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Récit poétique
Cyrill : La clé des songes
 Publié le 26/08/24  -  8 commentaires  -  2664 caractères  -  119 lectures    Autres textes du même auteur

Un bémol en sous-sol.


La clé des songes



Après bien des années de bohème on en vint à briguer un avenir meilleur, à rêver d’oublier le problème et se la couler douce en tâtant du bonheur, être rose qui pousse à l’orée de nivôse ou feuille abandonnée sur un tapis de mousse. On s’aperçut alors en maniant le loquet que la porte était close, rabattu son caquet.

Inadvertance ou fait exprès, tissu de mensonges ou voile de mantille, jamais on ne le sut. On en fut pour nos billes.
La clé des songes disparue, on se mit à creuser en se grattant le front.
Sous le goudron la terre et sous l’occipital de la matière en crise. Ça nous rendit du liseron puis des empreintes en escadron, des labyrinthes d’inconscient, du refoulé sur le retour et des lettres d’amour.
Il en vint à la louche, alliées en ribambelle, de ces histoires louches à faire taire un bavard, à faire rougir nos pelles. Des choses pas très neuves qu’on se prenait pleins fards, des preuves pas bien nettes, des signes obsolètes. Des objets de délit à délier les langues, bien enfouis dans leur gangue. Des harangues enrubannées aux racines des pissenlits.
Qu’on y allât à la pioche ou qu’on préférât les râteaux – la plupart d’entre nous en avaient dans les poches – toujours la terre nous livrait de quoi bâtir des châteaux.

Mais à part les bévues de nos jeunes années que nous resservait le sous-sol à chaque pelletée, il y eut un bémol : la clé demeurait introuvable, prise au dépourvu sans trousseau secourable.

On posa les outils, on fronça les sourcils.
On s’en lava les mains. On s’essuya les pieds.

~~


La lumière nous vint comme un frisson remontant des orteils chatouille le cerveau : la clé était dans le caveau juste en dessous du paillasson. Et c’est ainsi que fut déterré le cadavre.
Notre havre de paix était fort compromis. Il fallut qu’on s’amende, qu’on demande pardon. Qu’on couse bien les bouches aux bonnes intentions, qu’on en fasse des couches, y compris les fausses pour reboucher la fosse et noyer le poisson.
On se fendit de deux prières à trois abbés auxquels on confessa tout un verger de mauvaises manières, même les fruits d’un adultère que l’on n’avait jamais commis.
On avoua, bien fanfarons, de pleins chapelets de jurons, de lamentables réparties dont on s’était depuis bien longtemps repentis.

Et lorsque les abbés cédèrent au point de croix du cimetière, dont on répara les clôtures afin de combler Notre Père, on eut enfin l’absolution.

Pour faire bonne mesure et se concilier les augures, on assura que Pierre avait trahi Jésus, bien qu’on ne sût rien de l’affaire.


 
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   Robot   
26/8/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Je ne suis pas sûr d'avoir trouvé la clef de ce récit poétique.
Mais assurément, il est poétique dans son écriture et ses images, et dans son inventivité lexicale.
Pour mon interprétation, j'y vois un message sur l'illusion de la recherche du bonheur absolu qui s'oppose à la réalité et aux contraintes sociales.
Ce que l'on imagine ne correspond guère au vécu.

   Myndie   
26/8/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Cyrill,

La clé des songes n'est-elle pas la clé de voûte d'un bel édifice, sinon d'une cathédrale ?
Ce texte, encore une fois très personnel, offre plusieurs lectures, selon qu'on choisisse de lire entre les lignes ou de prendre les expressions au pied de la lettre.

Je n'irai pas ici de mon analyse dont je doute fort qu'elle soit la meilleure ou tout au moins la plus approchante mais ce que j'y lis en filigrane me frappe par sa lucidité.
Certes, le fait que le texte ne soit pas rédigé à la première personne est pour beaucoup dans le fait qu'on se sente concerné mais le partage d'un certain ressenti me laisse émotionnellement un arrière-goût de désillusion ou de découragement, sentiment qui m'est aussi très personnel.

Cela étant, est-il besoin de dire que j'apprécie toujours autant ce goût pour le jeu poétique, cette excentrique fantaisie et son double plein de noirceur qui sont un peu ta signature?
Ainsi, en ne donnant aucune limite à la langue, jouant avec les mots, leurs sonorités (gangue-langue-harangue) et leurs signification tu fais se rejoindre l'imaginaire et le réel et tu nourris ton univers de multiples sens.
Ici encore, l'écriture est suggestive, vive et inventive, même s'il ne fait aucun doute qu'elle relève d'un travail minutieux et réfléchi :
« Il en vint à la louche... de ces histoires louches »
«  à faire rougir nos pelles... qu’on se prenait pleins fards »

C'est comme ce passage qui pourrait aussi bien se lire ainsi :
« Qu’on y allât à la pioche
ou qu’on préférât les râteaux
– la plupart d’entre nous en avaient dans les poches
– toujours la terre nous livrait de quoi bâtir des châteaux. »

Me reste toutefois cette interrogation sur le sens à donner à l'évocation du Saint Père, de Jésus et de tout le tralala...
Mais ça fait partie du mystère qui pousse à la relecture du texte, comme un gage de sa qualité.

   Provencao   
26/8/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill,

Cette clé des songes : C’est donc en s’appuyant sur ces mots que je me suis essayée d'y trouver une échappatoire. Sur ce langage utilisé, celui de la poésie et de la poésie elle-même.

La clé des songes s'agit-il en somme d’une
approche du prélude, du seuil du dédal que la vie, le bonheur et l'illusion ofrrent par le biais de mensonges qui toutefois se refusent au dire et au sentir vrai...

