Avant propos
À toi qui commences cette lecture, je te demande de faire très attention. Si tu es seul dans ta chambre, s’il est tard, enfin si tu es craintif par nature, ne continue pas ! Ta vie ne sera plus la même, après m'avoir rencontré. Je suis souvent plus cruel que Maldoror, si tu vois ce que je veux dire. Je te vois du dedans, comme tu vas me voir du dehors ! Si tu es un enfant, ou si tu as encore une âme d'enfant, alors referme cette page, car je ne te veux aucun mal.
Tu continues la lecture, tant pis pour toi !
Parfois les mots me ravagent le cerveau, comme tant de rats d'égout... des rats dégoûtants ! Je connais la folie des poètes maudits, l'écriture d'Antonin Artaud, le suicide d'André Baillon... J'ai admiré le clair de terre, mangé le poisson soluble des surréalistes... J'ai rencontré Céline et ses fameux "...", son style talentueux et ses "farces" pamphlétaires d'un goût douteux mais "..." Regarde-moi bien, je suis ordinaire, peut-être minable, peut-être génial, mais ce n'est pas important pour la suite.
Je ne sais rien de la psychanalyse et pourtant, j'ai essayé de lire Freud, Piaget, Lacan... Je suis comme toi, je n'aime pas les érudits, mais je n'aime pas non plus les contenus vides, les grossièretés sans idées, la littérature pour concierges... Tu as l'impression de m'avoir déjà vu ! Tu ne sais pas qui je suis ? Tu le sauras bientôt. Maintenant que je t'ai mis en condition, je peux commencer.
Je t'apprends à me connaître comme je suis
Je repense à ce que j'ai lu il y a bien longtemps, chez Voltaire, je crois. C'était l'anecdote du bouton sur lequel on a le choix d'appuyer ou non, pour que, bien loin, à chaque action, cela provoque la mort d'un petit chinois, par exemple.
Eh bien ! Moi, j'ai appuyé souvent sur ce bouton ! Ça t'étonne, mais attends un peu, tu ne seras pas déçu ! Je suis assez souvent, bien pensant, pourquoi pas moraliste, croyant... enfin quoi, humain ! Et pourtant, les criminels, ça existe, et les pédophiles, et les juifs, et je ne sais quoi d'encore plus calamiteux que tout ça... Je m'intéresse au progrès, au génome, à l'ADN... Tu ne vois pas le rapport avec ce qui précède ? Mais c'est parce qu'il n'y en a pas ! Ah ! Comme c'est beau la science. Mais je ne suis pas venu aujourd'hui pour faire de la philosophie.
As-tu déjà détruit un couple, trompé tes amis, volé un mendiant ? Moi, oui. Plus le couple était radieux et épanoui, plus mes amis étaient fidèles, plus les mendiants étaient pauvres, alors plus je jubilais. C'est quand j'imagine quelque chose de défendu, que le désir devient plus grand. Oedipe n'aurait pas dû se crever les yeux. La nature, qui ne se trompe pas, sinon tu ne serais pas là, m'a donné ces vilains penchants. Il ne faut pas aller contre la nature, c'est dangereux.
Si tu as un penchant pour ton frère ou pour ta soeur, ne te gêne pas.
"Dommage qu'elle soit une p...", comme disait John Ford il y a bien longtemps.
Si Cenci veut violer sa fille, personne ne pourra l'en empêcher. Et si la bête immonde qui me ronge m'entraîne vers la luxure, je ne vais pas me priver. Je te choque ! Tu es coincé, pas moi. Je peux parler du sexe sans pudeur, qu'il soit mâle ou femelle, c'est égal. Pour moi, il serait neutre, si ce genre asexué était possible dans notre langue.
Ils ne s'en privent pas, tous ces grands de la pensée psychopathologique ! Jacques Lacan vous aurait montré la "naissance du monde", si vous aviez fait partie de ses bons amis. Il devait trouver ce chef-d'oeuvre digne de recevoir vos Courbettes. Les mots qui se terminent par le suffixe "ette" désignent pourtant de petites choses !
Mais j'admire ces grands esprits qui se penchent sur le quotidien du pauvre monde, Deleuze sur Foucault, Lacan sur Freud et Hegel, et pourquoi pas sur Descartes et Aristote, et sur Cro-Magnon, sur Adam et ève.
Vous n'êtes pas sans avoir remarqué que j'ai écrit Adam avec une majuscule et ève avec une minuscule ! Eh bien ! C'est parce que pour moi, ève mérite un accent grave. Tu ne comprends pas tout, et moi non plus.
J'ai appris que tous les grands noms, et Dieu sait si j'en oublie, puisque ni Spinoza, ni Saint Augustin, ni Kant, ni Nietzsche... ne sont présents dans mes propos, mais dis-je, j'ai entendu dire qu'ils n'étaient pas tous d'accord, ou disons du même avis, ce qui semble, à vrai dire, presque pareil. Et pourtant, il y a des évidences qui devraient réconcilier tout ce petit monde. Sans vouloir remonter jusqu'au déluge, je vais t'éclairer sur ce qu'est ma version du complexe d'Oedipe.
