13 avril 2008
Quand j'ai dit à mon artiste, ce matin, que j'allais chercher Nemo sous l'eau, elle a eu très peur. Il m’a fallu longtemps pour la convaincre. Elle trouve que c'est dangereux. Moi je trouve que c'est dangereux de laisser Nemo tout seul. Finalement, nous avons passé un accord. Elle m'a emmenée au magasin de jouets pour trouver un équipement de plongée à ma taille. J'ai dû faire semblant de ne pas bouger quand le vendeur regardait vers nous. Je crois bien qu'il a pris mon artiste pour une folle, mais qu'il n'a rien osé dire.
J'ai essayé beaucoup de sous-marins et de scaphandres avant de trouver un petit costume de plongée qui m'allait. Nous avons aussi acheté un bateau à moteur, et en passant à la librairie, un manuel de plongée sous-marine. Ensuite nous sommes allées les essayer à la piscine municipale.
Heureusement qu'il n'y avait pas beaucoup de monde à la piscine. Nous avons pu aller nous cacher dans le petit bassin. J'ai appris bien vite à faire du bateau. C'est même amusant. Par contre la plongée, qu'est-ce que c'est difficile ! L'artiste me lisait les instructions, mais je n'y arrivais pas très bien. Toute seule je me serais noyée une centaine de fois. À la fin ça a fini par rentrer. Mon artiste voudrait que je m'entraîne encore mais je ne peux pas laisser Nemo tout seul si longtemps.
Ce soir, j'ai vérifié le moteur du bateau et rempli les bouteilles d'oxygène. Demain, je pars chercher Nemo !
18 avril 2008
Cher journal,
Nemo est de retour ! Nous sommes avec lui dans le train, c'est une longue histoire mais je suis soulagée. Nemo dort maintenant et l'artiste est en train de dessiner toute l'aventure pour faire passer le temps du voyage. Je vais laisser de la place pour coller les dessins, ça sera plus simple.
Alors, il y a quatre jours je suis montée dans mon bateau avec mon équipement de plongée, j'ai pris la toupie et j'ai pensé à la maison de Nemo, la grande barrière de corail en Australie. J'avais attaché la toupie à une longue ficelle que j'ai mise autour de mon cou, alors elle ne tournait pas très bien mais ça a marché quand même.
J'ai bien fermé les yeux cette fois et je me suis retrouvée sur l'Océan. J'ai plongé aussitôt, tout droit, tellement j'étais sûre de retrouver Nemo. Ça aurait pu mal se passer, parce que sous le bateau il y avait deux gros poissons gris avec des petits yeux et un autre tout plat. Nemo croit que j'ai vu des requins et une raie, et que je l'ai échappé belle. Heureusement qu'ils ne m'ont pas fait de mal. En fait, ils n'ont même pas fait attention à moi !
Il y quand même un autre poisson gris qui est venu vite vers moi. J’ai eu peur. Il avait de grands yeux, lui, et il rigolait tout le temps. Nemo croit que c'est un dauphin, et que je ne dois pas le confondre avec les requins. Les dauphins sont des mammifères, pas des poissons. En tout cas le dauphin a été bien gentil avec moi. Il m'a demandé quelle sorte de poisson j'étais. J'ai répondu une vache en peluche, et il a dit qu'il ne connaissait pas cette espèce, qu'il n'en avait jamais entendu parler ! Alors je lui ai expliqué que je vivais sur Terre et que je cherchais un petit poisson rouge et blanc qui s'appelait Nemo. Ça l'a beaucoup fait rigoler !
- Tu crois vraiment pouvoir trouver un petit poisson dans l’Océan ! Tu es un peu malade peut-être ?
Je n'ai pas apprécié qu'il se moque de moi, mais il a dit qu'il allait m'aider. Seulement les poissons rouge et blanc vivaient un peu plus loin et je n'arrivais pas à suivre le dauphin qui nageait vraiment vite. Alors je suis remontée sur mon bateau, il a sorti la tête de l'eau et nous avons poursuivi comme cela. Pendant le trajet nous avons eu le temps de bavarder. Je lui ai demandé son nom, mais je n'ai rien compris. Cela ressemblait à un éclat de rire très long, un peu comme aaaaaaaaaaa. Sauf que quand je l'écris je ne peux pas montrer le rythme que ça fait. Le nom du dauphin était bien compliqué pour moi, alors je l'ai appelé AaA et ça ne l'a pas embêté.