Au plaisir de vous lire
Cordialement

   Vincente   
26/8/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
J'aime beaucoup l'écriture de ce récit. La richesse kaléidoscopique des images engendrées par les multiples "outils" argumentaires fournit un champ joliment foisonnant, au risque de peut-être perdre un peu le lecteur. Les sons, les expressions, les jeux de mots, les champs qui se percutent, se relient, se conjuguent, s'harmonisent parfois, montrent une effective virtuosité de l'expression, c'est très plaisant à lire et à rêver. J'ai apprécié de me sentir empli de cette atmosphère mi lumineuse, mi dérangeante, comme le résume cette phrase : "La lumière nous vint comme un frisson…". La lumière du verbe excité tente là l'emportement excitant du lecteur ; pour moi, ça a marché.

J'ai ainsi trouvé que les jeux multiples de langage passent très bien, sans trait forcé (ce qui est un risque qui a pu parfois dans d'autres textes de l'auteur être moins bien maîtrisé), dans une juste adéquation entre l'intention de l'association de vocables et celle du but, du sens recherché.

Je regretterais, cependant d'avoir eu du mal, passé ma très plaisante première lecture, à sentir un peu mieux cette lumineuse expression m'offrir une clé qui me laisserait moins songeur in fine sur le propos en lui-même. Mais j'y ai tout de même vu un retour sur images du passé de narrateurs un brin âgés, une sorte de revisitation de leur parcours mental moyennement épanoui, qui s'interrogent sur le difficile équilibre entre sagesse et conscience crue, entre ambition intellectuelle et modestie émotionnelle.

J'ai adoré ce passage :
"On se fendit de deux prières à trois abbés auxquels on confessa tout un verger de mauvaises manières, même les fruits d’un adultère que l’on n’avait jamais commis."
De même ce "Et les abbés cédèrent au point de croix du cimetière"…

Pas trop compris ce "Pierre avait trahi Jésus", mais ce n'est pas trop grave, j'espère…

   Skender   
26/8/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill,

J'ai vraiment apprécié ce texte, un récit poétique en effet, qui se lit presque comme une courte nouvelle mais qui est basé sur un rythme entraînant, très agréable à lire et qui renferme une grande quantité de fomules joliment poétiques ("des empreintes en escadron, des labyrinthes d'inconscient, du refoulé sur le retour et des lettres d'amour" par exemple).

En ce qui concerne le sens véritable caché derrière le texte, les nombreuses allusions aux Évangiles : "On s'en lava les mains", similaire à la formule qu'on prête à Ponce Pilate après avoir condamné Jésus, le fait que le texte soit narré à la première personne du pluriel ("on" donc un groupe de narrateurs), la référence au labour de la terre (comme dans une des versions du mythe qui stipule que Judas après avoir trahi Jésus, reçut trente deniers et s'acheta un champ avec le "salaire du crime" puis périt en le cultivant) et le final étonnant "on assura que Pierre avait trahi Jésus" (Pierre étant évidemment le nom d'un des apôtres) me font penser à une réecriture du mythe où un groupe d'individus (les apôtres ?) se seraient rendus coupable collectivememt d'un crime à l'encontre du Christ mais il est fort possible que je fasse fausse route. Comme il est tout à fait possible qu'il y ait un sens beaucoup plus métaphorique et imagé derrière cette histoire.

Dans tous les cas un texte très intéressant, avec un côté mystérieux et un peu ésotérique qui me plait. Merci, Skender.

   papipoete   
27/8/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
bonjour Cyrill
Il avait disparu des écrans, le poète mais le voilà revenu ; à travers ce texte tellement alambiqué, mais c'est sa marque de fabrique !
J'ai cherché la clé... ne l'ai pas trouvée, mais le vocabulaire pour le dire est tellement drôlatique !
on pourrait croire que c'est un " âne du fond de la classe ", qui vient de rendre sa copie ? que nenni, bien au contraire et de roulades en dégringolades orthographiques, on sourit à ces trouvailles ; le " Cyrill nouveau est de retour "
NB aussi, ne noterai-je pas le thème, mais la calligraphie véritable numéro de funambule...

   Cyrill   
4/9/2024

   tentacule_du48   
5/9/2024
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
oulalala, oui quel voyage ce texte !!! je dirais que la clé des rêves s’est échappée, mais c’est la porte de la réalité qui nous claque au nez, mon nez, hhh... entre deux coups de pelle dans les souvenirs et quelques regrets bien emballés, il y a comme une danse de florin dor, vous connaissez ?... en fait un souffle mystérieux qui nous chatouille les pieds...je souris... mais je me demande : est-ce que cette clé perdue n’est pas une excuse pour éviter d’ouvrir une porte qui n’a peut-être jamais eu de serrure ?

Et ce cadavre sous le paillasson, est-ce notre passé qu’on déterre, juste pour lui demander pardon ??? Mais pardon à qui ???! À nous-mêmes ou à cette lumière trompeuse qui, des pieds à la tête, nous fait croire qu’on a tout compris, alors que la vérité reste cachée sous des prières mal formulées ?!

On se lave les mains, oui, oui! mais est-ce pour avoir la conscience tranquille ou pour mieux manipuler ce fameux trousseau salvateur ?! À force de creuser des labyrinthes dans nos têtes, ne risque-t-on pas d’oublier pourquoi on cherchait cette clé au départ ??? Peut-être que la porte n’a jamais été fermée… Peut-être que c’était nous qui avions peur de l’ouvrir... !

J’aime beaucoup ce texte, vraiment, mais… il y a un petit quelque chose... en fait je sens qu’il manque une clé, un détail qui m’échappe !... La lecture est intrigante, oui, mais pas tout à fait satisfaisante... je vais devoir le relire une troisième fois, peut-être alors, la lumière me viendra...


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