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Poésie classique
Cristale : L'entre-rêve
 Publié le 01/08/23  -  26 commentaires  -  1113 caractères  -  804 lectures    Autres textes du même auteur

Rondeau redoublé.


L'entre-rêve



Je me souviens, je me souviens d’une île…
Les yeux ouverts sur le soleil levant,
Près de la rive, un enfant, immobile,
Ses cheveux fous emmêlés par le vent.

À l’horizon le ciel m’offre souvent
L’esquisse floue, éphémère et fragile,
D’un garçon calme au regard émouvant ;
Je me souviens, je me souviens d’une île.

Sans prêter garde à la vague indocile
Sur sa peau nue, il chantonne en rêvant
Puis il sourit, d’un sourire tranquille,
Les yeux ouverts sur le soleil levant.

Je cours vers lui mais le sable mouvant,
Tel un étau, rend l’effort inutile.
Je vois au loin les flots se soulevant ;
Près de la rive, un enfant, immobile.

La mer écume, amère, ultime asile
Où le destin dérive droit devant
Mais l’ange est sourd à mon appel fébrile,
Ses cheveux fous emmêlés par le vent.

Il sifflotait avec l’engoulevent
Les nuits de lune à la blancheur d’argile ;
L’oiseau s’est tu, rien n’est plus comme avant,
Seule, à genoux sur la terre infertile,
Je me souviens.


 
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   Lebarde   
19/7/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Une forme fixe: « le rondeau redoublé «, d’une grande technicité qui requiert de la part de l’auteur(e), une grande maîtrise dans l’écriture et une parfaite connaissance du sujet, dont bien peu sont capables…
La qualité et la perfection signent cet émouvant poème.

Beaucoup de pudeur, d’émotion et de tristesse contenues, de souffrances infinie dans le souvenir flou, mais combien présent, « d’un garçon calme au regard émouvant » qui, “sans prêter garde à la vague indocile”, est emporté par “La mer écume, amère, ultime asile”, sous des yeux impuissants:
“Je cours vers lui, mais le sable mouvant
Tel un étau rend l’effort inutile « …
« Mais l’ange est sourd à mon appel fébrile ».

L’horreur ….indescriptible qui vous avez pourtant si bien sue décrire.

Une évocation digne, sobre, pudique mais tellement puissante de la souffrance provoquée par la disparition d’un enfant, que la gorge du lecteur que je suis, se noue sous l’émotion .

Mais arrête-toi donc…tes yeux se brouillent et tu n’as plus rien d’autre d’intelligent à dire dans ton commentaire..

Merci pour ce magnifique poème d’une rare intensité émotionnelle.
Superbe.

En EL
Lebarde ému, mais aussi admiratif par autant de poésie.

   Geigei   
22/7/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Un rondeau redoublé. Un rondeau parfait donc.

Je n'ai pas retenu mes larmes en lisant :
"L’oiseau s’est tu, rien n’est plus comme avant,
Seule, à genoux sur la terre infertile,
Je me souviens."

La dimension onirique de cette création s'arrête juste avant cela pour nous rappeler le titre. Ceci n'est pas qu'un rêve. C'est un "entre-rêve".

Le rêve est probablement la seule façon d'exprimer l'indicible. La beauté de ces vers est l'élégance ultime pour dire une douleur que rien n'apaise. Pas même la poésie.

Jamais rien lu d'aussi beau.

Alors, pour avoir assez de larmes, assez de beau, je reviens sur :
"Je cours vers lui mais le sable mouvant,
Tel un étau, rend l’effort inutile."

   Mokhtar   
26/7/2023
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aime beaucoup
Chez tous les êtres de sang de la création, on peut observer ce summum de la détresse : la mère qui cherche son petit.

Dans les rêves, et probablement souvent dans les rêves, la quête obsessionnelle renverse les tentatives d’oubli diurnes.

Et dans les méandres oniriques, l’amour perdu devient comme un ange inaccessible, qui fuit et se dérobe, qui s’échappe et se perd.
Et le fil des ans ne peut atténuer cette hantise inextinguible, répétitive et lancinante comme la ronde des vagues et les vagues des rondeaux.

Une fois que l’on aura souligné le talent et la délicatesse de l’auteure à faire naitre l’émotion, peut-on vraiment commenter ce genre de poème ? Le noter ?