J'ai retenu, peut-être du catéchisme, qu'Adam et ève étaient les premiers hommes et qu'ils n'ont eu que deux enfants, Caïn et Abel. Jusque là, je ne t'apprends rien de nouveau. Pour que la race se perpétue, l'un des 2 fis, disons Abel, a nécessairement dû, permettez-moi de le dire un peu crûment, "coucher" avec sa petite maman ! Caïn, forcément jaloux de la faveur accordée à son frère, l'a supprimé, et depuis ce temps, l'œil est dans la tombe... comme dit le grand Victor.
On est tous sorti d'un trou, c'est pourquoi on veut y retourner. Ce n'est pas une question de sexe, c'est un retour aux sources. Les vers qui me pourrissent ne sont pas nés d'hier. Ils étaient déjà dans le fruit. Ils me rongent tout l'intérieur, surtout l'intestin et les bas-fonds. Tant que je ne possède pas tout, tant que je ne saurai pas tout, je serai vivant, mangé par les vers, mais vivant. La mort, c'est le savoir infini, l'absence de désirs, la déroute des asticots. Ne fais pas le dégoûté, il y a pire !
Je t'ai préparé un petit extrait d'Isidore, que j'ai découvert récemment et qui vaut le détour. Si tu es sensible, passe ton chemin, et viens me rejoindre au paragraphe suivant.
Extrait du quatrième chant de Maldoror d'Isidore Ducasse
Oh ! Ce philosophe insensé qui éclata de rire, en voyant un âne manger une figue ! Je n'invente rien : les livres antiques ont raconté, avec les plus amples détails, ce volontaire et honteux dépouillement de la noblesse humaine. Moi, je ne sais pas rire. Je n'ai jamais pu rire, quoique plusieurs fois j'aie essayé de le faire. C'est très difficile d'apprendre à rire. Ou, plutôt, je crois qu'un sentiment de répugnance à cette monstruosité forme une marque essentielle de mon caractère. Eh bien, j'ai été témoin de quelque chose de plus fort : j'ai vu une figue manger un âne ! Et, cependant, je n'ai pas ri ; franchement, aucune partie buccale n'a remué. Le besoin de pleurer s'empara de moi si fortement, que mes yeux laissèrent tomber une larme. "Nature ! Nature ! M’écriai-je en sanglotant, l'épervier déchire le moineau, la figue mange l'âne et le ténia dévore l'homme ! " Sans prendre la résolution d'aller plus loin, je me demande moi-même si j'ai parlé de la manière dont on tue les mouches. Oui, n'est-ce pas ? Il n'en est pas moins vrai que je n'avais pas parlé de la destruction des rhinocéros ! Si certains amis me prétendaient le contraire, je ne les écouterais pas, et je me rappellerais que la louange et la flatterie sont deux grandes pierres d'achoppement. Cependant, afin de contenter ma conscience autant que possible, je ne puis m'empêcher de faire remarquer que cette dissertation sur le rhinocéros m'entraînerait hors de la patience et du sang-froid, et, de son côté, découragerait probablement (ayons, même, la hardiesse de dire certainement) les générations présentes. N'avoir pas parlé du rhinocéros après la mouche ! Au moins, pour cette excuse passable, aurai-je dû mentionner avec promptitude (et je ne l'ai pas fait !) cette omission non préméditée, qui n'étonnera pas ceux qui ont étudié à fond les contradictions réelles et inexplicables qui habitent les lobes du cerveau humain. Rien n'est indigne pour une intelligence grande et simple : le moindre phénomène de la nature, s'il y a mystère en lui, deviendra, pour le sage, inépuisable matière à réflexion.
Si quelqu'un voit un âne manger une figue ou une figue manger un âne (ces deux circonstances ne se présentent pas souvent, à moins que ce ne soit en poésie), soyez certain qu'après avoir réfléchi deux ou trois minutes, pour savoir quelle conduite prendre, il abandonnera le sentier de la vertu et se mettra à rire comme un coq ! Encore, n'est-il pas exactement prouvé que les coqs ouvrent exprès leur bec pour imiter l'homme et faire une grimace tourmentée. J'appelle grimace dans les oiseaux ce qui porte le même nom dans l'humanité ! Le coq ne sort pas de sa nature, moins par incapacité, que par orgueil. Apprenez-leur à lire, ils se révoltent. Ce n'est pas un perroquet, qui s'extasierait ainsi devant sa faiblesse, ignorante et impardonnable ! Oh ! Avilissement exécrable ! Comme on ressemble à une chèvre quand ont rit ! Le calme du front a disparu pour faire face à deux énormes yeux de poissons qui (n'est-ce pas déplorable ?)… qui… qui se mettent à briller comme des phares !
Souvent, il m'arrivera d'énoncer, avec solennité, les propositions les plus bouffonnes… je ne trouve pas que cela devienne un motif péremptoirement suffisant pour élargir la bouche ! Je ne puis m'empêcher de rire, me répondrez-vous ; j'accepte cette explication absurde, mais alors, que ce soit un rire mélancolique. Riez, mais pleurez en même temps. Si vous ne voulez pleurer par les yeux, pleurez par la bouche. Est-ce encore impossible, urinez ; mais, j'avertis qu'un liquide quelconque est ici nécessaire, pour atténuer la sécheresse que porte, dans ses flancs, le rire, aux traits fendus en arrière. Quant à moi, je ne me laisserai pas décontenancer par les gloussements cocasses et les beuglements originaux de ceux qui trouvent toujours quelque chose à redire dans un caractère qui ne ressemble pas au leur, parce qu'il est une des innombrables modifications intellectuelles que Dieu, sans sortir d'un type primordial, créa pour gouverner les charpentes osseuses.
