Que pourrais-je tirer de ce morne réel,
Si ce n'est la sublime et flottante substance
Dont est bâti ce monde au loin du sensuel
Qui retient en son sein ma raison d'existence ?

J'irai me perdre ainsi dans cet ailleurs sans toit,
Où l'ailleurs de la chair n'est qu'un souvenir trouble,
Et touchant la plus brève éternité qui soit
Je me consumerai dans l'air d'un esprit double ;

Je sonderai de mots les vérités du rien,
Ivre d'un doux vertige et bercé par mes leurres,
Car tout autour de moi, dans un silence plein,
Glisseront des courants de vanités et d'heures ;

Et je saurai peut-être, au fond d'un rêve blanc,
Cueillir un petit fruit de bel art authentique
Qui pourrira, pareil aux choses du vivant,
Pour devenir alcool puis calmant chimérique...