Quand j’étais enfant, j’accompagnais parfois ma grand-mère au cimetière pour entretenir les tombes. Nous finissions toujours par visiter un secteur à l’écart. Ici, me disait-elle, ce ne sont que des petits enfants. Ils sont allés directement au ciel. Cet endroit, c’est « le carré des anges ».
Ce n’est que des années plus tard que j’appris qu’elle en avait perdu trois.

Mokhtar, en EL

   Eskisse   
1/8/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Cristale,

C'est juste très beau...Je préfère cette forme classique à d'autres: elle est plus souple, plus fluide, moins contrainte et elle sied bien au sujet parce que les vers se déroulent comme des vagues.

Un drame raconté sous forme de souvenir rédigé au présent pour le mettre sous nos yeux, plus visible, plus enserrant alors qu'il relève du rêve.

Le contraste entre le calme de l'enfant et le danger crée une tension palpable.
J'aime le sujet et son traitement autant dire tout.

Bravo

   fanny   
1/8/2023
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très aboutie
et
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Un poème magnifique qui m'avait déjà beaucoup touchée, et on le serait à moins, lors d'une brève lecture en El et dont la forme s'adapte parfaitement au fond et à un chagrin plus que redoublé en pareille circonstance.

"La poésie sublime le souvenir, la douleur, avec élégance, originalité, respect envers soi-même, les lecteurs et la chair de sa chair disparue" peut-être cela vous rappelle-t-il un de vos commentaires.

Il faut beaucoup de recul ainsi qu'une talentueuse maîtrise de soi et de la discipline pour pouvoir exprimer ce qui frole l'indicible avec autant de finesse, de douceur et de retenue.

Chapeau bas Cristale, notre maîkresse agrégée.

   Myndie   
1/8/2023
Bonjour Cristale,

Je connaissais l'attrape-rêve, le mythe, la symbolique, la séduisante magie qui fascine les esprits fertiles mais jusqu'ici rien encore ne m 'avait autant bouleversée que ce merveilleux « entre-rêve ».

Je ne relèverai pas ici la perfection de l'écriture poétique, en est-il encore besoin , et d'ailleurs je ne suis pas assez aguerrie à cet exercice qui consiste à distinguer un rondeau de toute autre forme classique.
Ce que je peux dire, sur la forme c'est que je me régale (tu t'en doutes!) du procédé de répétition qui émaille le poème. En plus de servir le rythme, il véhicule l'émotion ; c'est pour moi le meilleur gage de la vérité, de l'authenticité du sentiment éprouvé et partagé par le poète.
Et parlons-en de l'émotion : elle est partout, dans le choix délicat des mots, la beauté des images, forcément aussi éthérées, aussi belles, horrifiques et douloureuses que peuvent l'être les fantômes de nos mémoires...
Ta sensibilité artistique fait jaillir de gouffres profonds des clartés, des beautés qui rendent ta poésie aussi puissante que touchante.
Une merveille.

C'est beau à pleurer

Merci Cristale

   Robot   
1/8/2023
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très aboutie
et
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Cet entre-rêve nous révèle une tristesse douloureuse empreinte d'une infinie douceur. Je sais, que c'est apparemment contradictoire, mais c'est ainsi que j'ai reçu le choc de cette superbe et élégante lecture. A l'oral, dans une expression lente, on ressent encore plus la profondeur émotionnelle du sentiment qui imprègne le texte.
La reprise du vers ne tombe pas à plat et s'insère naturellement dans le texte.

   papipoete   
1/8/2023
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très aboutie
et
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bonjour Cristale
Nous avons au menu poésie classique, il y a l'écriture intuitive... ici, nous lisons de beaux décasyllabes, et j'ai l'intuition qu'ils devraient émouvoir qui sur leur profondeur, se pencheront !
Nul besoin de calculer la racine-carrée de l'hypoténuse, pour comprendre cette histoire dramatique, dont un petit ange est le pauvre héros. La vie donne, la vie reprend. Ici, elle s'entoure de vagues scélérates et de ces traîtres de sables mouvants... la mort dévore dent à dent.
NB d'aucuns pourraient dire " un fait-divers, un de plus ! " un rapt d'enfant sous les yeux d'une maman, à qui le ciel bleu ment.
Nous sommes submergés par l'émotion, autant que par cette " vague indocile " qui put se montrer humble sac-et-ressac, mais le destin en décida autrement !
Cristale réapparait du néant, et sous sa plume des vers si poignants, que l'encre bleue nous ouvre la page de souvenirs si noirs, mais empreints d'une infinie douceur ( la dernière strophe a ma préférence )
je n'ai pas l'outrecuidance de vérifier métrique et tcétéra...

