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Poésie libre |
Alcirion : Cadavres |
Publié le 08/07/16 - 7 commentaires - 6759 caractères - 65 lectures Autres textes du même auteur
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2004-2016 Une bataille depuis longtemps achevée Dont je termine aujourd'hui le décompte des corps.
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Cadavres
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I
Je répondais à tes sourires sur le même ton À tout hasard En toute inquiétude Tandis que la lumière Tout autour Chaque jour S’affaiblissait Mes yeux voulurent voir Malgré leurs prunelles crevées Qui ne distinguaient plus Ton ombre imprécise La peste soit des circonstances De la posture adéquate Il est un fait oui il est un fait acquis Que mes nerfs exténués glapissaient Enragés étranglés Aux tréfonds de tes ténèbres J’étais dévoré de rancœur Je me souviens J’étais transi de dépit Je me souviens
II
Des démons menteurs mes frères murmurent Que je fus condamné relaps Rejeté pour faute Pour complaisance Pour avoir laissé choir L’humaine solitude La mélancolie fondamentale Le charme mauvais est rompu à présent Mais je ne puis retourner à mes amours malsaines J’ai commis la lourde erreur De chercher la lumière dans le dos du diable Et ne puis plus que pleurer sur la leçon reçue S’étiolera l’innocence Morale de l’histoire Se délitera l’embrasement Révélation terrible
III
Satan aveugle manqua donc mon âme d’un cheveu Et m’en tient encore aujourd’hui rigueur Par vengeance ou fantaisie Il voulut que ma lumière fût toi Une aurore maladive La venue de l’hiver et la mort de toute chose
IV
Mes maîtres mes juges mes pairs Que comprenaient-ils donc de ma souffrance En ces temps effroyables J’étais donc en passe de crever tous les fonds Rejeté des limbes Je ne me laissais plus tripoter par les muses Vivre encore me semblait d’une pertinence relative Quand la furie du monde passait à mes côtés Sans parvenir à m’arracher le moindre soupir J’avais connu l’amour J’avais lu tous les livres J’avais pris toutes les drogues Je traînais derrière moi Un tombereau rempli D’angoisses lamentables Qui me sevraient de sommeil Qui me trouaient le repos Mon visage n’avait plus couleur humaine Les vampires se signaient à ma vue Je poussais par habitude des hurlements exsangues Pareils aux cris déchirants d’un enfant perdu Qui arrache un bout de désespoir aux passants Lugubres sur un quai de gare désert
V
Et tu vins de derrière le chaos La lumière accompagnait chacun de tes pas Et releva mon regard d’étonnement Ô comme je compris alors Ô comme je baissai bien vite les yeux Ô comme j’empourprai mon visage Mon existence même devint sujette à caution Déplacée En ce monde-là En cet univers étrange Il n’y avait pas de chemin Toutes les routes étaient fermées par des tempêtes inouïes Ma vanité blessée pleura longtemps Et j’en conçus une rage profonde J’étais le sagouin couvert de flétrissures J’étais celui qui n’entre pas J'étais celui qui demeure sous la pluie
VI
Fallait-il vraiment que passent les hivers Que mois et années m’écharpent nerfs et sourire Quelle folie donc fut mienne De persévérer m’acharner À vouloir éclairer ton sourire Comme un croyant espère une grâce impossible Sans doute avais-je enfin trouvé une source maudite assez Ô douleur véritable Ô rêve inaccessible Ô joie pure qui jamais ne coulera entre mes doigts
VII
Encore aujourd’hui voudraient me revenir Au terme de l’automne toujours De sombres soupirs D’ignobles souvenirs Des vestiges de l’époque où tu m’appelais Dans l’horreur blafarde Putréfiée D’une aurore de novembre Et de me raconter ta nuit Tu narrais confusément tes ébats évanouis Te souviens-tu Tu m’informais des voyageurs rencontrés Faut-il vraiment faut-il En avoir de la haine La relation de tes massacres Sectionnait chacune de mes fibres Peste Je ne prêterai plus l’oreille aux rumeurs anciennes Plutôt devenir sourd et me crever les yeux
VIII
Et la coda du monde d’advenir Comme magie obligée Qui donc alors bouleversa l’alchimie cosmique Qui ordonna la transition planétaire Les étoiles filées sur la lame de l’épée D’un aléa hautement improbable Et mon sang et mes sens et mon âme foudroyés Pour résultat de la conjoncture Quelle noire fantaisie vraiment que d’offrir sa viande par déprime Un soir de désœuvrement s’il m’en souvient Le plus élémentaire des sens communs Eût alors été de prendre la fuite Mais ma cervelle en charpie s’y refusa Et j’entendis résonner le rire de Satan À laisser s’exhaler ces relents corrompus Il me semble à présent Que même la haine est morte Jetons tout cela Cela n’a plus d’importance Jetons Aux vautours leur pitance N’est-ce pas Puisque c’est dans l’ordre des choses
IX
Ma barbarie à moi était d’une autre essence Elle changea au fil du temps Ta circonspection curieuse En attention irréelle Bercée de fragrances inquiètes et merveilleuses Rythmant les nuits de synthèse Qui constituaient en ces temps L’essentiel de ta vie J’ai toujours eu l’œil imbécile Toujours j’ai voulu croire aux mirages abscons La ligne de l’horizon seule me ravit pour des heures J’ai survécu à côté des choses J’ai refusé de leur prêter attention Et vu couler mille fois tout mon sang C’est qu’il coûte bien cher De conserver aux nuages L’intégrité de son attention
