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Poésie libre
arigo : Les cailloux ne suffiront plus
 Publié le 30/09/22  -  12 commentaires  -  894 caractères  -  156 lectures    Autres textes du même auteur

Son monde à lui.


Les cailloux ne suffiront plus



Ce jour-là
Jean qui rit,
Jean qui pleure,
Ne seront plus que Jean
Tout court.

Ce même jour
Les flaques ne seront que de l’eau.
Le trampoline, une toile.
Les châteaux, un peu de sable.
Le toboggan perdra de sa hauteur
Plus personne ne conduira le petit tracteur.

Seront silencieux
Flûte, guitare, piano et trompette.
Aucun chant à tue-tête,
Aucun parent ne rouspète.

Sur le sol
Dénué de Lego,
De pions et pièces perdus
S’en iront doucement
Querelles et disputes,
Jeux doux et jeux bruts.
Les larmes.
Les rires.
La vie.

Ce jour lointain
Est déjà proche.

Je te regarde jouer,
Remplir tes poches
D’un simple trésor
Qui rend ta vie de gamin
Si belle.

Je crains ce jour où
Les cailloux ne suffiront plus.


 
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   Jemabi   
21/9/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Un joli poème sur la fin de l'enfance mais du point de vue des parents, toujours plus inquiets que les enfants eux-mêmes. Les enfants vivent leur vie et leur croissance d'une façon naturelle sans se poser trop de questions. Les parents, eux, n'ont pas cette insouciance. Avec délicatesse et sensibilité est évoquée la crainte de voir disparaître tout ce qui rend les enfants à la fois si exaspérants et si attachants, cris, pleurs, rires, jeux... et tout ce qui rend le silence à venir si angoissant.

   Anonyme   
23/9/2022
 a aimé ce texte 
Bien
La mère ou le père du petit Jean (?) le considère et pense au futur. Quand il sera un homme, tout le bonheur d'être avec lui, l'enfant, sera évaporé. Il n'y aura plus de larmes ni de rire, mais un adulte raisonnable et ennuyeux. Bon... mais le sujet n'est pas traité complètement, car avoir un fils de 30, 50 ans n'est pas mal non plus je suppose, il y a beaucoup de compensation, sans compter les petits enfants. Je pense à la phrase de Goethe : les gens croient faire des enfants, mais il faut d'autres gens.

Pour un si court poème, la répétition du très beau titre apporte une lourdeur.
Un poème sympa et gentil, quoique ouvert sur les profondeurs.

   Anonyme   
23/9/2022
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai d'abord cru que le narrateur c'était le gosse lui-même, qui observant les adultes autour de lui se disait qu'ils avaient perdu quelque chose ; il est vrai qu'une telle perspicacité dans le diagnostic paraît peu vraisemblable, mais le sentiment de ne pas vouloir sortir de l'enfance, ce regard juvénile sur soi, cela existe : mon petit-fils de quatre ans m'en a fait part récemment. C'est triste je trouve.

Et puis non, la nostalgie vient bien de l'adulte, pas pour lui- ou elle-même mais pour l'enfant qui un jour n'en sera plus un. Une « nostalgie antespective », en quelque sorte. Le sentiment, pour le coup, m'intéresse moins car il s'agit d'une projection (qui sait si l'enfant en question n'adorera pas grandir, découvrir tout un monde au-delà des cailloux dans sa poche ?), toutefois son expression m'apparaît nettement et joliment posée. Je regrette, cela dit, la majuscule systématique en début de vers qui, à mes yeux, apporte une sorte de raideur, presque comme un jugement moral, à un propos intimiste et rêveur.
Ma strophe préférée est la deuxième, je m'attendris (un peu bêtement me dis-je, je me sens manipulée) sur le « petit tracteur ». Une mention pour le titre qui me semble fort approprié !

   Donaldo75   
24/9/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J’aime déjà beaucoup le titre de ce poème ; je lui trouve une puissance symbolique qui me donne envie d’aller plus loin, de lire le texte lui-même. La première strophe confirme cette impression et je trouve bien vue l’allusion à Jean et la comptine sous-jacente que notre inconscient collectif de lecture nous rappelle. Il y a de la tonalité dans ce poème, un peu de tristesse également et surtout une belle dimension évocatrice qui va dans les deux temporalités du poète.

C’est une très belle réussite car l’ensemble est fluide et agréable à la lecture.

Bravo !

   papipoete   
30/9/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour arigo
Trop beau !
Il viendra le jour, où le sol du salon sera clean, si désert du moindre Lego ! Le toboggan pour les enfants... les châteaux de sable, bof du sable ! Petits-chevaux et autres jeux, rangés à prendre la poussière. Dans la maison, plus de cris, d'accords de guitare...Je te regarde jouer, à m'en remplir le coeur... bientôt ce sera du passé !
NB je ne sais si c'est papa ou papi qui parle, ils disent la même chose...
Et sans cette présence qui parfois casse les oreilles, comme la vie sera vide de lui, le petit : quand il partira à l'école, ou ne viendra plus ici !
C'est pourquoi, il ne faut jamais vouloir qu'ils grandissent vite les enfants, car une balançoire qui reste désespérément figée, comme c'est triste !
Comme la main qu'il nous donne pour aller sur les chemins, la tenir comme un trésor car il dira un jour " tu peux me lâcher la main s'il te plaît ? "
Le dernier vers me touche particulièrement, parce que je me souviens... ma fille jouant avec un haricot coco, des heures durant...
" je te regarde jouer... " est ma strophe préférée