Quand AaA m'a dit que nous étions arrivés chez la famille de Nemo et qu'il fallait replonger j'ai été plus prudente que la première fois. Je n'ai pas sauté d'un coup dans l'eau sans réfléchir. Ici, il n'y avait pas de gros poissons gris, mais des tas de choses incroyables. Un vieux monsieur en pierre, tout au fond de la mer par exemple. AaA m'a dit qu'il était là depuis très très longtemps.
Il y avait aussi des fleurs et de l'herbe, je ne savais pas qu'on pouvait en trouver dans l’eau ! Nemo prétend que ce sont des algues et des anémones, et que les anémones piquent. Je ne les ai pas touchées, elles étaient beaucoup trop jolies pour ça. Nous avons aussi croisé des dizaines de poissons de toutes les couleurs, de drôles de méduses et des familles de crabes, une tortue, et une créature pleine de bras. Elle n'a pas arrêté de me suivre. Je crois que c'était une pieuvre ! Sans AaA pour me guider et tout m'expliquer j'aurais été complètement perdue.
Finalement, AaA m'a emmené vers un vieux bateau tout abîmé couché sur le sable : une épave !
J'ai vu un petit poisson rouge et blanc caché dans l'ombre et j'ai nagé de toutes mes forces et criant :
- Nemo ! Je suis là !
Le poisson m'a regardé sans réagir. Je me suis dit que le voyage l’avait peut-être perturbé.
- Tu ne te souviens pas de moi ? Margueritte ! Allez, on retourne dans l'atelier, l'artiste nous attend ! - Je ne sais pas qui vous êtes Madame, a répondu le poisson, mais si vous approchez, vous aurez affaire à moi.
Alors j'ai compris que ça n'était pas Nemo. AaA nous a rejoints, et il a bien vu que j'étais trop triste pour parler. Il a tout expliqué au petit poisson, tous les deux ont discuté longtemps.
- Vous savez, m'a dit le poisson au bout d'un moment, notre famille est très grande. Nous nous appelons les poissons-clowns et nous avons des milliers et des milliers de frères et sœurs. Rien que dans le coin nous sommes cinq mille sept cent soixante-huit, nous ne nous rendons visite que pour nos anniversaires ! Il n'y a personne parmi nous qui s'appelle Nemo. Je suis vraiment désolé. - Margueritte, a continué AaA, l'océan peut être dangereux pour ceux qui ne le connaissent pas bien. N'essaie pas de passer trop de temps ici, ce n'est pas bon pour toi. Tu devrais retourner dans ton élément, sur terre, et chercher comment trouver ton ami. Tu reviendras à ce moment-là. Nous te reconnaîtrons.
Il avait raison. Nous nous sommes dit au revoir et je suis remontée sur le bateau. J'ai fait tourner la toupie et je suis revenue dans l'atelier. Mon artiste m'a aussitôt attrapée et serrée dans ses bras. Elle a dû me sécher avec un sèche-cheveux, car j'étais toute mouillée ! En plus, je n'arrêtais pas de pleurer, j'étais tellement sûre que nous ne retrouverions jamais Nemo. Alors l'artiste m'a dit qu'elle avait réfléchi pendant que j'étais sous l'océan. Elle avait acheté Nemo dans un grand aquarium, et se demandait s'il n'y serait pas retourné. Aussitôt, j'ai voulu faire marcher la toupie, mais l'artiste m'a arrêtée.
- Assez de voyages magiques pour aujourd’hui ! Je préfère que nous prenions le train, a-t-elle dit, ça sera un peu plus long mais moins dangereux ! Et au moins, je ferais quelque chose, je ne resterais pas à attendre en me demandant ce qui se passe.
