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Laboniris
wancyrs : Déchirures [concours]
 Publié le 23/10/24  -  9 commentaires  -  5385 caractères  -  56 lectures    Autres textes du même auteur

Je t’ai aimée comme j’ai appris à le faire : vite. Et mal ; du premier coup d’œil. Autant que j’ai aimé celles avant toi, et que j’ai quittées comme j’ai aimé : vite. Et mal.


Déchirures [concours]


Ce texte est une participation au concours n° 36 : Des courts littéraires atypiques

(informations sur ce concours).



Plus expressif que les sonorités, il y a le silence total : je m’étendais dans l’herbe, et l’écoutais me parler, loin de la grande cité, là où le bruit atteste l’existence ; j’avais dix-sept ans. Je ne sais pas pourquoi à cet âge-là déjà j’ai eu envie de fuir le tumulte des villes ; peut-être le besoin de me rapprocher de moi, le besoin d’entendre cette voix que la cacophonie et le vertige de la vie dans les grandes cités étouffent. Le besoin d’entendre cette voix, car sans elle la possibilité de connecter avec les autres est nulle…


***


Certains ont un père. D’autres, un souvenir clair de père. Et d’autres encore, la certitude d’avoir eu un père, tellement leur mère en parle. Il me reste de mon papa quelques images floues, une moto, et les éloges de ma mère à son égard. Oh bien sûr qu’il me reste aussi des frustrations, mais c’est contre la mort qui l’a réquisitionné si jeune. J’ai essayé tant bien que mal de faire la paix avec le destin, mais il y a ce cliché qui me hante, tache noire sur le blanc de ma mémoire d’enfant : un visage que même la faucheuse n’a pas réussi à enlaidir, apparaissant dans le carré vitré d’un cercueil laqué. Deux boules de coton blanc obstruaient des narines qui désormais n’inspireraient plus aucun air, au-dessus d’une moustache en arc de cercle qu’il prenait le soin de tailler chaque semaine. On l’avait mis là, sous la grande fenêtre de la salle où son corps était exposé au public, et les rayons de soleil – ô ironie – frappaient aux portes de ses yeux éteints. C’était la première fois que je faisais face à la mort : j'avais cinq ans…


***


Steeve ne disait pas grand-chose après m’avoir introduit dans son bureau. Il me montrait une chaise en face de lui, me tendait un verre d’eau, prenait un bloc-notes et m’invitait à parler. Je ne me souviens de son visage que le roux de ses cheveux, et le compatissant de son sourire. J’ouvrais la bouche et me vidais le cœur. Mon psy, de temps à autre, regardait la pendule sur le mur, puis, à trois quarts d’heure depuis le début de notre rencontre, m’arrêtait pour tout récapituler et céduler le prochain rendez-vous. Je repartais le cœur aussi surchargé qu’avant la consultation. Sa tactique me troublait…


***


Le temps n’existe que pour frustrer l’humain : la rotation des aiguilles le détermine. Le mouvement des planètes le fixe. La dégradation cellulaire l’induit, et le passage du noir au blanc des cheveux le confirme. Parce qu’on se fixe des objectifs à atteindre, le temps joue un rôle important dans la vie de chacun. Il est pourtant infini, et nul ne peut se vanter de l’impressionner ; à moins de l’ignorer…


***


Après six rencontres avec Steeve je ne savais toujours pas son plan d’action ; d’ailleurs, je n’en n’avais pas un moi non plus. Je me plaignais, il m’écoutait. Quelque fois il me témoignait de la sympathie en m’affirmant avoir vécu le même déboire que moi ; ça me réconfortait. Aujourd’hui il m’arrive de le détester, parce que je t’aimais…


***


On habite un corps qui, la plupart du temps, n’est pas celui qu’on souhaite habiter. On hérite d’une nation qu’on n’aurait pas choisie si on avait le pouvoir de le faire. Toute une vie on peut être un étranger pour soi-même, et pour le monde entier si on ne conçoit pas la différence comme étant l’élément fondamental de l’identité, par ricochet, de notre existence en tant qu’être unique. Mais, l’acceptation de soi, comme étant soi, ne garantit pas le bien-être total de soi, car on vit de déchirures. Naître en est la première. Être, la deuxième. Disparaître, la troisième. Partir de chez soi est une déchirure encore plus grande ; seul mourir pourrait décrire combien partir est souffrant : mais personne n’est revenu à la vie pour le confirmer…


***


Je t’ai aimée comme j’ai appris à le faire : vite. Et mal ; du premier coup d’œil. Autant que j’ai aimé celles avant toi, et que j’ai quittées comme j’ai aimé : vite. Et mal.


***


Tu étais blanche au sang indien, mes deux fantasmes en une et même femme, de quoi activer mes programmations erronées en quête de la femme parfaite, et créer l’illusion du bonheur suggéré par les myriades de clichés cinématographiques visionnés mille et une fois. Isabella, ma psy après Steeve, trouvait que mon problème est la façon dont j’entre en relation avec les femmes. Toi-même, un jour où ça allait mal entre nous tu m’as dit que tu avais l’impression que je suis tombé en amour avec une image. Aujourd’hui je peux t’affirmer que j’ignore encore pourquoi j’étais amoureux de toi ; entre fantasme, besoin de se reproduire ou besoin d’être, simplement, le cœur et la tête ont des raisons qui défient la raison d’y comprendre quelque chose. Et puis, étais-je vraiment amoureux de toi ?