   Ornicar   
1/8/2023
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Bonjour Cristale,

J'avais aperçu ce poème dans mon espace lecture, me promettant d'y revenir plus tard. Las ! je l'ai vite perdu de vue comme l'enfant trop tôt disparu. Je le regrette amèrement. Que puis-je rajouter à ce qui a déjà été dit ? Obéissant à quelque nécessité impérieuse, je dépose néanmoins mon modeste grain de sable sur cette plage de la désolation.

Que de perfection et d'émotion entremêlées. Ce magnifique poème, dans l'alliage d'exigences contraires, est une totale réussite à mes yeux.

Tout d'abord, le cadre d'écriture - rondeau redoublé sur un rythme 4/6 - est très contraint. Or, à aucun moment je ne ressens le travail. Les vers coulent naturellement, avec aisance et musicalité, évitant l'écueil de l'artifice.

Ensuite, le recours au procédé de la répétition, le tout sur deux rimes seulement, ne s'avère jamais répétitif et donc, source d'ennui.

Enfin, l'émotion est constamment présente. C'est une tragédie. On assiste même en direct à la noyade de ce jeune garçon. Or, là encore, si l'histoire est infiniment douloureuse, nulle pesanteur ne se fait ressentir dans ce récit qui sait rester d'une grande pudeur, comme l'écrit très justement Lebarde.

En aparté, retenant d'un poème de Miguel la leçon - ce que l'oreille admet, l'oeil ne saurait le tolérer - je me demande s'il n'y a pas un hiatus à la strophe 2 (floue, éphémère) et 3 (nue, il). Mais est-ce vraiment le lieu et le moment de poser cette question, quand la grande technicité s'efface pour laisser place à l'émotion ?

Ornicar

   Marite   
4/8/2023
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Une lecture d'abord silencieuse puis une seconde à voix haute, en respectant les pauses marquées par la ponctuation m'ont imprégnée de l'intensité dramatique de cet "entre-rêve" ... souvenir indélébile qui marque le coeur, à vie, au fer rouge. La forme classique choisie restitue pleinement l'instant éphémère où tout aurait pu changer. La dernière strophe clôt superbement ce poème.

   Quidonc   
1/8/2023
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L'entre-rêve est un point de bascule. Dans le cas présent c'est l’instant précis où la narratrice quitte son rêve obsédant et doit accepter de faire face au souvenir douloureux pour cheminer dans la réalité. C'est le passage où les relations deviennent différentes entre la narratrice et le souvenir. L'entre-rêve est le moment ultime où elle ressent une émotion indicible qui monte en elle et qui la submerge. Spectatrice, elle assiste impuissante à l'écart entre le passé et le présent. C'est un changement de posture dans le processus de résilience, c’est le moment «mystérieux» qui marque un virage au cœur de la mémoire.
Cet « Entre-rêve » est un poème captivant qui évoque avec nostalgie et émotion le souvenir douloureux de la perte d'un enfant. Il capture brillamment l'essence d'un rêve, en utilisant des images et des métaphores évocatrices pour créer une atmosphère onirique sincère et profonde.
Le choix de la structure en forme de rondeau redoublé donne une sensation de boucle et de répétition, de même que l'ambiance marine de flux et de reflux, mouvement répétitif à l'instar du souvenir. Le contraste entre le calme et la tranquillité de l'enfant et la force tourmentée de la mer crée une tension émotionnelle puissante dans le poème.
Cette forme poétique, avec son schéma de rimes spécifique, où les premiers mots du premier vers sont répétés comme refrain à la fin des autres strophes, est utilisé ici avec brio. Elle donne au poème un rythme et une musicalité particulièrement bien adaptée au thème de cette douleur récurrente. La répétition des mots du premier vers comme refrain ajoute de la cohérence et de l'harmonie au poème.
Ce poème parvient à créer une atmosphère envoûtante en utilisant des images visuelles et sensorielles pour nous transporter dans l'île inaccessible du rêve. La répétition des mots « Je me souviens » en finale , et les deux vers "Je me souviens, je me souviens d'une île" ajoute une musicalité et une cohérence au poème et renforce l'idée d'une mémoire récurrente de la blessure incurable.

