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Humour/Détente
Sebastien : Les Aventuriers de l'Amérion - Chapitre 14 : le Nouveau Monde
 Publié le 02/03/08  -  2 commentaires  -  23282 caractères  -  7 lectures    Autres textes du même auteur

L'Amérion s'est donc posé sur une nouvelle planète, a priori accueillante. Mais sait-on jamais...
Cette histoire a été écrite à 4 mains, par celles de Corentin et Sébastien, deux abrutis sévissant par l'écriture de textes tous plus idiots les uns que les autres... Bonne lecture.
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Les Aventuriers de l'Amérion - Chapitre 14 : le Nouveau Monde


Hal s’avança vers Tipek en affichant une mine réjouie, enfin autant que peut l’être une tronche de concombre avec des antennes. Enfin, ils pouvaient sortir de l’orbite sans griller les maigres réserves d’hydrogène qui restaient. Comble du bonheur, Klebz avait réparé les inverseurs de poussée vectorielle, et la majeure partie des systèmes de calcul du vaisseau fonctionnait. L’atterrissage semblait donc ne présenter aucune difficulté insurmontable. Mieux : ils ne seraient sans doute pas obligés de s’écraser. Bonne nouvelle, pensa Tipek, sarcastique. Avisant Brossard qui glandait dans les parages, il l'apostropha :


- Sergent, veuillez rassembler l’équipage sur le pont supérieur, nous allons nous poser.

- SIR YES SIR ! cria ce dernier avant de partir en courant.

- Il me fatigue, celui-là, il me fatigue, marmonna le capitaine en se massant douloureusement les tempes.


Quelques instants plus tard, chacun était à son poste et prêt à manœuvrer. Globalement il n’y avait pas grand-chose à faire, mais bon, on ne pouvait prévoir l’imprévisible (par définition et pour le plus grand bonheur des auteurs). Par un heureux hasard, cependant, l’approche puis la descente se firent sans concombres, et c’est par une matinée ensoleillée que l’équipage de l’Amérion posa le pied (la patte, dans le cas de Klebz) sur PKL-201. De doucereuses senteurs parvenaient à leurs narines aguerries par les odeurs d’huile et les pets du mécanicien, et une légère brise balayaient la clairière dans laquelle ils s’étaient posés. La surface émergée était en effet recouverte à 89 % de forêts luxuriantes parsemées çà et là de trouées accueillantes. Il faisait bon vivre à cet instant. La première tâche fut de trouver de la nourriture fraîche ainsi que de l’eau douce, et Klebz fut bien évidemment nommé pour la première tâche. Ses instincts canins couplés à son équipement perfectionné feraient de lui un chasseur redoutable.


Klebz zonait donc dans la campagne et humait l’air à pleine truffe. Oui car, c’était un coup de bol assez dingue, l’atmosphère était complètement respirable. En même temps, il fallait s’y attendre, vu qu’il y avait des humains primitifs dans le coin, enfin bref, c’était quand même vachement cool. Finies, les enconcombrantes bouteilles d’oxygraugène de 75 kg à se farcir sur le dos. Pareil pour la combarde, bazardée dans la soute de l’Amérion et itou pour le Baukval, abandonné au fond de la niche. Klebz portait un costume plus adapté à la chaleur moite de la jungle : un bon gros Marcel bien moulant, un vieux futal troué au niveau de la queue, et les pattes enfin libres ! Le capitaine Tipek avait quand même insisté pour que chacun garde un maximum de bordel sur le dos, des fois que… Lourdement équipé, portant notamment deux fusils Snipeuhars sur le dos ainsi qu’une dizaine de gourdins de lancer à la ceinture, Klebz était parti à la chasse. Il espérait surtout coincer quelques graulaviandes, bestioles reconnues d’utilité publique, et qui avaient toutes les chances de grouiller dans le coin. Kebz trimbalait donc son appendice nasal un peu partout, espérant tomber sur un fumet caractéristique, et il avait toute foi en ses capacités. Parce que primo, il avait toujours été balèze à ce petit jeu, et que secundo, il était équipé d’une biotruffe à vasodilatation génétiquement modifiée et, enfin, parce qu’il crevait la dalle comme pas possible. Suivant une piste éminemment prometteuse – une odeur de graisse douceâtre, mélangée à des sécrétions animales avec un brin de klouklouk, caractéristique d’un regroupement de graulaviandes –, Klebz arpentait au pas de course ce qui semblait être un petit sentier traversant la forêt. L’odeur délicate et parfumée éveillait chacun de ses sens, et Klebz fnoufnoufait avec bonheur lorsque le son d’un cours d’eau fit se lever son oreille droite. Trop bien ! De la bonne eau fraîche, pensa-t-il, tout content, ce qui eut pour effet immédiat de faire dresser son oreille gauche. Klebz sentit sa queue s’agiter et fouetter le feuillage touffu qui bordait le sentier. De bien belles plantes d’ailleurs, probablement une variété de palmotruffier à feuilles persistantes. Il y avait également quelques joncs de canarasucre qui perçaient, çà et là, dans la végétation moite.


