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Fantastique/Merveilleux
Tiramisu : Apocalypse bleue
 Publié le 25/09/21  -  11 commentaires  -  23487 caractères  -  73 lectures    Autres textes du même auteur

Et si certains animaux commençaient à en avoir vraiment marre de l’espèce humaine…


Apocalypse bleue


Luciana fait le tour de la salle ronde dont les murs transparents dévoilent un fond marin reconstitué. C’est un ballet incessant de raies, de tortues… Fascinée par les reflets bleutés, la jeune femme se sent apaisée par le rythme de la faune marine qui tourne autour d’elle. La paroi de l’aquarium est une invention récente, matériau hybride entre verre et caoutchouc qui se déforme de l’intérieur lorsque des corps robustes s’appuient contre lui. Luciana se remémore à ce sujet les propos du directeur de l’établissement dans la presse : « Ce relief des corps donne un réalisme fou au fond marin ! » Un dauphin s’appuie contre le verre souple et sa forme s’imprime dans la paroi, Luciana plaque sur cette empreinte ses deux mains pour le caresser, l’œil taquin du mammifère semble la fixer, il fait des allers et retours et à chaque fois se love dans ses mains en une longue caresse. Le charme est rompu par l’arrivée d’un couple accompagné de trois enfants, l’un d’entre eux se précipite et écrase son nez sur le verre. Il hurle face à un mérou :


– Maman, tu crois qu’il me voit ?


Le père répond mollement :


– Arthur, viens ici, tu ne dois pas te coller contre les vitres, c’est interdit…


Les deux autres enfants se dispersent en courant dans la salle. Une moue d’agacement se dessine sur les lèvres de Luciana, elle regarde l’heure sur son portable, Steve doit la rejoindre. Elle observe chaque nouvel arrivant. La salle se remplit de monde et de bruits, de cris d’admiration, des pleurs d’enfants aux rires d’adultes, le niveau sonore s’élève considérablement. La jeune femme s’assoit sur un banc central, elle continue d’observer la foule et jette un œil au plafond de verre où passent des mammifères marins. Soudain la lumière s’obscurcit, les lueurs bleutées font place à une nuit sans étoiles accompagnée d’un silence total, même le bébé ne pleure plus. Intriguée, Luciana se lève et se met sur la pointe des pieds, il n’y a plus que des requins qui tournent autour des spectateurs. Une jeune fille s’exclame :


– Waouh ! Putain d’ambiance ! Trop forts les organisateurs !


Les petits yeux méchants des requins fixent la foule alors qu’ils ne voient que leur propre reflet à l’infini. Ils sont de plus en plus nombreux. Luciana inspire et expire pour libérer la tension. Brusquement des cris fusent de part en part, la paroi se déforme, des dents jaillissent et attrapent la tête d’un homme, il est décapité sur le coup. Les parois ondulent sous la forme des monstres et des têtes de requins surgissent et attrapent tout ce qui est à leur portée. Ils donnent aussi de violents coups avec leur nageoire caudale qui font tomber les personnes les unes sur les autres. Les parois élastiques se referment après leur passage dans un bruit de succion libérant des éclaboussures d’eau et de sang. Le rouge remplace le bleu. Des tortues recroquevillées dans leur carapace se propulsent comme des bombes et assomment des individus. Des raies mantas percent la paroi de leur queue et en blessent d’autres qui tombent à la renverse. Dans la panique, les personnes se bousculent et empêchent les premiers rangs de reculer. Luciana tente de calmer le jeu et d’orienter au mieux tout le monde vers la sortie. Tout se passe très vite. Elle voit une poussette renversée, et un bébé qui hurle dedans, elle se précipite, elle est malmenée par des personnes qui cherchent à fuir en en piétinant d’autres. Luciana parvient avec difficulté à détacher l’enfant et à revenir au banc central, elle se hisse dessus, le bébé serré contre elle. Tremblante, la jeune femme saisit son portable d’une main et appelle son chef.


***


La réunion avec son équipe va bientôt commencer. Tendu, Louis fixe le panneau blanc sur lequel s’étalent de nombreuses photos de l’attentat. Des corps ensanglantés jonchent le sol. C’est la première fois de sa carrière qu’il est confronté à une telle tuerie et à son premier échec en tant que commandant, ce qui le blesse profondément, réussir et gagner font partie de ses objectifs de vie. Précédemment, sa hiérarchie lui a demandé de constituer une équipe spéciale suite à différents évènements troublants avec des mammifères marins : deux dresseurs de dauphins gravement blessés dans un Marineland, et des bateaux attaqués par des orques sur la côte atlantique, un noyé. Auparavant, il y avait eu des incidents intrigants, des refus de mammifères marins à se faire dresser, ou bien des bandes de dauphins, accompagnant des embarcations de manière plus agressive que joyeuse, avaient été signalées. Cette montée en puissance de ces comportements déviants inquiète en haut lieu, cela perturbe l’activité économique de nombreux endroits : fermetures de parcs aquatiques, pêche artisanale entravée, activité nautique limitée en plein été. Avec l’attentat, un cap vient d’être passé, le ministre de l’Intérieur lui-même s’est saisi du problème, des moyens importants vont être débloqués pour résoudre cette énigme.