Jusqu'à nos temps, la poésie fit une route fausse ; s'élevant jusqu'au ciel ou rampant jusqu'à terre, elle a méconnu les principes de son existence, et a été, non sans raison, constamment bafouée par les honnêtes gens. Elle n'a pas été modeste… qualité la plus belle qui doive exister dans un être imparfait ! Moi, je veux montrer mes qualités ; mais, je ne suis pas assez hypocrite pour cacher mes vices ! Le rire, le mal, l'orgueil, la folie, paraîtront, tour à tour, entre la sensibilité et l'amour de la justice, et serviront d'exemple à la stupéfaction humaine : chacun s'y reconnaîtra, non pas tel qu'il devrait être, mais tel qu'il est. Et, peut-être que ce simple idéal, conçu par mon imagination, surpassera, cependant, tout ce que la poésie a trouvé jusqu'ici de plus grandiose et de plus sacré. Car, si je laisse mes vices transpirer dans ces pages, on ne croira que mieux aux vertus que j'y fais resplendir, et, dont je placerai l'auréole si haut, que les plus grands génies de l'avenir témoigneront, pour moi, une sincère reconnaissance. Ainsi, donc, l'hypocrisie sera chassée carrément de ma demeure. Il y aura, dans mes chants, une preuve imposante de puissance, pour mépriser ainsi les opinions reçues.
Il chante pour lui seul, et non pas pour ses semblables. Il ne place pas la mesure de son inspiration dans la balance humaine. Libre comme la tempête, il est venu échouer, un jour, sur les plages indomptables de sa terrible volonté ! Il ne craint rien, si ce n'est lui-même ! Dans ses combats surnaturels, il attaquera l'homme et le Créateur, avec avantage, comme quand l'espadon enfonce son épée dans le ventre de la baleine : qu'il soit maudit, par ses enfants et par ma main décharnée, celui qui persiste à ne pas comprendre les kangourous implacables du rire et les poux audacieux de la caricature !…
Deux tours énormes s'apercevaient dans la vallée ; je l'ai dit au commencement. En les multipliant par deux, le produit était quatre… mais je ne distinguai pas très bien la nécessité de cette opération arithmétique. Je continuai ma route, avec la fièvre au visage, et je m'écriai sans cesse : "Non… non… je ne distingue pas très bien la nécessité de cette opération d'arithmétique ! " J'avais entendu des craquements de chaînes, et des gémissements douloureux. Que personne ne trouve possible, quand il passera dans cet endroit, de multiplier les tours par deux, afin que le produit soit quatre ! Quelques-uns soupçonnent que j'aime l'humanité comme si j'étais sa propre mère, et que je l'eusse portée, neuf mois, dans mes flancs parfumés ; c'est pourquoi, je ne repasse plus dans la vallée où s'élèvent les deux unités du multiplicande !
Une potence s'élevait sur le sol ; à un mètre de celui-ci, était suspendu par les cheveux un homme, dont les bras étaient attachés par derrière. Ses jambes avaient été laissées libres, pour accroître ses tortures, et lui faire désirer davantage n'importe quoi de contraire à l'enlacement de ses bras. La peau du front était tellement tendue par le poids de la pendaison, que son visage, condamné par la circonstance à l'absence de l'expression naturelle, ressemblait à la concrétion pierreuse d'une stalactite. Depuis trois jours, il subissait ce supplice. Il s'écriait : "Qui me dénouera les bras ? Qui me dénouera les cheveux ? Je me disloque dans des mouvements qui ne font que séparer davantage de ma tête la racine des cheveux ; la soif et la faim ne sont pas la cause principale qui m'empêche de dormir. Il est impossible que mon existence enfonce son prolongement au delà des bornes d'une heure. Quelqu'un pour m'ouvrir la gorge, avec un caillou acéré ! " Chaque mot était précédé, suivi de hurlements intenses. Je m'élançai du buisson derrière lequel j'étais abrité, et je me dirigeai vers le pantin ou morceau de lard attaché au plafond.