À petites foulées, Klebz atteignit le cours d’eau qui miroitait sous un soleil étincelant. La petite rivière était agitée, l’eau bondissait sur un fond rocheux et probablement aussi un peu caillouteux. L’eau était d’un marron rougeâtre, mais transparente et pleine de petites bulles sympas, faisant inévitablement penser à du koka. Klebz plongea une nanosonde à osmose inverse et vérifia le taux de pautabilité de l’eau avant d’y plonger la tête et d’entreprendre de vider la rivière à grands coups de langue. Et, lorsqu’il releva la truffe, ce qu’il vit fit se dresser ses oreilles encore plus haut vers le ciel. Un troupeau de graulaviandes, souffla-t-il en essayant de calmer sa grosse queue de 25 kg qui était en train de hacher menu les maigres buissons qui bordaient la rivière. Klebz se releva discrètement et se planqua sous une grande feuille de bakoïa. Là, il évalua rapidement la situation : une trentaine de bestiaux glandaient paisiblement de l’autre côté de la rivière, broutant les herbes hautes, bien à l’abri de la chaleur sous la canopée. Il s’agissait probablement d’un troupeau de graulaviandus pulupei, animal plutôt stupide mais inoffensif, dont la viande n’avait rien à envier à celle des cautelettiers. La décision était prise : Klebz allait faire un carnage et ramènerait au bas mot trois semaines de gras à bord de l’Amérion. Il sortit du couvert végétal, avisa que la rivière n’était pas bien profonde et, sans se soucier des Snipeuhars impermétiques, se mit à l’eau. Il fit quelques pas, s’enfonça rapidement jusqu’aux genoux, et réfréna un « kouï » lorsque ce fut aux tours des valseuses de prendre l’eau. Klebz avançait précautionneusement, mais comme tout se passait abusivement bien, il perdit soudainement l’équilibre en marchant sur un poisson plat tout gluant, et se ramassa comme une merde. Floutch kloutch aïe merd’ putaaaain !, fit bien malgré lui l’infortuné chasseur en se brêlant dans la flotte. Le troupeau de gras, alerté par le vacarme, prit la fuite à vive allure, et Klebz se retrouva la truffe dans l’eau, bredouille. Amusé par sa mésaventure, il mit son orgueil et son équipement de côté et pataugea gaiement dans l’eau, tentant d’attraper d’invisibles poissons par de grands claquements de gueule. Décidément, la nature avait du bon.


Pendant ce temps, Tipek se hasardait vainement à la remise en fonction de Wall-ID, malgré les mises en garde répétées et pleines de bon sens de Von Dutch, toujours prêt à la ramener.


- Mais non mais capitaine sérieusement il va mal le prendre ! Ça fait quand même cinq jours qu’il s’est sacrifié et aucun de nous n’a pensé à le réactiver... Je vous dis que c’est une mauvaise idée ! Vous vous souvenez de ce qu’il avait fait à Klebz, le jour où il lui a marché dessus ?


Oui, le capitaine se rappelait très bien le bruit de tôle froissée qui l’avait fait rire pendant des jours, ainsi que l’expression vexée que la botte de Klebz avait imprimée sur la caboche du petit robot. Celui-ci avait pourtant assez mal digéré la plaisanterie, et avait intoxiqué le mécanicien au bolonium (les fameuses pâtes bolonium). Le malheureux s’en était tiré avec une bonne semaine de diarrhées aiguës, mais il aurait pu en claquer si le susceptible robot avait forcé la dose.