Les membres de son équipe arrivent et s’installent autour de la table. Louis s’interroge sur la pertinence de sa sélection, il voulait peu de monde mais de réelles compétences dans plusieurs domaines. Steve, cheveux en bataille, chemise froissée à moitié rentrée dans son jean, se laisse tomber sur sa chaise, il a la réputation d’avoir beaucoup de flair, ce que son apparence nonchalante ne laisse pas deviner au premier abord. Julie s’assoit en face de lui et ouvre son ordinateur dont elle ne se sépare jamais, c’est une informaticienne hors pair, une hackeuse toute catégorie, et enfin, Luciana, officier dans la gendarmerie maritime, de formation océanographe, et experte du milieu marin.


Les sourcils froncés, Louis fait face à son équipe.


– Nous avons cinq morts et quinze blessés, dont deux en urgence absolue.


Il se frotte le menton piqueté de poils noirs et drus. Le bruit de ce frottement occupe l’espace sonore, chacun retient son souffle. Il arrête son geste et reprend la parole :


– Ce qui est arrivé ce matin dépasse tout ce qu’on pouvait craindre.


Il se tait à nouveau, sa main effleure sa barbe naissante. Personne n’intervient, chacun attend, les visages traduisent une incompréhension totale, les regards suivent le mouvement de sa main comme pour y trouver un sens à ce qui vient de se passer. Face au silence général, Louis reprend :


– C’est un attentat ! Et on a été prévenu… J’ai pensé que le danger viendrait d’individus, d’où l’énorme dispositif policier déployé à l’extérieur et auprès des équipes de l’aquarium, tous les visiteurs ont été fouillés et contrôlés.

– Prévenu ? Menacé plutôt, dit Steve la voix enrouée.


Steve se penche vers une feuille de papier bleue dactylographiée posée devant lui et lit :


« Vous devez protéger la faune marine, si vous ne le faites pas, il en coûtera à l’humanité. Libérez les animaux des aquariums. Si pas de changement, rendez-vous au grand aquarium le vendredi 13 août à 10 heures ! Vous savez ce qui vous reste à faire ! »


– C’est incompréhensible, comment des animaux stupides peuvent être aux ordres de quelqu’un qui utilise un ordinateur ! lâche Julie en mâchant son chewing-gum la bouche à moitié ouverte.

– C’est sûr ! Cela t’en bouche un coin, toi l’informaticienne de talent ! se moque Steve.

– Oh, ta gueule !


Julie lui a lancé un regard noir qu’elle plonge rapidement dans son ordinateur. Ses joues ont rougi violemment, ses tatouages au cou et aux bras ont foncé d’un coup.


– Vous n’allez pas recommencer à vous chamailler tous les deux, l’heure est grave ! coupe fermement Louis. Pas de doute, un ou des individus sont derrière tout ça. Deux questions : qui sont-ils ? Et comment influencent-ils les mammifères marins ? Maintenant, nous avons une autre urgence.

– Laquelle ? s’inquiète Steve.

– La direction a reçu un appel à l’aide d’une plateforme offshore qui construit des éoliennes au large de la Bretagne.

– Que se passe-t-il ? demande Luciana.

– De nombreux mammifères marins les ont encerclés. Dauphins, orques, sans doute aussi des requins.

– Mais c’est haut une plateforme offshore, non ? Ils ne risquent rien, remarque Steve.


Louis appuie sur une touche de son ordinateur.


– Regardez cette vidéo.


Sur le mur blanc, on voit un groupe de six personnes dans un zodiaque entouré de mammifères marins, ceux-ci tournent autour de l’embarcation et s’en rapprochent. Le bateau est bousculé, puis carrément retourné, les hommes sont propulsés dans l’eau. Ils nagent jusqu’au ponton d’amarrage, les poissons les accompagnent mais ne s’approchent pas. La vidéo s’arrête et Louis reprend :


– C’est une vidéo prise de la plateforme lors d’un changement d’équipe. Dans ces conditions, ils ne peuvent plus se déplacer en bateau. Heureusement, ils ont un hélicoptère mais ça ne transporte pas beaucoup de monde.

– Les bestioles auraient pu s’en prendre aux mecs quand ils nageaient, ils ne l’ont pas fait, remarque Julie.


Louis acquiesce d’un air sombre.


– Oui, c’est clairement un avertissement, nous sommes missionnés sur ce sujet. On part demain sur la plateforme, il faut que nous comprenions ce qui se passe !

– Demain, samedi ? grogne Julie. Mais ne suis-je pas plus utile ici ? Si je dois faire des recherches ? Pas de réseau en mer. Et puis qui va auditionner les témoins du drame de ce matin ?

– Les auditions seront menées par des collègues d’autres services. Notre rôle est de résoudre les problèmes en amont pas de les traiter après. Nous sommes quatre, on part tous les quatre ! Et on fera venir des renforts si besoin. On ne doit pas se faire avoir comme ce matin !


Le ton autoritaire de leur chef ne permet pas de réplique. Lorsqu’il quitte en dernier la salle de réunion Louis rattrape Steve par l’épaule.


– Attends, je voudrais te parler deux minutes.


Steve le regarde d’un air interrogateur.


