remarques "pratiques".
Pour commencer,il y a un problème sémantique (Quel est le sens cherché ? L'adjectif dérisoire est inapproprié, on n'est pas en écriture surréaliste.) : "Ma vue était dérisoire,"
Il y a beaucoup d'imparfaits imparfaits (Il faut "ais" pour "je" : "je me baignait"
Il y a des problèmes d'accord et de formulation (phrase à revoir) : "Je les ai regardé{es} être purifiée{s} par le courant."
Il y a des loupés dans l'orthographe et dans le français.

C'est le genre de fin au "je" qui est bancale (on ne devrait pas aller plus loin que "le sol"), le "je" n'est pas omniscient, surtout quand il meurt : "J'ai fermé les yeux, j'ai entendu la bombe heurter le sol et la déflagration dévorer le monde, tout ça et puis plus rien que du noir."
Subjectivement (quoi que), je pense que ce serait mieux à la troisième personne pour pousser sans problème l'omniscience.

Ce texte ne raconte pas grand-chose, c'est plus un climat, mais ce n'est pas antipathique.

Au plaisir.

   thierry   
11/10/2019
 a aimé ce texte 
Pas
Bonjour,
Je n'ai pas accroché, je n'y ai pas cru. Je ne comprends pas.
D'abord le séquençage qui doit apporter quelque chose de nouveau à chaque "minute" et qui ici ne donne pas de clé supplémentaire. Le rythme s'en ressent qui fait apparaître un artifice vain.
Ensuite - et peut-être cela explique-t-il le point précédent - le manque d'économie de la narration. Par exemple la minute 3 : " c'est peut-être pour cela que ma tête a fini par heurter le sol, ou à cause de la malnutrition, du manque d’eau. Personne ne le saurait jamais, et ça n’intéressait finalement personne." Oui on se doute que ça fait mal de tomber par terre, oui ne pas boire et ne pas manger ça peut poser problème et oui on craint que ça n'intéresse personne…
Quant à "J'avais les larmes au bord des lèvres et le cœur au bord des yeux, ou peut-être l’inverse ? " cette facilité ne rentre pas du tout dans le champ de la narration.
Enfin, cette histoire est une promesse non tenue. "Une superbe histoire à sensation" ? J'en doute.
Donc non je ne suis pas rentré dans cette histoire et je ne vois pas grand chose à sauver.
Mais, parce qu'il y a un mais, j'aperçois, peut-être à tort, une véritable intention poétique : une envie de revenir à l'essentiel : l'eau, l'herbe, le soleil, une envie d'unicité - un seul brin d'herbe- et un éternel retour dans le thème des parents. C'est cette logique qu'il faudrait retrouver dans ce thème largement exploité. Là il y aurait quelque chose de plus abouti, d'unique et léger.
Merci pour ce partage, j'espère une suite à cette fin du monde !

   Tiramisu   
11/10/2019
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Je n'ai pas beaucoup apprécié le début, je suis restée à l'extérieur., le thème lui même est assez commun dans la SF.
Et puis, le laçage des chaussure m'a ennuyé, cela semble bien trivial dans le contexte.
Mais c'est vrai que ce texte pousse à me poser la question, qu'est ce que je ferais moi, le jour de la fin du monde, voire dans les 5 dernières minutes ?
A partir du moment où le personnage principal sort dehors, s'approche du bois, recherche son ruisseau d'enfance, et finit par fixer un brin d'herbe, j'avoue avoir été touchée. Se dire que ce dernier moment essentiel dans une vie, se termine à regarder un détail infime de la nature, combien de brins d'herbe, on foule au pied avec tant d'indifférence. La folie de l'humanité contre un brin d'herbe.

Merci pour cette lecture

   in-flight   
13/10/2019
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Ce texte aurait gagné à être conté au présent pour accroître la tension narrative et pour plus de cohérence (si le narrateur est mort, d'où parle-t-il?).
Sur le fond de ce thème éculé, j'ai l'impression que le texte sert essentiellement d'hommage à un lieu fréquenté par le narrateur durant son enfance, un lieu baigné par la présence d'un père aimant.

   plumette   
13/10/2019
 a aimé ce texte 
Bien ↓
j'ai eu du mal avec la forme.
pourquoi l'imparfait? Il ne me semble pas adapté à ce récit qui aurait certainement été plus crédible au présent.
Et puis ce "je" qui nous écrit d'outre-tombe ! c'est toujours délicat que le narrateur meurt en direct à la fin car comment peut-il en témoigner?
Ce décompte des cinq dernières minutes ne me semble pas toujours cadrer avec l'action ( c'est vrai que je suis plutôt lente et qu'il me faut plus d'une minute pour enfiler et lacer des chaussures!)
j'ai trouvé quelques étrangetés de rédaction. je ne vois pas à quoi ressemble du chêne ridé par le temps, ou un feuillage grisonnant. j'ai été déroutée par le "j'avais encore de la contenance pour cinq minutes " et " un fond de liberté conditionnelle" ou encore "ma vue était dérisoire".

Les deux dernières minutes m'ont touchée. Un souvenir d'enfance avec le père , le désir de retrouver un contact avec l'eau et la nature.
Un texte qui a du fond et qui peut sûrement gagner en forme!

   Anonyme   
28/2/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

J'ose mon premier commentaire sur Oniris.

Pour commencer, je dois dire que quelques points m'ont gênée avec cette nouvelle.

Le tout premier paragraphe (de "Aujourd'hui" jusqu'à "sensation") a échoué à me mettre en appétit. Je trouve qu'il tombe un peu à plat et qu'il n'apporte pas grand-chose au récit.

Par ailleurs, quelques formules m'ont semblé maladroites, comme la "vue dérisoire" ou les vapeurs chimiques qui se chargent "avec plaisir" de cette tâche, ainsi que certaines petites lourdeurs.

Les derniers mots "tout ça et puis plus rien que du noir" me paraissent superflus. Le récit à la première personne doit à mon avis s'arrêter en même temps que la perception du narrateur.

Tout ceci étant dit, j'ai quand même bien accroché avec l'histoire.
J'aime la forme du récit, ces petits chapitres minute par minute qui installent un rythme.

J'y ai vu, à tort ou à raison, une métaphore de notre vie à tous. Le temps nous est compté, même si ce n'est pas avec la même précision. A quoi veut-on accorder de l'importance, quand on réalise enfin que l'on est mortel?

Je n'ai pas non plus été dérangée par l'absence de contexte. Il s'agit d'un instant de vie, examiné dans ce qu'il est, indépendamment de ce qui a précédé ou de ce qui suivra. J'ai aimé cet aspect "fragment brut".

En conclusion, les imperfections de cette nouvelle ne m'ont pas empêchée d'être touchée et d'apprécier ma lecture.

Merci pour ce partage.


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