- C’est bon Von Dutch, lâchez-moi ! Allez donc vous promener, et tâchez de faire une bonne flambée bien cancérigène sans mettre le feu au vaisseau. Après avoir passé autant de temps dans une boîte de conserve à bouffer… des conserves, justement, je suis sûr qu’un petit retour aux sources ne nous fera pas de mal. Vous cuirez donc ce que Klebz ramènera à la broche, et on mangera même dehors ! Exécution !


Ravalant une bordée de jurons, Von Dutch sourit en son for intérieur. Après tout, le capitaine avait raison : cela ferait le plus grand bien à l’équipage. Tipek était un bon bougre, il le savait bien, et il n’ouvrait sa grande gueule que parce que c’était plus fort que lui. Bon, il me faut du bois, pour commencer, pensa-t-il. Il contourna le nez de l’Amérion et passa à côté du caporal Lumi, qui étudiait le climat local en bikini vautrée par terre. Il se força à imaginer des trucs mous et répugnants (la truffe de Klebz, par exemple). La vue de la sémillante jeune femme ainsi laissée à sa merci lui fit penser qu’un jour elle finirait par avoir des ennuis d’ordre corporel, et il dut sérieusement prendre sur lui, une fois de plus. Un bref coup d’œil alentour lui apprit qu’il n’y avait malheureusement pas le moindre glaçon à proximité, et Von Dutch en fut pour ses frais. Abasourdi, il détourna vivement le regard lorsque Lumi, qui n’avait pas spécialement percuté la présence de son équipier (quoique… jusqu’où va se nicher la perversité des femmes ?) dégrafa le haut de son maillot afin de bronzer plus… intégralement. C’en était trop, décida l'exacerbé cuisinier. Il reprit péniblement son chemin en tentant de penser à autre chose jusqu’à retrouver un nombre de jambes convenable, et reprit finalement sa quête de petit-bois. Décidément, la nature était cruelle…


Klik bzz tüt tüt tülülüt kloutz flonf ! Après plusieurs minutes de codage en natif dans le bios de Wall-ID, Tipek avait réussi à instancier la sous-routine de démarrage à redondance multifruits. L’extension mobile de l’Amérion reprenait vie. Une mise à jour système de quelques Gigos lui apprit les récents événements, des brèves explorations de Coteless-1 jusqu’à l’atterrissage sur PKV-201. Connecté à l’automate, un terminal de commande à l’affichage vert et blanc permettait de suivre en verbose mode les évolutions du démarrage chaotique. Le capitaine semblait anxieux, et lorsque le tilalalère caractéristique et plus ou moins mélodieux se fit entendre, il pressa vivement la touche retour chariot (alors qu’il n’y avait même pas de chariot !) du terminal afin de valider la commande en cours.


- Yesss ! Brossaaaard ! BROSSAAAAAARD !

- Oui capitaine ? cria-t-il du haut d’un arbre.

- Vous faites quoi, là-haut, Hank, vous repérez les environs ?

- Heu… Oui oui !


Le soleil aveuglant força Tipek à plisser les yeux au maximum. Brossard était juché sur un arbre qui ressemblait à un glairier à feuilles tombantes, à la différence près que ses fruits de la taille d’un ballon de rugueuby affichaient un rouge vif et appétissant. Manifestement le sergent-chef tentait d’en décrocher un bien mûr du bout du bras, et, trébuchant tout à coup, il se rattrapa de justesse à sa branche non sans agiter comme par grand vent l’arbre fruitier qui protesta par un froutch froutch caractéristique des arbres sous le vent. Un silence s’ensuivit, et les deux hommes observèrent le gros fruit mûr se balancer au bout de sa branche, puis se décrocher, et la fin de l’histoire ne put être observée que par Brossard, le capitaine ayant reçu le corpulent agrühm sur la tronche dans un pleurftch assez peu ragoûtant mais très amusant pour le sergent, qui ponctua la mésaventure d’un éclat de rire moqueur. La nature était décidément une sacrée farceuse, pensa Brossard en descendant de son arbre aussi promptement que l’homme descend du singe.