– Tu étais où ce matin ??? Luciana s’est retrouvée toute seule à gérer cet enfer ! Merde ! 10 heures c’est pas l’aube ! Hier, on t’a laissé chez toi avant minuit, il te faut combien d’heures de sommeil ?


Steve fait une moue embarrassée.


– Je me suis écroulé, j’ai pas compris, je t’assure… Je couve peut-être quelque chose…


Le regard noir de Louis le fusille.


– Tâche d’être à l’heure demain !


Louis lui donne sèchement son congé et appelle Luciana qui passe dans le couloir.


– Comment tu vas ?

– Ça va…

– Pas très bavarde tout à l’heure. Tu sais que tu peux passer voir le psy, si tu préfères ne pas venir demain, ça m’embêterait mais… J’en veux à Steve de ne pas avoir été avec toi…

– Ça n’aurait pas changé grand-chose.

– C’est pas sûr, à deux, vous auriez pu vous organiser, aller chercher du secours, faire partir des gens, sauver plus de monde, et surtout tu n’aurais pas été toute seule à vivre ça.


Louis observe Luciana, soucieux. La jeune femme balaye ses longs cheveux noirs vers l’arrière, et lève ses yeux bleus vers lui, elle a toujours cette façon déroutante de le regarder directement sans ciller.


– Laisse tomber, ça a été tellement vite. Avançons. Dis-moi ce que dit la hiérarchie, a-t-elle l’intention de prendre des mesures, de répondre à leur demande ?

– Je ne sais pas encore. Je monte voir le boss, il m’a appelé, il doit y avoir du nouveau dans les hautes sphères. Pour demain, peux-tu nous préparer une synthèse sur ce qui concerne ce projet d’éoliennes, ont-ils des ennemis ?

– D’accord, je vous ferai un topo durant le transport.


Louis observe la démarche souple de Luciana qui s’éloigne dans le couloir, il a du mal à détacher ses yeux de la silhouette gracile. Cette femme a un charme fou. Il finit par se secouer et part d’un pas pressé vers l’ascenseur.


***


Le lendemain, l’hélicoptère traverse une baie magnifique bordée de caps majestueux. Des mouettes et goélands volent au-dessus de la mer turquoise et transparente, pas de mammifères marins en vue. Les regards se perdent dans ce spectacle grandiose, et chacun pense au topo que vient de faire Luciana. Le projet de construction des 62 éoliennes de plus de 200 mètres de haut a entraîné beaucoup de résistance : la colère des pêcheurs privés d’une zone très importante, les associations environnementales qui parlent d’écocide vis-à-vis des oiseaux et de la faune marine, et les riverains qui veulent un libre horizon. Steve finit par rompre le silence avec sa voix rocailleuse :


– Ces éoliennes vont faire tache dans le décor !

– Et gros malin, comment tu crois qu’on va avoir de l’électricité dans l’avenir, tu comptes pédaler ? se moque Julie.

– Les assos disent que c’est une électricité intermittente et extrêmement chère, drôle de pari, quand même…

– De toute façon tu critiques tout, toi !

– Non, je suis juste objectif, ce ne sont pas des jolis moulins à vent mais carrément une usine en mer, et reconnais que dans ce lieu naturel préservé, c’est pas terrible !

– Bah, ça pollue pas !

– La pollution sonore est réelle, vibration et infrasons peuvent être très perturbants pour la faune marine, sans compter les déchets d’aluminium dans la mer avec les éoliennes, et diverses pollutions, comme le dit Steve, c’est une usine en mer !


Ce que vient de dire Luciana évite à Louis d’intervenir dans les conflits habituels du duo mais il ne peut s’empêcher de jeter un œil en coin à Steve. Son boss, hier soir, l’a mis en garde contre lui, des recherches ont été faites sur tous les membres de l’équipe, Steve est le seul à avoir un passé d’activiste, même de zadiste. Son patron se demande s'il n’y a pas une taupe dans les services de police, et Louis n’a pas digéré son absence au côté de Luciana. Il ne s’explique pas les liens que Steve pourrait avoir avec les mammifères marins, mais il a bien l’intention de le tenir à l’œil.


Les pales d’hélicoptère vrombissantes se mêlent au vent marin tandis que l’équipe descend de l’appareil. Paul Maurin, le manager de la plateforme, les accueille avec un sourire fatigué.


– Je suis content de vous voir. On s’est peut-être inquiétés trop vite, mais vu ce qui s’est passé hier au grand aquarium…


Son front est barré de rides transversales.


– Venez, je vous emmène prendre un café, et je vous explique la situation.


Luciana observe la taille énorme de la plateforme, elle se remémore ce qu’elle a lu, 150 mètres de long et 40 mètres de large, quatre piliers autoélévateurs peuvent faire croître la hauteur, leur base est enfoncée dans la mer. Actuellement, la plateforme est en surplomb d’une dizaine de mètres, quand les piliers sont relevés cela devient un navire. D’un côté, il y a les bureaux et logements d’habitation, de l’autre la partie concernant le forage pour installer les pieux de fixation des éoliennes. Quelques minutes plus tard, tout le monde rentre dans une salle de réunion, un thermos de café est posé sur la table avec une corbeille de biscuits.

Lorsque chacun est installé autour de la table avec un café servi, Paul Maurin, le dos voûté, tenant sa tasse à deux mains, finit par prendre la parole.