Nous avons pris le train très tôt le lendemain matin et nous avons filé vers l'aquarium. Le voyage n'est pas très long mais il m'a semblé durer une éternité. Dans la boutique de l'aquarium nous avons vu des dizaines de peluches qui ressemblaient à Nemo comme deux gouttes d’eau ! Un vrai casse-tête, nous ne savions pas du tout comment le reconnaître. L'artiste ne pouvait quand même pas acheter tous les poissons en peluche. Ça aurait été compliqué, et pas gentil pour les autres visiteurs qui voulaient aussi un souvenir.
J'ai pensé que Nemo avait peut-être été vendu par erreur et qu'il dormait dans la chambre d'un inconnu ! Mais je me suis dit aussi qu'il n'aurait pas aimé revenir dans la boutique. Il devait sûrement être allé du côté des aquariums. Nous avons cherché partout, dans tous les coins. Les gens nous regardaient un peu bizarrement et une dame habillée en bleu nous a demandé ce que nous faisions. L'artiste a expliqué qu'elle avait perdu sa peluche en visitant. La dame en bleu a été très gentille : elle a appelé d'autres dames habillées en bleu aussi et elles se sont toutes mises à chercher avec nous. Une d’elles a fini par trouver Nemo. Il s'était endormi par terre, dans un coin de la grande salle où on peut admirer les poissons tropicaux.
Mon artiste l'a pris et a beaucoup remercié les dames en bleu. Ensuite nous sommes allées à l'hôtel, car il n'y avait plus de train pour rentrer à l'atelier. Quand Nemo s'est réveillé il a été bien content de nous voir et nous avons beaucoup parlé !
19 avril 2008
Cher journal,
Je me suis endormie à l'hôtel et j'ai dormi toute la nuit. Nemo, lui était bien réveillé. Même après que 2h22 furent passées ! Il a tellement réfléchi pour retrouver nos amis que ça l'a empêché de s'endormir et alors il lui est arrivé la même chose qu'à moi. Je suis bien contente, et l'artiste ça lui a fait vraiment plaisir ! À midi, Nemo nous a dit qu'il avait une idée. À cause de son passé à l'aquarium, il raisonne de manière scientifique. Je croyais que tout le monde était retourné d'où il venait, comme moi, mais ma théorie ne lui plaît pas.
Théorie c'est un mot que les scientifiques aiment bien, moi je ne l'avais jamais utilisé avant. C'est un peu comme une idée qu'on aurait en observant quelque chose, mais on ne serait pas sûr d'avoir raison. Nemo nous a dit que si la théorie était vraie, tous les deux nous aurions dû nous retrouver dans une usine de fabrication de peluches. Il croit que je suis allée dans la prairie parce que j'avais trop regardé des livres de tourisme dans mon magasin. Lui il est retourné dans l'aquarium parce qu'il se rappelait cet endroit qui lui plaisait bien. La théorie de Nemo c'est qu'on a tous voulu aller dans un endroit qu'on aimait. Alors, il faut qu'on réussisse à deviner quel est l'endroit que chacun de nos amis aime le plus, pour aller le chercher. Nous avons commencé à donner notre avis dans tous les sens. C'est quand même difficile de deviner les rêves des autres !
Alors Nemo a eu une deuxième idée. Il a dit qu'il fallait faire un tableau pour noter toutes nos hypothèses. Encore un mot scientifique, pour dire idée aussi, mais quand on ne sait pas si c'est une bonne idée ou pas. Enfin, je crois. C'est compliqué la science, mais bien pratique ! Nous avons mis une grande feuille blanche dans l'atelier et nous avons réfléchi ensemble.
Il nous a fallu toute la journée pour remplir le tableau. Je le copie ici, comme ça si jamais la grande feuille se perd nous n'aurons pas besoin de recommencer !
Le tableau pour retrouver nos amis : Qui ? Où il a pu aller ? Ce qu'on doit faire ?
Mimi Chez la reine d’Angleterre ? Mimi peut se cacher, elle va être en sécurité
Avicenne Pourvu qu'il ne soit pas allé sur la lune ! C'est son endroit préféré C'est encore un bébé, il faut vite le retrouver
Gontran Il est en Inde, c'est sûr. Depuis qu'il sait que là-bas, les singes sont sacrés, il n'a pas arrêté de nous en parler ! Il paraît qu'il y a des tigres en Inde, on doit vite le retrouver !