À quelques kilaumètres de la scène, Klebz avait repris la chasse. Dans un silence lourd et ponctué uniquement par les piaillements de quelques volatiles, l’air semblait palpable tant il était chargé en humidité. Plein de sueur et assailli par des moukmiks friands autant que lui de chair fraîche, le seconde classe n’en menait pas large. La nature devenait plus hostile au fur et à mesure qu’il s’enfonçait dans la djeungueule, et les animaux plus vigilants. Ramener du gras à bord ne serait en fin de compte pas si aisé que ça. Tout à coup, un animal à poil mi-long de la taille d’un gros sanglochon coupa la route de Klebz en beuglant de toutes ses forces. Le chasseur n’eut pas le temps de réagir, mais cela n’augurait rien de bon. Les profondeurs de l’étrange forêt devaient abriter bien plus que de simples herbivores… Il arma donc son fusil à lunette en ayant une pensée amusée pour Von Dutch qui avait fièrement sorti un jour de combat urbain : « Fusil à lunette… fusil à quéquette ! ». Le sol était de plus en plus spongieux, et Klebz s’enfonçait maintenant jusqu’aux balloches dans une sorte de vase qui était tout de même bien plus accueillante que celle de Coteless-1. Celle-là sentait l’humus et le sous-bois. Bon elle était quand même gluante, hein, c’était de la vase. Un deuxième animal, plus gros celui-là, coupa la route de Klebz en meuglant lui aussi. La bête n’était pas sans rappeler un kolautrin à cornes mouchetées, mais un peu plus petit (celui-là ne devait pas peser plus de trois tonnes). Décidément ça sentait la merde de plus en plus fort. Un gros carnivore n’allait sans doute pas tarder à débouler. Klebz arma son fusil, régla le potar de charge sur maximum et se mit à attendre. Il n’eut pas à patienter très longtemps, car une sorte de pinosaure à trompe fouisseuse mais sans trompe débarqua en grognant férocement. Il cherchait visiblement la trace du bestiau précédent. Le courageux seconde classe épaula, visa, puis… rien. Enfin, si, l’arme fit une espèce de « klük » poussif, mais c’était tout, là où on se serait plutôt attendu à un gros « baoum » tonitruant. Rhâââ l’échec, pensa Klebz, j’ai oublié d’enleuver la sécurité à molette réglable, ch’uis vraiment une truffe. Et, le temps que Klebz réarme son fusil, le pinosaure avait disparu. C’était vraiment la louze. Le seconde classe mit deux plombes à s’extraire de la vase, s’agrippant à qui mieux mieux à une espèce d’herbe coupante comme un razoar et munie d’épines plus grosses que des cure-dents pour titanosaure.


Les deux mains en sang et le corps couvert de merde, Klebz rengaina son fusil dans le dos, puis repartit à la chasse. Il suivait les traces du pinosaure qui devait quand même être un sacré bestiau, à en juger par sa capacité de pénétration arboricole. La végétation ne faisait effectivement pas le poids face à cet engin de terrassement qu’était le pinosaure. La situation était assez cocasse, pensa Klebz, il était couvert de boue façon Schwarzy dans Predator, ce qui lui rappelait d’ailleurs son stage d’entraînement au C.R.A.D.E. (Commando de Recherche et d’Action en DjeungueulE) où il avait appris à repérer, traquer puis tuer ses ennemis en milieu hostile et sans laisser de traces. Oui, Klebz était un pur, un dur, de la trempe d’un John Rambo laissé pour mort en pleine forêt birmane. Enfin bref, Klebz avançait à vive allure et, il le sentait, il approchait du pinosaure. La viande ne serait pas aussi bonne que celle d’un bon gros herbivore juvénile, mais ça serait déjà pas mal, rien que par rapport à la taille de l’engin.