– Je suis inquiet, je ne vous le cache pas !


Il reste un moment la tête baissée.


– Nous avons d’abord vu une ronde incessante de mammifères marins autour de la plateforme, ils devaient être au moins une centaine. Que nous voulaient-ils ? Et puis, ils sont partis d’un coup. On a cru que c’était fini…

– Ensuite, un zodiaque a été retourné, c’est ça ?

– Oui, vous avez vu la vidéo, des hommes à bord, ils venaient de quitter l’amarrage, ils ont pu nager jusqu’au ponton.

– Pas de blessés.

– Plus de peur que de mal mais…


Paul Maurin relève la tête, les yeux écarquillés.


– Ces monstres auraient pu les noyer sans aucun problème.


Son ton lugubre fait frissonner Luciana. Louis, l’air grave, reprend la parole :


– Je n’ai pas de bonnes nouvelles, il y a un nouveau message de menace, il concerne la plateforme.


Louis sort un papier bleu de sa poche de blouson. Les membres de l’équipe le regardent surpris, ils s’étonnent que Louis n’en ait pas parlé lors du transport. Leur chef lit le texte :


« La construction des éoliennes de la baie doit s’arrêter immédiatement, autrement, nous l’arrêterons nous-mêmes à minuit le samedi 16 août. »


– C’est pas possible ! Ils ne peuvent rien faire contre la plateforme, s’écrie Paul Maurin.

– Les mammifères, non, des hommes si ! Je veux la liste de tous vos collaborateurs avec leur date d’arrivée.

– Vous pensez que…


Paul Maurin regarde Louis, l’effroi se lit dans ses yeux.


– Nous ne devons rien laisser au hasard.


Louis demande à Julie d’examiner la liste et de se mettre en rapport par radio avec le service pour faire des recherches sur chacun des collaborateurs. Tandis que Luciana, Steve et lui vont inspecter l’ensemble de la plateforme.


Après une fouille minutieuse, rien ne leur a paru suspect. Louis a gardé la bride sur le cou à Steve durant toute la visite. L’après-midi est consacré à auditionner les membres de l’équipage arrivés récemment ainsi que certains ayant un passé trouble.


Après le dîner du soir, Louis et son équipe se retrouvent à l’extérieur pour fumer une cigarette ou prendre l’air.


– On n’a trouvé que dalle, lâche Julie d’un ton dépité en expirant sa fumée.

– Peut-être est-ce une fausse alerte pour nous faire flipper, réplique Steve pensif.

– On ne lâche rien ! On garde à l’œil une dizaine de personnes que l’on a jugées potentiellement suspectes, j’ai demandé au bureau à ce que l’on approfondisse leur passé.


Louis a répliqué sèchement, il est inquiet, il a un mauvais pressentiment. Il se tourne vers Luciana, silencieuse. Soudain, des cris les font sursauter. Des membres d’équipage sont sur le pont, penchés au bastingage, ils montrent la mer du doigt. Tous les quatre se précipitent vers la rambarde. La mer est noire de mammifères marins, leur nageoire dorsale forme des remous.


– Putain, combien sont-ils ? s’exclame Julie.

– Plusieurs centaines… murmure Steve.


Louis est blême, d’un ton autoritaire, il lâche :


– Il est 21 heures, dans 3 heures, que va-t-il se passer ? Il faut dès maintenant réexaminer tous les recoins de cette fichue plateforme. Steve, tu viens avec moi, on fait la partie ouest et on passe à la radio pour alerter les autorités maritimes, Julie et Luciana, vous faites la partie est et après, on inversera. On reste en lien avec les talkies-walkies.


Une bonne partie des équipes ont déserté leur poste pour venir voir le spectacle fascinant. Le soleil rouge qui descend à l’horizon éclaire une scène apocalyptique. La mer est envahie de masses noires à perte de vue. Beaucoup de personnes s’exclament, d’autres sont silencieuses comme hébétées devant le spectacle irréel.


***


Quelques instants après minuit, des signaux d’alarme se mettent à hurler sur le pont, des feux se sont déclenchés dans les salles des machines, des équipes se précipitent vers les lances à incendie. Bientôt la plateforme retentit de nouveaux signaux d’alarme ce qui accélère la panique des personnes, elles se déplacent en tous sens, comme une fourmilière dérangée par un coup de pied.


Dans la salle des commandes, Louis demande à Paul Maurin complètement sidéré :


– Vous n’avez pas de détecteurs automatiques de fumée qui déclenchent des jets d’eau à la moindre alerte ?

– Si bien sûr, mais je viens d’apprendre qu’ils ont tous été sabotés !

– Avez-vous des explications quant au départ de feu ?

– Du gasoil, des bidons ont été retrouvés aux différents départs de feux. Lieux les plus inflammables à cause du gaz, de l’huile, bref, cela a brûlé comme de la paille sèche !

– Pas d’autre solution, il faut évacuer !

– J’ai fait appeler des hélicoptères qui vont se relayer, partez avec votre équipe, vous ne servez plus à grand-chose ici…


Le ton de Paul Maurin est mi-agressif, mi-amer. Louis est profondément atteint par ce nouvel échec, l’attitude du manager lui fait l’effet du sel sur une blessure à vif.