   Lotier   
30/9/2022
Peinture bien pessimiste des adultes (il y a même une cour de récré sur Oniris…), peinture bien optimiste des enfants (voir « Ça tourne pas rond dans ma p'tite tête », de Francis Blanche), cette dichotomie sert le propos du poème. Ce qui différencie le mieux les enfants des adultes, c'est la perception du temps, or ici, rien de tel, c'est dommage.
Le charme du poème, c'est d'appuyer sur des ressorts mnémoniques, à la manière de la scène de la boîte aux souvenirs de Dominique Bretodeau, dans « Le fabuleux destin d'Amélie Poulain ». En cela, il atteint son but.

   Vincente   
30/9/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Ce poème semble être né du trouble causé par la confrontation entre la plus belle des félicités, le bonheur de se réjouir de et pour son jeune enfant, et la plus sourde affliction en ressentant la terrible éphémérité de ces instants. Cette opposition qui porte haut les sentiments mais aussi la conscience de l'amour filial n'épargnera pas le narrateur envahi d'une irrépressible mélancolie.

La force de ce texte tient dans cette perspective, large, profonde, sensible, dont le point de fuite obnubile l'expression, point de concentration ultime où la concrétion à la fois justifie et densifie la proposition.
Cette force tient également dans d'autres composantes, formelles celles-là, mais sensiblement ajustées. Le titre laisse apercevoir qu'il y aura là un lieu en forme de chemin, enfantin, limité/limitant. Les vers sont à la fois presque factuels et elliptiques ; pas facile à conjuguer ces deux registres et pourtant ils s'accordent et forment corps.
Phrases courtes, peu de verbes et pourtant beaucoup d'actions qui apparaissent sous les évocations en bribes, laconiques mais extensives des moments de vie de l'enfant.

J'ai beaucoup aimé le regard soucieux de l'adulte qui savoure, tente en vain de retenir le temps, et accentue ainsi la valeur de l'instant précieux (quand bien même il aura passé), d'autant plus précieux qu'il est fugace et doit s'accrocher aux souvenirs pour perdurer. Pauvre bonheur évanescent… que le poème imprime comme il peut dans l'esprit de l'écrivant, du passant. Une fragilité apparaît ainsi, particulièrement touchante, comme opposée à la "solidité" présupposée du parent. À ce point, les rôles semblent inversés, l'enfant est protégé par son halo de candeur et l'adulte est fébrile de par sa conscience de ses limitations.

Pour finir, dommage ces majuscules en début de vers en poésie libre, ils accentuent les ruptures entre les vers, au-delà du souple retour à la ligne bien suffisant, et n'ont d'autres justifications qu'un rappel à la tradition prosodique caduque ici. Puisque le choix a été de conserver une ponctuation classique, une majuscule minimum en début de strophe aurait bien suffi.

   Anonyme   
30/9/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,

oui, pour ce "Mistral Gagnant" revisité.
Cela fonctionne sur moi.
L'émotion est là, avec l'évocation des jeux et des rires de nos enfants, c'est à dire le bonheur.
Et ce temps assassin qui emporte avec lui... ♪

Merci.

   MartinHer   
1/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Arigo,
Mes deux jeunes enfants jouent dans la pièce à côté au moment où je lis votre poème, les larmes me montent presque. Le pouvoir de la poésie quoi :-)
Merci

   Ioledane   
2/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
J'ai trouvé cet écrit très touchant, d'autant que je n'avais pas tout de suite vu venir le sujet. Celui de l'enfance qui s'enfuit à jamais : la nôtre d'abord, puis celle de nos propres enfants, petits-enfants ... Un thème qui me 'parle'.
Mon seul (léger) bémol porte sur l'oscillation entre vers non rimés ou rimés. J'aurais préféré que ce soit homogène, et plutôt sans rimes puisque c'est ainsi que le texte débute joliment. Hauteur/tracteur, puis trompette/tue-tête/rouspète, disputes/bruts : pour le coup, cela m'a paru un peu pesant à la lecture.
Merci pour ce partage.

   Eki   
21/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Belle tranche d'insouciance dans un présent qui s'éloigne mais pas que...
Léger, profond, poème intemporel comme les petits cailloux que l'on sème...La part de l'enfance qu'on abandonne, vous en parlez si bien.
Il y a pourtant dans ce texte de la douceur liée à la mélancolie, votre plume en a joué avec talent.
Moi, j'ai adoré.

   Eskisse   
27/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour arigo

Très beau titre qui clôt aussi le poème montrant l irreversibilite du temps.
J ai beaucoup aimé la seconde strophe avec la négation restrictive "ne que " qui traduit bien cette fuite du temps et nos yeux d enfants perdus.
Un futur qui évoque le passé par la perte.
C est très beau.


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