Klebz arriva dans une petite clairière. L’herbe était basse, presque inexistante sur le sol ratiboisé comme si une armée de tondeusaures était passée par là. Ce qui ne serait pas plus mal, songea Klebz, puisque le tondeusaure était complètement comestible. La clairière était vaste et, en plein milieu, Klebz aperçut une énorme bestiole, à peu près aussi haute que l’Amérion en caleusèche. Apparemment, le pinosaure n’était pas rentré breucouille, vu qu’il était en train de se repaître sauvagement d’un animal devenu difforme, complètement décalqué par le prédateur. C’était peut-être bien un sanglochon, mais c’était difficile à dire, tant la pauvre bête n’était plus qu’un amas de ripaille sanguinolente. Le pinosaure mâchait avidement la viande molle, et Klebz pouvait entendre les dents riper sur les os. Sûr de lui et de son fusil Snipeuhar, Klebz s’approcha un peu, puis mit la bestiole en joue. Ce coup-ci, il vérifia que la sécurité était bien désactivée, puis il envoya un gros pruneau qui fendit l’air en sifflant. La tête du pinosaure éclata en une gerbe proprement immonde, et le corps du prédateur s’affaissa lourdement. Alors, c’est qui, le Master Chief ? Tu fais moins le malin, hein ? pensa Klebz en remuant la queue. Le seconde classe rangea son fusil – il n’y avait aucun risque que le pinosaure se relève, vu comment il avait pris cher – et s’approcha du tas de viande au pas de course. Il fit une rapide estimation, et en conclut que l’équipage n’aurait plus à se soucier de la becquetance pour un bon moment. À condition de dépecer convenablement la bête avant qu’elle ne pourrisse – ce qui n’était pas gagné avec ce cagnard et ces grosses mouches bleues dégueulasses qui commençaient déjà à tourner autour du trophée.


Klebz avait appelé Brossard via l’intercom pour qu’il se ramène vite fait avec un convoi de mobiles réfrigérés autoporteurs pour convoyer la barbaque. Attendant son équipier, Klebz commença à découper le bestiau à l’aide de son gourdin-laser. Mais soudain, il se sentit épié. La forêt était silencieuse. Il s’interrompit. Une forte odeur de trakeunard flottait dans l’air. Il observa la jungle alentour, anormalement calme. Ça n’était pas bon signe. Car généralement, quand toutes ces saloperies d’oiseaux jacqueteurs et autres singes pinailleurs ferment leur gueule, c’est qu’il y a du gros dans les parages. Klebz rangea son gourdin et reprit son fusil à deux mains. Soudain, à la lisière de la forêt, une nuée de konlubrus à plumes moucheutées prit son envol. Les arbres, hauts d’une cinquantaine de mètres à l’aise, frémirent. Un hurlement proprement monstrueux surgit du couvert végétal qui fut pris de convulsions. Le sol trembla et le ciel s’obscurcit carrément, tant la bestiole était mastoc. Klebz baissa les oreilles, se mit la queue entre les jambes, puis poussa un « kaï » plaintif. Il n’en croyait tout simplement pas ses yeux.


Brossard était en train de configurer le convoi frigorigène, attelant les mobiles autoporteurs les uns aux autres, et entrant les coordonnées que Klebz lui avait communiquées. Il finit d’entrer la topologie du terrain dans les unités de calcul vectoriel autonome du véhicule de tête, puis il appuya sur ‘ON’. Wall-ID, d’humeur joyeuse, prit place sur la laukaumautive autoportée. Le petit-train se mit en branle avec un bourdonnement, s’éleva à environ un mètre du sol, puis prit la direction de la forêt par le petit sentier en avançant comme une grosse chenille en frétillant du cul. Wall-ID poussa un « tülülüt » d’amusement. Mais soudain le sol se mit à trembler comme pas possible, et Brossard faillit se vautrer. Le convoi, quant à lui, prit brusquement de la vitesse sur un glissement de terrain. Wall-ID émit un son étrange, une espèce de terreur électronique, et le convoi alla se boiter la gueule dans un vieux tas de bousin. Un hurlement lugubre se fit entendre au loin. Diantre, qu’est-ce que Klebz avait encore fait comme connerie ?