***


Le silence n’est pas l’édifice le plus facile à construire, quand tout parle autour et en nous. Il ne suffit pas de se boucher les oreilles, ni d’éviter d’ouvrir la bouche pour qu’il se fasse ; il faut l’adopter et l’apprivoiser, comme on le fait avec un animal de compagnie…


 
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   Provencao   
24/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour,

"Le silence n’est pas l’édifice le plus facile à construire, quand tout parle autour et en nous."

Ce silence que j'ai recouvré tout le long de votre écrit relie le cœur de ces déchirures au mystère de l'existence.
Belle expression et impression de cette intériorité, en révélation secrète. L’écriture poétique se laisse émouvoir par cette sensibilité infinie qui s'aveugle avec maladresse.
Avec le timbre de cette voix perdue, vous nous offrez de decouvrir l’intériorité de ces déchirures.
J'ai aimé cette vérité dévoilée qui rejoint la difficulté de la Présence.

   BlaseSaintLuc   
24/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Je n'ai pas compris le passage entre le vide laissé par le père, et cet amour sans doute perdue aussi, si ce n'est le manque qui fait sans doute le lien, bien écrit et bien décrit, le silence, le manque.

   Catelena   
24/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Le narrateur nous entraîne à sa suite dans une réflexion plutôt désabusée, sur la vie, sur la mort, sur l'amour. Sur la Vie et son V majuscule avec sa blessure d'enfant de cinq ans, ses ecchymoses à l'âme, ses questions, et leurs réponses où l'on se perd, fichées en plein cœur du drame, « car on vit de déchirures. Naître en est la première ; Être, la deuxième ; Disparaître, la troisième... »

Il n'y a ni mélo, ni trémolos sur les lignes de ce journal intime. Juste des constatations à la mine triste qui nous balancent nonchalamment leur pessimisme à la figure, comme étant une vérité universelle, puisque vécue comme telle.

   plumette   
24/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
quelques fragments, bien écrits, assez décousus, qui parlent de perte, d'amour et de quête de sens.
une alternance dans les temps utilisés, du descriptif et des réflexions.
je ne sens pas trop l'intention de l'auteur.

Dans des fragments, je m'attends à plus de poésie.

je sors de ce texte et je me demande ce que j'en retiens. L'évocation du père mort, les séances chez le psy, insatisfaisantes.

et difficile de trouver un titre qui suggérerait une unité à tout ça.

   Charivari   
24/10/2024
trouve l'écriture
perfectible
et
aime un peu
Bonjour. J'avoue ne pas être très fan de ce tye de texte sans véritable structure ni thème, qui se regarde écrire. Il y a bien des tournures intéressantes et un je ne sais quoi de poétique, mais c'est évanescent, flou, et au final, je ne sais pas bien ce que ça apporte au lecteur

   jeanphi   
25/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
Bonjour,

C'est un texte d'une terrible tristesse, où le lecteur peut clairement percevoir le déficit de maturité affective causé chez le narrateur par la perte de son père.
Ayant pu observer que les personnes abusées, abandonnées ou simplement séparées très tôt de leur père ont effectivement une forte tendance à vouloir inclure leur psy dans leur noyau familial, ce texte me parle tout particulièrement. Je ne connais aucun source théorique qui confirme ce phénomène, et c'est seulement en lisant votre texte que je réalise qu'il existe éventuellement une causalité établie à ce sujet.
L'avant dernier paragraphe me paraît malgré tout cela mériter d'être moins abrupte, ainsi l'ensemble resterait-il plus agréable à découvrir.

   Dameer   
25/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Hello,

Une première lecture m'avait emballé, je me dis voilà quelqu'un qui réfléchi sur le "moi", sur sa propre identité, sa place dans le monde : "On habite un corps qui, la plupart du temps, n’est pas celui qu’on souhaite habiter. On hérite d’une nation qu’on n’aurait pas choisie si on avait le pouvoir de le faire.."
Mais à la relecture, j'ai découvert un texte à la trame narrative assez décousue !
il est question de la mort du père, puis de séances chez Steeve, le psy, puis d'une séparation avec une femme choisie sur catalogue de mode "Tu étais blanche au sang indien, mes deux fantasmes en une et même femme" ce qui montre pas mal d'immaturité, et re-séances de psy chez Isabella.

Quant à la conclusion où on apprivoise le silence comme "un animal de compagnie", c'est totalement absurde et ça vient gâcher la bonne impression que j'avais de l'ensemble.

   Jemabi   
25/10/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Une suite de réflexions faites sur le ton de la confidence comme à un journal intime. Cela pourrait être plus court, plus long, puisqu'il n'y a pas vraiment de liens entre chaque paragraphe, pas de lien autre que le besoin de se confier. Mais chaque paragraphe est suffisamment bien pensé et écrit pour que la révélation de cette vie intérieure conserve de bout en bout un intérêt.

   papipoete   
25/10/2024
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
bonjour concurrent
j'ai aimé pas comme il fallait, comme je savais vite et mal
j'ai quitté autant que j'ai conquis, vite et mal
il me revient des visages, dont l'image n'est pas ancrée en moi ; normal, je ne m'attachais pas ni mon père, ni ma mère
NB entre désillusion et pessimisme, on évolue à travers ces lignes, avec l'envie de donner des conseils
" y faudrait que, et pi ça et ça ! "
j'aime particulièrement la seconde strophe


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