Mais, voici que, du côté opposé, arrivèrent en dansant deux femmes ivres. L'une tenait un sac, et deux fouets, aux cordes de plomb, l'autre, un baril plein de goudron et deux pinceaux. Les cheveux grisonnants de la plus vieille flottaient au vent, comme les lambeaux d'une voile déchirée, et les chevilles de l'autre claquaient entre elles, comme les coups de queue d'un thon sur la dunette d'un vaisseau. Leurs yeux brillaient d'une flamme si noire et si forte, que je ne crus pas d'abord que ces deux femmes appartinssent à mon espèce. Elles riaient avec un aplomb tellement égoïste, et leurs traits inspiraient tant de répugnance, que je ne doutai pas un seul instant que je n'eusse devant les yeux les deux spécimens les plus hideux de la race humaine. Je me recachai derrière le buisson, et je me tins tout coi, comme l'acantophorus serraticornis, qui ne montre que la tête en dehors de son nid. Elles approchaient avec la vitesse de la marée ; appliquant l'oreille sur le sol, le son, distinctement perçu, m'apportait l'ébranlement lyrique de leur marche. Lorsque les deux femelles d'orang-outang furent arrivées sous la potence, elles reniflèrent l'air pendant quelques secondes ; elles montrèrent, par leurs gestes saugrenus, la quantité vraiment remarquable de stupéfaction qui résulta de leur expérience, quand elles s'aperçurent que rien n'était changé dans ces lieux : le dénouement de la mort, conforme à leurs vœux, n'était pas survenu. Elles n'avaient pas daigné lever la tête, pour savoir si la mortadelle était encore à la même place. L'une dit :
"Est-ce possible que tu sois encore respirant ? Tu as la vie dure, mon mari bien-aimé."
Comme quand deux chantres, dans une cathédrale, entonnent alternativement les versets d'un psaume, la deuxième répondit :
"Tu ne veux donc pas mourir, ô mon gracieux fils ? Dis-moi donc comment tu as fait (sûrement c'est par quelque maléfice) pour épouvanter les vautours ? En effet, ta carcasse est devenue si maigre ! Le zéphyr la balance comme une lanterne."
Chacune prit un pinceau et goudronna le corps du pendu… chacune prit un fouet et leva les bras… J'admirai (il était absolument impossible de ne pas faire comme moi) avec quelle exactitude énergique les lames de métal, au lieu de glisser à la surface, comme quand on se bat contre un nègre et qu'on fait des efforts inutiles, propres au cauchemar, pour l'empoigner aux cheveux, s'appliquaient, grâce au goudron, jusqu'à l'extérieur des chairs, marquées par des sillons aussi creux que l'empêchement des os pouvait raisonnablement le permettre. Je me suis préservé de la tentation de trouver de la volupté dans ce spectacle excessivement curieux, mais moins profondément comique que ce qu'on n'était en droit de l'attendre. Et, cependant, malgré les bonnes résolutions prises d'avance, comment ne pas reconnaître la force de ces femmes, les muscles de leurs bras ? Leur adresse, qui consistait à frapper sur les parties les plus sensibles, comme le visage et le bas-ventre, ne sera mentionnée par moi, que si j'aspire à l'ambition de raconter la totale vérité ! Moins que, appliquant mes lèvres, l'une contre l'autre, surtout dans la direction horizontale (mais, chacun n'ignore pas que c'est la manière la plus ordinaire d'engendrer cette pression), je ne préfère garder un silence gonflé de larmes et de mystères, dont la manifestation pénible sera impuissante à cacher, non seulement aussi bien, mais encore mieux que mes paroles (car, je ne crois pas me tromper, quoiqu'il ne faille pas certainement nier en principe, sous peine de manquer aux règles les plus élémentaires de l'habileté, les possibilités hypothétiques d'erreur) les résultats funestes occasionnés par la fureur qui met en oeuvre les métacarpes secs et les articulations robustes : quand même on ne se mettrait pas au point de vue de l'observateur impartial et du moraliste expérimenté (il est presque assez important que j'apprenne que je n'admets pas, au moins entièrement, cette restriction plus ou moins fallacieuse), le doute, à cet égard, n'aurait pas la faculté détendre ses racines ; car, je ne le suppose pas, pour l'instant, entre les mains d'une puissance surnaturelle, et périrait immanquablement, pas subitement peut-être, faute d'une sève remplissant les conditions simultanées de nutrition et d'absence de matières vénéneuses.
Il est entendu, sinon ne me lisez pas, que je ne mets en scène que la timide personnalité de mon opinion : loin de moi, cependant, la pensée de renoncer à des droits qui sont incontestables ! Certes, mon intention n'est pas de combattre cette affirmation, où brille le critérium de la certitude, qu'il est un moyen plus simple de s'entendre ; il consisterait, je le traduis avec quelques mots seulement, mais, qui en valent plus de mille, à ne pas discuter : il est plus difficile à mettre en pratique que ne le veut bien penser généralement le commun des mortels. Discuter est le mot grammatical, et beaucoup de personnes trouveront qu'il ne faudrait pas contredire, sans un volumineux dossier de preuves, ce que je viens de coucher sur le papier ; mais, la chose diffère notablement, s'il est permis d'accorder à son propre instinct qu'il emploie une rare sagacité au service de sa circonspection, quand il formule des jugements qui paraîtraient autrement, soyez-en persuadé, d'une hardiesse qui longe les rivages de la fanfaronnade.
