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Poésie en prose
AlexisGarcia : Hannibal échevelé
 Publié le 17/08/21  -  5 commentaires  -  1881 caractères  -  79 lectures    Autres textes du même auteur

Avignon fin juillet. Le festival est terminé, demeurent les remparts bas. La présentation en un seul paragraphe (ce mot ne convient d'ailleurs pas exactement) est évidemment la volonté de l'auteur : le poème en prose est ici conçu comme un objet de pensée refermé sur lui-même.


Hannibal échevelé



Par juillet, par sa flamme, par l’onde large du brûlant Sirocco, les remparts rêvent d’Afrique. Les tours éléphants ne reviennent-elles pas de Carthage ? Et n’est-ce pas Hannibal, l’arbre échevelé, qui harangue sa maigre troupe, une fois encore ? La ville est désertée, les écoles ont fermé, et les foules, et les théâtres sont sur les routes. Il est midi depuis hier, et jusqu’à la fin des temps. L’heure de bronze sonne puissamment, dans le silence des pierres attentives, et elle grave, à tout jamais, précisément, le néant. Il semble que l’exode est très ancien, et que les jours ont été des millénaires. La Lune même a quitté cette terre de feu, car la nuit est interdite, et les étoiles. L’ombre rare des rues est incongrue, que parcourent insolemment des rats, dans des puanteurs doucereuses. La marchande des quatre saisons ne chante plus son air à quatre sous, elle compte on ne sait où, ni dans quel trou, son pauvre argent. Une tourterelle ne sait pas se taire, qui ne reçoit aucune réponse, à son appel obstiné, à sa cadence effrénée. Quelques-uns sont restés, des hommes peut-être, hors toute famille, qui se sentent exilés. Teintent étrangement des couverts sur des assiettes, comme finissent de combattre à l’épée des presque morts, qui se sont longuement entretués. Ils s’aiment un peu, les affrontés, par la force du corps à corps. Ils se jettent l’un vers l’autre encore, et, dans la joie des franchissements, se transpercent, comme formidables lances. Ils agonisent maintenant, ils se séparent d’eux-mêmes, et leurs têtes, à côté des étendards déchirés, flottent au-dessus de la cité. On voudrait pouvoir lutter, contre le soleil d’été, lever le fer de l’épée, et rejoindre une dernière fois la troupe, qui s’agglomère un peu, en semence de peuple. Les remparts sont bas, comme murs d’Afrique, comme argiles chantant les sables, qui tout en vagues ensevelissent.


 
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   Cyrill   
10/8/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour Alexis

La présentation du texte m’évoque un rempart : c’est bien vu, tout à fait adapté aux dimensions d’oniris.
Cet effet formel, allié à la brièveté du récit, permet de passer outre la difficulté de lecture en mur sur ordi.

Le thème de l’après-festival, lorsque le théâtre en train de se jouer glisse vers autre chose, où le poids de l’histoire s’invite dans une ambiance de désertion de la ville, comme si le spectacle n’était jamais vraiment terminé… tout cela est bien rendu.
Vous décrivez une atmosphère particulière, un peu surréaliste, et je me suis immergé avec plaisir dans cet imaginaire, qui fait revivre Hannibal avec moins de superbe que les représentations populaires nous en content.

Merci pour cette lecture agréable.

   papipoete   
17/8/2021
 a aimé ce texte 
Bien
bonjour AlexisGarcia
Un tour de ville, alors que d'Avignon la foule a fui vers d'autres horizons ; après la fourmilière qui grouillait de touristes et festivaliers, voici quelques cigales le coeur triste, qui trouve la cité bien grande pour elles...
NB l'écriture alerte arme cette prose, où le médiéval côtoie le présent, sous les yeux du fantôme des papes, et Avignon pour un an tombe en léthargie...

   jfmoods   
19/8/2021
La figure centrale de ce poème en prose n'est pas Hannibal. C'est l'astre du jour à son zénith. C'est l'accablante torpeur méridienne qui s'abat, levant la fantasmagorie d'un mythique espace méditérranéen.

Sur la scène de spectacle abandonnée, un chef de guerre s'avance, ressuscitant Carthage et l'étape avignonnaise d'une incroyable épopée vers Rome.

Parmi les éléments marquants du texte, on peut mentionner...

- l'entame à rythme ternaire ascendant, avec effet de gradation ("Par juillet, par sa flamme, par l’onde large du brûlant Sirocco")
- les personnifications ("les remparts rêvent d’Afrique", "l’arbre échevelé, qui harangue sa maigre troupe")
- le lexique de la clarté aveuglante (en particulier "l'heure de bronze", "terre de feu")
- les deux interro-négatives qui font habilement surgir le héros
- les marqueurs temporels mettant en exergue la puissance du mythe ("jusqu’à la fin des temps", "à tout jamais")
- l'écho sonore entre réalité et fiction épique ("Teintent étrangement des couverts sur des assiettes" / "combattre à l'épée")
- l'image de la troupe qui mêle représentation théâtrale et aventure guerrière
- préparée par l'entête, la fermeture du poème sur lui-même (présence des mots "remparts" et "Afrique" dans la première et dans la dernière phrase)

Merci pour ce partage !

   Queribus   
20/8/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Une très bonne idée que d'avoir mis en parallèle Avignon, son festival, sa foule estivale, ses théâtres d'un côté avec Hannibal, Carthage, le Sirocco et l'Afrique dans un saisissant contraste. L’écriture est particulièrement soignée avec ses effets particuliers et ses mots recherchés. L'ensemble donne une impression de travail d'orfèvre tout à votre honneur; j'ai impression que ce style d'écriture vous convient très bien.

Bien à vous.

   Lariviere   
29/12/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour AlexisGarcia,

J'ai beaucoup aimé votre festival d'Avignon fantasmagorique...

Le texte en prose est bien construit, très musical...

Merci pour cette lecture et bonne continuation !


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