Merci pour ce partage

   Provencao   
1/8/2023
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très aboutie
et
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Bonjour Cristale,

Merveilleux poème où au tragique du "Je me souviens, je me souviens d’une île… " perdu, vous réussissez à opposer le plaisir de la distension circonstancielle du présent entre passé et avenir, à celui de l'instant retrouvé.


Cet entre-rêve se confronte merveilleusement bien à l’éphémère et donc au destin. Il serait vite sacrifié cet entre-rêve, si il n’était que source de douleur. C’est parce qu’il s’accompagne du plaisir spécifique de votre belle écriture, pour narrer , qu’il peut prendre sens et faire écho en chacun de nous.

Merci.
Au plaisir de vous lire
Cordialement

   gino   
1/8/2023
Demant Cristale
Depuis longtemps j'avais l'habitude de venir de temps en temps voire une gorgée de liqueur de poésie à votre source
je vous imagiais chatelaine marchant sans toucher terre
ou bien une princesse aztèque habillée d'un ong manteau de plues ùulticolore (un peu exagéré j'avoue)
Mais tout d'un coup, plus de princesse, plus de plumes, plus de liqueur. Disparu!
Alors j'ai pensé qu'un Conquistador vous avait enlevé ou bien que vous vous étiez égarée dans les brumes de l'pile de Sein
at tout d'un coup vous revoilà,comme sortie de la manche d'un magicien...

Ce poème est sublime. Je ne veux pas l'altérer avec des commentaires terrestres

Trugarez

   Eki   
2/8/2023
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Pas un rond dans l'eau ici...
Ce poème est d'une grande intensité émotionnelle.
Une douce musique mais pas que...un souvenir lancinant bien décrit
Les souvenirs sont comme le va-et-vient de l'océan.
Ils nous submergent, nous emportent, poussent nos mémoires contre les rugissements de l'existence, entre passé et présent.

Les images ont ce pouvoir très évocateur, les vôtres sont une belle réussite.

En plein drame, la plume reste légère comme les cheveux de cet enfant.

Eki le grain de sable

   Antoninus   
2/8/2023
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très aboutie
et
aime bien
Un très beau poème, dont l'auteur utilise avec justesse les ressources du décasyllabe 4/6. Les rimes sont très satisfaisantes. La progression du "soleil levant" au premier quatrain jusqu'aux "nuits de lune" du quintil final fait parfaitement sentir la tragédie de la disparition des êtres chers.

   pieralun   
2/8/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
Magnifique Cristale, vraiment magnifique !.!!!

Une écriture toujours à fleur d’émotion, sans pathos.
J’ai adoré.

   Miguel   
3/8/2023
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très aboutie
et
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Le trop rare décasyllabe classique est ici employé avec une maîtrise parfaite, et la forme même du poème avec ses récurrences lui donne un air de chanson. De belles images, et un pathétique sans pathos. Bravo, bravo.

   Catelena   
4/8/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
Maestria totale pour ce rondeau qui n'est que prétexte à se souvenir dans un entre-rêve émouvant autant que magnifique.

Il est de ces douleurs indélébiles qui, par la magie des mots exilés en baume sur les blessures, se subliment et atteignent le paradis pour l'illuminer toujours.

Éblouissant à en crever le cœur.

   Atoutva   
6/8/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
On se laisse porter par l'écriture de ce rondeau. Magnifiquement émouvant.

   AMitizix   
3/12/2023
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très aboutie
et
aime bien
« L’entre-rêve », ou le souvenir… Le titre, déjà, annonce la poésie du texte : le souvenir, univers brumeux, à mi-chemin entre la réalité et l’imagination, imagination teintée de délire, rêverie ancrée dans la réalité…

Et le premier vers, déjà, nous plonge dans l’ambiance marine : « Je me souviens, je me souviens d’une île… » : on entend le ressac qui meurt sur la plage, comme on entend la tristesse entêtante de la narratrice et le poids de sa mémoire.

La contrainte classique est bien respectée et généralement mélodieuse (jolie réussite technique que d’avoir construit tout ce poème sur seulement deux rimes !). Ici, on n’a pas l’impression que la forme ait contraint l’auteur, tout est fluide et agréable (sauf peut-être la « blancheur d’argile », dont je ne comprends pas bien la signification : que vient faire l’argile là-dedans ?) Les deux rimes en « ile » et « vent », surtout la première, sont douces, caressantes, et cela doit contribuer efficacement à l’atmosphère tendre et rêveuse du poème, qui est bien rendue.
L’emploi du décasyllabe, aussi, contribue pour beaucoup, je crois, à l’atmosphère tendre du poème. Peut-être parce qu’elle nous sort des « habituels » alexandrins, pour proposer un nouveau rythme qui me semble, question d’habitude j’imagine, moins « académique », plus intime.