Pour clore ce petit incident, qui s'est lui-même dépouillé de sa gangue par une légèreté aussi irrémédiablement déplorable que fatalement pleine d'intérêt, à la condition qu'il ait ausculté ses souvenirs les plus récents), il est bon, si l'on possède des facultés en équilibre parfait, ou mieux, si la balance de l'idiotisme ne l'emporte pas de beaucoup sur le plateau dans lequel reposent les nobles et magnifiques attributs de la raison, c'est-à-dire, afin d'être plus clair (car, jusqu'ici je n'ai été que concis, ce que même plusieurs n'admettront pas, à cause de mes longueurs, qui ne sont qu'imaginaires, puisqu'elles remplissent leur but, de traquer, avec le scalpel de l'analyse, les fugitives apparitions de la vérité, jusqu'en leurs derniers retranchements), si l'intelligence prédomine suffisamment sur les défauts sous le poids desquels les ont étouffés en partie l'habitude, la nature et l'éducation, il est bon, répété-je pour la deuxième et dernière fois, car, à force de répéter, on finirait, le plus souvent ce n'est pas faux, par ne plus s'entendre, de revenir la queue basse, (si, même, il est vrai que j'aie une queue) au sujet dramatique cimenté dans cette strophe.
Il est utile de boire un verre d'eau, avant d'entreprendre la suite de mon travail. Je préfère en boire deux, plutôt que de m'en passer. Ainsi, dans une chasse contre un nègre marron, à travers la forêt, à un moment convenu, chaque membre de la troupe suspend son fusil aux lianes, et l'on se réunit en commun à l'ombre d'un massif, pour étancher la soif et apaiser la faim. Mais, la halte ne dure que quelques secondes, la poursuite est reprise avec acharnement et le hallali ne tarde pas à résonner. Et, de même que l'oxygène est reconnaissable à la propriété qu'il possède, sans orgueil, de rallumer une allumette présentant quelques points en ignition, ainsi, l'on reconnaîtra l'accomplissement de mon devoir à l'empressement que je montre à revenir à la question.
Lorsque les femelles se virent dans l'impossibilité de retenir le fouet, que la fatigue laissa tomber de leurs mains, elles mirent judicieusement fin au travail gymnastique qu'elles avaient entrepris pendant près de deux heures, et se retirèrent, avec une joie qui n'était pas dépourvue de menaces pour l'avenir.
Je me dirigeai vers celui qui m'appelait au secours, avec un œil glacial (car, la perte de son sang était si grande, que la faiblesse l'empêchait de parler, et que mon opinion était, quoique je ne fusse pas médecin, que l'hémorragie s'était déclarée au visage et au bas-ventre), et je coupai ses cheveux avec une paire de ciseaux, après avoir dégagé ses bras. Il me raconta que sa mère l'avait, un soir, appelé dans sa chambre, et lui avait ordonné de se déshabiller, pour passer la nuit avec elle dans un lit, et que, sans attendre aucune réponse, la maternité s'était dépouillée de tous ses vêtements, en entrecroisant, devant lui, les gestes les plus impudiques. Qu'alors il s'était retiré. En outre, par ses refus perpétuels, il s'était attiré la colère de sa femme, qui s'était bercée de l'espoir d'une récompense, si elle eût pu réussir à engager son mari à ce qu'il prêtât son corps aux passions de la vieille.
Elles résolurent, par un complot, de le suspendre à une potence, préparée d'avance, dans quelque parage non fréquenté, et de le laisser périr insensiblement, exposé à toutes les misères et à tous les dangers. Ce n'était pas sans de très mûres et de nombreuses réflexions, pleines de difficultés presque insurmontables, qu'elles étaient enfin parvenues à guider leur choix sur le supplice raffiné qui n'avait trouvé la disparition de son terme que dans le secours inespéré de mon intervention. Les marques les plus vives de la reconnaissance soulignaient chaque expression, et ne donnaient pas à ses confidences leur moindre valeur. Je le portai dans la chaumière la plus voisine ; car, il venait de s'évanouir, et je ne quittai les laboureurs que lorsque je leur eus laissé ma bourse, pour donner des soins au blessé, et que je leur eusse fait promettre qu'ils prodigueraient au malheureux, comme à leur propre fils, les marques d'une sympathie persévérante. À mon tour, je leur racontai l'événement et je m'approchai de la porte, pour remettre le pied sur le sentier ; mais, voilà qu'après avoir fait une centaine de mètres, je revins machinalement sur mes pas, j'entrai de nouveau dans la chaumière, et, m'adressant à leurs propriétaires naïfs, je m'écriai :
"Non, non… ne croyez pas que cela m'étonne !"
Cette fois-ci, je m'éloignai définitivement ; mais, la plante des pieds ne pouvait pas se poser d'une manière sûre : un autre aurait pu ne pas s'en apercevoir ! Le loup ne passe plus sous la potence qu'élevèrent, un jour de printemps, les mains entrelacées d'une épouse et d'une mère, comme quand il faisait prendre, à son imagination charmée, le chemin d'un repas illusoire. Quand il voit, à l'horizon, cette chevelure noire, balancée par le vent, il n'encourage pas sa force d'inertie, et prend la fuite avec une vitesse incomparable ! Faut-il voir, dans ce phénomène psychologique, une intelligence supérieure à l'ordinaire instinct des mammifères ? Sans rien certifier et même sans rien prévoir, il me semble que l'animal a compris ce que c'est que le crime ! Comment ne le comprendrait-il pas, quand des êtres humains, eux-mêmes, ont rejeté, jusqu'à ce point indescriptible, l'empire de la raison, pour ne laisser subsister, à la place de cette reine détrônée, qu'une vengeance farouche !