– On partira les derniers, il faut que l’on comprenne ce qui s’est passé, et trouver les coupables, car forcément, il y a du monde derrière tout ça… Organisez les départs de vos équipes… Arrangez-vous afin que ceux que nous avons listés partent en dernier.


Quelques minutes plus tard, Louis retourne sur le pont central. Les différents départs de feux se rapprochent les uns des autres, les nombreux signaux d’alarme résonnent dans la nuit. Des hommes actionnent les lances à incendie et tentent de réduire les feux. Louis remarque une silhouette familière qui se rapproche de l’escalier qui mène au quai d’amarrage, il la suit.


– Luciana, où vas-tu ?


La jeune femme se retourne et lui fait face, ses yeux bleus étincellent sous l’effet des flammes.


– Je m’en vais.

– Comment ça tu t’en vas ?


Louis est sidéré. Soudain tout s’éclaire, il a fait fausse route depuis le départ.


– C’est toi qui as mis le feu ! C’est ça ?

– Oui.

– Tu n’as pas pu faire ça toute seule, qui sont tes complices ? Tu commandes aux mammifères marins ? Comment est-ce possible ?


Luciana éclate de rire.


– Vous êtes tous pareils, les humains, il vous faut trouver un responsable, un chef.

– Les humains ? Car tu n’es pas humaine peut-être ?


Louis ne lui laisse pas le temps de répondre, il insiste :


– Dis-moi, comment ça se passe ? Comment tu fais ? Qui sont tes complices ?

– Il y a des communications que tu ne peux pas comprendre, j’ai une connexion particulière avec eux…


Son regard se détourne vers la mer.


– … et ce qui nous lie, c’est l’amour, l’esprit de groupe…

– L’amour ?


Louis la regarde les yeux écarquillés. Luciana sourit.


– Oui l’amour, c’est un gros mot, un peu ridicule n’est-ce pas ? Vous êtes trop égocentrés pour savoir aimer.

– Comment peux-tu parler d’amour, toi qui as orchestré le massacre du grand aquarium ?


Une lueur de tristesse passe dans le regard de Luciana.


– Comme je te l’ai dit, je ne suis pas un chef, je donne des impulsions, je ne maîtrise pas tout, je n’ai pas voulu que ça aille si loin. Je ne pensais pas que les parois pourraient craquer, il s’agissait juste d’effrayer. De montrer la puissance de la faune marine…

– Tu es responsable de ce drame !


Pour une fois, il voit la colère dans les yeux de la jeune femme.


– Non. La responsable c’est votre surdité ! Vous n’écoutez rien, vous ne pensez qu’à vos intérêts personnels, vous massacrez la nature, vous ne respectez ni le monde animal, ni le monde végétal, ni la terre, ni la mer. Beaucoup d’humains ont les yeux ouverts pourtant, mais on ne les écoute pas… C’est seulement la violence qui vous fait réagir, enfin…

– Steve n’a rien à voir là-dedans.

– Non, rien, j’ai voulu détourner ton attention vers lui, je lui ai mis un somnifère puissant dans son verre la veille du grand aquarium. Je connaissais son passé d’activiste. Tu l’as surveillé, pendant ce temps, j’ai pu agir tranquillement.

– Tu n’as pas pu faire cela toute seule, ce n’est pas possible, tu n’étais pas là la première fois que les mammifères sont venus autour de la plateforme ? Qui a mis le feu avec toi ?


Luciana se contente d’un sourire énigmatique. Louis sort son arme de service et la braque vers elle. Durant leur conversation, il s’est déplacé de façon à lui barrer le passage vers l’escalier qui descend au quai d’amarrage.


– Tu dois te rendre maintenant.

– Très bien.


Luciana tend les mains en avant. Louis range son arme et sort les menottes. Au même instant, elle enjambe la rambarde et plonge dans l’océan. Louis croit voir dans la lumière des flammes une grande nageoire à la place de ses pieds.


 
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   Anonyme   
3/9/2021
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai bien aimé l'idée de base d'une attaque généralisée de la faune marine, et trouve que vous ménagez plutôt bien le suspense au long du récit, en revanche la résolution de l'énigme me semble faible ; une femme-dauphin qui met en branle les actions par des impulsions mentales ? Non, pour moi ça ne colle pas dans la mesure où le ton général jusqu'à présent était complètement réaliste et où le "changement de braquet" du réaliste au fantastique m'apparaît trop soudain. J'ai l'impression que vous n'avez su comment "ficeler" votre histoire, la rendre complète avec une explication qui tienne la route, et je me dis que, tant qu'à faire, il serait peut-être préférable de laisser les choses en suspens. Genre, Luciana disparaît au cours de l'évacuation, plus tard on retrouve ses empreintes partout sur les lieux des départs de feu, des rapports mystérieux indiquent la présence d'une femme qui se déplace au milieu de grands groupes de mammifères marins... Bref, ménager une échappée vers le fantastique, mais éviter de clore par un virage complet qui sonne incongru pour moi. Tel est mon avis de lectrice, naturellement vous auteur ou autrice en faites ce que vous voulez.