La « vision » évoquée ici est à la fois tendre, comme je viens de le dire, et touchante.
D’abord, j’ai apprécié la manière dont l’émotion de la narratrice, ici, est suggérée plutôt que décrite lors de l’évocation du souvenir. Les sentiments ne sont en effet jamais exprimés directement, tout ce qui nous touche est dans la manière de décrire la scène et de montrer l’ « obsédance » du souvenir.
Pour ce que j’appellerai l’ « action » du milieu du poème, on ressent bien la tension qui s’ y installe (« Sans prêter garde »), la panique (l’ « appel fébrile »), puis l’impuissance et le tragique (l’ « étau », l’ « effort inutile »). Et dans toutes ces actions, les sentiments impliqués, toujours inexprimés, mais toujours puissamment présents.
Quant aux « tableaux » qui débutent et closent le poème (les deux premières strophes et la dernière), j’aime bien la manière dont ils sont installés : le premier, plutôt évocateur, introduit bien le poème, par l’image du garçon debout auprès de la mer, dans l’ambiance onirique de la poésie ; et le dernier, passant du souvenir raconté au présent à celui raconté au passé (dans les trois premiers vers), nous fait efficacement sentir la voix propre de la narratrice, qui finit le poème en revenant à son commencement, ce qui achève de nous faire sentir la puissance de l’ « entre-rêve ».

Pour conclure, j’ai vraiment bien aimé ce poème, émouvant et écrit avec une bonne maîtrise technique. Merci !

   Edgard   
11/8/2023
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très aboutie
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On comprendra que je sois touché par ce poème. Mais en dehors de mes souvenirs personnels, j'y trouve tout ce qui me plaît et m'émeut. Le thème particulièrement douloureux, la manière, si parfaite, fluide, presque tristement chantante. Il y a comme ça, des lectures qui marquent, dont il reste quelque chose de profondément personnel et universel.
De la vraie belle poésie qui va droit au coeur.
Passionnément.

   solo974   
16/8/2023
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Chère Cristale,
J'aime beaucoup ton poème.
Il en émane à la fois, paradoxalement, tristesse et paix.
La reprise du vers "Je me souviens, je me souviens d’une île…" est très appropriée.
J'ai particulièrement apprécié la dernière strophe :
"Il sifflotait avec l’engoulevent
Les nuits de lune à la blancheur d’argile ;
L’oiseau s’est tu, rien n’est plus comme avant,
Seule, à genoux sur la terre infertile,
Je me souviens."
Un grand bravo à toi et merci pour ce partage !

   Cristale   
16/8/2023

   Hiraeth   
5/9/2023
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très aboutie
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Très beau poème, poignant, aux images puissantes servies par un rythme travaillé. Comme les vagues de la mer-tombeau, le traumatisme causé par la perte de l'enfant revient sans cesse à travers la forme du rondeau redoublé et de ses vers répétés. Il n'y a pas de gras dans ces vers, tout est incisif et sert à merveille la dramaturgie d'une histoire où transparaît petit à petit la funeste vérité. J'aime particulièrement la dernière strophe. La blancheur d'argile de la lune, sombre ironie, renvoie indirectement au mythe de la création de l'homme dans diverses mythologies.

Un beau texte, vraiment. Telle est la force terrifiante et scandaleuse de la poésie, qui change la boue en or, le tragique en beauté.

La dernière strophe est sublime

   Salima   
18/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Cristale,

Que dire...
Une minute de silence.

À première lecture, j'ai eu l'impression que j'avais déjà lu cette œuvre avant, comme si elle éveillait un écho intime. Je ne sais pas ce qui fait la beauté de ce rondeau, bien sûr votre maîtrise du vers, mais autre chose encore, de difficile à appréhender pour mon esprit.

C'est d'une tristesse et d'une beauté qui n'en finissent pas. Sans doute, voilà ce qu'est "sublimer la douleur", elle paraît plus supportable dans vos lignes.

Un compliment sincère pour une grande poètesse.

   Borisparisse   
3/1/2024
Modéré : Commentaire trop peu argumenté.


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