Je suis sale. Les poux me rongent. Les pourceaux, quand ils me regardent, vomissent. Les croûtes et les escarres de la lèpre ont écaillé ma peau, couverte de pus jaunâtre. Je ne connais pas l'eau des fleuves, ni la rosée des nuages. Sur ma nuque, comme un fumier, pousse un énorme champignon, aux pédoncules ombellifères. Assis sur un meuble informe, je n'ai pas bougé mes membres depuis quatre siècles. Mes pieds ont pris racine dans le sol et composent, jusqu'à mon ventre, une sorte de végétation vivace, remplie d'ignobles parasites, qui ne dérive pas encore de la plante, et qui n'est plus de la chair. Cependant mon cœur bat. Mais comment battrait-il, si la pourriture et les exhalaisons de mon cadavre (je n'ose pas dire corps) ne le nourrissaient abondamment ? Sous mon aisselle gauche, une famille de crapauds a pris résidence, et, quand l'un d'eux remue, il me fait des chatouilles. Prenez garde qu'il ne s'en échappe un, et ne vienne gratter, avec sa bouche, le dedans de votre oreille : il serait ensuite capable d'entrer dans votre cerveau. Sous mon aisselle droite, il y a un caméléon qui leur fait une chasse perpétuelle, afin de ne pas mourir de faim : il faut que chacun vive. Mais, quand un parti déjoue complètement les ruses de l'autre, ils ne trouvent rien de mieux que de ne pas se gêner, et sucent la graisse délicate qui couvre mes côtes : j'y suis habitué. Une vipère méchante a dévoré ma verge et a pris sa place : elle m'a rendu eunuque, cette infâme. Oh ! Si j'avais pu me défendre avec mes bras paralysés ; mais, je crois plutôt qu'ils se sont changés en bûches. Quoi qu'il en soit, il importe de constater que le sang ne vient plus y promener sa rougeur. Deux petits hérissons, qui ne croissent plus, ont jeté à un chien, qui n'a pas refusé, l'intérieur de mes testicules : l'épiderme, soigneusement lavé, ils ont logé dedans. L'anus a été intercepté par un crabe ; encouragé par mon inertie, il garde l'entrée avec ses pinces, et me fait beaucoup de mal ! Deux méduses ont franchi les mers, immédiatement alléchées par un espoir qui ne fut pas trompé. Elles ont regardé avec attention les deux parties charnues qui forment le derrière humain, et, se cramponnant à leur galbe convexe, elles les ont tellement écrasées par une pression constante, que les deux morceaux de chair ont disparu, tandis qu'il est resté deux monstres, sortis du royaume de la viscosité, égaux par la couleur, la forme et la férocité. Ne parlez pas de ma colonne vertébrale, puisque c'est un glaive. Oui, oui… je n'y faisais pas attention… votre demande est juste. Vous désirez savoir, n'est-ce pas, comment il se trouve implanté verticalement dans mes reins ? Moi-même, je ne me le rappelle pas très clairement ; cependant, si je me décide à prendre pour un souvenir ce qui n'est peut-être qu'un rêve, sachez que l'homme, quand il a su que j'avais fait vœu de vivre avec la maladie et l'immobilité jusqu'à ce que j'eusse vaincu le Créateur, marcha, derrière moi, sur la pointe des pieds, mais, non pas si doucement, que je ne l'entendisse. Je ne perçus plus rien, pendant un instant qui ne fut pas long. Ce poignard aigu s'enfonça, jusqu'au manche, entre les deux épaules du taureau de fêtes, et son ossature frissonna, comme un tremblement de terre. La lame adhère si fortement au corps, que personne, jusqu'ici, n'a pu l'extraire. Les athlètes, les mécaniciens, les philosophes, les médecins ont essayé, tour à tour, les moyens les plus divers. Ils ne savent pas que le mal qu'a fait l'homme ne peut plus se défaire !
J'ai pardonné à la profondeur de leur ignorance native, et je les ai salués des paupières de mes yeux. Voyageur, quand tu passeras près de moi, ne m'adresse pas, je t'en supplie, le moindre mot de consolation : tu affaiblirais mon courage. Laisse-moi réchauffer ma ténacité à la flamme du martyre volontaire. Va-t'en… que je ne t'inspire aucune pitié. La haine est plus bizarre que tu ne le penses ; sa conduite est inexplicable, comme l'apparence brisée d'un bâton enfoncé dans l'eau. Tel que tu me vois, je puis encore faire des excursions jusqu'aux murailles du ciel, à la tête d'une légion d'assassins, et revenir prendre cette posture, pour méditer, de nouveau, sur les nobles projets de la vengeance. Adieu, je ne te retarderai pas davantage ; et, pour t'instruire à te préserver, réfléchis au sort fatal qui m'a conduit à la révolte, quand peut-être j'étais né bon ! Tu raconteras à ton fils ce que tu as vu ; et, le prenant par la main, fais-lui admirer la beauté des étoiles et les merveilles de l'univers, le nid du rouge-gorge et les temples du Seigneur. Tu seras étonné de le voir si docile aux conseils de la paternité, et tu le récompenseras par un sourire. Mais, quand il apprendra qu'il n'est pas observé, jette les yeux sur lui, et tu le verras cracher sa bave sur la vertu ; il t'a trompé, celui qui est descendu de la race humaine, mais il ne te trompera plus : tu sauras désormais ce qu'il deviendra. Ô père infortuné, prépare, pour accompagner les pas de ta vieillesse, l'échafaud ineffaçable qui tranchera la tête d'un criminel précoce, et la douleur qui te montrera le chemin qui conduit à la tombe.