Quelques centaines de mètres plus avant dans la jungle, ledit Klebz serrait contre lui son arme. Un grognement guttural le fit sursauter. Derrière lui, quelque chose avait bougé. Il sentit une haleine fétide à quelques centimètres de sa nuque, ponctuée d’un funeste claquement de mâchoire… Il se tourna comme un seul homme – normal – et tira dans le tas sans viser ni rien tout en roulant sur le côté, comme John Rambo. Le seul résultat valable fut qu’il se retrouva dans un buisson cul par-dessus tête. Lorsqu’il émergea, la présence avait disparu de son champ de vision. Et meeeeeerde, pensa Klebz. Il se mit à regarder dans toutes les directions de façon frénétique, dans cette mimique familière de nos amis canins. Rien. Il n’était pas de taille… La même frousse bizarre lui parcourut l’échine lorsqu’il flaira à nouveau les exhalaisons pestilentielles à quelques centimètres derrière lui. Comprenant qu’il n’avait pas le moindre espoir de surprendre son adversaire, il se retourna lentement, à la loyale. Ce qu’il vit le remplit de terreur. Une créature mi-bête mi-molette le toisait de toute sa hauteur, soit plus d’une fois et demi celle du mécanicien. D’un aspect gluant, le bestiau possédait une mâchoire impressionnante, trois yeux globuleux et quelques oreilles bouffées aux mites (d'ailleurs, les mites d’oreilles de cette bestiole devaient plutôt être costaudes, vu la tronche des oreilles). Un beuglement suraigu fit couiner Klebz, et il eut de la peine à esquiver le coup de mandibules de l’animal. Une patte aux griffes acérées déchira sa chemise et ses chairs alors qu’il tentait de se mettre hors de portée, et le mécanicien pensa tout à coup qu’il n’aurait peut-être pas l’heur de bouffer du gras avec ses collègues. Il reprit rapidement ses esprits, épaula et tira une rafale de pruneaux supersoniques à dilatation pluri-azimutale en direction de son assaillant. Les projectiles, qui normalement arrêtent un bus scolaire en plein course ricochèrent sur l’épaisse carapace de la bête qui avait adopté pour se protéger une posture proche de celle du coureur dans les starting-blocks. Aucun effet. Là, là je suis dans le caca mais sévère, songea Klebz. L’animal bondit tout à coup sur lui, et Klebz eut tout juste le temps de parer le coup, ses poignets croisés sous la gorge du bestiau. Il évita ainsi un fatal coup de mâchoire. Les crocs longs de 10 centimètres luisants de bave effleuraient sa peau et ses poils (les fameux poils de Klebz), et il crut vraiment son dernier instant arrivé. La lutte était inégale et ça sentait sérieusement le sapin. C’est heureusement ce moment que choisirent Brossard et Wall-ID pour débouler, redonnant ainsi un peu d’espoir à Klebz. Hank n’hésita pas longtemps : il saisit le bazooka dont il ne se séparait jamais depuis son deuxième mariage, régla la temporisation de la roquette sur thermostat 4, visa et tira dans le monstre. La roquette non plus n’hésita pas longtemps, et le monstrueux autochtone fut frappé et entraîné par le deus ex machina qui acheva sa course en explosant à quelques dizaines de mètres de Klebz, non sans le recouvrir d’une épaisse couche de glaire verte, façon MIB. La clairière était maintenant une glairière, en fait. Il se détendit d’un coup, la menace envolée, et laissa retomber sa tête sur l’herbe. Oohohohoo la vaaache, brailla-t-il.


- Rien de cassé, Klebz ?

- Non c’est bon, Hank. Il était moins une ! Merci du coup de main, je maîtrisais la situation mais bon… C’est sympa quand même !

- C’était quoi ce truc ? Un alien ?

- Tiens oui ça ressemblait… Boarf un prédateur quelconque. J’espère que c’était le plus gros, parce que dis donc il était coriace hein !

- Pourquoi tu lui as pas tiré dessus ???

- Hé ho j’suis pas une bille je l’ai fait, hein ! Aucun résultat, rien, que dalle, que tchi, des nèfles, peau d’zob…

- Oui oui, rien, quoi !

- Voilà.

- Bon… Et ta viande, là, elle est encore comestible avec cette merde verte dessus ?

- Bin… Chais pas… C’est peut-être à la menthe ? ajouta Klebz en remuant la queue qui fouetta l’herbe, visiblement content de sa plaisanterie.


Brossard soupira, dit à Wall-ID d’atteler le gros-la-viande au convoi et s’assit à côté de Klebz. Il y avait eu plus de peur que de mal. Cette fois. Ce monde-ci était finalement bien éloigné des planètes domestiquées de la Cellule, et s’il n’était pas aussi hostile que le précédent, il fallait quand même faire gaffe. Qui pouvait savoir quelles étranges créatures chassaient la nuit ?



 
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   nico84   
2/3/2008
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bravo aux deux tarés (c'est un compliment) qui ont une imagination débordante, un humour bien dosé, l'action est présente, le vocabulaire technique donne de la qualité.

Il y a de tout ici, j'adore !!!

Vivement la suite.

   jaimme   
26/8/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Un fin plutôt amusante qui rattrape toutes les vulgarités faciles du reste du texte. Les auteurs auraient-ils enfin réparé leur loufocalisateur à dispersion fine??


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