Un détail : tout au long du texte l'insistance est mise sur le rôle prépondérant des mammifères marins (exemple
comment influencent-ils les mammifères marins ?
), or le premier attentat d'envergure démarre avec des attaques de requins. Cela m'a un peu gênée.

   cherbiacuespe   
4/9/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Un plaidoyer rondement mené contre les activités d'homo sapiens. Bien pensée, je trouve, bien échafaudée et bien écrite. Les dialogue sont cohérents. Cela me rappelle " le cerveau vert" de F. Herbert, la nature qui se rebelle. Sous cette forme, une enquête policière, c'est intéressant et se laisse lire facilement. On en arrive vite à chercher ce qui cloche avec l'équipe, à se poser des questions. On est à la limite de l'anticipation, heureusement la dernière phrase est là pour y mettre le zeste de merveilleux qui convient.
Agréable en tout point !

Cherbi Acuéspè
En EL

   Robot   
25/9/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Voilà une aventure fantastique qui m'a retenu de bout en bout. A aucun moment je ne me suis douté que Luciana pouvait être l'instigatrice. Ce qui veut dire que pour moi le suspense a bien marché.
Une bonne fable écologique. J'ai apprécié que tout du long les animaux marins restent des animaux et qu'ils ne soient pas transformés par anthropomorphisme en êtres devenus hybrides.
C'est exactement le contraire puisque c'est l'humaine qui semble devenir sirène, ce qui maintien le récit dans le domaine de la fable.
C'est ce qui donne je crois de la crédibilité à l'histoire.

   plumette   
25/9/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'ai passé un bon moment avec cette histoire.

il y a quelque chose de fascinant dans la contemplation des fonds marins , et la première scène dans l' aquarium géant aux parois souples est très bien décrite.
L'attaque des requins est saisissante, je ne m'y attendais pas du tout!
Le texte change alors de direction, on entre dans un genre de polar d'anticipation, les dialogues de l'équipe avec les rivalités et les méfiances créent un climat de tension qui ne cesse d'évoluer et de perdre le lecteur.

Un peu moins convaincue par l'enquête sur la plateforme, et bizarrement déçue par la résolution presque trop explicative, mais qui, surtout, va trop vite à mon goût.

L'idée de faire de Luciana la transfuge est bonne, car en effet, tu nous as habilement détournée d'elle, j'essaye d'imaginer une autre fin qui laisserai plus de mystère, tout en étant consciente de la difficulté à boucler cette histoire sur un format court.
Ce qui m'a gênée, je crois, c'est que tu prends ton temps pour installer l'histoire et les péripéties et qu'ensuite il y a une très grande accélération.

Sur le fond, cette histoire résonne comme un signal d'alarme, j'aime aussi la porosité que tu installes entre l'humain et le marin.

A te relire

   placebo   
25/9/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une idée intéressante à suivre. Ça me rappelle un film de Shyamalan sur les arbres qui tuent, Phénomènes.
Les lieux - l'aquarium, la plate-forme - changent un peu de l'ordinaire.
Les descriptions sont efficaces.

Un bémol pour les dialogues que j'ai trouvé un peu plats. L'attirance de Louis pour Luciana fait légèrement cliché. Et l'attitude de Luciana me semblait plus suspecte que celle de Steve, donc pas de surprise pour moi :)

Merci,
bonne continuation,
placebo

   Corto   
26/9/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Suspense et faune marine.
L'idée est très bonne et le scénario recèle des moments captivants.

L'histoire est bien menée, avec au début un épisode paisible et satisfait, puis une accélération brusque dès le moment de l'accident.
Passer de l'aquarium à la plateforme en mer donne une ampleur intéressante et surtout une envergure au suspense où le lecteur se sent embarqué dans un contexte qu'il ne maîtrise plus du tout.

Luciana la sirène-femme organise et dirige les attaques alors qu'on la trouvait si belle et sympathique tout au long du récit.

L'auteur a su monter une histoire en ne dévoilant qu'à la toute fin la structure sous-jacente.

Un bien beau moment de lecture avec éventuelle réflexion sur le respect de la nature en prime.

   hersen   
27/9/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Carrément d'actualité à l'heure où sortent des flots les premiers piliers d'une ferme éolienne en Atlantique.
C'est une lecture agréable, le déroulé est bon.
Par contre, je pense que Luciana en sirène, femme-poisson, c'est un peu faible, même si la description de sa silhouette quand elle est observée par Louis fait sens.
Mettre le feu à la plate-forme est à mon avis trop humain dans ce monde marin qui se rebellent et, en quelque sorte, freine la magie.
C'est un texte qui a un gros potentiel, à mon avis, mais dont les actions devraient être plus clairement décidées par le monde marin, d'une manière qui nous scotcherait vraiment.
Ce qui rachèterait la faiblesse du concept femme-poisson, ce serait d'aller bien plus loin, pourquoi pas de reprendre des monstres marins légendaires, ou bien d'expliquer que ce sont les exactions humaines qui ont conduit à générer des monstres marins, capables de sauver leur océan.
Bref, ne pense pas que je refait ton histoire, j'essaie d'expliquer qu'à mon sens, il y a un manque de profondeur :)) dans le sujet, qu'il reste finalement trop humain.

Merci de la lecture, merci aussi pour le sujet évoqué.