Mini-Bill Mini-Bill ne sait même pas encore parler ! On ne va pas réussir à le retrouver Il est si petit, on ne peut pas le laisser trop longtemps
Nestor L'artiste le connaît bien, elle croit qu'il est dans la vieille maison de campagne Nestor est vieux et sage et il connaît bien la maison
Octave Il a dû aller dans une forêt en automne, mais maintenant c'est le printemps ! Est-ce que la toupie peut remonter dans le temps ? Octave a vécu avec des gardes forestiers canadiens, il va s'en sortir !
Sophie Elle n'est pas bavarde, alors on ne sait pas du tout où chercher Sophie est très timide, ça peut être embêtant !
Wolf Wolf nous a toujours parlé du Pôle Nord C'est un dur à cuire, mais au Pôle Nord il fait très froid
Ce qui est un peu triste, c'est qu'il y a beaucoup de cases où nous ne sommes pas sûrs du tout. Nemo pense que plus on retrouvera de peluches plus on sera nombreux pour réfléchir et plus ça sera facile de trouver les autres. J'espère qu'il a raison...
En regardant le tableau nous avons tous décidé qu'il fallait vite sauver les bébés. Demain je vais aller chercher Avicenne sur la Lune. Nous avons pensé à la Lune car il n'arrêtait pas de la regarder toutes les nuits en soupirant. Et puis comme il parle encore un peu bébé, quand il sera là, il pourra peut-être nous aider pour retrouver Mini-Bill. J'espère vraiment qu'on va réussir !
Après il faudra trouver Gontran. L'artiste nous a montré des photos de tigres en Inde et nous avons eu très peur ! Gontran est malin mais ça n'est un bon endroit pour personne.
Bon, je vais me reposer un peu avant de partir pour la Lune. Souhaite-moi bonne chance !
20 avril 2008
Sur la Lune on ne peut pas respirer sans équipement, mais je ne peux pas réutiliser le costume de plongée ! Ça nous inquiète beaucoup, car Avicenne n'a pas de costume lui. Nemo croit qu'il n'y a rien à craindre car les peluches n'ont pas besoin d'oxygène pour respirer. Comme c'est juste une hypothèse, je dois quand même mettre un costume, au cas où il se tromperait. L'artiste a fabriqué un équipement de cosmonaute en papier aluminium et en plastique. Il est un peu lourd pour moi. Mon cœur bat très fort, je vais bientôt y aller.
Au revoir journal.
21 avril 2008
Journal,
Je suis revenue ! La Lune est beaucoup moins jolie de près que de loin ! Déjà, on ne peut pas marcher sans s'envoler, on se sent tout léger. En plus, il n'y a personne. Tout est silencieux, ça fait vraiment froid dans le dos. Heureusement, grâce au silence j'ai vite entendu Avicenne pleurer et je l'ai retrouvé. L'hypothèse que les peluches n'ont pas besoin d'oxygène est juste !
Avicenne était drôlement content de me revoir. Il a voulu sauter dans mes bras, et s'est envolé. Je l'ai rattrapé juste à temps...
- La Lune n'est pas belle, je suis malheureux, a-t-il dit, et je n'ai pas su répondre.
Juste à ce moment-là, il s'est passé quelque chose de tellement beau qu'on ne peut pas le raconter. La Terre est apparue, toute bleue et douce dans l'espace. Nous avons su tout de suite que c'était la Terre... Nous l'avons contemplée longtemps et puis Avicenne m'a donné la patte.
- On rentre maintenant, s'il te plaît Margueritte. Elle est chouette la Terre ! Je veux y retourner.
Nous avons quitté la Lune sans regret et retrouvé la Terre avec plaisir. Avicenne a vraiment changé, il regarde tout avec de grands yeux émerveillés et ne tient pas en place. Je suis contente !
À suivre…
____________________________ Texte Mathilde Pascal (Twinkle)
Illustrations Colette Pitance (Colette)
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