Sur le mur de ma chambre, quelle ombre dessine, avec une puissance incomparable, la fantasmagorique projection de sa silhouette racornie ? Quand je place sur mon cœur cette interrogation délirante et muette, c'est moins pour la majesté de la forme, que pour le tableau de la réalité, que la sobriété du style se conduit de la sorte. Qui que tu sois, défends-toi ; car, je vais diriger vers toi la fronde d'une terrible accusation : ces yeux ne t'appartiennent pas… où les as-tu pris ? Un jour, je vis passer devant moi une femme blonde ; elle les avait pareils aux tiens : tu les lui as arrachés. Je vois que tu veux faire croire à ta beauté ; mais, personne ne s'y trompe ; et moi, moins qu'un autre. Je te le dis, afin que tu ne me prennes pas pour un sot.
Toute une série d'oiseaux rapaces, amateurs de la viande d'autrui et défenseurs de l'utilité de la poursuite, beaux comme des squelettes qui effeuillent des panoccos de l'Arkansas, voltigent autour de ton front, comme des serviteurs soumis et agréés. Mais est-ce un front ? Il n'est pas difficile de mettre beaucoup d'hésitation à le croire. Il est si bas, qu'il est impossible de vérifier les preuves, numériquement exiguës, de son existence équivoque. Peut-être que tu n'as pas de front, toi, qui promènes, sur la muraille, comme le symbole mal réfléchi d'une danse fantastique, le fiévreux ballottement de tes vertèbres lombaires. Qui donc alors t'a scalpé ? Si c'est un être humain, parce que tu l'as enfermé, pendant vingt ans, dans une prison, et qui s'est échappé pour préparer une vengeance digne de ses représailles, il a fait comme il le devait, et je l'applaudis ; seulement, il y a un seulement, il ne fut pas assez sévère. Maintenant, tu ressembles à un Peau-Rouge prisonnier, du moins (notons-le préalablement) par le manque expressif de chevelure. Non pas qu'elle ne puisse repousser, puisque les physiologistes ont découvert que même les cerveaux enlevés reparaissent à la longue, chez les animaux ; mais, ma pensée s'arrêtant à une simple constatation, qui n'est pas dépourvue, d'après le peu que j'en aperçois, d'une volupté énorme, ne va pas, même dans ses conséquences les plus hardies, jusqu'aux frontières d'un vœu pour ta guérison, et reste, au contraire, fondée, par la mise en œuvre de sa neutralité plus que suspecte, à regarder (ou du moins à souhaiter) comme le présage de malheurs plus grands, ce qui ne peut être pour toi qu'une privation momentanée de la peau qui recouvre le dessus de ta tête.
J'espère que tu m'as compris. Et même, si le hasard te permettait, par un miracle absurde, mais non pas, quelquefois, raisonnable, de retrouver cette peau précieuse qu'a gardée la religieuse vigilance de ton ennemi, comme le souvenir enivrant de sa victoire, il est presque extrêmement possible que, quand même on n'aurait étudié la loi des probabilités que sous le rapport des mathématiques (or, on sait que l'analogie transporte facilement l'application de cette loi dans les autres domaines de l'intelligence), ta crainte légitime, mais, un peu exagérée, d'un refroidissement partiel ou total, ne refuserait pas l'occasion importante, et même unique, qui se présenterait d'une manière si opportune, quoique brusque, de préserver les diverses parties de ta cervelle du contact de l'atmosphère, surtout pendant l'hiver, par une coiffure qui, à bon droit, t'appartient, puisqu'elle est naturelle, et qu'il te serait permis, en outre (il serait incompréhensible que tu le niasses), de garder constamment sur la tête, sans courir les risques, toujours désagréables, d'enfreindre les règles les plus simples d'une convenance élémentaire.
N'est-il pas vrai que tu m'écoutes avec attention ? Si tu m'écoutes davantage, ta tristesse sera loin de se détacher de l'intérieur de tes narines rouges. Mais, comme je suis très impartial, et que je ne te déteste pas autant que je le devrais (si je me trompe, dis-le moi), tu prêtes, malgré toi, l'oreille à mes discours, comme poussé par une force supérieure. Je ne suis pas si méchant que toi : voilà pourquoi ton génie s'incline de lui-même devant le mien… En effet, je ne suis pas si méchant que toi !...
Coucou, me revoilà
Que tu aies lu ou non Lautréamont, tu conviendras que la vérité sort du contraste ! Pour que tu ne sois pas égaré par mon texte un peu confus, je vais te résumer les personnages :
Il y a toi, tu le conçois aisément, et les choses, pour le dire arrivent... Il y à moi, c'est celui qui dit "je", c'est moi, "ego", bien que nous ne le sommes pas tous. Je pense donc je suis, je suis donc je sais ! Il y a l'auteur, il parle à la troisième personne, il s'appelle Xavier. Tu ne le confondra pas avec "je", sous peine de non sens. Enfin, il peut y avoir des personnages de passage, que Xavier vouvoiera.