   Anonyme   
28/9/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour. Belle histoire bien écrite. L'intrigue fonctionne, j'ai enchaîné les lignes et les paragraphes pour savoir où j'allai me retrouver. Et juste une ligne pour la chute emprunte de poésie… J'aime beaucoup la façon dont vous avez traité ce thème qui est, aujourd'hui plus que jamais, d'actualité.
Je viens de me poser sur le site Oniris. Si vous le souhaitez, je pourrai faire quelques petites remarques - minimes, très minimes - histoire de mettre mon grain de sel (de mer )…

   Tiramisu   
2/10/2021

   Anonyme   
29/10/2021
Bonjour Tiramisu,

Je me suis demandé s’il était bien raisonnable de ma part de commenter ce texte. Je suis parvenu sur-celui-ci par hasard au gré du parcours de fils de discussions. Je l’ai donc lu.
Faut-il que je le commente ou pas ?
Si je le commente, j’ai bien peur de me retrouver dans le même contexte qu’il y a quelques jours, lorsque j’avais commenté un autre de vos textes. De ce point de vue, il serait sage que je m’en abstienne.
Si je ne le commentais pas, j’aurais en revanche l’impression sinon la certitude de ne pas jouer le jeu du site qui, je le suppose du moins, consiste à décrire honnêtement son expérience de lecture plutôt que craindre un retour de l’auteur. Cet argument me parait primer sur tout autre. Voilà pourquoi je prends malgré tout le risque de le commenter.

Il y a bien des angles pour aborder l’analyse d’un texte. Disons que je distingue grossièrement quatre axes : le thème, l’histoire, le récit qui en est fait et la forme que prend littérairement ce récit.

Je suis sensible au thème et il m’intéresse. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai entamé la lecture de votre texte, sinon je ne l’aurais sans doute pas fait. Ce thème (vous me corrigerez si je me trompe) est globalement écologiste, traite de cette façon qu’a l’humain de réserver pour lui seul le milieu qu’il partage pourtant avec d’autres et, de manière encore plus singulière ici, un milieu qui n’est a priori pas tout à fait le sien. Après tout, l’humain dégrade son propre milieu et pas seulement celui d’autres espèces, mais vous focalisez ici sur l’outrage causé aux autres espèces et ça me va très bien.

Une histoire peut-être imaginée pour soutenir le thème. Vous avez imaginé une vague d’attentats écologistes dont on connait ici les deux premiers événements. Vous avez inscrit cette histoire dans un cadre fantastique, dans lequel le monde animal marin se révolte, en cela accompagné et aidé par un être humain qui ne l’est plus tout à fin à la fin de l’histoire, comme s’il avait choisi de poursuivre sa vie dans la peau d’une espèce convenant mieux à son âme. Ou bien alors, ce personnage n’est pas humain, mais a seulement pris apparence humaine le temps de s’adresser aux humains. Ça me va. D’ailleurs, à ce stade, tout pourrait peut-être me convenir dès lors que le reste me plaise.

Il y a ensuite le récit qui est fait de cette histoire, encore détaché pour l’instant de la forme purement littéraire que prend ce récit, bien que nous soyons déjà à mi-chemin entre le fond et la forme.
C’est là que ça se gâte pour moi. Je ne sens pas d’existence propre des personnages. Je ne les perçois que comme des pions que l’on déplace pour faire avancer le récit. Même les éléments annexes censés donner une matérialité aux personnages sont tellement caricaturaux qu’il m’est impossible d’y croire. Les dialogues n’aident pas non plus. Je ne vois pas de récit, je vois uniquement le thème, l’histoire et l’auteur au travail.

Concernant la forme purement littéraire que prend le récit, je la trouve pauvre et aussi caricaturale que les personnages. Certes l’orthographe, la conjugaison et la grammaire ne sont pas maltraitées, mais le respect des règles ne fait pas en soi la littérature, qui pourrait d’ailleurs être faite de non-respect de ces règles. Quoi qu’il en soit, un texte contenant des fautes involontaires peut se corriger. Un texte contenant une abondance de qualificatifs peu éclairants et des formulations convenues ne peut qu’être repris par son auteur.

A titre indicatif, je relève ici quelques fins de répliques de dialogues :

- [..] dit Steve la voix enrouée
- [..] lâche Julie en mâchant son chewing-gum la bouche à moitié ouverte
- [..] se moque Steve
- [..] s’inquiète Steve
- [..] demande Luciana
- [..] remarque Steve
- [..] remarque Julie
- [..] se moque Julie
- [..] s’écrie Paul Maurin
- [..] lâche Julie d’un ton dépité en expirant sa fumée
- [..] réplique Steve pensif
- [..] s’exclame Julie
- [..] murmure Steve

Pour varier quelque peu la forme, on peut aussi mettre ces formules convenues avant la réplique plutôt qu’après :

- Le père répond mollement :
- Une jeune fille s’exclame :
- Les sourcils froncés, Louis fait face à son équipe.
- Il arrête son geste et reprend la parole :
- Face au silence général, Louis reprend :
- Steve se penche vers une feuille de papier bleue dactylographiée posée devant lui et lit :
- La vidéo s’arrête et Louis reprend :
- Steve finit par rompre le silence avec sa voix rocailleuse :
- Paul Maurin, le dos voûté, tenant sa tasse à deux mains, finit par prendre la parole
- Louis, l’air grave, reprend la parole :
- Leur chef lit le texte :
- Louis est blême, d’un ton autoritaire, il lâche :
- Dans la salle des commandes, Louis demande à Paul Maurin complètement sidéré :
- Louis ne lui laisse pas le temps de répondre, il insiste :