X
Puisqu’il faut bien se fâcher Puisqu’il faut bien s’emporter en circonstances Quand les nerfs sont dépassés Par l’importance du sentiment Quelles flammes terribles vraiment Ont au dernier jour jailli de mes mains ouvertes Pour faire brûler toutes les postures Sans doute espéras-tu Que ma voix monte et frémisse Que mon corps jaillisse de ses gonds d’airain Tu y as échoué toi aussi que veux-tu Le ciment n’est pas frais il date d’avant toi Et ne laissa filtrer que mon soupir Un instant de lucidité Un retour à la méthode M’obligent à rendre à tes yeux La grâce qui leur est due Courir ton attention a distrait mes divagations Organisé le désordre Animé le corps Attendri la chair Mes yeux voient depuis toutes les couleurs Mes sens portent plus loin Et les nouveaux sentiers obscurs Connaissent parfois ton nom
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Anonyme
24/6/2016
a aimé ce texte
Beaucoup
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... Ou la poésie du fond du gouffre. Une écriture que l'on sent à vif, brillante dans sa noirceur. Un poème en dix actes avec des passages marquants : "J'ai commis la lourde erreur De chercher la lumière dans le dos du diable"
le passage suivant : "Les vampires se signaient à ma vue ... Lugubres sur un quai de gare désert"
"Et tu vins de derrière le chaos"
"Les étoiles filées sur la lame de l'épée"
Il y a je trouve dans ces vers un mélange de tragédie Shakespearienne et de révolte hallucinée Ginsbergienne.
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Vincente
8/7/2016
a aimé ce texte
Beaucoup ↑
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Bonsoir Alcirion,
Quelle tourmente vous nous contez là ! Douze ans à se débattre - Dix strophes à s'épancher ! Une rédemption fugitive - Un poème achevé !
Achevé de son bon sens, en termes et propos, abouti pourrais-je dire. Il s'entend des mots simples des cris du cœur, mais il est maîtrisé. Votre phrasé est limpide bien que fragmenté au rythme de vos chocs émotionnels. Aucune lassitude, aucun creux à la lecture, à part les bas de votre moral qui ne cessent de rebondir vers la folle espérance suivante, dans un feu improbable.
La dernière strophe a laissé poindre des vers moins coulants (par exemple "Puisqu'il faut bien s'emporter en circonstances" ou "Ont au dernier jour jailli de mes mains ouvertes", la lassitude sûrement, l'attention qui s'éteint abandonnée par votre flamme. Mais l'oubli ne sera pas négation, le tableau de fond que laisse ce souvenir restera un décor qui ne disparaîtra pas, à l'instar de la formulation de ces beaux deux derniers vers.
Il y du Brel et sa Mathilde dans cette radieuse désespérance là.
Au plaisir de vous lire.
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Zoe-Pivers
8/7/2016
a aimé ce texte
Passionnément
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Alors ça, c'est terrible. Sentir que tout est sous les yeux, à portée de sens, à deux doigts de la lumière et ne faire que partir dans tous les sens : la liberté, la vérité, Lucifer l'ange déchu qui aida les hommes ?.. S'accrocher à des indices qui vous claquent dans les doigts aux suivants... Se dire qu'il 'y a pas de hasard, que tout semble réglé comme du papier à musique, et ne pas trouver les bons accords... Il y a de quoi, de quoi... Adorer ! Forcément :) Je ne vais pas lâcher, il faut que je saisisse, parce que je le trouve vraiment beau ce poème et j'aime cette personnalité qu'il y a dans l'écriture. Merci beaucoup Zoé PS : Si je suis partie à l'ouest, ne me le dites pas, c'est aussi ça la magie de la poésie, faire partir le lecteur dans son imaginaire :)
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MissNeko
9/7/2016
a aimé ce texte
Passionnément ↑
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Quelque part entre Shakespeare et Baudelaire se trouve votre poème. Quelle claque à la lecture ! SUBLiME. Le sens m est encore un peu sibyllin malgré plusieurs lecture et je n arrive pas à me décider sur le choix de l interlocuteur auquel s adresse le narrateur : la mort, une femme...? Merci pour cette lecture.
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Anonyme
9/7/2016
a aimé ce texte
Bien
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Je trouve qu'il y a une surenchère à chaque phrases, pour les rendre plus choc les unes que les autres. Le problème c'est que je le ressens, et j'avoue que ça gène un tant soit peu ma lecture.
Sinon sur le fond, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai immédiatement pensé à Isidore Ducasse, alias le comte de Lautréamont dans ses chants de Maldoror, ça part dans tous les sens, on passe du coq à l'âne allègrement, mais le tout est assez bien dosé quand même.
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Alcirion
10/7/2016
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dom1
23/7/2016
a aimé ce texte
Un peu ↓
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Râle exigu qui s'éternise et finit par laisser indifférent comme si le trop était l'ennemi du bien. On est pas malheureux ou triste par hasard, hormis si on se complaît dans son jus moribond...
Dominique
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