En voilà justement un qu'il vient de rencontrer. C'est un médecin de campagne, comme on n'en rencontre pas dans les villes ! Il me raconte une petite aventure, qu'il a vécue dans son cabinet.
« Voyez-vous, Xavier, la salle d'attente était bondée et je commençais un peu tardivement, à cause d'une urgence. Ma première cliente était une femme d'une trentaine d'année, assez sexy, en pleine forme, du moins en apparence.
- Qu'est-ce qui vous amène, madame ? - Je crois que je suis enceinte ! - Allons voir, déshabillez-vous, je vais vous ausculter. »
Le temps que je cherche mon spéculum, en un temps record, elle s'est mise, comme on dit vulgairement, "entièrement à poil" ou "à poils", comme vous voulez. Je lui dis de remettre sa culotte et son soutien gorge, je pourrais l'ausculter comme cela. Enfin, comme elle n'avait pas bronché, et comme je m'imaginais la salle d'attente en proie à une impatience bien légitime, je commençais l'examen.
À peine je l'avais touchée, elle se met à pousser des cris, se précipite sur la porte, traverse toute la salle d'attente avec le spéculum et s'engouffre dans les toilettes devant le regard médusé du peuple. Vous imaginez le tableau ! Je n'ai rien pu faire d'autre que de sortir du cabinet, en disant, m'adressant à la cantonade :
"Vous voyez, j'ai quelques problèmes !".
Il y a, docteur, des comportements bien étranges. Vous avez peut-être une explication. Il arrive aussi que certains spécialistes aient un comportement qui semble pour le moins curieux, pour leur malade.
Il y avait un éminent "psy", qui s'était marié avec une éminente consoeur, issue d'une importante famille de spécialistes en tout genre, et ceci de père en fille et de fille en conjoint, mais comme vous semblez perdu, je résume :
Ils ont eu un enfant, certainement très mignon, comme tous les petits enfants, mais voilà, ce petit ne pouvait pas être tout à fait normal, puisque c'était une spécialité issue d'un accouplement de deux être consanguins, ou tout au moins, du même monde. Il n'était pas question que les grands parents voient cette petite créature, qui paraissait, d'après quelques photos trouvées par hasard, aussi normal que tous les petits des hommes. Le petit avait un demi-frère et une demi-sœur, issus d'un premier mariage de leur mère avec un homme qui était, vous ne le devinerez jamais, un éminent chirurgien.
Il est facile de penser combien le "psy" a été accueilli dans ce concentré d'essences rares, à tel point que l'idée même que le petit eût des grands-parents assez ordinaires, était intolérable. Ce qui devait arriver arriva.
Le "psy" traita sa mère de tous les mots et de tous les maux que l'on trouve dans les manuels de psychiatrie et dans les encyclopédies médicales. Freud lui donna en quelque sorte, sa bénédiction posthume.
Il a bon dos, ce pauvre Freud ! Me revoilà, maintenant que tu as lu ces deux petites histoires. Tu remarqueras que je n'ai fait aucun commentaire. Ce ne sont que des anecdotes, racontées par l'auteur. On ne comprend pas bien ce qu'elles font ici, mais un auteur a tous les droits.
Ça lui a sûrement fait du bien de les raconter. Il va beaucoup mieux depuis, notre Xavier. Il se fait tard. Toi qui est allé jusqu'au bout, reçois mes félicitations.
Dans le silence de ta chambre, je devine des formes d'animaux sans tête, debout sur leurs pattes, ou plutôt sur leurs jambes. Ils sont tout nus et comme leurs mains cachent leurs sexes, on ne peut pas distinguer si ce sont des mâles ou des femelles. Mais quelle importance ! Et ce qu'ils font, ou ce qu'elles font, ça les regarde. C'est peut-être bien des humains !
Et maintenant, concentre-toi, c'est le dénouement !
Si tu es encore là, tu vas bientôt me découvrir. Regarde derrière toi s'il n'y a personne. Tu veux me dire des grossièretés, me traîner dans la boue, me chasser pour toujours, mais fais attention, pas de brusqueries, il pourrait t'arriver des malheurs ! Avant de refermer doucement cette page, regarde attentivement ton écran. Et surtout, ne fais pas comme le singe, qui va voir ce qu'il y a derrière le miroir, et qui s'en détourne, après avoir constaté qu'il n'y avait personne.
Épilogue
L'auteur a écrit cette nouvelle, après avoir rencontré sur Internet, des écrivains post-modernistes, des psychanalystes délirants, des poètes maudits... Il avait très peu lu de littérature décadente, d'essais philosophiques, de poèmes surréalistes... Il a rassemblé ici, quelques pages, dans lesquelles il a découvert la vie tourmentée et le style de quelques écrivains fous. La folie n'a rien à voir avec la démence. C'est simplement une autre manière de se représenter une réalité personnelle. La démence, c'est la perte de la faculté de pouvoir penser. Je suis fou et tu es fou. Les fous ne devraient jamais être enfermés, ce serait dément !
Références
Lien externe : Freud et Lacan, association lacanienne internationale Lien externe : Chants de Maldoror, Isidore Ducasse, comte de Lautréamont Lien externe : Antonin Artaud
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