« Montrer, non la chose, mais l’effet de la chose » est un principe connu pour aider à la rédaction d’un texte. Bien sûr, un effet littéraire peut aussi être obtenu en prenant consciemment le contre-pied de ces « recettes de cuisines ». Je relève seulement ici ce qu’engendre l’ignorance systématique de tels principes :

- Fascinée par les reflets bleutés
- la jeune femme se sent apaisée par le rythme de la faune marine
- Une moue d’agacement se dessine sur les lèvres de Luciana
- Intriguée, Luciana se lève
- Tendu, Louis fixe le panneau blanc
- ce qui le blesse profondément
- les visages traduisent une incompréhension totale
- Le ton autoritaire de leur chef
- Steve le regarde d’un air interrogateur
- Steve fait une moue embarrassée
- Louis lui donne sèchement son congé
- Louis observe Luciana, soucieux.
- Louis observe la démarche souple de Luciana
- il a du mal à détacher ses yeux de la silhouette gracile
- Cette femme a un charme fou
- les accueille avec un sourire fatigué
- Son ton lugubre fait frissonner Luciana
- Louis, l’air grave, reprend la parole
- Les membres de l’équipe le regardent surpris
- Paul Maurin regarde Louis, l’effroi se lit dans ses yeux
- Louis a répliqué sèchement, il est inquiet, il a un mauvais pressentiment
- Louis est blême, d’un ton autoritaire, il lâche :
- Louis demande à Paul Maurin complètement sidéré
- Le ton de Paul Maurin est mi-agressif, mi-amer
- Louis est profondément atteint par ce nouvel échec
- Louis est sidéré
- Une lueur de tristesse passe dans le regard de Luciana.
- Pour une fois, il voit la colère dans les yeux de la jeune femme.
- Luciana se contente d’un sourire énigmatique

J’extrais l’un des rares passages dans lesquels vous montrez l’effet de la chose et non la chose (et sans que vous ne nommiez avant ou après la chose montrée par ses effets) :
« Ses joues ont rougi violemment, ses tatouages au cou et aux bras ont foncé d’un coup. »
Ce n’est peut-être pas exprimé de manière très originale et la chose demeure imprécise (est-ce de la colère ? De l’embarras ?), mais c’est en tous cas un bon début.


Je ne suis peut-être ou sans doute pas très habile pour aborder des auteurs plus sensibles que d’autres. En réalité, je ne sais pas comment les aborder. Faire un inventaire plus ou moins exhaustif de ce que je crois être des faiblesses littéraires peut-être pris pour de l’acharnement (j’en ai l’expérience) alors que dans mon esprit, il s’agit au contraire de montrer par l’exemple ce qui pourrait sinon être pris pour un avis expéditif (et cela demande beaucoup de temps au commentateur). A contrario, s’abstenir d’un tel inventaire et se contenter de quelques phrases plus suggestives que directes, avec des mots choisis pour ne pas heurter ou heurter le moins possible peut être ensuite pris pour de la « condescendance ».

Lorsque je vois qu’un auteur fait partie du Comité Editorial, je forme l’hypothèse qu’il doit avoir de la bouteille et pouvoir prendre du recul par rapport à son propre texte. Si j’avais conscience qu’il s’agit d’un débutant exerçant sa plume, je serais sans doute plus prudent.
Mais quelle que soit l’hypothèse que je puisse formuler au sujet de l’auteur, je ne peux pas non plus dénaturer mon commentaire au point qu’il ne dise plus rien de ce qu’il a à dire. Sinon, je cesse de commenter.
On peut aussi prendre le parti de ne commenter que les textes sur lesquels on n’a que du bien à dire. Je pense que ce serait faire du mal en voulant faire du bien.

Cordialement

   Marite   
30/10/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Très agréable lecture pour cette nouvelle et, au point où sont rendues les recherches sur les matériaux divers, j'y trouve même une note de réalisme. L'écriture est fluide, les dialogues bien menés et rien ne vient perturber notre avancée dans la découverte du scénario apocalyptique. La conclusion est inattendue et signe, en deux phrases, l'aspect fantastique et merveilleux du récit :
" Au même instant, elle enjambe la rambarde et plonge dans l’océan. Louis croit voir dans la lumière des flammes une grande nageoire à la place de ses pieds."

Ah ! Juste un bémol, un peu de difficulté à m'habituer, tant à l'oral qu'à l'écrit à l'utilisation aujourd'hui banalisée de certains mots qui, à mon sens, traduisent fortement une sorte de soumission à une "mode" qui se veut et se dit décomplexée :
Ex :
" – Waouh ! Putain d’ambiance ! Trop forts les organisateurs !"
" – Putain, combien sont-ils ? s’exclame Julie."

Mais ce n'est peut-être que la mise en évidence de la médiocrité des personnages qui les prononcent. C'est dommage pour la lectrice que je suis mais, après tout, une forme de réalisme aussi ...


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